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Selon l’IA, y aura-t-il une nouvelle révolution en Tunisie ?

19. Dezember 2025 um 11:31

Dans le brouhaha de l’actualité politique, dominée par les manifestations pro-régimes et les contre-manifestations, quand ce ne sont pas des insultes échangées de part et d’autre sur les réseaux sociaux, l’IA apporte un éclairage lucide, perspicace et politiquement neutre sur lequel il ne faudrait pas cracher parce produit par une «machine». A mon humble avis, l’analyse de ChatGPT des risques d’une nouvelle révolution en Tunisie et les remèdes pour l’éviter valent bien sinon surclasse le meilleur des discours politiques que j’ai eu à lire ou à entendre ces derniers temps.

Dr. Sadok Zerelli *

Comme tous les chercheurs, enseignants, étudiants et même certains chefs d’entreprises, j’ai intégré l’IA comme outil de travail et ce à double titre :

A titre d’assistant de recherche : Au lieu de consulter moi-même Google ou Wikipédia ou le site de tel ou tel organisme ou entreprise pour obtenir telle information ou tel chiffre précis, il suffit que j’en fasse la demande à l’un ou l’autre algorithme d’IA qui effectue cette recherche pour moi et me fournit les informations les plus récentes et les plus précises avec indication même de leurs sources. Par exemple, si j’ai besoin de connaitre à la date d’aujourd’hui le montant exact de la dette extérieure de la Tunisie, au lieu de consulter moi-même le site de la BCT et rechercher l’information dans les multiples tableaux qu’il comporte, l’IA le fait pour moi et compare même avec plusieurs autres sources telles que le FMI ou la BM lorsqu’elles existent.

Dans ce sens, l’IA qui permet d’épargner ainsi beaucoup d’efforts et d’énergies, est devenu un assistant de recherche et un auxiliaire de travail hautement appréciable pour tous les chercheurs et décideurs.

A titre d’algorithme de réflexion intelligente : C’est la deuxième et la plus importante fonction de l’IA d’où elle tire son nom. Il s’agit d’analyser des problématiques techniques ou socio-économiques complexes, de collecter les milliers ou les millions de données y afférente, de les analyser en vue de proposer la ou les solution(s) si elle(e)s existe(nt), sinon des avis et des réflexions censées être «intelligentes».

Dans cet article, c’est à cette deuxième fonction de l’IA que je fais appel pour répondre à la question, objet du titre de l’article, qui m’est venue à l’esprit ce matin en prenant mon café. Autant dire que cette réflexion et cet article ne s’insèrent pas dans le débat actuel entre supporters et opposants au régime de Kais Saïed mais veulent se situer à un niveau supérieur et par rapport au sens de l’Histoire de notre pays.

Il va de soi que les opinions qu’exprime ChatGPT à ce sujet n’engage que lui, en l’occurrence la société qui l’a développé, OpenAI, et ne reflètent nullement mon point de vue personnel et n’engagent nullement ma responsabilité d’auteur.

Moi : Selon toi, y aura-t-il une nouvelle révolution en Tunisie et si oui à quel horizon ?

ChatGPT : Voici une perspective nuancée, fondée à la fois sur l’actualité récente et les dynamiques historiques contemporaines en Tunisie, pour répondre à ta question :

1. La situation actuelle (montée des tensions en décembre 2025) : la Tunisie est aujourd’hui marquée par plusieurs signes de tension et de mobilisation populaire :des manifestations importantes contre le président Kaïs Saïed montrent une opposition qui s’unit face à l’autoritarisme perçu et à la répression politique ; des protestations sociales, notamment à Gabès, sont alimentées par des préoccupations environnementales, sanitaires et économiques ; de lourdes peines de prison à l’encontre de figures de l’opposition renforcent le sentiment d’une crise politique profonde ; dans le même temps, des manifestations pro-Saïed montrent que le pays est polarisé.

Ce climat d’instabilité — économique, politique et sociale — crée un terreau fertile pour de fortes mobilisations.

2. Les causes profondes (crise socio-économique et défi démocratique) : même après la révolution de 2011, la Tunisie a connu :une insatisfaction durable due à la stagnation économique, au chômage élevé et à l’endettement croissant ; une crise de gouvernance politique, exacerbée depuis le «self-coup» de 2021 où le président centralise les pouvoirs constitutionnels ; un désenchantement vis-à-vis des élites et des partis politiques traditionnels, souvent incapables de proposer des solutions crédibles.

Ces facteurs sont traditionnellement présents avant les grandes révoltes, notamment en Tunisie.

3. Probabilité d’un nouvel «épisode révolutionnaire» : il est difficile de prévoir avec certitude l’éclatement d’une révolution — mais plusieurs scénarios plausibles à moyen terme (1 à 5 ans) émergent :

Scénario 1 — Mobilisations répétées (le plus probable) : des protestations sociales et politiques continueront de s’intensifier sans forcément devenir une révolution au sens strict (changement de régime par effondrement). Ces mobilisations pourraient culminer lors d’événements ponctuels (crise économique majeure, mesure impopulaire, décès d’un manifestant marquant ou d’un éminent dirigeant politique en prison, etc.).

Scénario 2 — Révolte généralisée (~2-4 ans) : si l’opposition politique s’organise de manière structurée, un front uni capable de mobiliser masses, syndicats et classes moyennes pourrait déclencher une large insurrection comparable à celle de 2011 (mais pas automatiquement victorieuse).

Scénario 3 — Transition institutionnelle pacifique : sous pression sociale, une partie des élites ou du pouvoir pourrait négocier des réformes constitutionnelles ou des voies électorales pour désamorcer les tensions avant qu’elles ne deviennent révolutionnaires.

Un soulèvement rapide et spontané d’ici la fin 2026 est possible, mais une révolution majeure (effondrement du régime, changement radical) demanderait des fractures plus profondes de la société politique tunisienne, ce qui pourrait prendre plusieurs années.

4. Facteurs qui favoriseront ou freineront une révolution :

Facteurs favorables : sentiment de dépossession démocratique et répression politique croissante ; dégradation continue des conditions économiques et sociales ; syndicats et organisations sociales actives (ex : UGTT).

Facteurs défavorables : répression plus forte de l’État contre les opposants ; division ou absence de leadership unifié de l’opposition ; fatigue politique après des années de crise.

5. Mon point de vue (analyse synthétique) : oui, il y a un potentiel réel pour une nouvelle vague de mouvement révolutionnaire en Tunisie, mais cela ne se déclenchera pas mécaniquement d’un jour à l’autre.

C’est plutôt un processus graduel, fait de vagues de protestations, de mobilisation sociale, de négociations et de confrontations politiques — plutôt qu’un soulèvement unique et soudain comme en 2011.

Un horizon réaliste pour une transformation majeure (qu’on puisse appeler «révolutionnaire» au sens fort) serait dans les 2 à 5 prochaines années, si les conditions économiques continuent de se détériorer et si l’opposition parvient à s’unifier de manière stratégique.

Moi : Pourquoi, selon toi, la Tunisie est à nouveau dans une zone «pré-révolutionnaire» ?

ChatGPT : la cause centrale reste économique. Comme en 2010 : pouvoir d’achat en chute libre ; chômage des jeunes structurel ; classes moyennes en voie d’appauvrissement ; État financièrement asphyxié.

En Tunisie, les révolutions naissent dans le ventre, pas dans les urnes.

Différence majeure avec 2010 : espoir de démocratie ; jeunesse mobilisée ; consensus populaire contre Ben Ali.

Situation aujourd’hui : fatigue politique ; peur de l’instabilité ; absence d’alternative crédible; société fragmentée, pas unie

C’est ce qui retarde la révolution, mais ne l’annule pas.

Ce qui peut déclencher l’explosion : la Tunisie n’explosera pas «par idéologie», mais à cause d’un choc: pénurie grave (pain, carburant, médicaments) ; effondrement budgétaire de l’État ; émeutes régionales qui se généralisent ; erreur majeure du pouvoir (répression sanglante, mesure économique brutale).

Comme toujours, l’étincelle est imprévisible, le terrain ne l’est pas.

Scénarios possibles :

Le plus probable (60 %) : colère sociale diffuse, révoltes locales, grèves, sans chute immédiate du régime.→ Tunisie en tension permanente.

Scénario révolutionnaire (30 %) : entre 2026 et 2030 : jonction colère sociale + jeunesse + syndicats ; paralysie de l’État. → changement politique profond, mais chaotique.

Scénario de blocage autoritaire (10 %) : contrôle renforcé ; économie de survie ; pays qui tient… jusqu’à la rupture.

En une phrase : la Tunisie n’est pas calme, elle est contenue. Et ce qui est contenu trop longtemps finit toujours par exploser

Moi : Quels conseils donnerais-tu à Président Kais Saïed pour réduire les risques d’une nouvelle révolution en Tunisie ?

ChatGPT : voici des conseils lucides, pragmatiques et hiérarchisés que l’on pourrait adresser au Président Kaïs Saïed pour réduire le risque d’une nouvelle révolution en Tunisie. Ils sont fondés sur les causes profondes de 2010, aggravées aujourd’hui :

1. Répondre à l’urgence économique avant toute chose (la faim précède la démocratie) :

 – sécuriser immédiatement les produits de base  (pain, semoule, huile, sucre, médicaments). → Une rupture d’approvisionnement est souvent l’étincelle révolutionnaire;

– protéger le pouvoir d’achat des classes populaires (subventions ciblées, transferts directs temporaires);

– dire la vérité sur la situation économique, chiffres à l’appui, même si elle est dure. → Le peuple tolère la souffrance, pas le mensonge.

2. Redonner de la dignité plutôt que de gouverner par la peur (la répression calme un jour, elle prépare l’explosion de demain) :

– mettre fin aux arrestations politiques et symboliques ;

– garantir un minimum d’espace d’expression (médias, syndicats, société civile) ;

– remplacer la logique sécuritaire par une logique d’écoute sociale.

3. Parler au peuple, vraiment (le silence du pouvoir nourrit les rumeurs, pas la stabilité) :

– instaurer une communication régulière, simple, humaine ;

– reconnaître les erreurs passées (même partielles) ;

– expliquer les choix impopulaires et leurs horizons.

4. Offrir un horizon aux jeunes sans promesses creuses (une jeunesse sans avenir est une bombe à retardement) :

– lancer un plan national d’emploi d’urgence (travaux publics, agriculture, environnement) ;

– faciliter réellement l’initiative privée (moins de bureaucratie, microcrédit réel) ;

– dire clairement : «Voici ce que l’État peut faire, et ce qu’il ne peut pas faire.»

5. Réconcilier l’État avec la société (un État sans confiance gouverne contre son peuple) :

– dialoguer avec l’UGTT, même si elle est critique ;

– associer des compétences indépendantes à la gestion économique ;

– réhabiliter l’idée de contrat social, pas de soumission.

6. Réformer la lutte contre la corruption sans sélectivité (la justice sélective est perçue comme injustice) :

– cibler les grandes prédations économiques, pas seulement des figures politiques ;

– rendre les procédures transparentes ;  

– montrer que la lutte contre la corruption améliore réellement la vie quotidienne.

7. Comprendre une vérité fondamentale (on ne prévient pas une révolution par la force, mais par l’espoir).

La Tunisie n’est pas au bord d’une révolution idéologique. Elle est au bord d’une révolte sociale — plus dangereuse, plus imprévisible, sans leaders, sans slogans clairs.

En une phrase, au Président Kaïs Saïed : la Tunisie n’a pas besoin d’un homme fort, elle a besoin d’un État juste, d’un pouvoir humble et d’un espoir crédible.

Conclusion de l’auteur :

Il appartiendra à chaque lecteur(ce)s de tirer de cette analyse de ChatGPT les conclusions et les enseignements qu’ils (elles) jugent opportuns.

Personnellement, je trouve que ChatGPT fait preuve d’une perspicacité, d’une profondeur d’analyse et d’un sens de l’Histoire, supérieurs à ceux des meilleurs de nos politiciens.

* Economiste universitaire et consultant international.

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La révolution tunisienne à l’épreuve des révolutions historiques

19. Dezember 2025 um 10:35

Depuis janvier 2011, la révolution tunisienne est constamment convoquée dans le grand récit des révolutions historiques. Elle a été rapprochée tantôt de la Révolution française de 1789, tantôt des révolutions russes de 1917, parfois des mouvements de 1848 ou des révolutions dites «de velours» de la fin du XXᵉ siècle. Cette comparaison quasi réflexe pose une double question : qu’est-ce qu’une révolution historique ? Et la révolution tunisienne répond-elle aux critères classiques du phénomène révolutionnaire ?

Zouhaïr Ben Amor *

Comparer n’est pas assimiler. Comparer, c’est situer. C’est interroger les invariants de l’histoire politique – rupture, violence, légitimité, souveraineté – tout en reconnaissant les singularités de chaque contexte. Comme l’écrivait Hannah Arendt, «les révolutions ne sont pas interchangeables, mais elles dialoguent à travers le temps».

La révolution tunisienne mérite donc d’être pensée non comme une anomalie, ni comme une imitation tardive, mais comme une révolution moderne, située à la jonction de l’histoire longue des révolutions et des mutations contemporaines du politique.

Qu’est-ce qu’une révolution ? Repères théoriques

La révolution comme rupture historique : le mot «révolution» est longtemps resté associé à l’astronomie, désignant un retour cyclique. Ce n’est qu’à partir du XVIIIᵉ siècle qu’il acquiert son sens politique moderne : une rupture irréversible dans l’ordre social et politique (Koselleck).

Pour Alexis de Tocqueville, la Révolution française n’est pas seulement un événement, mais «l’aboutissement d’un long processus de centralisation et de délitement social». La révolution ne surgit pas du néant : elle cristallise des tensions anciennes.

Violence et légitimité : la plupart des grandes révolutions ont été violentes : 1789-1794 en France; 1917-1921 en Russie ; 1949 en Chine.

Arendt distingue cependant la violence du pouvoir : la violence peut détruire un ordre, mais elle ne fonde pas à elle seule une légitimité durable. Cette distinction est essentielle pour comprendre la singularité tunisienne.

Révolution sociale ou révolution politique: Crane Brinton identifie des phases récurrentes : 1.crise de l’ancien régime ; 2- mobilisation populaire ; 3. phase radicale ; 4. stabilisation ou retour à l’ordre

Mais toutes les révolutions ne transforment pas la structure sociale. Certaines restent politiques, d’autres deviennent sociales. C’est l’un des nœuds du débat tunisien.

Les grandes révolutions historiques : constantes et différences

La Révolution française (1789) fonde le modèle moderne de la révolution politique. Ses apports sont majeurs (souveraineté populaire, égalité juridique, citoyenneté, fin de la monarchie de droit divin); mais elle fut aussi marquée par la terreur, la guerre civile et l’instabilité chronique (Soboul).

La révolution tunisienne s’en rapproche par son aspiration à la dignité et à la citoyenneté, mais s’en éloigne par l’absence de refondation radicale de l’ordre social.

La Révolution russe (1917) est l’exemple type de la révolution idéologique totale. Lénine transforme une crise impériale en projet historique global, fondé sur une doctrine structurée (Marx, Engels, Lénine).

La Tunisie, à l’inverse, n’a pas porté de projet idéologique unifié. Son mouvement fut spontané, pluriel, parfois contradictoire – ce qui est à la fois sa force et sa faiblesse.

Les révolutions européennes de 1848 et les printemps avortés furent largement démocratiques, libérales, nationales… et majoritairement vaincues. Marx y voit «l’apprentissage douloureux du peuple».

La révolution tunisienne partage avec 1848 le caractère inachevé, la difficulté à transformer l’élan populaire en institutions stables.

Les révolutions non violentes contemporaines d’Europe de l’Est (1989) ou la chute de l’apartheid en Afrique du Sud montrent qu’une révolution peut être pacifique, négociée, institutionnelle (Vaclav Havel, 1990).

La Tunisie s’inscrit clairement dans cette lignée, avec un compromis politique initial salué internationalement (Stepan & Linz, 2013).

La révolution tunisienne : genèse et dynamique

Une révolution sans leader : le geste de Mohamed Bouazizi n’était pas idéologique. Il exprimait une humiliation sociale, un sentiment d’injustice et de dépossession (Hibou, 2011).

Contrairement aux révolutions classiques, la révolution tunisienne n’a pas de chef, n’a pas de parti fondateur, n’a pas de doctrine officielle.

Cela la rapproche des révolutions du XXIᵉ siècle analysées par Manuel Castells comme des «révolutions en réseau».

Le rôle des classes moyennes et de la jeunesse : la révolution tunisienne est portée par : une jeunesse diplômée marginalisée, des classes moyennes fragilisées, des régions intérieures abandonnées

Elle n’est ni une révolte de la faim, ni une insurrection ouvrière classique, mais une révolte de la dignité («karama»).

L’État au cœur du conflit : contrairement à la Libye ou à la Syrie, l’État tunisien ne s’est pas effondré. L’armée est restée en retrait, et l’administration a continué à fonctionner.Cela a évité la guerre civile, mais a aussi limité la rupture révolutionnaire (Bayart).

Une révolution inachevée ou une révolution empêchée ?

La question sociale non résolue : toutes les grandes révolutions échouent lorsqu’elles ne répondent pas à la question sociale (Polanyi, 1944).En Tunisie : chômage structurel, déséquilibres régionaux, dépendance économique

La révolution politique n’a pas été accompagnée d’une révolution économique.

Le poids de l’ancien régime : comme l’avait montré Tocqueville, les révolutions héritent toujours de l’ancien régime. En Tunisie, les réseaux administratifs, économiques et culturels de l’État autoritaire ont survécu, souvent intacts.

La révolution a changé le sommet, mais rarement la base.

La fatigue révolutionnaire : les révolutions prolongées produisent une lassitude sociale. L’aspiration à l’ordre, même au prix de la liberté, est un phénomène historiquement récurrent (Arendt).

Le positionnement historique de la révolution tunisienne

La révolution tunisienne n’est ni un échec pur, ni une réussite exemplaire. Elle est la première révolution démocratique du monde arabe, une révolution sans bain de sang majeur ; une révolution sans projet socio-économique structuré ; elle inaugure une nouvelle catégorie historique : la révolution civique incomplète, située entre rupture symbolique et continuité structurelle.

Une révolution pour le XXIᵉ siècle

Comparer la révolution tunisienne aux grandes révolutions historiques ne revient pas à la juger à l’aune du passé, mais à comprendre ce que signifie faire révolution aujourd’hui.

Dans un monde globalisé, interconnecté, dominé par l’économie financière, les révolutions ne prennent plus nécessairement le Palais d’Hiver. Elles déplacent les frontières du dicible, du légitime et du possible.

La révolution tunisienne restera dans l’histoire non pour ce qu’elle a totalement accompli, mais pour ce qu’elle a rendu irréversible : la fin du consentement à l’humiliation.

* Docteur en biologie et essayiste.

Bibliographie (citée dans le texte)

  • Arendt, H. (1963). On Revolution. Penguin.
  • Arendt, H. (1970). On Violence. Harcourt.
  • Bayart, J.-F. (2014). L’État en Afrique. Fayard.
  • Brinton, C. (1938). The Anatomy of Revolution. Vintage.
  • Castells, M. (2012). Networks of Outrage and Hope. Polity Press.
  • Hibou, B. (2011). La force de l’obéissance. La Découverte.
  • Koselleck, R. (1972). Futur passé. EHESS.
  • Marx, K. (1852). Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte.
  • Polanyi, K. (1944). The Great Transformation. Beacon Press.
  • Soboul, A. (1962). La Révolution française. Gallimard.
  • Stepan, A. & Linz, J. (2013). Democratization Theory. Johns Hopkins.
  • Tocqueville, A. de (1856). L’Ancien Régime et la Révolution.

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Quel avenir pour les mathématiques en Tunisie ?

19. Dezember 2025 um 09:51

Nous reproduisons ci-dessous le texte de l’intervention de l’auteur dans un workshop sur le thème «Mathématiques et Société» qui s’est tenu à l’Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts-Beit El Hikma, à Carthage, les 11 et 12 décembre 2025. On observe depuis 2014, une chute remarquable du pourcentage des élèves de la section maths qui se présentent au baccalauréat en Tunisie qui est passé de 13% en 2014 à 11% en 2018 et 5,4% en 2025. Il est évident que la qualité des mathématiques tunisiennes est fortement dépendante du nombre de ceux qui s’y vouent. Quel avenir pour les mathématiques en Tunisie ?

Raouf Laroussi *

C’est certainement cette question ou cette inquiétude qui nous a poussé à nous réunir. Mais pourquoi cette inquiétude ? On essaiera de répondre à cette question, examiner les raisons qui ont créé la situation peu reluisante de l’enseignement des maths en Tunisie tout en proposant des pistes de solutions. On termine cet exposé par notre regard sur l’avenir des mathématiques dans notre pays.

Importance des mathématiques à l’ère de l’IA

«Sans les mathématiques, vous ne pouvez rien faire. Tout ce qui vous entoure est mathématique», disait Albert Einstein.

Depuis l’apparition de ChatGPT en novembre 2022 qui a révélé au grand public la puissance (presque miraculeuse) de l’IA générative, la question s’est posée de savoir ce qu’il y a derrière ces applications qui ont l’air de tout savoir et qui sont même capables des résoudre certains problèmes mathématiques ou de faire des tâches jadis nécessitant un spécialiste. La réponse à cette question : des mathématiques enfouies dans ce qu’on appelle Machine Learning ou Deep Learning avec, en appui, de puissants calculateurs et des données massives.

Depuis, et en quelques années, l’IA s’est démocratisée et on estime aujourd’hui que toutes les cinq minutes un nouveau modèle IA est mis en ligne.

Cette démocratisation de la production de modèles ou «agents IA» s’accompagne-t-elle d’une démocratisation des maths ou, nécessite-t-elle la démocratisation des maths ? Ma réponse est plutôt non. Pour réaliser un modèle IA, on n’a pas besoin de beaucoup de maths sauf si l’on veut concevoir un modèle à partir de rien (from the scratch) sinon les bibliothèques existantes permettent de construire un modèle ad-hoc selon le besoin sans aller chercher les maths qu’il y a derrière.

Toutefois, la maîtrise des mathématiques devient essentielle au niveau de la conception et de l’innovation. Autrement dit, le besoin d’une élite mathématique de haut niveau est essentiel au niveau de la conception et de l’innovation.

D’ailleurs la «qualité mathématique» est importante dans toute la chaine de valeur de l’IA depuis l’extraction des matériaux rares en passant par la fabrication des puces ou la production de l’énergie nécessaire à faire tourner les modèles IA.

Evidemment, les maths ce n’est pas seulement l’IA. Toutes les sciences font appel à des mathématiques de haut niveau pour se développer.

En résumé, les mathématiques de haut niveau sont un levier indispensable de l’innovation dans tous les domaines. Et l’innovation est la clé de la souveraineté parce qu’elle permet de maîtriser les sources de la technologie et de ne pas rester dans la dépendance vis-à-vis des diverses puissances technologiques.

Rappelons-nous l’apparition soudaine en janvier 2025 de DeepSeek, l’équivalent chinois de ChatGPT qui a ébranlé l’Occident et provoqué une chute spectaculaire des actions Nvidia, le principal producteur de puces destinées à équiper les super calculateurs de l’IA.

Etat des lieux en Tunisie

«Pour la plupart de nos contemporains, les mathématiques sont administrées et ingurgitées comme un médicament», disait Seymour Papert.

Je viens de parler de mathématiques de haut niveau et de la «qualité mathématique».

Toutefois, ce qui a permis de tirer la sonnette d’alarme sur l’état des maths en Tunisie, c’est plutôt la quantité. En effet, l’on observe depuis 2014, une chute remarquable du pourcentage des élèves de la section maths qui se présentent au baccalauréat qui passe de 13% en 2014 à 11% en 2018 et 5,4% en 2025. Il est évident que la qualité des mathématiques tunisiennes est fortement dépendante du nombre de ceux qui s’y vouent.

Comment peut-on espérer produire une élite dans ce domaine sans une base étendue de jeunes étudiants dans les sections mathématiques ?

Quand on voit la tendance qui se dessine depuis 2014 du point de vue quantitatif, on ne peut que s’alarmer.

De plus, il y a certainement beaucoup d’élèves qui ont une bonne prédisposition pour les maths mais qui ne choisissent pas cette section en raison notamment de la réglementation de l’orientation universitaire qui semble défavoriser les bacheliers maths.

Cette perte au niveau de la qualité me semble la plus dangereuse.

Outre, l’impact que cela peut avoir sur la recherche et l’innovation, elle peut engendrer un cercle vicieux puisque les cohortes d’étudiants qui vont faire des maths seront privées de beaucoup de ceux qui en ont la vocation mais qui auraient choisi un autre chemin et ne feraient pas partie des enseignants de maths dans les collèges et les lycées.

Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Pistes de solutions.

«Nul ne peut être mathématicien s’il n’a l’âme d’un poète», écrivait Sofia Kovalevskaya.

Les raisons de cette situation : i) l’orientation universitaire qui défavorise ceux qui choisissent la section maths; ii) la didactique des maths, c’est-à-dire la manière dont sont enseignées les maths qui est souvent rebutante ainsi que la perception de maths dans l’imaginaire collectif ; iii) l’organisation de l’enseignement en général qui attend une réforme qui ne vient toujours pas et de l’enseignement des maths en particulier ; iv) La mentalité héritée de la France qui fait un clivage entre formation scientifique et formation littéraire.

Ainsi ceux qui choisissent des sections scientifiques délaissent en général les langues alors qu’avant de résoudre un problème mathématique, il faut bien maîtriser la langue pour saisir les nuances des questions posées.

Ce que beaucoup n’arrivent pas à faire et leur occasionne des difficultés dans la résolution des problèmes. L’ensemble de ces aspects nous amènent à proposer les idées de solutions suivantes :

– à très court terme : redonner de l’importance à la section maths au niveau de l’orientation universitaire;

– à moyen terme : renforcer la formation en didactique des maths pour les enseignants du primaire et du secondaire, en mettant à contribution par exemples l’Institut supérieur de l’éducation et de la formation continue (Isec) ; introduire de nouvelles méthodes d’apprentissage ; scénariser des cours, quiz, exercices interactifs… ; s’inspirer de la méthode de Singapour qui consiste à rapprocher les concepts abstraits des application quotidiennes; donner des flashs historiques pour que l’apprenant sache que l’humanité a construit l’édifice mathématique sur une très longue durée, pierre après pierre. Par exemple, il a fallu des milliers d’années pour «découvrir» le zéro. Il n’y a que quelques siècles qu’on a adopté les lettres dans les équations algébriques et seulement quatre siècles que le logarithme est né ! D’ailleurs né pour répondre à un besoin concret, celui des commerçants et des astronomes qui faisaient beaucoup de multiplications nécessitant beaucoup de temps ! Alors que tout cela doit être assimilé en quelques années;

– à long terme :  réformer l’enseignement du primaire au secondaire et notamment l’enseignement des maths avec en priorité, l’unification de la langue d’enseignement des maths du primaire jusqu’à l’université.

Il est évident que le travail sur les mentalités nécessite beaucoup de temps et est une affaire de toute la société mais il faudrait que les familles et les enfants délaissent l’idée que l’on doit soit choisir les sciences soit choisir les lettres. La formation de l’esprit et la maîtrise des différentes disciplines ne peut en fait se concrétiser qu’à travers un minimum de maîtrise de l’ensemble du spectre de la formation, notamment la formation en langues, littérature et sciences.

«Les hautes mathématiques sont l’autre musique de la pensée», notait George Steiner.  

Ma réponse à la question posée dans le titre de cet exposé est, sans excès d’optimisme, que l’avenir des maths en Tunisie sera radieux.

Pourquoi cet optimisme ?

Il n’y a qu’à se tourner vers l’histoire récente de la Tunisie. Fraichement sortie du colonialisme, notre pays a donné à la communauté mathématique mondiale de brillants mathématiciens.

On en citera Mohamed Salah Baouendi, né en 1937 (il avait 19 ans lors de l’indépendance), élève au Collège Sadiki avant de poursuivre ses études en France et d’entamer une carrière en France, en Tunisie, et aux Etats-Unis.

Mais aussi Abbes Bahri né en 1955 (quelques mois avant l’indépendance) dont tout le monde connait la carrière fulgurante.

Je ne citerai que ces deux grands mathématiciens tunisiens pour étayer la thèse de l’excellence tunisienne malgré un environnement pas très favorable…

On pourrait évidemment citer des dizaines de brillants mathématiciens tunisiens qui portent haut notre drapeau aux instances internationales.

Alors, aujourd’hui, certes la base se rétrécit, mais il y aura toujours des jeunes pour reprendre le flambeau, soutenus par des moins jeunes qui aiment les maths et aiment la Tunisie !

* Mathématicien.

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Gestern — 18. Dezember 2025Haupt-Feeds

Quinze ans après, le Printemps arabe n’est pas terminé

18. Dezember 2025 um 12:33

Le Printemps arabe n’est pas terminé, et les régimes arabes le savent. Même si quinze ans après, les gouvernements ont interdit les manifestations, manipulé les élections et réécrit les constitutions pour s’assurer que 2011 ne se reproduise jamais. (Ph. Révolution tunisienne, le 14 jnvier 2011).

Mohamad Elmasry *

Il y a exactement quinze ans, l’immolation par le feu de Mohamed Bouazizi en Tunisie déclenchait un mouvement de protestation panarabe sans précédent, témoignant de l’immense désir du monde arabe d’instaurer des formes de gouvernement plus démocratiques.

Dans des scènes extraordinaires, des millions de manifestants, à travers plusieurs pays, se sont rassemblés contre des dirigeants autoritaires au pouvoir depuis des décennies, contestant des systèmes politiques marqués par la répression, la corruption et l’exclusion.

Les revendications des manifestants portaient sur des structures de pouvoir centralisées qui engendraient corruption et injustice et concentraient les richesses entre les mains d’une minorité. Ce qui suivit ne fut pas simplement une révolte régionale, mais une revendication historique de dignité, de responsabilité et de démocratie.

Comme on pouvait s’y attendre, les régimes réagirent par une répression brutale : de nombreux manifestants furent tués, battus ou arrêtés.

Cependant, le mouvement prodémocratie remporta des succès initiaux significatifs.

En quelques mois, quatre dictateurs de longue date – Zine El Abidine Ben Ali en Tunisie, Hosni Moubarak en Égypte, Mouammar Kadhafi en Libye et Ali Abdullah Saleh au Yémen – furent renversés.

Dans une poignée de pays – dont le Bahreïn, l’Algérie et l’Irak – les régimes réussirent à étouffer les manifestations, les interrompant avant qu’elles ne prennent de l’ampleur.

Dans d’autres pays, les mouvements de protestation aboutirent à des réformes limitées ou, dans le cas de la Syrie, à une guerre civile prolongée sans changement de régime immédiat.

À l’instar de la Syrie, la Libye et le Yémen finirent par sombrer dans un conflit violent.

L’Égypte et la Tunisie furent les seuls pays du Printemps arabe à pouvoir se prévaloir de succès significatifs à long terme : les deux pays ont rapidement renversé leurs dictateurs et ont entamé presque immédiatement des transitions démocratiques.

Malgré des résultats mitigés, les observateurs ont généralement salué le Printemps arabe comme un moment démocratique révolutionnaire pour une région longtemps engluée dans la tyrannie.

Pourtant, quinze ans plus tard, il est clair que si les revendications populaires en faveur de la démocratie ont persisté, les régimes autoritaires ont appris à s’assurer que de tels soulèvements ne puissent plus jamais aboutir.

Les cas de l’Égypte et de la Tunisie

En Tunisie comme en Égypte, les transitions démocratiques ont d’abord semblé s’installer : des assemblées constituantes ont été formées, de nouvelles constitutions ont été rédigées, de nouveaux partis politiques et médias ont été créés, et de nouveaux dirigeants politiques ont été élus.

Il est important de noter que, dans les deux pays, les partis formés par les Frères musulmans – qui sont depuis longtemps bien organisés dans une grande partie de la région – ont rapidement acquis de l’influence.

Certains observateurs ont perçu la montée en puissance politique et l’influence des islamistes centristes comme un phénomène bienveillant, voire positif, tandis que d’autres y ont vu un problème.

Abstraction faite des débats sur les mérites ou les lacunes potentiels de l’islam politique, la Tunisie et l’Égypte étaient initialement perçues comme des modèles prometteurs de transformation démocratique arabe, précisément parce qu’elles laissaient entrevoir que l’autoritarisme n’était pas une fatalité arabe.

Bien que leurs transitions aient été marquées par de sérieux défis et parfois de véritables crises, ces deux pays ont démontré que les sociétés arabes modernes étaient capables de construire des systèmes démocratiques, même imparfaits et fragiles.

Plus important encore, peut-être, les exemples de la Tunisie et l’Égypte ont montré que les citoyens arabes étaient désireux de participer aux élections : les taux de participation électorale dans les deux pays étaient comparables à ceux de certaines démocraties occidentales établies.

Mais les apparences et les chiffres de participation étaient, au moins en partie, trompeurs, notamment dans le cas de l’Égypte, où le Parti Liberté et Justice des Frères musulmans et ses représentants ont remporté les référendums et les élections, y compris la présidence, sans pour autant exercer véritablement le pouvoir.

L’«État profond» égyptien – l’armée, la police, les services de renseignement, le système judiciaire et les médias – n’a jamais complètement quitté la scène politique.

L’ancien régime a réussi à saboter deux parlements élus, puis, à l’été 2013, a collaboré avec des libéraux égyptiens anti-islamistes pour renverser le premier président égyptien démocratiquement élu, Mohamed Morsi.

Le coup d’État égyptien de 2013 a représenté un renversement complet de la démocratie, un retour au statu quo d’avant 2011, et sans doute quelque chose d’encore plus autoritaire.

Abdel Fattah Al-Sissi, ancien ministre de la Défense de Morsi, a rapidement consolidé son pouvoir. Il a orchestré des arrestations massives, l’interdiction des partis politiques, la fermeture des médias, des élections contrôlées et la refonte complète du système juridique et politique égyptien.

Des experts ont démontré, à juste titre, que le système autoritaire instauré par Al-Sissi est encore plus autoritaire que celui de Moubarak.

L’expérience démocratique de la Tunisie a duré plus longtemps que celle de l’Égypte, mais a finalement connu un recul similaire.

En 2014, la Tunisie a élaboré une nouvelle constitution et élu son premier président démocratiquement élu, Béji Caïd Essebsi.

Mais l’élection, en 2019, d’un nouveau président, Kaïs Saïed, a marqué le début de la fin de l’expérience démocratique tunisienne.

En juillet 2021, environ deux ans après son entrée en fonction, Saïed a renversé la démocratie tunisienne naissante, s’octroyant les pleins pouvoirs, destituant le Premier ministre et suspendant le Parlement. Depuis lors, Saïed a encore renforcé son pouvoir.

Les leçons tirées d’un échec

Il est clair que les régimes égyptien et tunisien ont tiré au moins une leçon des mouvements de protestation prodémocratie de 2010-2011 : leurs dictatures n’étaient pas suffisamment autoritaires.

Dans les deux pays, les cadres politiques et juridiques ont été soigneusement remaniés afin d’empêcher précisément le type de désobéissance civile observé il y a 15 ans. La moindre protestation ou opposition n’est pas tolérée.

En Égypte, par exemple, une loi de 2013 sur les manifestations interdit les rassemblements publics ; et une loi antiterroriste de 2015 considère comme un acte de terrorisme tout acte d’«intimidation» qui «porte atteinte à l’unité nationale», «trouble l’ordre public» ou «entrave l’exercice des fonctions des autorités publiques».

Le régime militaire égyptien post-2013 a également démontré qu’il ne laisserait aucune élection au hasard.

Le gouvernement a orchestré des élections truquées, adopté une loi électorale garantissant l’allégeance du Parlement au président et révisé la Constitution afin de prolonger le règne d’Al-Sissi jusqu’en 2030.

Là où des dissensions ont permis à des figures de l’opposition de se présenter à la présidence, Al-Sissi a usé de son emprise sur le pouvoir pour les faire arrêter ou les contraindre à l’exil définitif.

Des experts ont constaté à quel point le président tunisien Saïed a suivi de près les traces d’Al-Sissi.

Bien qu’il n’ait pas instauré en Tunisie une répression comparable à celle d’Al-Sissi, Saïed, à l’instar de son homologue égyptien, a réécrit la constitution, étendu les pouvoirs présidentiels et supprimé les contre-pouvoirs.

Les données recueillies par l’Indice de transformation Bertelsmann montrent que, sur de nombreux indicateurs politiques et économiques, la Tunisie a régressé à son niveau d’avant le Printemps arabe.

Des failles dans le système

Quinze ans après le Printemps arabe, les problèmes fondamentaux qui ont conduit aux manifestations – corruption, injustice et difficultés économiques – persistent et sont peut-être plus urgents aujourd’hui qu’à l’époque.

Les pays arabes obtiennent très majoritairement de mauvais résultats à l’Indice de perception de la corruption (IPC) annuel, nombre d’entre eux figurant parmi les derniers du classement mondial, et les États restent englués dans l’injustice.

Par exemple, sur 21 pays arabes récemment évalués par Freedom House, aucun n’a été classé «libre» ; et sur les neuf nations arabes évaluées en 2025 dans le cadre de l’Indice de l’Etat de droit du World Justice Project, la plupart se classent parmi les derniers du classement mondial.

Il est important de noter que, dans son ensemble – pays du Golfe mis à part –, la région arabe reste enlisée dans des difficultés économiques.

Selon la Banque mondiale, le produit intérieur brut (PIB) par habitant demeure extrêmement faible dans la plupart des pays non membres du Conseil de coopération du Golfe, et les Nations Unies indiquent que les pénuries alimentaires et la faim restent des problèmes majeurs dans une grande partie de la région.

Les difficultés économiques de l’Égypte et de la Tunisie sont révélatrices de la situation dans une grande partie du reste de la région.

En Égypte, depuis le soulèvement de 2011, l’empire économique de l’armée et les inégalités se sont accrus, tandis que l’inflation et la pauvreté ont progressé.

Parallèlement, l’économie tunisienne se détériore également.

Selon un rapport récent de la Fondation Carnegie pour la paix internationale, la politique économique de Saïed a entraîné une forte augmentation de la dette intérieure et un effondrement de la croissance économique, ainsi qu’une baisse des salaires réels et une hausse du chômage.

Démocratie : un sujet tabou

Ce qui est peut-être le plus alarmant pour les régimes arabes, c’est que leurs citoyens continuent, dans leur immense majorité, d’aspirer à un gouvernement démocratique.

Selon l’Indice d’opinion arabe, plus de 70 % des Arabes interrogés sont favorables à la démocratie, contre seulement 19 % qui y sont opposés.

Les résultats de l’enquête suggèrent également que les citoyens arabes portent un jugement négatif sur le niveau de démocratie dans leurs pays ; ils ont tendance à associer la démocratie à la liberté, à l’égalité et à la justice ; et ils ont une opinion favorable du Printemps arabe.

Un sondage plus récent de l’Arab Barometer aboutit à des conclusions similaires.

Le Printemps arabe n’est pas terminé

En décembre 2024, le dictateur syrien Bachar Al-Assad a été renversé et contraint à l’exil, environ 14 ans après le début du soulèvement contre lui.

Cet événement cataclysmique a démontré, peut-être mieux que tout autre, que les analystes ont peut-être été prématurés en déclarant la fin du Printemps arabe.

Les récentes manifestations de la génération Z au Maroc apportent des preuves supplémentaires que de nombreux Arabes – en particulier les jeunes – sont capables, désireux et prêts à se battre pour le changement.

Il ne s’agit donc peut-être que d’une question de temps avant que la situation ne dégénère et qu’une nouvelle vague de manifestations ne commence.

Les gouvernements savent que le risque est réel. Le régime égyptien d’Al-Sissi en est une nouvelle fois un exemple frappant.

Ces dernières années, Al-Sissi a été contraint de mettre en garde à plusieurs reprises les Égyptiens contre toute manifestation.

Lors d’une allocution publique il y a quelques années, il a déclaré qu’une répétition du soulèvement de 2011 «ne se reproduirait plus jamais» en Égypte.

La paranoïa est bien réelle : l’État profond égyptien ne semble pas disposé à prendre le moindre risque en ouvrant l’espace politique.

Le régime a récemment intensifié son vaste programme de fraude électorale et chercherait, selon certaines sources, à prolonger indéfiniment le règne d’Al-Sissi.

Non content d’éliminer l’opposition intérieure, le gouvernement égyptien s’efforce également de museler l’opposition à l’étranger.

Le régime a tenté de fermer les médias d’opposition basés hors d’Égypte et a cherché à obtenir l’extradition de figures populaires de l’opposition.

Plus tôt cette année, un jeune Égyptien, Anas Habib, a organisé une manifestation pacifique devant l’ambassade d’Égypte à La Haye.

En réponse, le ministre égyptien des Affaires étrangères a exhorté le personnel de l’ambassade à détenir les manifestants et à les faire arrêter. Dans un acte de représailles apparentes, les autorités égyptiennes ont arrêté l’oncle âgé d’Habib en Égypte.

Au-delà de l’Égypte, les États arabes ont récemment intensifié leur coopération en matière de sécurité intérieure, leurs gouvernements recherchant activement les individus recherchés à l’étranger en vue de leur extradition.

Ces mesures extrêmes soulignent la paranoïa ambiante : les régimes arabes semblent comprendre qu’il ne s’agit que d’une pause, et non d’une fin, dans le Printemps arabe.

L’histoire montre que lorsque le mouvement reprendra, il ne sera pas annoncé à l’avance.

Le peuple a presque toujours le dernier mot. Nous ignorons simplement quand il choisira de l’exprimer.

Traduit de l’anglais.

Source : Al Jazeera.

* Professeur à l’Institut d’études supérieures de Doha.

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La Tunisie face aux choix difficiles 

18. Dezember 2025 um 10:31

Les révolutions échouent rarement par excès d’audace, mais par incapacité à instituer durablement la liberté. Celle du 17 décembre 2010-14 janvier 2011 en Tunisie fut une ouverture. Mais aucune ouverture ne garantit le chemin qui suit, qui, quinze ans après, reste sinueux, erratique et incertain (Photo : On a «fêté» quoi le 17 décembre, un succès ou un échec ?)

Manel Albouchi

Le sociologue John Walton a décrit ce moment précis comme celui de la révolution en échec. Non pas un échec du soulèvement, mais un échec de la transformation. Selon lui, les sociétés postrévolutionnaires ne s’effondrent pas faute de désir de changement, mais parce que les structures héritées (économiques, administratives, symboliques) ne permettent pas de soutenir durablement les réformes nouvelles. 

La mobilisation retombe alors par épuisement. Et la société entre dans ce temps intermédiaire, ni ancien régime, ni ordre nouveau. 

Un bilan mitigé

Quand Ben Ali est mort politiquement, la Tunisie n’a pas disparu avec lui. Au contraire : l’histoire véritable a commencé. Le corps d’un système de pouvoir massif, saturé de privilèges et d’habitudes, a entamé une chute lente, presque silencieuse. Il a mis des années à toucher le sol, à se déposer dans un mélange de fatigue, d’oubli et de silence officiel. Pendant ce temps, la vie sociale et politique n’a jamais cessé. Elle a continué autrement, en marge, en dessous, dans les interstices. 

Les premiers à s’en approcher furent ceux qui savent vivre des vides de pouvoir : nouveaux politiciens, récits médiatiques hâtifs, groupes d’influence. Ils ont rongé les restes, disputé l’héritage, jusqu’à ce qu’il ne demeure que l’ossature de l’État : lois anciennes, procédures, bureaucratie robuste. Puis, lorsque les restes ont été consommés, une autre surprise est apparue. Plus lente. Moins visible. Plus profonde. 

La jeunesse, les associations, les initiatives culturelles indépendantes ont commencé à creuser la structure non pour la renverser, mais pour la transformer de l’intérieur. À produire une énergie nouvelle, discrète, parfois fragile, mais persistante. Un réseau inédit s’est ainsi tissé, complexe, connecté, issu des abysses sp laissées par l’ancien régime. 

Les choix difficiles  

Le «17 décembre-14 janvier» ne marque donc pas une fin, mais le début d’une élaboration. 

Dans Hard Choices, Hillary Clinton rappelle que l’histoire ne se joue pas dans les moments héroïques, mais dans l’après. Dans ce temps où aucune option n’est pure, où chaque décision comporte un coût, où choisir signifie aussi renoncer. La Tunisie vit ce temps‑là : celui des décisions difficiles, de la responsabilité sans garantie, de la patience contrainte. 

«إذا الشعب يوما أراد الحياة» n’est pas un slogan. C’est une exigence. Vouloir la vie, ce n’est pas seulement briser le silence ; c’est accepter l’angoisse de la liberté, la lenteur des constructions, l’absence de modèle prêt‑à‑porter. Beaucoup désirent la liberté ; peu supportent ce qu’elle exige. 

Clinique d’un présent discret 

La société tunisienne n’est pas explosive. Elle est compressée. Comme un corps qui retient son souffle trop longtemps. Frustrations économiques accumulées, sentiment d’injustice difficile à formuler, fatigue psychique collective proche de l’épuisement moral. Les affects dominants sont discrets mais persistants : lassitude, méfiance, irritabilité silencieuse. 

Ce n’est pas une année de révolte massive. C’est une année de besoin de cadre. La peur du chaos et de l’effondrement l’emporte sur le désir d’expérimentation. Beaucoup préfèrent un ordre dur mais lisible à une liberté vécue comme menaçante. La tolérance au contrôle augmente. Le silence social s’installe. Une résignation active prend forme. 

Le lien collectif se replie. Alain Ehrenberg a donné un nom à cet état diffus : la fatigue d’être soi. Une fatigue propre aux sociétés où l’autonomie n’est plus une conquête, mais une obligation silencieuse, laissant chacun seul face à ses échecs et à ses impasses. La rue n’est plus le lieu du désir projeté ; elle devient le lieu du danger perçu. La société se privatise psychiquement : on protège la famille, le clan, le micro‑réseau. L’autorité est à la fois désirée comme protection et redoutée comme écrasement. Le clivage interne est constant : «J’ai besoin qu’on me protège, mais j’ai peur d’être étouffé»

Cliniquement, ce temps favorise des troubles anxieux diffus, des états dépressifs masqués, une agressivité passive. Peu de violence collective, mais beaucoup de violence retournée contre soi. 

Freud avait déjà mis des mots sur ce paradoxe fondamental. Dans ‘‘Malaise dans la civilisation’’, il écrit que «l’homme n’est pas cet être débonnaire assoiffé d’amour que l’on imagine, mais qu’il porte en lui une puissante part d’agressivité»

Lorsque cette agressivité ne trouve plus d’inscription symbolique (politique, collective, institutionnelle) elle ne disparaît pas. Elle se retourne. Elle se déplace. Elle se loge dans le corps social sous forme de fatigue, de retrait, d’hostilité muette ou de violence dirigée contre soi. 

La stabilité apparente n’est alors pas le signe d’une pacification, mais d’une contention. 

La «fête» du 17 décembre 

Le 17 décembre ne demande pas d’applaudir. Il demande de répondre. Non pas par des slogans, mais par une élaboration patiente. Il rappelle que la révolution n’est pas un événement figé, mais un processus qui passe par des phases de doute, de repli, parfois de régression. 

Le corps du système déchu n’était pas un symbole de fin. Il est la preuve que la vie sait continuer, même au cœur d’un ordre mort. La question, désormais, n’est plus : contre quoi nous sommes‑nous levés ? Mais : que faisons‑nous de ce qui a été ouvert ? 

Peut‑être que la maturité politique commence ici. Quand la liberté cesse de crier. Quand elle travaille en silence. Quand un peuple apprend que vouloir la vie, c’est accepter le temps et les choix difficiles qui l’accompagnent. 

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XXIᵉ siècle | Ce que nous avons appris, et ce qui s’annonce

18. Dezember 2025 um 09:48

À quelques jours de la fin du premier quart du XXIᵉ siècle, l’humanité se découvre à un moment rare, celui où le temps des promesses s’achève avant que celui des certitudes n’ait commencé. Ce quart de siècle n’a pas seulement accumulé des crises — il a opéré un tri impitoyable entre les récits auxquels nous voulions croire et les réalités que nous avons refusé de regarder.

Yahya Ould Amar *

Valeurs universelles, démocratie, mondialisation heureuse, émergence économique, progrès moral continu : autant de piliers intellectuels qui, sans s’effondrer totalement, se sont fissurés au contact du réel. Cet article ne cherche ni à condamner, ni à absoudre. Il propose un examen de ce que ces vingt-cinq années nous ont réellement appris — sur nos valeurs lorsqu’elles deviennent coûteuses, sur nos modèles économiques lorsqu’ils atteignent leurs limites, sur nos ambitions de justice dans un monde désormais contraint — afin de comprendre non pas ce que le monde devrait être, mais ce qu’il est devenu, et ce qu’il est encore possible d’y reconstruire.

La grande désillusion morale

Au cours des quatre-vingt dernières années, le monde s’est raconté une histoire confortable, celle d’un progrès moral cumulatif, d’une humanité convergeant lentement mais sûrement vers des normes communes — droits humains, primauté du droit, démocratie, dignité universelle. Cette histoire avait ses temples – à New York, Paris, la Haye ou Genève – ses textes sacrés, ses gardiens. Elle avait surtout ses sermons.

Puis est venu le réel. Gaza, l’Ukraine, la Libye, l’Irak, le Yémen … — autant de lieux où le langage des valeurs s’est fracassé contre la hiérarchie des intérêts. Le choc n’a pas seulement été géopolitique. Il a été moral. Le Sud global a compris par observation que les valeurs proclamées ne sont pas toujours les valeurs appliquées, et que l’universalité cesse souvent là où commencent les coûts stratégiques.

Ce que nous avons appris est terrible par sa simplicité, les valeurs, lorsqu’elles ne sont pas coûteuses pour ceux qui les défendent, cessent d’être des principes pour se transformer en slogans ; lorsqu’elles deviennent coûteuses, elles sont négociables. Ce n’est pas la morale qui a disparu, c’est sa prétention à l’universalité qui a été démasquée.

La démocratie elle-même, longtemps présentée comme une fin en soi, est défendue avec ferveur chez certains, relativisée chez d’autres, suspendue ailleurs au nom de la sécurité, de la stabilité, ou de l’équilibre régional.

La fracture interne du Nord

Cette perte de crédibilité des valeurs n’est pas uniquement une perception du Sud. Elle trouve aussi sa source au cœur même des sociétés développées. Le premier quart du XXIᵉ siècle a vu se fissurer la promesse interne du progrès avec une stagnation des classes moyennes, un déclassement éducatif et une insécurité économique diffuse.

Dans ce contexte, la solidarité internationale, le climat, l’aide au développement cessent d’apparaître comme des impératifs moraux pour devenir, aux yeux de millions de citoyens du Nord, des luxes abstraits. Le repli n’est pas seulement géopolitique ; il est social. Un monde anxieux finance difficilement un avenir qu’il ne croit plus pouvoir habiter dignement.

La responsabilité des élites

La désillusion est aussi le résultat d’une faillite des élites politiques, économiques et intellectuelles qui ont longtemps bénéficié de la mondialisation sans en assumer les coûts sociaux et moraux. Globalisées dans leur mode de vie, rarement exposées aux conséquences sociales ou environnementales de leurs décisions, elles ont pu transformer des choix profondément politiques en nécessités techniques.
Ce siècle n’a pas seulement révélé l’égoïsme des États ; il a exposé l’écart grandissant entre ceux qui décident et ceux qui paient. Or aucune architecture morale ne survit durablement à une telle asymétrie de responsabilité.

De la bipolarité à la multipolarité

Le monde qui se recompose n’est plus réductible aux catégories familières du bipolarisme ou de l’hégémonie. Nous entrons dans une multipolarité hybride, où les alliances émergentes — Brics élargis, Organisation de coopération de Shanghai — ne se contentent pas de contester l’ordre occidental, mais expérimentent des formes inédites de gouvernance mêlant souveraineté régionale et échanges Sud-Sud … profondément asymétriques. Cette multipolarité fragmente les normes, les chaînes de valeur et les standards technologiques.

Pour le Sud global, l’enjeu n’est plus de choisir un camp, mais de naviguer entre des dépendances croisées — occidentales et chinoises — sans se laisser enfermer dans une subalternité.

Dans cette configuration instable, la multipolarité n’est ni une promesse automatique de justice, ni une fatalité de fragmentation ; elle devient une opportunité d’innovation diplomatique, à condition de penser les alliances non comme des loyautés idéologiques, mais comme des instruments stratégiques réversibles dans un monde de conflits hybrides.

L’économie : de l’illusion de l’émergence à la révolution cognitive

Sur le plan économique, le premier quart du siècle aura également clos une époque d’émergence «mécanique», fondée sur des recettes désormais épuisées : industrialisation extensive, main-d’œuvre bon marché, insertion linéaire dans les chaînes de valeur mondiales, rattrapage technologique par imitation.

Le miracle asiatique a été un moment historique non reproductible à l’identique. Il reposait sur une mondialisation fluide, une énergie abondante, une finance permissive et un monde sans contraintes climatiques sérieuses. Aucun de ces piliers n’existe plus.

La nouvelle frontière ou rupture est la révolution cognitive. La richesse ne se mesure plus seulement en tonnes produites mais en capacité de production de biens et services complexes donc rares.

A titre d’exemple, un iPhone 17 – qui est un concentré de technologies – vendu aujourd’hui en Europe environ 1 450 euros, soit l’équivalent de près de 27 barils de pétrole aux prix actuels, ne contient pourtant qu’environ 200 grammes de matériaux et du plastique dont la valeur brute dépasse à peine un euro. Ce paradoxe dit tout, ce qui est rémunéré aujourd’hui n’est plus la matière, mais l’idée ; non plus le gisement minier, mais le gisement cognitif. À tel point que les ventes annuelles d’iPhone pèsent désormais davantage que l’ensemble des exportations pétrolières de l’Arabie saoudite.

Le centre de gravité de la richesse mondiale s’est déplacé irréversiblement de l’extraction vers la conception, du sous-sol vers le cerveau. Et pendant que le Nord maîtrisait cette révolution de la connaissance, une grande partie du Sud, encore prisonnière de ses matières premières, n’a pas vu venir ce renversement historique.

L’automatisation, l’IA générative, les infrastructures de données, les modèles d’apprentissage déplacent la valeur de la production vers la conception, de la matière vers l’intelligence. Il y a ceux qui creusent le sous-sol pour survivre, et ceux qui creusent le savoir pour dominer l’économie-monde.

En un mot, l’économie des dernières décennies récompensait l’usine ; celle de 2026 rémunère l’esprit.

Ainsi, la duplication des modèles asiatiques de réussite est devenue une impasse conceptuelle. Parce que ces modèles reposaient sur un monde stable, hiérarchisé, carbone-intensif, faiblement numérisé et abondant en emplois intermédiaires. Le monde de 2026, lui, est décarboné, cognitif, instable, ultra-technologique — un monde où concevoir vaut infiniment plus que produire.

Face à cette nouvelle réalité, une évidence s’impose, l’émergence des pays du Sud ne peut plus être une réplique ; elle doit devenir une invention. L’ambition du Sud global n’est plus de rattraper, mais de se reconfigurer. Non pas copier le passé des autres, mais inventer son propre futur.

Nous entrons dans un âge où la croissance peut subsister sans transformation, où le progrès peut se diffuser sans enrichissement, où l’innovation peut coexister avec le déclassement.

La question centrale de notre époque n’est donc plus comment croître, mais comment se transformer.

La mutation du capitalisme

Cette révolution cognitive ne transforme pas seulement la nature de la croissance ; elle modifie la structure même du capitalisme. La valeur ne se concentre plus dans la production, mais dans la capture des rentes intellectuelles, des données, des standards technologiques.
Nous sommes entrés dans un capitalisme où l’innovation peut coexister avec une concentration extrême des gains, où la connaissance devient un actif privatisé, et où l’avantage compétitif tend à s’auto-reproduire. Dans un tel système, l’injustice n’est plus une anomalie, elle devient un risque structurel.

L’éducation — longtemps traitée comme un secteur social parmi d’autres — est redevenue le cœur battant de la puissance économique.

Mais pas n’importe quelle éducation, une éducation qui forme à penser, pas seulement à exécuter ; à apprendre, pas seulement à reproduire ; à naviguer dans l’incertitude, pas à réciter des certitudes mortes. La révolution de l’intelligence artificielle (IA) ne remplace pas l’humain, elle sanctionne les systèmes éducatifs qui ont cessé de le cultiver.

L’IA, un enjeu civilisationnel

L’intelligence artificielle pose une question civilisationnelle. Qui contrôle les architectures cognitives ? Qui possède les modèles, les données, les capacités de calcul ?

Dans un monde où l’intelligence devient industrialisable, la dépendance n’est plus seulement énergétique ou financière, elle devient cognitive. Une société qui renonce à former ses esprits ne se contente pas de perdre en compétitivité, elle abdique une part de sa souveraineté intellectuelle. L’éducation redevient ainsi non seulement un levier de croissance, mais une condition de liberté.

La rareté des financements pour le développement

Le monde qui s’ouvre n’est pas seulement plus conflictuel ; il est plus contraint. L’endettement généralisé des États, après une longue période de politiques monétaires accommodantes, referme la parenthèse de l’abondance financière. Les marges budgétaires se réduisent au moment même où les besoins explosent.

Les investissements massifs dans l’intelligence artificielle – uniquement aux USA, entre 5000 et 8000 milliards de dollars dans les quatre prochaines années – les budgets annuels de défense 5% du PIB européen et plus de 1000 milliards de dollars aux USA, la souveraineté technologique et énergétique (les besoins en énergies de l’IA représentent aux USA 25% de la consommation actuelle – Data centers) absorbent une part croissante de l’épargne mondiale. Le capital devient sélectif. Les financements concessionnels se raréfient. Les priorités s’arbitrent désormais entre urgences — et non plus entre projets vertueux.

La transition climatiquedont les besoins annuels de financement sont estimés entre6 000 et 7 500 milliards de dollars, incluant 2 400 à 3 300 milliards destinés aux pays en développement hors Chine —, longtemps érigée en grand chantier consensuel du XXIᵉ siècle, entre désormais dans une zone de tension critique. Elle se trouve en concurrence frontale avec d’autres priorités désormais perçues comme existentielles comme la sécurité géopolitique, la souveraineté technologique, la stabilité financière.

Le danger est que la justice climatique devienne la variable d’ajustement d’un monde à la fois surendetté, fragmenté et inquiet, où l’urgence immédiate l’emporte sur la responsabilité de long terme.

À cette équation déjà contrainte s’ajoute les besoins annuels globaux d’investissement de l’économie mondiale, toutes finalités confondues, atteignant environ 18 000 milliards de dollars, en sus des montants requis pour le climat, la sécurité et l’IA. Ce chiffre donne la mesure de l’étroitesse réelle des marges de manœuvre budgétaires des États et du poids croissant transféré vers le secteur privé — dont la soutenabilité globale, financière comme politique, demeure à ce stade largement inexplorée.

Cependant il y a un paradoxe moral vertigineux, les pays en développement (hors Chine) historiquement les moins responsables du réchauffement de la planète et qui ont le moins profité du carbone se voient sommés d’en assumer une part croissante du coût. C’est la logique la plus cruelle de ce siècle.

Quel avenir pour un monde plus «juste» ?

La question centrale n’est donc plus que faut-il faire ? — nous le savons. Elle est devenue qu’est-ce qui est encore politiquement, financièrement et moralement possible?

Un monde plus juste ne naîtra pas de sermons moraux renouvelés. Il ne naîtra pas non plus d’un retour nostalgique à des universalismes abstraits. Il naîtra, s’il doit naître, d’un réalisme éthique – la capacité à reconstruire des valeurs non pas contre les intérêts de certains, mais en les reconfigurant.

Cela suppose trois ruptures majeures.

La première est intellectuelle : accepter que la justice mondiale ne sera pas uniforme, mais graduelle, négociée, imparfaite — et pourtant préférable au cynisme intégral.

La deuxième est institutionnelle : inventer des mécanismes de financement hybrides, mêlant capital privé, garanties publiques, innovation financière et discipline budgétaire, plutôt que d’attendre le retour d’un multilatéralisme généreux qui ne reviendra pas sous sa forme passée.

La troisième est éducative et civilisationnelle : réhabiliter l’idée que la puissance véritable d’une société réside dans la qualité de ses esprits, pas seulement dans la taille de son PIB ou de son arsenal militaire.

Parallèles historiques

Le moment de désillusion susmentionnée n’est pas sans précédent dans l’histoire des civilisations. Rome, à la fin de sa puissance, découvrit que ses valeurs proclamées ne suffisaient plus à contenir ses contradictions internes ; l’Europe des Lumières, après avoir cru à la raison comme horizon auto-suffisant, dut affronter ses propres ombres au XIXᵉ siècle. Chaque cycle de maturation historique connaît ce point de bascule où les récits s’épuisent avant que les principes ne soient réinventés.

Enfin, le premier quart du XXIᵉ siècle ne nous lègue ni une morale clé en main ni un horizon rassurant ; il nous lègue une responsabilité. Celle de renoncer aux illusions confortables sans céder au cynisme, d’abandonner les universalismes incantatoires sans renoncer à l’exigence de justice. Le monde qui s’ouvre sera plus fragmenté, plus contraint, plus conflictuel — mais il peut aussi devenir plus honnête. À condition d’accepter que les valeurs ne précèdent plus le réel, mais qu’elles s’y éprouvent ; que la justice ne soit plus proclamée, mais construite ; et que la lucidité, loin d’être un aveu d’impuissance, devienne la vertu cardinale d’un siècle qui n’a plus le luxe de l’innocence. Ce n’est qu’à ce prix — et à ce prix seulement — que l’humanité pourra transformer la fin des certitudes en commencement d’une éthique pragmatique.

* Economiste, banquier et financier.

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Algérie | La grâce présidentielle accordée à Belghit fait débat

17. Dezember 2025 um 10:40

Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a accordé ce lundi 15 décembre 2025 une grâce totale à Mohamed Amine Belghit, historien et professeur d’université à Alger, définitivement condamné, suite à des accusations d’atteinte à l’unité nationale. Il a fait des déclarations controversées, considérées comme racistes à l’égard des Amazighs.

Cette de grâce présidentielle portant sur le reliquat de la peine de Belghit n’affecte pas les procédures en cours concernant d’autres détenus, ni les condamnations déjà prononcées dans des procès similaires.

Cette libération intervient dans un contexte sensible, marqué par des débats autour de la liberté d’expression, de l’identité culturelle et de la justice en Algérie. Certains observateurs ont noté que la mesure pourrait alimenter des discussions sur la cohérence et l’égalité de traitement des détenus dans le pays.

Les réactions sur les réseaux sociaux et forums montrent une diversité de points de vue : certains saluent la décision comme un geste humanitaire, tandis que d’autres appellent à des réformes plus larges pour garantir l’accès équitable à la justice pour tous les détenus, y compris ceux considérés comme prisonniers d’opinion.

Cette grâce présidentielle prouve aussi l’implication de l’exécutif dans le système judiciaire algérien. Le cas Belghit pourrait relancer le débat sur la grâce présidentielle et les limites de son application dans un pays où les questions de droits, d’identité et de liberté d’expression restent au cœur des discussions publiques.

D. G.

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Tunisie | Qui a poussé Ben Ali vers la porte de sortie ?  

17. Dezember 2025 um 08:56

«Révolution/révolte» droit d’inventaire ! Construire un beau récit des journées insurrectionnelles (17 décembre 2010-14 janvier 2011) est à la portée de tout un chacun et d’aucuns n’ont pas manqué de le faire dès le 15 janvier 2011. Mais il est autrement plus difficile de reconstituer, avec minutie, les faits qui ont abouti au départ du président Ben Ali.

Noureddine Dougui *

Ceux qui savent comment les choses se sont passées n’ont pas encore livré leurs témoignages. Une grande question demeure qui est de savoir qui a poussé Ben Ali vers la porte de sortie ? La rue, une «révolution de Palais» ou les deux ? On ne saura pas la réponse de sitôt.

Venons-en à l’après Ben Ali, là aussi il y a une divergence de vues : pour une grande partie de l’élite politique issue de l’opposition et celle qui a accédé au pouvoir, durant les années 2011- 2021, ce fut une transition démocratique sans précédent dans l’histoire de la Tunisie.

En revanche, pour les tenants du pouvoir actuel, c’était un fiasco total, d’où l’expression stéréotypée : «décennie noire» utilisée, à tout bout de champ, pour qualifier cette période. Où se situe la réalité ?

Le droit d’inventaire fournira, me semble-t-il, quelques éléments de réponse. Il s’agit d’établir honnêtement et sans arrière-pensée le bilan de cette période controversée. Pour faire simple, il faudrait établir la liste de ce qui a été positif et ce qui était erroné.

La distance par rapport aux faits appréhendés n’étant pas suffisante, cette tâche ne pourrait pas être pas être confiée aux historiens, elle devrait incomber, en premier lieu, aux décideurs de l’époque qui gagneraient à faire, sinon leur autocritique du moins leur auto-évaluation. La société civile, les intellectuels indépendants ayant participé à cette dynamique politique pourraient apporter une contribution conséquente.

* Historien.

Page Facebook de l’auteur.

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«La Voix de Hind Rajab» | Le cinéma tunisien à l’honneur sur la scène internationale

Von: Yusra NY
16. Dezember 2025 um 23:38

Le film tunisien « The Voice of Hind Rajab » (La Voix de Hind Rajab) de Kaouther Ben Hania, figure officiellement sur la shortlist des Oscars, une étape clé précédant l’annonce des nominations finales par l’Académie des arts et des sciences du cinéma.

Cette shortlist regroupe une sélection restreinte de films issus de plusieurs pays, classés par ordre alphabétique selon leur pays d’origine, témoignant de la richesse et de la diversité du cinéma mondial en compétition cette année.

Cette distinction marque une reconnaissance majeure pour le cinéma tunisien et renforce sa visibilité à l’international, dans l’attente de l’annonce des nominations finales prévue fin janvier 2026

Félicitations à toute l’équipe du film et bonne chance pour la suite !

Centre National du Cinéma et de l’Image

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Entre crimes de guerre et génocide, le Soudan agonise !

16. Dezember 2025 um 16:46

Des familles délibérément écrasées sous des véhicules blindés, des détenus exécutés devant une caméra, des enfants orphelins abandonnés à leur sort dans le désert et autant de crimes de guerre mais aussi des assassinats basés sur des critères ethniques ce qui relève du génocide, les Forces de soutien rapide de Hemedti Dagalo ont transformé le Soudan en enfer sur terre. Les témoignages sont accablants. 

Imed Bahri

Le Washington Post a publié une enquête de Kathrine Houreld et Hafiz Haroun concernant les enlèvements de masse et les crimes -notamment basés sur des critères ethniques- perpétrés par les Forces de soutien rapide (FSR) après la prise de contrôle d’El Fasher, ville de l’ouest du Soudan.

Selon des survivants, des organisations de défense des droits humains et des proches des personnes enlevées, les FSR ont détenu des milliers de civils, exigeant des rançons exorbitantes et exécutant ceux qui ne pouvaient pas payer. 

Les FSR ont assiégé El Fasher pendant un an et demi, à partir de 2014, et ont systématiquement tué et enlevé ceux qui tentaient de fuir. Lorsque l’armée soudanaise s’est retirée de ses dernières positions dans la ville fin octobre et que les FSR en ont pris le contrôle, leurs combattants ont enlevé des civils en masse, y compris des femmes et des enfants. Des survivants ont rapporté que les captifs ont été torturés et affamés puis contraints de contacter leurs familles pour les supplier de les aider.

Le Washington Post a interviewé neuf victimes d’enlèvement, leurs familles ainsi que des militants. Les témoignages sur les détails concernant les méthodes d’attaque, les lieux où sont enlevés les otages et leur traitement correspondent souvent aux rapports des témoins oculaires et des organisations de défense des droits de l’homme.

Un tableau effroyable

Les difficultés de communication à El Fasher rendent complexe l’évaluation de l’ampleur des exactions commises sur place mais des témoignages divulgués dressent un tableau effroyable : des familles délibérément écrasées sous des véhicules blindés, des détenus exécutés devant une caméra et des enfants orphelins abandonnés à leur sort dans le désert.

Les Nations Unies ont déclaré que le Soudan connaissait la pire crise humanitaire au monde, avec des dizaines de milliers de morts et 12 millions de déplacés en trois ans de guerre civile.

Les récits d’atrocités commises à El Fasher, l’une des plus grandes villes du Darfour, ont mis en lumière les divisions entre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, deux riches États du Golfe alliés aux États-Unis, mais aux intérêts divergents au Soudan.

L’Arabie saoudite soutient l’armée soudanaise, tandis que les Émirats arabes unis sont accusés d’apporter un soutien militaire et financier aux FSR. Les dirigeants émiratis ont nié ces allégations, mais des armes vendues aux Émirats ont été retrouvées à plusieurs reprises dans les stocks des FSR et des responsables politiques de tous bords à Washington ont commencé à critiquer ouvertement les Émirats.

Les sanctions américaines répétées imposées aux FSR et à l’armée soudanaise, elle aussi coupable de violations massives des droits humains, n’ont guère permis d’enrayer les massacres.

Le mois dernier, lors de sa visite à la Maison-Blanche, le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a lancé un appel au président Donald Trump pour obtenir son aide afin de mettre fin au conflit. Trump a déclaré à Truth Social qu’il collaborerait avec les partenaires régionaux pour mettre fin à ces atrocités.

Pendant ce temps, de nombreux survivants restent détenus sous la menace des armes.

On estime à 270 000 le nombre de personnes qui se trouvaient à El Fasher et dans ses environs lors de sa chute le 27 octobre.

Les preuves des massacres dissimulées

Selon les Nations Unies, quelque 106 000 personnes ont fui la ville ces six dernières semaines, tandis que le sort des autres demeure inconnu.

Nathaniel Raymond, directeur du Laboratoire de recherche humanitaire de l’École de santé publique de Yale, estime que les Forces de soutien rapide ont déjà tué des dizaines de milliers de personnes. Son laboratoire publiera la semaine prochaine un rapport cartographiant d’au moins 140 sites où des corps se sont accumulés et documentant les actions considérables entreprises par les FSR pour dissimuler les preuves des massacres.

Raymond raconte : «Une force de la taille d’une brigade est déployée pour dégager les corps et rien ne laisse présager un retour à la normale : aucune activité aux puits, sur les marchés, dans les rues, ni dans les transports en commun. Ils pensent devoir ramasser le plus de corps possible, le plus rapidement possible, avant que quiconque n’entre dans la ville». Le Washington Post cite un infirmier de 37 ans qui a déclaré être resté en ville pendant tout le siège. Son jeune frère a tenté de s’échapper en août mais les FSR l’ont enlevé et tué, malgré le paiement d’une rançon par sa famille, déjà très pauvre.

L’infirmier a ajouté que lorsque les combattants ont pris d’assaut la ville, il s’est enfui avec un groupe d’une centaine de personnes mais qu’ils ont été rapidement capturés. Il a précisé qu’une trentaine d’entre eux ont été sommairement exécutés.

«Je leur ai dit que j’étais médecin et que j’aidais tout le monde, y compris les membres des Forces de soutien rapide», a-t-il déclaré, convaincu que cela lui a sauvé la vie.

Le médecin a raconté que les survivants avaient été transportés en convoi jusqu’à Kutum, à une journée et demie de route : «Ils nous ont déposés devant une maison abandonnée et nous ont ordonné de contacter nos familles. Ils m’ont dit : ‘‘Tu dois les convaincre de payer 50 millions de livres soudanaises sinon nous t’exécuterons sur-le-champ’’». Il a ajouté : «J’ai contacté mes amis car je savais que ma famille n’avait pas assez d’argent». Le médecin a indiqué que ses amis avaient négocié la rançon et l’avaient ramenée à 15 millions de livres soudanaises, soit environ 25 000 dollars. Pendant qu’il attendait des nouvelles de son sort, les combattants ont amené d’autres jeunes hommes d’El Fasher et leurs chefs les ont incités à tuer à leur guise. Il s’est souvenu d’une conversation au cours de laquelle on avait dit à leurs ravisseurs : «Vous devez en tuer la moitié pour faire pression sur les autres et les contraindre à payer la rançon». Le lendemain, ses amis avaient remis la somme totale pour sa libération et il avait été relâché près de la ville de Tawila, où de nombreux rescapés d’El Fasher avaient trouvé refuge.

Un autre homme, âgé de 26 ans, a raconté avoir rejoint une foule importante fuyant vers l’ouest de la ville le 26 septembre. Il se souvient que le groupe a été pris pour cible par des tirs d’artillerie et des drones pendant sa fuite, et que lorsqu’ils ont atteint un remblai de terre construit par les FSR pour encercler la ville, des véhicules blindés ont ouvert le feu. «Certains ont essayé de s’échapper, mais en vain, et beaucoup ont été tués. D’autres ont fait semblant d’être morts, allongés immobiles au sol comme nous et les véhicules ont alors commencé à foncer sur les gens», a-t-il déclaré. 

Les conducteurs des blindés scrutaient le sol, écrasant tout ce qui bougeait. «Une dizaine de personnes ont été tuées dont ma sœur et je n’ai rien pu faire pour la sauver», a-t-il dit. 

Les prisonniers conduits comme du bétail

Il a poursuivi en expliquant qu’à chaque barrage routier, d’autres personnes étaient tuées par les combattants des FSR ou attaquées par des milices arabes alliées à dos de chameau. Il raconta que le groupe avec lequel il avait quitté El Fasher, qui comptait environ 150 personnes, s’était réduit à une trentaine, mais que le calvaire était loin d’être terminé. «J’étais avec mon ami et sa femme. Un soldat a tenté de prendre sa femme comme servante mais il a refusé et l’a serrée fort dans ses bras. Il fut alors abattu et sa femme tomba sur lui. Un des soldats dit: ‘‘Laissez-les se vider de leur sang’’».

Il ajouta que des combattants des FSR lui avaient bandé les yeux, ainsi qu’à une douzaine d’autres survivants, et leur avaient lié les mains derrière le dos. Ils les avaient conduits comme du bétail à Zamzam, un ancien camp de réfugiés et les avaient placés avec d’autres prisonniers. Puis, expliqua-t-il, leurs ravisseurs s’en prirent aux membres des groupes ethniques associés aux milices qui avaient défendu El Fasher contre les Forces de soutien rapide.

Chaque personne était sommée d’indiquer son appartenance tribale, a-t-il raconté. «Si quelqu’un disait ‘‘Zaghawa’’ ou appartenait à une autre tribu africaine, il était tué. Si quelqu’un disait être soldat, il était également tué», a-t-il ajouté.

Finalement, a-t-il poursuivi, lui et dix autres prisonniers ont été conduits dans une cellule d’une prison au sud-ouest d’El Fasher. Le troisième jour, a-t-il expliqué, les FSR leur ont ordonné de contacter leurs familles et d’exiger 15 millions de livres soudanaises. Deux prisonniers ont demandé une somme inférieure, prétextant que leurs proches ne pouvaient pas réunir une telle somme, mais ils ont été immédiatement tués. 

Les FSR ont ordonné aux prisonniers restants de contacter leurs familles et, pendant l’appel, ils leur braquaient leurs armes sur eux. «Ils nous battaient et nous humiliaient jusqu’à ce que nos familles cèdent», précise-t-il. 

Il a indiqué que sa famille avait réussi à payer la rançon en plusieurs fois et que lui et trois autres survivants avaient été libérés et conduits dans un camp de personnes déplacées situé à proximité.

Un troisième témoignage a mis en lumière le caractère systématique de cette opération d’extorsion. La prison de Daqris, à Nyala, est surpeuplée et accueille des milliers de prisonniers transférés d’El Fasher, selon une source proche du dossier. Cette source a ajouté que les détenus ne sont libérés que par l’officier des Forces de soutien rapide qui les a amenés, après le versement de rançons par des proches via une application de paiement électronique. La source a expliqué qu’environ 60 détenus sont entassés dans chaque cellule ordinaire et six dans chaque cellule d’isolement. «Les prisonniers subissent des actes de torture et de violence de la part des gardiens et beaucoup sont morts», a déclaré la source. Les décès dus aux mauvais traitements et aux maladies, notamment au choléra, sont si fréquents qu’une fosse commune située près de la prison s’est rapidement remplie.

Dans un communiqué publié cette semaine, le Réseau des médecins soudanais a indiqué que plus de 5 000 civils sont détenus à Nyala, notamment à la prison de Daqris. Parmi eux figurent du personnel médical, des personnalités politiques et des journalistes.

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Le thé, l’huile d’olive et les dattes dans la liste des investisseurs chinois

16. Dezember 2025 um 14:48

Une délégation d’hommes d’affaires chinois spécialisés dans la filière du thé, en provenance de la région de Hubei et conduite par Song Huiyu, Présidente du comité municipal de Chibi, a exprimé son intérêt pour des projets d’investissement en Tunisie. 

Jalel Tebib, DG de FIPA-Tunisia, a présenté aux investisseurs chinois le climat des affaires et les opportunités du secteur du thé, les invitant à collaborer avec des acteurs locaux.

À l’issue de la rencontre, des mises en relation ont été effectuées avec des opérateurs tunisiens de la filière, ouvrant la voie à des collaborations concrètes et à de futurs projets communs.

Par ailleurs, il est opportun de rappeler que le groupe chinois Wuhan Yangluo Port Services a également exprimé son intérêt pour d’autres secteurs agricoles, notamment l’huile d’olive et les dattes, renforçant ainsi le potentiel de coopération économique bilatérale.

Source: FIPA-TUNISIA

 

 

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Médicaments: le système «tiers payant» en suspension officielle

16. Dezember 2025 um 12:21

Le Syndicat des pharmaciens d’officine de Tunisie (Spot) a annoncé, lundi, la suspension immédiate du système «tiers payant», invoquant l’échec des négociations avec la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam).

Dans un communiqué publié sur sa page Facebook, le Spot précise que cette décision intervient après la rupture unilatérale des discussions par la Cnam. Le syndicat rappelle qu’après un premier échange jugé «positif» le 21 novembre 2025, la Cnam a refusé, sans explication, de tenir la seconde réunion prévue le 28 novembre.

Le bureau national justifie cette suspension par plusieurs manquements persistants: absence de cadre légal clair, retards dans les remboursements et absence de garanties pour les pharmaciens. Le Spot dénonce également l’inaction des autorités officielles, qualifiant la situation de «grave irresponsabilité touchant directement à la sécurité nationale».

Pour autant, le syndicat se dit prêt à réintégrer le système du tiers payant dès que des «garanties légales et financières réelles» seront mises en place, assurant la protection des patients, des pharmaciens et du système de santé. Le communiqué insiste: «Cette mesure ne vise pas à nuire aux citoyens, mais à garantir la sécurité et la viabilité du système pharmaceutique, tout en préservant la dignité et la mission des pharmaciens dans le pays».

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Goldman Sachs : les actions américaines en voie d’atteindre de nouveaux records en 2026

15. Dezember 2025 um 18:50

Les stratèges de Goldman Sachs prévoient que les actions américaines atteindront de nouveaux sommets historiques en 2026. Car les portent l’adoption accélérée des technologies d’intelligence artificielle et la poursuite d’une croissance économique robuste aux États-Unis.

L’équipe stratégique de Goldman Sachs a prédit le 14 décembre que le bénéfice par action des sociétés du S&P 500 augmenterait d’environ 12 % l’année prochaine et de 10 % en 2027. Les gains de productivité liés à l’IA contribuant à hauteur d’environ 0,4 % l’année prochaine et de 1,5 % en 2027.

Ces perspectives optimistes concordent avec les prévisions d’autres grandes institutions, notamment Morgan Stanley, Deutsche Bank et RBC Capital Markets. Lesquelles prévoient toutes que les actions américaines enregistreront des gains supérieurs à 10 % en 2026.

Dans le même contexte, une enquête informelle menée par Bloomberg montre que les gestionnaires de fonds du monde entier parient sur la poursuite de la tendance haussière. L’alimente une confiance accrue dans les perspectives économiques. Et ce, malgré les inquiétudes persistantes quant au risque de bulle spéculative sur les actions des grandes entreprises technologiques engendré par les dépenses massives en intelligence artificielle.

À l’inverse, les analystes suivis par Bloomberg Intelligence prévoient une hausse de 14 % des bénéfices nets des entreprises du S&P 500 en 2026, soutenue par une augmentation de 18 % des bénéfices des sept plus grandes entreprises.

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Génocide et après | Que dit la prospective sur l’avenir de la Palestine ?

15. Dezember 2025 um 12:42

En adoptant l’analyse prospective (foresight), qui intègre les facteurs géopolitiques, juridiques, spirituels, culturels et technologiques (notamment l’intelligence artificielle ou IA), nous avons pu dégager trois scénarios plausibles pour la résolution (ou la perpétuation) du conflit israélo-arabe, tout en réfutant le scénario de la «solution finale» (l’extermination des Palestiniens) véhiculé par la narrative sioniste.

Prof. Med-Dahmani Fathallah

Bien que l’Onu et les organisations humanitaires aient qualifié de génocide l’agression violente d’une ampleur sans précédent perpétrée par l’entité israélienne sioniste contre le peuple palestinien depuis plus de deux ans, ce génocide se poursuit au vu et au su de toute la communauté internationale sub oculis hominum.

L’action intentée devant la Cour Internationale de Justice (CIJ) par l’Afrique du Sud, ainsi que les condamnations répétées et les actions courageuses de quelques gouvernements affranchis du joug sioniste, ont eu pour conséquence indirecte la mise en place d’un cessez-le-feu ignoré par les Israéliens et d’un plan de paix imposé par les États-Unis et rapidement endossé par la communauté internationale.

A ce jour, ces actions n’ont malheureusement fait que changer le rythme de ce génocide et les actions nécessaires à son arrêt définitif se font toujours attendre.

L’exceptionnalisme du conflit et la défaite du droit international

Ce génocide des temps modernes se distingue par une auto-proclamation d’exemption du droit international et par une omerta tacite de tous les médias officiels en Occident. Il revêt aussi un étrange caractère spirituel imprégné par les sionistes, qui le présentent comme l’œuvre du «peuple élu de Dieu», ce qui dédouanerait les auteurs des meurtres massifs de civils, ciblant les enfants et n’épargnant même pas les personnes âgées, de la destruction systématique des infrastructures vitales (hôpitaux, écoles, logements) ; du siège total entraînant la famine ainsi que des discours de haine émanant des autorités israéliennes.

Ce génocide est également préoccupant en raison du silence assourdissant ou de la complicité active des dirigeants de la majorité des puissances occidentales. Ce positionnement est une défaite morale et une violation flagrante de l’obligation de prévenir le génocide (découlant de la Convention de Genève de 1948), permettant ainsi la poursuite des destructions et des pertes humaines.

Ce contraste entre l’ampleur des souffrances et l’inaction internationale marque un tournant potentiellement sombre pour l’ordre mondial et la crédibilité du droit international.

Cette rupture historique avec le droit international et les principes moraux qui régissaient les conventions internationales laisse tous les observateurs perplexes. Deux niveaux de questionnement s’imposent :

1- Comment en est-on arrivé à cette situation ?

2- Quelle sera l’évolution et l’issue de cette nouvelle situation ?

C’est cette question prospective qui préoccupe le monde.

En adoptant l’analyse prospective (foresight), qui intègre les facteurs géopolitiques, juridiques, spirituels, culturels et technologiques (notamment l’intelligence artificielle ou IA), nous avons pu dégager trois scénarios plausibles pour la résolution (ou la perpétuation) de ce conflit, tout en réfutant le scénario de la «solution finale» (l’extermination des Palestiniens) véhiculé par la narrative sioniste.

L’analyse prospective : trois arcs narratifs pour la résolution (ou la perpétuation)

Ces scénarios ne sont pas exhaustifs, mais représentent des arcs narratifs fondamentaux basés sur les dynamiques actuelles et des ruptures potentielles.

Scénario 1 : la solution à deux États réinventée (rupture positive) : ce scénario repose sur un changement radical de la volonté politique interne des parties belligérantes, associé à une intervention externe multilatérale renouvelée et décisive, en lien avec une pression technologique et sociétale.

Le facteur clé de ce scénario ne serait pas moins qu’une rupture positive de l’ordre mondial et le développement d’une nouvelle réalité géopolitique, propice à l’application du droit international. Ce nouveau climat est envisageable : soit par la mise en place d’un cadre renforcé de négociations internationales, soutenu par un consensus puissant des États-Unis, de l’Union Européenne et des puissances arabes clés ; soit par l’émergence d’un front politique mené par les Brics et incluant tous les pays arabes.

Un ultimatum international serait alors adressé à Israël, assorti de sanctions dures et coordonnées en cas de non-respect d’une feuille de route de paix comprenant : l’arrêt de la colonisation, le démantèlement des colonies et la réparation des crimes de guerre. L’Onu et les tribunaux internationaux, forts des décisions de la CIJ, exigeraient le retrait d’Israël des territoires occupés, créant un précédent juridique contraignant. Ceci serait concomitant avec une application ferme des résolutions de l’Onu, notamment la solution à deux États le long des lignes de 1967.

Le rôle de l’IA : l’IA de médiation serait utilisée pour modéliser des compromis complexes. L’IA de sécurité deviendrait une force de pacification, offrant une surveillance frontalière non-humaine, précise et neutre. L’IA de reconstruction accélèrerait l’établissement d’une économie palestinienne viable.

Plan spirituel et culturel : un mouvement de base prônant «Jérusalem, capitale partagée des deux peuples et des trois religions» prendrait de l’ampleur. La reconnaissance de la narrative de l’autre serait facilitée par des outils numériques et éducatifs communs.

Résultat : création d’un État palestinien souverain et viable aux côtés d’Israël, avec un statut spécial pour Jérusalem-Est en tant que capitale palestinienne, et des mécanismes de sécurité et de coopération économique permanents et technologiquement assistés.

Scénario 2 – Perpétuation et annexion – Le statu- quo renforcé (la trajectoire par défaut) : ce scénario est une extrapolation des tendances actuelles où la solution à deux États est jugée morte ou irréalisable.

Le facteur clé serait un développement géopolitique propice à la poursuite et à l’intensification de l’annexion de facto et de la colonisation. Le Droit International est définitivement marginalisé par la prééminence des rapports de force. L’Autorité Palestinienne s’affaiblit.

Le rôle de l’IA : l’IA serait principalement utilisée pour le contrôle sécuritaire et l’hyper-surveillance de la population (reconnaissance faciale, analyse prédictive). Cette hyper-guerre et cyberdéfense par la partie dominante rendraient la résistance armée traditionnelle obsolète. La désinformation par IA générative intensifierait la polarisation.

Plans spirituel et culturel : ce scénario prévoit l’exacerbation et la généralisation des discours maximalistes et des idéologies religieuses exclusives. Les mouvements ultra-nationalistes et religieux, promoteurs de la légende de la «Terre promise», auront gain de cause. La distinction entre civils et combattants s’estompe, favorisant une impunité accrue.

Résultat : établissement d’un système à un seul État d’apartheid de facto où la majorité palestinienne des territoires occupés n’a pas les mêmes droits civiques et politiques que les Israélites. Ceci mènerait à une instabilité chronique.

Scénario 3 – La Confédération régionale (intégration et décentralisation) : ce scénario propose une rupture conceptuelle en sortant d’une solution strictement bilatérale pour envisager une intégration régionale plus large. Le facteur clé sera la progression des Accords d’Abraham vers une initiative plus élargie. Israël et une entité palestinienne autonome deviennent membres d’une union économique et de sécurité régionale. Les frontières perdent de leur rigidité au profit de la libre circulation économique.

Le rôle de l’IA : L’IA serait le moteur de l’interdépendance économique. Des systèmes d’optimisation de la logistique, de l’énergie et de l’eau gérés par l’IA nécessiteraient une coopération transfrontalière, rendant la rupture de la paix trop coûteuse. L’IA de l’éducation permettrait l’enseignement de l’histoire et des cultures des deux peuples à l’échelle régionale.

Plans spirituel et culturel : l’accent serait mis sur les racines spirituelles et culturelles communes de la région. Les communautés spirituelles travailleraient à des protocoles de gestion commune des lieux saints.

Résultat : création d’une structure confédérale englobant les pays du Golfe, Israël, une entité palestinienne, et potentiellement la Jordanie/Égypte. Le conflit ne disparaît pas, mais il est institutionnalisé et contenu dans un cadre de bénéfices mutuels et d’interdépendances irréversibles.

Hiérarchisation des probabilités – Signaux forts, signaux faibles et cygnes noirs : l’évaluation de la probabilité d’émergence d’un scénario dépend des tendances actuelles. Le droit international est la boussole normative (scénario 1), son effacement favorise le scénario 2. Le facteur spirituel/culturel est le ciment (scénarios 1 et 3) ou l’explosif (scénario 2). Le rôle de l’intelligence artificielle est un amplificateur.

Cette hiérarchie de probabilité se présente comme suit : 1- Probabilité élevée : scénario 2 (statu quo/ perpétuation du conflit et annexion) ; 2- Probabilité moyenne : scénario 3 (confédération régionale) ; 3- Probabilité la moindre : scénario 1 (solution à deux États réinventée).

Cette évaluation met l’accent sur le fait que le statu quo sous contrôle israélien (menant au scénario 2) est la trajectoire là moins exigeante en termes de changement politique pour la partie dominante. La solution à deux États (scénario 1) nécessite une double rupture et un engagement international sans précédent que les signaux actuels ne confirment pas. Le scénario 3 implique l’émergence de leaders de paix des deux côtés.

Le scénario 2 est le prolongement le plus direct des tendances observées. L’expansion démographique et territoriale israélienne (rendant le retour aux frontières de 1967 très improbable) et le jeu injuste des vétos au Conseil de sécurité de l’Onu sont des tendances significatives qui alimentent ce scénario.

Avec une probabilité moyenne, le scénario 3 d’une confédération régionale est une tentative de contournement économique du conflit. Il n’a qu’une probabilité moyenne car il ne fournit pas de plan politique crédible pour un État palestinien (exigé par les Saoudiens) et nécessiterait une instance de gouvernance régionale très difficile à établir.

Conclusion – Trajectoires par défaut, stratégie d’évitement et idéal requis : cette tentative de prospective montre qu’actuellement, le scénario 2 est celui qui bénéficie du plus grand nombre de signaux forts et de la plus faible résistance politique interne. C’est la trajectoire par défaut.

Le scénario 3 est la stratégie d’évitement qui pourrait stabiliser la région économiquement tout en laissant la question palestinienne dans un état de statu quo dégradé.

Le scénario 1 demeure l’idéal de la communauté internationale, mais il est celui qui requiert le plus d’énergie politique et de ruptures fondamentales. Il ne pourrait émerger qu’à la suite d’une crise régionale majeure (un «cygne noir») qui changerait radicalement les calculs de sécurité et la légitimité des dirigeants actuels de toutes les parties.

Synopsis de l’étude prospective sur les scénarios plausibles de la Palestine post génocide.

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La Tunisie et l’électronucléaire

15. Dezember 2025 um 10:49

La Tunisie dispose d’une base stratégique cohérente pour intégrer progressivement le nucléaire dans son mix énergétique. Même si le projet de centrale a été interrompu, les fondements techniques, humains et institutionnels sont encore présents. Il apparaît donc pertinent de mettre à jour les études existantes et d’envisager la relance du projet dans le cadre du prochain plan de développement national, compte tenu des impératifs internationaux et du progrès réalisé au niveau de la technologie nucléaire dont notamment l’émergence d’une nouvelle catégorie de petites centrales nucléaires modulaires (de petite et moyenne taille).

Dr.Ing. M. Maksoudi (1) – Ing. T. Halila (2) – Ing. M. F. Herelli (3)

A l’instar de la plupart des pays en voie de développement dont les ressources énergétiques ne sont pas abondantes, la Tunisie a été fortement secouée par la crise énergétique de 1973 ; ce qui l’a amenée à réfléchir plus méthodiquement à la stratégie nationale à mettre en œuvre pour répondre efficacement aux besoins énergétiques du pays tout en optimisant la production et la consommation de l’énergie à l’échelle nationale. La stratégie mise en place à l’époque pour répondre aux défis générés par cette crise repose sur l’utilisation des ressources locales en pétrole et gaz naturel ainsi que sur l’importation de ressources spécifiques pour produire de l’électricité. La situation énergétique du pays a vite connu des difficultés causées par une diminution notable de la production nationale d’hydrocarbures et par l’augmentation des prix des produits importés, ce qui a nécessité des mesures plus fermes destinées à diversifier les ressources en énergies tout en maîtrisant davantage la consommation énergétique au niveau de tous les secteurs socio-économiques.

En début de la décennie 1980, la Steg s’est vu confier la mise en place de l’infrastructure humaine et matérielle pour développer le mix énergétique national en collaboration avec les ministères de l’Energie, de l’Industrie, de l’Agriculture et du Transport.

Pour mener à bien cette tâche, la Steg a mis en place une équipe multidisciplinaire composée d’ingénieurs en électronucléaire et statistiques, d’économistes et de planificateurs. Cette équipe a reçu de la part de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) une formation soutenue, du matériel informatique, des conseils et des codes spécifiques pour la planification énergétique, y compris les énergies renouvelables et l’électronucléaire.

Ainsi les énergie renouvelables et l’électronucléaire ont rejoint pour la première fois les autres options énergétiques pour jour le rôle que pourrait leur confier les objectifs stratégiques de développement du pays, compte tenu des conditions spécifiques du pays, dont notamment le coût-bénéfice, la fiabilité technologique et l’état de préparation du secteur bénéficiaire.

Dans le domaine des énergies solaires, par exemple, des démonstrations ont été réalisées dans la période 1980 à 1985 pour tester la fiabilité de certaines technologies de pointe et pour collecter des données de terrain pour les besoins des études plus poussées.

Ainsi le village isolé de Hammam Biadha a été intégralement électrifié grâce à un système photovoltaïque, y compris le pompage photovoltaïque, alors qu’une éoliennea été installée au Cap Bon pour produire de l’électricité.

La Steg a aussi mis en place une compagnie pour produire et commercialiser des chauffe-eaux thermiques solaires.

Les données collectées de ces démonstrations pilotes ont été exploitées pour raffiner davantage les objectifs stratégiques en matière d’énergies renouvelables et pour préparer les plans directeurs de la seconde phase.

En ce qui concerne l’électronucléaire, l’exploitation de cette option dans la période 1980-2000 n’était pas envisageable en raison de la faible capacité installée du réseau Steg, la taille des centrales nucléaires commercialement disponibles à l’époque dont la plus petite taille économiquement fiable remonte déjà à 700 MW ; et surtout l’expérience peu concluante de plusieurs pays avec l’électronucléaire.

En effet, plusieurs pays dans le monde se sont dotés de la première centrale nucléaire, souvent de la taille de 700-900 MW, et ont par la suite arrêté ce programme pour diverses raisons dont notamment les problèmes de sûreté-sécurité, le faible taux d’intégration locale des composants dans la mise en œuvre du programme électronucléaire et/ou une faible croissance économique. Seule un petit nombre de pays ont pu poursuivre la mise en œuvre de leur programme électronucléaire d’une manière soutenue ; tels que la Corée du Sud et la Chine.

Ces contraintes dont souffrent aussi l’Algérie et le Maroc étaient à la base de la décision prise par les trois pays du Maghreb central pour mener à bien une étude commune en vue de définir les perspectives et les conditions propres à l’inclusion de l’option électronucléaire dans un réseau électrique interconnecté au niveau du Maghreb.

Cette étude a été menée par une équipe formée de spécialistes de la Sonatrach (Algérie), de l’One (Maroc) et de la Steg (Tunisie), et a bénéficié de l’assistance de l’AIEA au même titre que les programmes nationaux.

Dans le cas d’un réseau électrique interconnecté, l’horizon de l’électronucléaire devient économiquement envisageable vers le début du nouveau millénaire, ce qui laisse en principe assez de temps aux trois pays pour finaliser l’étude et pour passer à la phase de mise en œuvre.

Ce passage à l’acte ne s’est pas concrétisé pour plusieurs raisons propres à chaque pays. Il résulte de ce coup d’arrêt une perte significative de connaissance ainsi que de ressources humaines formées, ce qui a affecté le processus de planification énergétique en Tunisie.

Il faut noter toutefois que tout au long de cette période et en dehors du domaine de l’électronucléaire, les applications de l’énergie atomique à des fins pacifiques ont continué à se développer en Tunisie pour couvrir certains besoins dans des secteurs socio-économiques clefs, tels que l’agriculture, la santé, l’industrie, l’environnement et la gestion de la connaissance nucléaire, y compris les ressources humaines. Ces activités sont coordonnées à l’échelle nationale par le Centre national des sciences et techniques nucléaires (CNSTN) depuis sa création en 1993, alors que les activités réglementaires sont du domaine du Centre national de radio protection (CNRP).

Le contexte actuel

Le contexte mondial dans lequel évolue aujourd’hui l’électronucléaire a été façonné par les événements très graves qui ont affectés ce secteur tout au long de la période 1980-2020. En premier lieu, l’explosion de la centrale de Tchernobyl, survenue le 26 avril 1986, fut une catastrophe nucléaire majeure due à une combinaison d’erreurs humaines et de défauts techniques lors d’un test sur le réacteur n°4, provoquant deux explosions (vapeur et hydrogène) qui projetèrent le couvercle de l’enceinte de confinement et exposèrent le cœur du réacteur, libérant ainsi massivement de la matière radioactive dans la plupart des pays européens.

Cet événement a entraîné des décès immédiats, des maladies graves (notamment cancers de la thyroïde) et l’évacuation de millions de personnes, créant une zone d’exclusion et marquant l’histoire nucléaire mondiale. Il est à noter que même des pays aussi loin du lieu de l’accident que la Tunisie ont été touchés par la radioactivité libérée par la centrale, puisqu’on avait décelé quelques semaines après l’accident des doses de rayonnement du césium 137 à Makthar et à Ain Draham provenant de Tchernobyl.

La catastrophe nucléaire de Fukushima représente aussi un accident majeur causée par le tsunami qui a frappé le Japon le 11 mars 2009. Cette catastrophe combine les effets d’un accident nucléaire et d’un séisme ; et a eu des répercutions sévères sur l’industrie nucléaire mondiale, ainsi que des conséquences majeures au Japon et notamment au niveau de la population locale, du programme nucléaire japonais et surtout l’économie de la zone touchée.

Avec le temps, on s’est rendu compte que les conséquences de Fukushima sont multiples, allant d’une crise environnementale et industrielle à des crises sanitaires et sociales complexes, dont la gestion est loin d’être terminée.

Aujourd’hui, la centrale de Fukushima représente un chantier colossal avec des défis majeurs comme le retrait du combustible fondu et la gestion de l’eau radioactive. L’environnement montre des signes de rétablissement, mais des restrictions majeures demeurent encore sur la pêche.

Bien qu’ils ont  durement affecté l’industrie nucléaire mondiale, ces deux accident graves ont aussi permis aux industriels du nucléaire et aux autorités réglementaires de s’entendre sur des mesures concrètes visant à améliorer la fiabilité et à augmenter la sûreté/sécurité des centrales nucléaires, ce qui a redonné confiance en ce moyen de production de l’électricité surtout que la communauté internationale exige aujourd’hui des pays de s’acquitter de leurs obligations vis-à-vis des émissions de gaz à effet de serre.

La position de la Tunisie sur l’électronucléaire

Concrètement, l’électronucléaire a été réhabilité par plusieurs pays pour les raisons suivantes : un regain d’intérêt à l’échelle mondiale pour les énergies moins polluantes dont notamment les énergies renouvelables et l’électronucléaire afin de répondre aux obligations imposées par la communauté internationale en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre, d’une part, et par l’épuisement progressif des ressources énergétiques fossiles d’autre part.

Cette situation a amené beaucoup de pays en voie de développement dont la Tunisie, à renouveler leur intérêt pour l’exploration des options énergétiques nucléaires tout en tenant compte des conditions spécifiques de leurs priorités en matière de développement socio-économique.

Face à la volatilité des marchés internationaux en matière d’offres et demandes d’hydrocarbures, et à la nécessité de renforcer sa sécurité énergétique, le Tunisie voit dans l’électronucléaire une option stratégique pour diversifier son mix énergétique, soutenir son développement socio-économique et aussi se conformer avec ses obligations relatives aux émissions de gaz à effet de serre.

Compte tenu de cette perspective, la Tunisie s’est inscrite pleinement dans cette dynamique en développant les applications pacifiques de l’énergie nucléaire, un domaine dans lequel elle entretient depuis longtemps une coopération solide avec l’AIEA. Cette orientation traduit une vision globale alliant sécurité énergétique, progrès technologique et montée en compétence des ressources humaines nationales.

La demande énergétique tunisienne continue d’augmenter alors que les réserves de gaz et de pétrole continuent à diminuer, dans un contexte de tensions géopolitiques sévères qui rendent les approvisionnements incertains. Dans cette situation, la diversification énergétique s’impose comme une nécessité vitale. La Tunisie a d’ailleurs réaffirmé son intérêt pour l’énergie nucléaire lors de la réunion ministérielle du World Fusion Energy Group tenue à Rome en 2025, en soutenant les initiatives internationales liées à la fusion et la fission nucléaires ainsi qu’à la recherche et à l’innovation dans ce domaine.

La Tunisie participe activement aux programmes de coopération technique soutenus par l’AIEA, notamment pour le renforcement des cadres réglementaires, l’amélioration des normes de sûreté et la formation de spécialistes.

L’Agence arabe de l’énergie atomique, basée à Tunis, joue également un rôle important en promouvant une vision régionale de la sécurité énergétique et en encourageant la mise en place d’une plate-forme dédiée à la formation des cadres et à la recherche, initiative à laquelle la Tunisie contribue pleinement.

La politique nucléaire tunisienne repose sur quatre principes fondamentaux : la sûreté, la sécurité, la non-prolifération et l’usage exclusivement pacifique de la technologie nucléaire. Le pays fait d’ailleurs partie des pionniers africains ayant intégré le nucléaire civil dans le développement des secteurs clefs ; tels que la santé, l’industrie et l’agriculture.

Entre 2006 et 2010, plusieurs études menées par la Steg avec l’appui de l’AIEA avaient envisagé la construction d’une centrale électronucléaire d’une puissance de 1000 à1200 MW. Le coût estimé à l’époque variait entre 770 millions et 1,2 milliard de dollars. Cependant, le projet a été suspendu après 2011, au profit d’une stratégie nationale orientée davantage vers les énergies renouvelables. Malgré cela, les acquis institutionnels et les partenariats internationaux sont restés solides, et des centaines d’experts tunisiens ont continué à être formés dans divers domaines liés au nucléaire civil, touchant la santé, l’environnement, l’agriculture et l’industrie.

Aujourd’hui, la Tunisie dispose d’une base stratégique cohérente pour intégrer progressivement le nucléaire dans son mix énergétique. Même si le projet de centrale a été interrompu, les fondements techniques, humains et institutionnels sont encore présents. Il apparaît donc pertinent de mettre à jour les études existantes et d’envisager la relance du projet dans le cadre du prochain plan de développement national, compte tenu des impératifs internationaux et du progrès réalisé au niveau de la technologie nucléaire dont notamment l’émergence d’une nouvelle catégorie de petites centrales nucléaires modulaires (de petite et moyenne taille).

Mesures concrètes à envisager à cours et moyen termes

A présent, la Tunisie ne dispose pas d’une stratégie validée à l’échelle nationale pour produire l’électricité à partir de l’électronucléaire d’une façon pérenne. Le pays compte plutôt sur les énergies renouvelables ; tout en continuant à s’intéresser de près à l’évolution technologique des centrales nucléaires de petite et moyenne taille en vue de répondre à des besoins nationaux spécifiques ; tel le dessalement d’eau de mer.  Cette vision a été bien reflétée dans le Programme-cadre national 2025-2029quela Tunisie a récemment adopté en collaboration avec l’AIEA pour bien orienter ses efforts présents et futurs vers les utilisations pérennes des technologies nucléaires, avec comme priorités les questions de sûreté/sécurité et de développement des compétences.

Sur le plan stratégique, la Tunisie passe actuellement par une phase cruciale, où la réussite de sa transition vers les énergies renouvelables est vitale pour réduire sa vulnérabilité énergétique et surtout pour stimuler une croissance verte. Ceci ne l’a pas empêchée de porter une attention particulière au développement durable de l’énergie nucléaire, en prenant part activement à la promotion des innovations technologiques et institutionnelles dans le domaine nucléaire et en favorisant un meilleur échange d’informations et de connaissance entre toutes les parties prenantes de la technologie nucléaire dans le pays (CNSTN, Steg, Sonede, ministères concernés).

A signaler, que la Steg a confié au Centre technique des industries mécaniques et électriques (Cetime) en 2009, une étude prospective pour définir les possibilités d’intégration/participation des capacités locales pour les besoins d’une centrale électronucléaire. 

Actuellement, il y a plus de 50 concepts innovants de petits réacteurs nucléaires modulaires (PRM) qui ont été ou sont en cours de développement de par le monde dans le cadre de programmes nationaux ou internationaux. Des PMR innovants pour toutes les principales catégories de réacteurs et pour certaines combinaisons non conventionnelles. Les technologies sont diverses, et de nombreuses conceptions mettent l’accent sur la sûreté intrinsèque et les caractéristiques techniques qui influent positivement sur les coûts d’installation, les emplacements et les applications. Des percées technologiques importances ont été réalisées en collaboration avec l’AIEA, tant au niveau de la technologie que sur le plan de la sûreté et sécurité, ce qui présage un avenir prometteur à cette catégorie de réacteurs.

De nombreux réacteurs de petite taille sont conçus pour remplir de multiples fonctions, principalement la production d’électricité ainsi que de la chaleur et de la vapeur pour les procédés industriels. Parmi les applications prometteuses figure le couplage de ces réacteurs avec des usines de dessalement d’eau de mer, qui nécessitent d’importantes quantités d’électricité pour les opérations de dessalement.

Il faut noter que la majeure partie de l’électricité nucléaire actuelle est produite dans les pays industrialisés par de grandes centrales d’une puissance de 700 mégawatts et plus, ce qui dépasse de loin la capacité des pays en voie de développement. L’avenir pourrait être plus prometteur si les objectifs de mise en service de petits et moyens réacteurs (PMR) sont atteints au cours des prochaines décennies.

A cet effet, l’AIEA soutient la coopération internationale en matière de recherche et de développement sur les PMR, notamment par le biais de son Projet international sur les réacteurs nucléaires et les cycles du combustible innovants (Inpro), qui réunit 30 États.

Parmi ces applications «non électriques», le dessalement de l’eau de mer à partir du nucléaire est le domaine d’intérêt particulier pour la Tunisie en raison des problèmes actuels et futurs qui affectent aujourd’hui et affecteront plus tard les ressources hydrauliques du pays ; ainsi et pour développer ce sujet et le mettre en œuvre, nous pensons que notre pays dispose d’un savoir-faire et des compétences qui pourraient planifier à moyen et long terme l’exploitation de cette technologie pacifique, et ce en coopération entre les organismes nationaux ayant une relation avec ce sujet, les organismes internationaux en général et l’AIEA en particulier pour développer une stratégie nationale de l’eau en vue de doter le pays des moyens techniques/technologiques, juridiques, et financiers pour faire face aux problèmes futurs de la sécheresse qui aurait une influence directe sur notre économie d’une façon générale et sur notre agriculture d’une façon particulière.

1- Ancien haut fonctionnaire de l’AIEA à Vienne.

2 et 3- Conseillers du Doyen de l’Ordre des Ingénieurs Tunisiens (OIT).

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Dominique de Villepin à Sousse | Un potentiel candidat à l’Elysée

14. Dezember 2025 um 09:47

La visite de Dominique de Villepin vendredi dernier en Tunisie dans le cadre des Journées de l’entreprise organisées du 11 au 13 décembre 2025 à Sousse par l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE) constitue à plusieurs titres un événement politique important même si elle s’inscrit dans un cadre privé, car il ne s’agit pas seulement d’un ancien Premier ministre et ancien ministre des Affaires étrangères de la France, mais d’un potentiel et très probable candidat à l’Elysée en 2027.

Raouf Chatty 

Cette visite s’est déroulée dans un contexte politique, économique et social très tendue alimenté par les procès faits sous différents chefs d’accusation à des opposants et par les critiques dont fait l’objet à l’étranger la situation droits de l’homme et des libertés en Tunisie. Ce dont le régime en place se défend, en rejetant avec véhémence ce qu’il appelle des ingérences extérieures dans les affaires intérieures du pays.

La visite s’est déroulée également dans un contexte français et européen extrêmement compliqué tout comme dans un environnement maghrébin explosif marqué par la rupture totale des relations bilatérales entre l’Algérie et le Maroc, sur fond de positions diamétralement opposées sur le statut du Sahara occidental, de crise politique et diplomatique profonde entre Alger et Paris, et de froid sans précédent depuis des décennies dans les relations diplomatiques entre Tunis et Rabat.

Positions équilibrées sur les questions arabes

Homme d’État mondialement connu, ancien ministre des Affaires étrangères et ancien Premier ministre, s’inscrivant dans le sillage  de la politique de son mentor, l’ancien président Jacques Chirac, connue pour ses positions équilibrées sur les questions arabes, sa visite en Tunisie ne pouvait laisser indifférent, car elle lui a sans doute permis de prendre connaissance de la situation générale en Tunisie, tout en donnant l’occasion à ses interlocuteurs tunisiens d’entrevoir comment la France post Macron pourrait être régie.

L’homme est de plus en plus présenté aujourd’hui comme un candidat probable pour la prochaine élection présidentielle. Ayant la faveur de larges franges de Français, il ne manque pas d’atouts pour accéder au Palais de l’Elysée en 2027. 

Pour beaucoup d’observateurs politiques, en France comme ailleurs, il est le seul capable pour l’heure de redonner à la France son rang et son statut dans le monde, largement entamés ces dernières années, et de rééquilibrer ses relations avec le monde arabe. 

Des relations plus apaisées entre Paris et Alger

Les positions de De Villepin sont désormais décortiqués, en France et à l’étranger où il est vu comme le politique français qui incarne le mieux aujourd’hui l’humanisme et la sagesse de la droite gaulliste. Son discours renvoie aux positions éclairées et équilibrées du président Chirac notamment sur le Moyen-Orient. Il est d’autant plus apprécié qu’il est soucieux de l’établissement de relations politiques et économiques solides et respectueux de la souveraineté des États partenaires. 

Cette visite est également un clin d’œil en direction de l’Algérie, Dominique de Villepin s’étant toujours prononcé, publiquement pour des relations politiques apaisées entre Paris et Alger, qui mettent fin aux tensions récurrentes entre les deux pays, lesquelles ont atteint en 2026 des niveaux sans précédent, aggravées récemment par le quasi alignement de la position officielle de la France sur celle du Maroc sur la question du Sahara occidental.

* Ancien ambassadeur. 

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L’hommage de Hédi Saïdi à ces «soldats français» venus d’ailleurs

14. Dezember 2025 um 08:16

L’Alliance Française de Bizerte a accueilli, samedi 13 décembre 2025, une rencontre-débat en hommage à l’historien franco-tunisien Hédi Saïdi, organisée par un groupe d’associations locales. Cet événement, présidé par Fathi Belkahia, était consacré à l’historien, universitaire et chercheur et à son ouvrage ‘‘Soldats et immigrés de France’’ (Editions Du Cygne, Paris, 19 mars 2025), qui ont été présentés par Driss Cherif.

Lotfi Sahli

L’événement a rassemblé un public averti et connaisseur, composé d’universitaires, de chercheurs et d’intellectuels, dont les questions pertinentes ont nourri la profondeur des échanges.

Hédi Saidi a écrit ‘‘Soldats et immigrés de France : une histoire méconnue’’ à partir d’un constat simple mais troublant : une part essentielle de l’histoire de la France demeure largement ignorée. Il s’agit de celle des hommes venus d’ailleurs — immigrés, coloniaux, étrangers — qui ont combattu pour ce pays, souvent sans reconnaissance, parfois sans nom, presque toujours dans l’ombre. Cet ouvrage est né d’un besoin de mémoire, mais aussi d’un devoir de justice.

Des trajectoires humaines

Au fil de ses recherches et de ses rencontres, l’auteur a compris que derrière les grandes dates, les cérémonies et les monuments se cachent des trajectoires humaines profondément marquantes. Des hommes arrachés à leur terre, engagés dans des guerres qui n’étaient pas toujours les leurs, mais qu’ils ont menées avec courage et loyauté. Son objectif n’était pas d’écrire une histoire militaire classique, mais de raconter ces parcours à hauteur d’homme, en redonnant une voix à ceux que l’histoire officielle a trop souvent réduits au silence.

Parmi ces destins, celui d’Abdoulaye N’Diaye occupe une place particulière. Ancien tirailleur sénégalais, il avait combattu lors des deux guerres mondiales. Toute sa vie, il a porté l’uniforme français comme un symbole de dignité et d’engagement. Pourtant, la reconnaissance qu’il méritait tant s’est fait attendre. Abdoulaye est décédé la veille de la cérémonie organisée en son honneur. Un consul français devait se rendre sur place pour lui rendre hommage à l’occasion des festivités du 14 juillet. L’hommage n’a finalement jamais eu lieu. Cette reconnaissance, annoncée trop tard, n’a pas franchi le seuil de sa vie. Pour Hédi Saidi, cette histoire résume à elle seule le paradoxe qu’il entend dénoncer : l’engagement précoce, le sacrifice, puis l’oubli.

L’engagement, le sacrifice, puis l’oubli

À travers ce livre, l’auteur montre que ces histoires individuelles ne sont pas des exceptions, mais le reflet d’une réalité plus large.

Tirailleurs africains, travailleurs Maghrébins, engagés européens ou soldats venus des anciennes colonies ont tous contribué à l’effort de guerre français. Beaucoup n’ont obtenu ni la reconnaissance symbolique, ni l’égalité de traitement qu’ils espéraient. Certains ont attendu des décennies avant qu’un hommage officiel ne leur soit rendu — lorsqu’il l’a été.

Hédi Saidi a volontairement adopté une écriture accessible afin que l’ouvrage puisse toucher un large public. Il s’adresse aux citoyens, aux enseignants, aux élèves, aux familles, à tous ceux qui s’interrogent sur la mémoire, l’immigration et l’identité française. Ce n’est pas un ouvrage universitaire au sens strict, mais un livre de transmission.

‘‘Soldats et immigrés de France’’ se présente ainsi comme un appel : celui de regarder l’histoire française dans toute sa complexité, de reconnaître ceux qui l’ont servie sans toujours recevoir les honneurs, et de rappeler que la France s’est aussi construite grâce à des hommes venus d’ailleurs, dont la mémoire mérite enfin d’être pleinement reconnue.

Lors du débat, les questions, tantôt pointues sur la méthodologie historique, tantôt personnelles sur l’expérience migratoire, ont fusé, permettant à l’historien d’éclairer certains points restés sombres ou ambigus et d’animer un dialogue enrichissant pour l’auditoire.

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Wuhan Yangluo Port Services a des projets pour la Tunisie

13. Dezember 2025 um 13:36

Suite à une première visite d’exploration à Tunis, fin juillet dernier, une délégation du groupe chinois Wuhan Yangluo Port Services Co., Ltd., effectue une seconde visite cette semaine en Tunisie. La délégation a eu, ce samedi 13 décembre 2025, une réunion de coordination avec le ministre du Commerce et du Développement des exportations, Samir Abid.  

La partie chinoise a affirmé sa volonté de mettre en place des projets et des investissements de classe mondiale, notamment dans le domaine de la réhabilitation des entreprises étatiques, de la réalisation de restructurations fondamentales et stratégiques et de la contribution à leur développement, indique un communiqué du ministère, qui parle de coopération, de nouvelles opportunités d’investissement et de partenariats à moyen terme. Le but étant de contribuer au développement et à l’amélioration des méthodes de travail des entreprises concernées grâce à l’échange d’expériences et à la mise à profit des technologies et des connaissances technologiques les plus récentes, ajoute-t-on, sans citer les noms des entreprises publiques qui intéressent les hôtes chinois.  

Le ministre du Commerce a souligné la nécessité de construire un partenariat solide qui profite aux deux parties et assure l’accès aux marchés africains, étant donné que la Tunisie est une porte d’entrée vers l’Afrique.

Wuhan Yangluo Port Services Co., Ltd., est une entreprise gouvernementale chinoise spécialisée dans le commerce international, la logistique, la finance et l’investissement. Lors de sa première visite en Tunisie, il y a cinq mois, elle a manifesté son intérêt pour certaines entreprises publiques tunisiennes auxquelles elle aimerait apporter le soutien nécessaire sur les plans logistique et financier.

La délégation est aussi une mission d’achat de produits tunisiens, notamment d’huile d’olive et de dattes, en tant que produits nationaux de haute qualité et conformes aux normes internationales.

Ont pris part à la réunion les directeurs généraux des agences et entreprises gouvernementales concernées, telles que le Centre de promotion des exportations (Cepex), l’Office du commerce de Tunisie (OCT), la Société tunisienne des marchés de gros (Sotumag) et la Société Ellouhoum.

I. B.

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Bientôt, la campagne d’exportation des oranges maltaises tunisiennes

13. Dezember 2025 um 11:13

La campagne d’exportation des oranges maltaises tunisiennes vers la France débutera le mercredi 31 décembre 2025, avec des volumes d’exportation estimés à environ 15 000 tonnes. Cette date avait été fixée après consultation des professionnels du secteur, notamment des exportateurs, des importateurs et les organisations concernées, a indiqué Tarek Tira, directeur adjoint du développement des exportations au sein du Groupe interprofessionnel des fruits (Gifruits).

Il a ajouté, dans une déclaration à l’agence Tap, que le choix de cette date, par rapport à la mi-janvier des années précédentes, s’appuyait sur des analyses effectuées au laboratoire du complexe concernant l’indice de maturation des oranges maltaises et les normes internationales de maturation des oranges établies par la Commission du Codex Alimentarius.

Huit stations de conditionnement et d’emballage certifiées devraient contribuer aux opérations d’exportation des oranges maltaises, a encore précisé Tira, ajoutant que les exportations tunisiennes d’oranges pour la campagne 2024/2025 ont atteint environ 14 000 tonnes, réparties comme suit : 8 500 tonnes vers le marché libyen et 5 500 tonnes vers le marché français.

Le marché libyen représente environ 52,6 % des exportations totales, suivi du marché français (45,6 %) et des marchés du Golfe (1,4 %).

Afin d’assurer le succès de la saison d’exportation et d’éviter les problèmes, Tira a souligné que Gifruits, en coordination avec les parties prenantes de la filière, tient à respecter les normes d’utilisation des pesticides dans les vergers d’agrumes à travers (en organisant) des journées de sensibilisation pour éduquer les producteurs et encourager davantage l’adoption de la lutte biologique contre les mouches des fruits à l’aide de pièges (technique de piégeage intensif) comme solutions alternatives au traitement chimique.

Il a souligné dans le même contexte que le traitement aérien pour lutter contre la mouche méditerranéenne des fruits avait été réalisé à l’aide d’un pesticide biologique, ajoutant que le complexe prélèverait 20 échantillons provenant de diverses exploitations d’agrumes et effectuerait des analyses en laboratoire des résidus de pesticides à partir du 15 décembre 2025.

Selon le responsable, un accord a également été conclu avec la profession et diverses parties prenantes afin de sensibiliser davantage les exportateurs à l’importance de faire analyser les résidus de pesticides dans les fruits dans des laboratoires agréés, en plus de conclure des accords avec 3 laboratoires d’analyse pour réaliser le plus grand nombre possible d’analyses en laboratoire.

Par ailleurs, Tira a indiqué que le complexe, sous la supervision du ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, a mis en place un programme de promotion des oranges tunisiennes par le biais de la participation à plusieurs événements spécialisés et salons professionnels à l’étranger.
La participation de la Tunisie au Salon international de l’agriculture de Paris, au sein du pavillon tunisien, comprend l’organisation de journées promotionnelles pour les oranges maltaises, incluant des dégustations et la distribution d’oranges dans un certain nombre de grands espaces et de magasins en France, en coordination avec les exportateurs et les importateurs.

Selon le responsable, la campagne promotionnelle des oranges maltaises se poursuivra via les médias sociaux et les technologies de communication modernes, avec la création de supports publicitaires et d’un nouveau logo pour promouvoir les oranges maltaises tunisiennes lors d’événements promotionnels. Dans le cadre des préparatifs de la campagne de promotion des agrumes pour cette saison, qui vise à attirer de nouvelles catégories de consommateurs, notamment ceux âgés de 20 à 40 ans, et à élargir la base de consommateurs, une campagne publicitaire pour les oranges maltaises sera menée sur les marchés national et européen.

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