Dix-sept artistes internationaux dont quatre originaires de la Tunisie participent à l’exposition polyphonique et pluridisciplinaire “L’esprit du geste” qui se tient depuis octobre 2024 et se poursuivra jusqu’au 30 mars 2025 à l’Institut des Cultures d’Islam (ICI) à Paris.
L’exposition autour d’une exploration du geste, des traditions ancestrales et de l’hybridation, présente une collection d’œuvres qui réinterprètent gestes, motifs et matières transmis au fil des siècles et des migrations, tout en mettant en lumière les affinités entre les cultures perses, indiennes, ottomanes, arabes, berbères et d’Asie centrale.
Entrecroisant les registres de l’art, de l’artisanat et du domestique, les artistes mettent en lumière l’inventivité du travail manuel dans une interprétation vivante et exaltante, donnant lieu à des hybridations plastiques et esthétiques. A travers la peinture, l’installation, la sculpture, la danse, la tapisserie et l’architecture ils placent au cœur de leurs processus créatifs l’humain, le temps et la nature dans une rencontre sensible et directe avec la matière et la technique.
Langages artistiques au cœur de l’humain, le temps et la nature avec les Ouissi, Mohamed Amine Hamouda et Farah Khelil.
Dans parcours d’artistes, Selma et Sofiane Ouissi, chorégraphes et danseurs tunisiens, présentent leur projet autour de la poupée de Sejnane “Laaroussa”, cette petite figurine portée par le savoir-faire des potières de Sejnane, inscrit par l’Unesco sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité.
Leur travail est exposé dans un parcours ponctué de projections vidéo, offrant une immersion sensible dans leur démarche à travers plusieurs projets emblématiques tels que “Laaroussa”, “Le Moindre geste” ou encore “Bird”, leur dernière performance, présentée en septembre 2024 lors de Dream City à La Commune (Aubervilliers) dans le cadre du Festival d’Automne.
Figure majeure de la danse contemporaine dans le monde arabe, le duo artistique a fondé en 2007 “L’Art Rue”, une association dédiée à la production et à la diffusion d’écritures artistiques contemporaines dans l’espace public en Tunisie. Leur projet, résolument pluridisciplinaire, s’articule autour de la biennale d’art contemporain Dream City..
Avec une tapisserie monumentale, l’artiste Mohamed Amine Hamouda sublime dans “le jardin oasien” les matières végétales insolites, mal aimées ou en voie de disparition. On y retrouve notamment laine de mouton, fibres de palmier, halfa, tiges de corète, jonc de mer, arjun…
A travers son œuvre, il rend hommage au patrimoine naturel et culturel de l’oasis de Gabès, en Tunisie, où il vit et travaille : il met en lumière la richesse d’une biodiversité oasienne en danger, tout en actualisant des techniques ancestrales de tissage. Dans son travail, Mohamed Amine Hamouda explore les ressources botaniques, maritimes et naturelles de Gabès pour créer des œuvres qui documentent et interprètent les menaces pesant sur la biodiversité et l’écosystème de la région, dues à l’intervention industrielle. Son travail vise à susciter des réflexions et à proposer des alternatives aux problématiques sociales, environnementales et économiques. En examinant la flore locale, il a mis au point des pigments naturels et des colorants, témoignant ainsi d’un processus de révélation et de recherche où peinture, collages et installations se conjuguent pour donner une nouvelle lecture du paysage et du patrimoine culturel de l’oasis.
L’artiste conceptuelle Farah Khelil, en conversation avec la commissaire d’art Clelia Coussonnet (France), revient dans “Le palmier entre matériau et figure”, sur son intérêt pour des gestes artistiques traditionnels ou hérités de l’histoire de l’art. Ensemble, elles présentent l’ouvrage “Effet de serre” (Bao Books, 2023), prolongement du projet de recherche et de création éponyme conçu par Farah Khelil en collaboration avec Clelia Coussonnet en octobre 2021 au sein de la serre du parc du Belvédère à Tunis. Le livre dévoile un corpus d’œuvres et de textes produits dans le cadre de ce projet qui étudiait l’histoire du Casino le Palmarium (Tunis, 1902) et la dialectique entre le palmier et l’eucalyptus. Cette recherche révèle une histoire où le politique côtoie la botanique et interroge l’architecture et l’ornementation.
Titulaire d’un doctorat de l’Ecole des Arts de la Sorbonne (2014), s’intéresse à la relation entre art, écriture et langage. Son approche s’inspire de son propre rapport à l’art, découvert à travers les livres d’histoire et les catalogues, et qu’elle retranscrit dans une pratique mêlant textes, images et objets en agencements protéiformes. En empruntant diverses techniques et matériaux, elle questionne la transmission et la perception de l’information. L’artiste dont le travail figure dans les collections du Frac Normandie, a exposé dans de nombreuses manifestations collectives à New York, Londres et Saint-Louis (Sénégal), ainsi que lors d’expositions personnelles, notamment à l’Appartement (Paris, 2017) et à Selma Feriani Gallery (Tunis, 2018).
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