Il n’y aurait qu’une différence de degré – et non, de nature – entre les Etats «autoritaristes» où règne une pensée unique, et les Etats «démocratiques» qui, faute de pouvoir supprimer la liberté de pensée, ont imposé à leurs ressortissants une vision globale du monde conforme à leurs intérêts.
Jamila Ben Mustapha *
Il existe deux types de solidarité humaine : celle justifiée par l’appartenance à la même aire culturelle que soi, et celle – plus rationnelle – basée sur la ferme croyance en des droits humains universels.
Comparons, à ce propos, Kamel Daoud et Boualem Sansal (affichant une position peu patriote et pro-occidentale ), d’une part, et, dans une liste non exclusive, Shlomo Sand, Ilan Pappé et Avi Schlaim, de l’autre, intellectuels antisionistes qui se dressent tous trois contre l’écrasante opinion majoritaire de leur pays pour dénoncer ses crimes israéliens actuels, avec la réserve à manifester toutefois à la sanction subie par Boualem Sansal, injustement emprisonné en Algérie non pour ses actes, mais pour ses idées, même si on ne les partage pas.
C’est que la coexistence à la même époque, des deux guerres en Ukraine et au Moyen-Orient (Gaza, Liban, Syrie…) crée des conditions «expérimentales» venant souligner le caractère trompeur, biaisé de tout fondement international à accorder au droit, ce qui est valable pour l’Ukraine quant à l’empathie que suscite son combat contre l’occupant russe, étant loin de l’être pour Gaza, enclave qui vient d’être soumise à une destruction systématique : «Vérité en-deçà des Pyrénées, erreur au-delà», dixit Pascal au XVIIe siècle.
Et il est bien connu que si Israël appartient, sur le plan géographique, à l’Orient, ce pays fait nettement partie, sur le plan politique, de l’Occident. Inversement, au niveau des individus et non plus des nations, certains Arabes et Musulmans de formation moderne et dont la plupart des pays se trouvent en Orient, sont acquis de façon inconditionnelle à la vision du monde occidentale qu’ils considèrent comme étant la norme.
Il est bien connu aussi, au niveau de la politique internationale, que la nécessité de respecter la liberté d’expression dans les pays occidentaux, a pour résultat d’essayer, de la part des Etats, de la limiter par une forte manipulation médiatique.
Seule, actuellement et au niveau public, une minorité d’intellectuels comme, par exemple, Noam Chomsky, Alain Gresh, Emmanuel Todd et Norman Finkelstein, échappe à son emprise. Cela nous conduit quelquefois à penser qu’il n’y aurait qu’une différence de degré – et non, de nature – entre les Etats «autoritaristes» où règne clairement et officiellement une pensée unique, et les Etats «démocratiques» qui, faute de pouvoir supprimer la liberté de pensée, ont inventé des façons efficaces de la réduire et d’imposer à leurs ressortissants une vision globale du monde conforme à leurs intérêts.
Mais si l’intellectuel d’un pays développé peut néanmoins, critiquer sa culture sans trop de risques, ce n’est pas le cas de son collègue issu d’un pays autocratique du Sud, et ceci pour deux raisons : l’une évidente à cause de la menace de répression qui le guette, et l’autre pour la fragilité de ces pays, leur identité blessée et leur susceptibilité concernant tout ce qui touche à leur unité et à leur identité durement reconquises après la colonisation, d’autant plus que pour s’affirmer après l’indépendance, ils doivent affronter la rude concurrence et la domination plus discrète mais toujours existante, des pays anciennement colonisateurs.
Quant à leurs intellectuels, leurs nécessaires critiques doivent être portées par l’amour sous-jacent, et non l’infériorisation tacite de leur propre pays.
Dans des déclarations au radiodiffuseur public Kan et à la chaîne privée DemocratTV, dimanche 1er décembre 2024,Moshe Yaalon, ancien chef de l’armée et ministre de la Défense israélien, a accusé Israël d’avoir commis des crimes de guerre et une épuration ethnique dans la bande de Gaza. Silence complice des médias occidentaux qui n’ont pas cru devoir rapporter ces propos.
Khémaïs Gharbi *
Au cœur des tragédies humaines, le silence des grandes plumes du journalisme occidental résonne comme une trahison. Là où l’on attendait des dénonciations courageuses, on n’a trouvé qu’une omerta glaçante. L’épuration ethnique et le déracinement d’un peuple millénaire, les Palestiniens, se déroulent sous nos yeux, sur leur territoire ancestral, dans un vacarme d’explosions et un silence complice.
Les grands penseurs et donneurs de leçons de morale, si prompts à s’indigner lorsqu’il s’agit de condamner ailleurs, semblent soudain frappés de cécité et de mutisme lorsqu’il s’agit de Gaza. Pourtant, l’évidence est là. Aujourd’hui, Moshé Yaalon, ancien ministre israélien de la Défense – homme de guerre, faucon de la droite extrême et artisan des politiques coloniales – s’élève contre cette horreur. Il parle, sans détour, de «nettoyage ethnique».
Lors d’une interview, Yaalon a déclaré : «La route sur laquelle on est entraînés, c’est la conquête, l’annexion et le nettoyage ethnique.» Évoquant la destruction systématique des villes de Gaza, il a décrit l’inhabitable, le chaos, l’effacement méthodique d’un peuple. Peut-on accuser cet homme, ancien membre du Likoud, de gauchisme? Faut-il l’étiqueter antisémite ou apologiste du terrorisme ?
Son témoignage est un miroir impitoyable pour ceux qui, dans les rédactions occidentales, ont choisi de détourner le regard. Il met en lumière leur hypocrisie et leur alignement idéologique avec les courants les plus extrêmes. Pire encore, il leur offre une ultime chance de dénoncer les crimes qu’ils ont jusqu’alors refusé de condamner.
Alors, que faudra-t-il de plus pour réveiller leur conscience? La providence leur tend une dernière perche, mais ils persisteront – j’en suis intimement convaincu – à trahir la mission première du journalisme : celle de porter la vérité, même lorsque celle-ci dérange.
J’accuse ces éditorialistes et journalistes en vue d’avoir volontairement ignoré les souffrances d’un peuple réduit à l’exil et à l extermination. J’accuse ces moralistes à géométrie variable d’avoir travesti l’histoire pour épargner un régime colonialiste. J’accuse ce silence de n’être rien d’autre qu’un crime par omission, une complicité par lâcheté.
Le temps viendra où les faits ne pourront plus être dissimulés. Ce jour-là, les mots qu’ils n’ont pas écrits les poursuivront comme des fantômes. Mais il sera trop tard pour se racheter.
Lorsqu’il a été publié la première fois sur les réseaux sociaux, ce court texte accompagnait une photo d’un enfant palestinien dans les décombres de Gaza, que l’administration de Facbook a enlevée. Comme pour conforter l’analyse de l’auteur.
Lahouari Addi *
Quand on regarde ces images d’enfants palestiniens désespérés, on se demande où est l’humanité? Où est le droit international? «Oui mais le Hamas utilise cet enfant et ses parents comme bouclier», disent Joe Biden et Emmanuel Macron. Est-ce une raison pour tirer sur le bouclier?
Ce qui se passe à Gaza conforte l’opinion publique que le droit international est à géométrie variable et qu’il n’a été conçu que pour renforcer l’hégémonie de l’Occident sur le reste du monde.
L’humanité, meurtrie hier par le génocide nazi, est aujourd’hui meurtrie à Gaza. Si l’Allemagne, accablée par la culpabilité, si l’Angleterre, porte-avions américain amarré à l’Europe, ne peuvent pas s’indigner, où est la France, terre où a été proclamée en 1789 la Déclaration universelle des droits de l’homme?
Les médias en France se sont mobilisés pour la libération de Boualem Sansal** et se taisent sur ce qui se passe à Gaza. Sansal serait du bon côté de l’histoire en défendant des valeurs menacées par les musulmans, tandis que Gaza est du mauvais côté de l’histoire parce que la majorité de ses habitants sont musulmans susceptibles d’être des terroristes.
La France, une certaine France, a trouvé des indigènes néo-coloniaux pour la déculpabiliser et fermer les yeux sur ce qui se passe en Palestine. «Ce qui se passe en Ukraine est inacceptable et nous refusons que le droit international soit piétiné aussi brutalement» dit Emmanuel Macron. Est-ce à dire que ce qui se passe à Gaza est acceptable et que le droit international est respecté?
Quand la politique est menée avec un tel cynisme, c’est la violence qui est cultivée. Des juristes célèbres ont voulu moraliser la politique par le droit, mais ce qui se passe sur la scène internationale, c’est le droit qui est politisé, puisque ce qui est immoral en Ukraine serait moral en Palestine. C’est vrai que l’Ukraine est en Europe et la Palestine ailleurs.
Chez les dirigeants occidentaux, le droit international n’est pas universel et s’applique cas par cas.
* Professeur à l’institut des études politiques de l’université de Lyon.
** Ecrivain algérien pro-occidental aux positions ouvertement antiarabes et antimusulmanes dont la récente arrestation en Algérie a suscité une levée de bouclier en Occident et notamment en France (Ndlr).
Le privilège de la franchise des droits de douane (ou régime FCR) pour l’importation d’une voiture, initialement prévu à l’occasion du retour définitif des Tunisiens expatriés, gagnerait à être étendu, par souci de justice et d’équité, à tous les contribuables tunisiens qui sont payés en dinars et dont la majorité est lourdement imposée à la source.
Elyes Kasri *
Il est heureux que les auteurs de l’idée saugrenue et inopportune de taxer les compétences tunisiennes expatriées à l’étranger se soient ravisés tant cette idée empeste le populisme de mauvais aloi.
Le projet de loi en ce sens initialement présenté par certains députés est de surcroit contradictoire car il tend à culpabiliser et pénaliser les compétences expatriées sous prétexte qu’elles ne contribuent pas au développement national, alors qu’en même temps des avantages extrêmement généreux et que certains considèrent même excessifs leur sont octroyés dans le cadre de la franchise des droits de douane (ou régime FCR) initialement prévue à l’occasion du retour définitif en Tunisie et qui vient d’être concédée tous les dix ans avec tous les relents d’abus et de petits trafics associés à ce régime.
L’exil est un arrachement et non un privilège
Ce privilège gagnerait d’ailleurs à être étendu, par souci de justice et d’équité, à tous les contribuables tunisiens qui sont payés en dinars et dont la majorité est lourdement imposée à la source.
La commission de l’éducation à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) serait mieux inspirée de réfléchir à la création de meilleures conditions de travail et de sédentarisation des compétences tunisiennes car l’exil est un arrachement et un déchirement dont sont victimes ces compétences et leurs parents qui paient un lourd tribut pour les sacrifices encourus pour l’éducation et le succès universitaire de leurs enfants.
A cet effet, alors que le pays souffre du ralentissement démographique pour de nombreuses raisons notamment économiques, les parents qui réussissent à faire de leurs enfants des médecins et des ingénieurs devraient être encouragées et dûment récompensés notamment par un abattement fiscal sur l’IRPP pour chaque fille ou fils ayant terminé avec succès des études en médecine ou en ingénierie.
Un vivier vital pour la relance de l’économie
Seule une politique de motivation et d’émulation est en mesure de sédentariser les compétences et d’encourager les parents à mieux s’investir pour reproduire ce vivier de compétences si vital pour toute relance de l’économie nationale car la principale richesse de la Tunisie a toujours été la qualité et l’ingéniosité de ses femmes et hommes.
Au lieu de culpabiliser et de menacer de sanctions financières les compétences expatriées, la Tunisie serait mieux inspirée de leur offrir des conditions de travail honorables psychologiquement et matériellement.
Elyes Kasri *
S’il est vrai que l’accélération de la vague migratoire des compétences tunisiennes prend l’apparence d’un pillage post colonial qui risque de porter un sérieux préjudice au développement et à toute relance économique, l’idée de taxer à posteriori ces compétences, outre son attrait populiste, comporte des aspects allant du saugrenu à l’imparaticable.
Outre l’impact psychologique très probablement négatif chez ces compétences expatriées et l’incitation supplémentaire à l’obtention de la nationalité du pays hôte et la renonciation à la nationalité tunisienne, il serait désolant de devoir procéder à l’arrestation de ces compétences à leur arrivée en Tunisie pour défaut de paiement de leur supposée dette envers leur pays d’origine.
Cette mesure saugrenue, si elle devait être adoptée, ne ferait que priver définitivement la Tunisie de ces compétences expatriées après les avoir forcées à l’exil à force de tracasseries bureaucratiques et de politiques qui ont nivelé le marché de l’emploi par le bas.
De nombreux pays qui ont souffert de l’exode de leurs talents et compétences ont adopté des formules plus intelligentes et attractives notamment l’Inde qui a fait du retour de ses compétences ou «Brain Gain» un axe de sa politique nationale.
Au lieu de culpabiliser et de menacer de sanctions financières les compétences expatriées, la Tunisie serait mieux inspirée de leur offrir des conditions de travail honorables psychologiquement et matériellement.
Si le secteur public a atteint un niveau de saturation et n’est pas en mesure de recruter ces compétences dont il a pourtant grandement besoin notamment dans les domaines de la médecine et de l’ingénierie, la Tunisie pourrait en revanche créer des zones franches médicales et des parcs technologiques off shore pour non seulement créer des emplois rémunérateurs à ses compétences mais également pour lancer des locomotives d’innovation, de gestion et de positionnement de notre pays comme un site d’investissement moderne, loin des tracasseries et rigidités bureaucratiques et syndicales.
La Tunisie a de nombreux atouts pour devenir le centre de soins médicaux et d’innovation technologique de l’Europe à condition d’une vision à long terme et d’une bonne dose d’audace et d’innovation loin de tout populisme politique et fiscal.
Suite à une rumeur, beaucoup de cardiologues ne voudraient plus se déplacer pour les urgences, et seraient alors soit injoignables, soit en déplacement pour cause de… congrès. Ils préféreraient encore risquer la non assistance à personne en danger que subir le rouleau compresseur fiscal, ce qui est un non sens.
Dr Mounir Hanablia *
Cela fait des lustres que je n’ai plus assisté à un congrès de cardiologie. On en dira ce qu’en voudra mais cela ne m’empêche ni de pratiquer l’écho doppler cardiaque d’une manière intelligible ni à l’occasion de réaliser un acte de cathétérisme cardiaque, ni enfin de traiter les hypertendus.
A franchement parler, outre leurs effets soporifiques très gênants quand on est ronfleur, qui s’abattent parfois sans crier gare, ces congrès me paraissent plus consacrer le pouvoir que le savoir avec leurs tribunes surélevées et leurs écrans géants où on finit toujours par retrouver les mêmes vedettes de la profession, celles qui sont censées posséder la connaissance infuse mais qui ne font que répéter ce qui se dit et se fait ailleurs. Cela ne m’empêche pas de recevoir à l’occasion chez moi avec beaucoup de plaisir l’un des rares collègues avec qui j’entretiens des relations d’amitié.
A l’occasion du dernier congrès j’ai donc eu droit à sa visite et nous avons abordé des sujets aussi importants que cet autre collègue qui a subi un redressement fiscal consistant pour avoir offert à son épouse une BMW, en ces temps de vaches maigres. Le Fisc l’a estimé redevable à l’Etat du prix de trois BM.
A première vue, pour qui en a la possibilité, cela inspire l’effroi. Mais si on compare à ce qui se passe ailleurs, il ne faut pas en être surpris outre mesure.
Absent pour cause de… congrès
Au Vietnam par exemple, il faut payer à l’Etat le prix de la voiture qu’on achète, et on a intérêt à construire sa maison dans le sens de la profondeur; en effet plus la façade est large, plus les taxes sont lourdes. Il est vrai qu’au Vietnam dans le delta du Mékong on fait quatre récoltes de riz par an.
En Chine il faut d’abord se soumettre à un tirage au sort pour faire partie des 25 millions heureux élus annuels, puis payer à l’État le prix de deux voitures, avant de payer la sienne. Chez nous il suffit de contracter un crédit auprès d’une banque ou de solliciter un leasing, et le tour est (en général) joué.
Apparemment ce cardiologue a fait une erreur de jugement ; il a cru que la voiture étant inscrite au nom de son épouse, il ne serait pas inquiété. Mais cette ambiance professionnelle désormais nourrie d’inquiétudes semble propice aux légendes urbaines les plus fantasmagoriques.
Ainsi les consultations des cardiologues appelés en urgence dans les cliniques de certaines régions seraient désormais calculées par le fisc sur la base des honoraires d’une coronarographie et d’une angioplastie coronaire. Ceci voudrait dire que, quand on est cardiologue, il ne faille pas se déplacer en urgence pour les pics hypertensifs ou le mal au cœur, mais pour les infarctus du myocarde confirmés avec élévation du segment ST dans le territoire antérieur, seuls justiciables en cas d’angioplastie du remboursement par la Cnam en l’absence d’accord préalable, pour peu que le patient dispose d’un chèque de garantie, ce qui est loin d’être le cas pour tout le monde.
Non assistance à personne en danger
Suite à cette rumeur, beaucoup de cardiologues ne voudraient plus se déplacer pour les urgences, et seraient alors soit injoignables, soit en déplacement pour cause de… congrès. Ils préféreraient encore risquer la non assistance à personne en danger que subir le rouleau compresseur fiscal, ce qui est un non sens.
Évidemment l’hypothèse que ces racontars soient propagés par des rivaux plus mal lotis afin de récupérer la manne considérables des cliniques ne saurait être écartée. Mais voilà qui pourrait dissuader certains d’émigrer sous des cieux réputés (faussement) être plus cléments.
Quoiqu’il en soit, tout ceci démontre bien les préoccupations essentielles des cardiologues par les temps qui courent. Certes, d’aucuns ont eu tout récemment des préoccupations bien plus nobles.
Ainsi mon ami a évoqué ce collègue réputé proche d’Angelina J, rencontré à l’occasion du congrès, et qui avait présenté sa candidature à la présidence de la république. Mon ami s’est borné à lui dire: «Tiens, voilà l’homme qui voulait être président !» On ne prétendra pas pour les connaisseurs d’Homère qu’il lui a dit cela sur le ton d’Achille qui prédisait à Hector en refusant de promettre de rendre son corps à sa famille, que son âme errerait aveugle dans les enfers et que les morts en le voyant diraient ; «Voilà le fou qui avait pris Patrocle pour Achille!» Certes, la politique peut être pour le cardiologue son talon d’Achille, même quand il se prétend le meilleur poseur de stents du monde.
La déclaration du chef de le minorité arabe ayant appelé à voter Trump en dit long en raison de l’identité des secrétaires d’Etats tous anti-arabes
Il serait erroné de croire en une différence fondamentale entre les républicains et les démocrates dans l’action internationale des Etats-Unis
Fidèles à leurs habitudes, les Perses, après avoir utilisé des Arabes chiites ou pas, vont les proposer sur un plateau pour s’ouvrir une voie de négociation avec les Américains
L’Iran a été derrière l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023, juste pour améliorer les conditions de ses négociations avec l’Occident, sans plus
Moscou lâchera l’Afrique, qui n’a jamais été une terre de conquête pour les Russes, ni pour les Soviétiques avant eux d’ailleurs
La Chine sera accaparée par la compétition stratégique avec les Etats-Unis et ne se lancera pas dans une aventure africaine, arabe ou même limitée à quelques investissements
TUNIS – UNIVERSNEWS – A divers degrés beaucoup, béatement et naïvement, ont espéré l’élection de Kamala Harris pour sauver les meubles et feindre de croire que ce que Madame Harris aurait fait serait fondamentalement différent de ce que Monsieur Trump va faire.
Ces derniers jours, il y a comme un goût amer chez les représentants de la minorité des Arabo-américains à l’encontre du président réélu Trump. La déclaration du chef de le minorité arabe ayant appelé à voter en faveur de Trump en dit long notamment en raison de l’identité des secrétaires d’Etats tous violemment anti-arabes et ouvertement pour une éradication des Palestiniens. Comme tous les Arabes, ceux qui sont citoyens américains, comme ceux du reste du monde arabe croient naïvement, à chaque élection américaine en une réorientation de la politique américaine au Moyen-Orient. Mais la seule différence entre les républicains et les démocrates ne se situe que dans le style. Car globalement, les administrations américaines, ont avec le monde arabe, un rapport régulier et perpétuel, semblable à celui qu’entretenaient les autorités des Etats ségrégationnistes du sud des Etats-Unis avec leurs minorités : condescendant, désobligeant, méprisant et globalement irrespectueux. Mais en plus le monde arabe se distingue par une forte appétence américaine pour l’usage de la force et des ingérences destructrices.
De fait, plus généralement, il serait erroné de croire en une différence fondamentale entre les républicains et les démocrates dans l’action internationale des Etats-Unis. De George Buch père à ce jour, les Etats-Unis ont agi de façon continue, selon les même fondamentaux, les mêmes objectifs avec la volonté d’aboutir toujours à un objectif central : maintenir le leadership des Etats-Unis. Seuls les chemins pour y parvenir ont parfois changé. Le « USA first » ne date pas de Trump.
Ce qui est intéressant depuis le 7 novembre est le rapide et profond réalignement de tous derrière la stratégie américaine telle qu’elle a été énoncée par Trump, qui ne remet pas en question l’axe principal : « USA first », mais qui a pour objectif de débarrasser les Etats-Unis de quelques « cailloux dans la chaussure » pour ne se consacrer qu’à son objectif majeur : maintenir la distance avec la Chine, seule menace stratégique pour les Etats-Unis. Car tout le reste est marginal, rapporté à l’objectif unique : se maintenir comme la première puissance. Parmi les cailloux, le Moyen-Orient.
Première conséquence, c’est la course de tous pour prendre le train de Trump avant qu’il ne quitte le quai. Avant même que « Trump II » ne soit investi, que la liste de ses secrétaires d’Etat ne soit approuvée par le Sénat, tout ce que la planète comptait hier de « courageux » anti-trumpistes et de Kamala-idolâtres, ont été saisis d’une soudaine envie de tourner la veste et d’annoncer leur disponibilité à accepter les injonctions que Trump répétait comme des mantras dans ses meetings électoraux.
Le premier des pays annonçant sa nouvelle « foi » trumpiste n’est autre que la République islamique, chiite, d’Iran. Fidèles à leurs habitudes, les Perses, après avoir utilisé des Arabes chiites ou pas, vont les proposer sur un plateau pour s’ouvrir une voie de négociation avec les Américains. Nous l’avions souligné dès octobre 2023, l’Iran a été derrière l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023, juste pour améliorer les conditions de ses négociations avec l’Occident, sans plus. L’Iran comme tous les pays arabes, a utilisé les palestiniens, les libanais, bientôt il lâchera Bachar El Assad. Avant même l’élection de Trump les iraniens et un conseiller de Trump s’étaient rencontrés à Washington pour envisager la suite. Libanais, palestiniens, houthis et ceux qui se sont convertis à l’illusion de la puissance iranienne peuvent apprécier à sa juste valeur la diplomatie souterraine de l’Iran.
Après les chiites, c’est un concert de bonnes intentions arabes sunnites, saoudiennes, émiraties et, bien sûr, qataris. Il est vrai que le Monde arabe à a été ravagé par les démocrates américains de Barak Obama à Biden, les interventionnistes américains laissent des souvenirs exécrables, sauf chez les riches arabes, qui comme le Qatar ont financé la destruction de la Tunisie et de la Libye ou la Syrie. Pro-islamistes, défavorables au maintien des Etats post-coloniaux dans le Monde arabe et au Maghreb, les démocrates américains laissent un champ de ruines comparable à la démolition de l’Irak par Bush fils. Une remarquable régularité, peut importe la couleur politique, démocrate ou républicaine.
Mais quelques nuances sont à souligner, les pays arabes riches et le Maroc se pensent gagnants avec le retour de Trump. Eux aussi ont déjà mis un pied sur le marchepied et un autre dans la porte pourvu que le nouveau maitre soit content, peu importe les chèques qui devaient être signés. Fidèle à son habitude, le Qatar sentant le vent tourner, a quitté la table des négociations israélo-palestiniennes. Il vaut mieux attendre les nouveaux ordres de Washington.
Soulagé par l’arrivée de Trump, la Russie s’est d’ores et déjà engagée à lâcher la pression dans la périphérie si on lui laisse le bénéfice des territoires conquis en Ukraine, malgré l’annonce de Biden concernant l’usage des missiles américains contre le territoire russe. Déjà en Syrie, les Russes ont interdit le transfert d’armes via le territoire sous contrôle de Bachar Al Assad en faveur du Hezbollah. C’est le fruit d’une médiation israélienne entre Moscou et l’équipe de Trump. Bien sûr, la question palestinienne est le dernier souci de Poutine. Les pro-Poutine dans le monde arabe et au Maghreb ont peut-être commencé à saisir le « deal » et la profondeur de leur bêtise à emboiter le pas au Maitre du Kremlin.
Pressé par la campagne électorale, le chancelier allemand s’est fendu d’un coup de fil à Poutine. Une hypothétique réélection vaut bien un appel. L’allemand a cru placer un pion en direction de Moscou. C’en est fini de la fausse unanimité européenne. L’Europe acceptera les annexions des territoires ukrainiens conquis par Poutine, c’est inéluctable. La situation de l’Ukraine ressemble ces jours-ci à celle de la Tchécoslovaquie d’avant deuxième guerre mondiale.
Pendant ce temps une frayeur a traversé le camp de ceux qui croyaient bêtement que les BRICS allaient être l’alliance majeure en capacité de faire trébucher les Américains, qu’ils seraient sauvés par Moscou, Pékin, Téhéran.
Moscou lâchera l’Afrique, qui n’a jamais été une terre de conquête pour les Russes, ni pour les Soviétiques avant eux d’ailleurs. L’ex-milice Wagner va s’évaporer et les armées africaines seront condamnées soit à s’effondrer soit à espérer le retour des armées européennes qui ont globalement tourné la page de l’Afrique. La Chine sera accaparée par la compétition stratégique avec les Etats-Unis et ne se lancera pas dans une aventure africaine, arabe ou même limitée à quelques investissements. Les pays de l’Afrique subsaharienne qui ont très vite fêté la fin de la présence française et européenne vont se trouver en panne de tout.
L’essentiel de ce que la Chine fera en Afrique du Nord a été posé au Maroc, sans certitudes de viabilité car, les investissements chinois au Royaume Chérifien dépendent des futurs accords commerciaux avec l’Union Européenne, ceux de la Chine et ceux du Maroc. Le Maroc permettait à la Chine de contourner les quotas européens.
Il est vraisemblable que le volume des aides américaines à travers le monde va diminuer, y compris les aides militaires. Corrélativement l’Union Européenne, traversée par une crise de la dette et par une crise industrielle structurelle, va se pencher sur ses propres problèmes, doit composer avec une Amérique conquérante et à l’appétit vorace. Déjà Van De Leyen a préféré devancer l’appel en rappelant à Trump que l’Union Européenne achète le gaz de schiste américain. Sans doute a-t-elle oublié les armes aussi. L’UE, les pays européens seront accaparés au moins pendant deux ans par les nouvelles relations avec les Etats-Unis. Le reste du monde sera bien loin et sans importance stratégique.
Le retour de Trump à la Maison Blanche, ne sera pas plus dangereux pour les pays de la périphérie qu’une l’élection de Harris et donc le maintien des démocrates. Les relations avec cette périphérie, notamment avec le monde arabe, sont marqués par une dramatique régularité peu importe l’administration du moment : vassalisation, usage de la force, guerres, ingérences, destructions et effondrements. Personne ne peut espérer une amélioration.
Le mérite de Trump s’il devait en avoir un, il est plus direct et moins hypocrite que les démocrates. Cela pourrait même être considéré comme une vertu au regard de ce qui a été fait avec le sourire démocrate, dans certains pays, par l’administration Obama et poursuivi par celle de Biden.