Au début de ce second quinquennat, l’économie tunisienne se trouve confrontée à plusieurs défis majeurs qui menacent sa stabilité et son développement à court et moyen termes.
Ces défis touchent à la fois des aspects structurels, macroéconomiques et sociaux, créant un contexte difficile pour la croissance économique et la cohésion sociale.
Cette analyse vise à examiner ces enjeux de manière approfondie et à esquisser les perspectives envisageables pour les mois et les années à venir.
- Bureaucratie excessive et cadre juridique contraignant :
Un des principaux obstacles à l’attractivité des IDE en Tunisie réside dans la lourdeur bureaucratique et les lenteurs administratives. Les investisseurs étrangers sont confrontés à une complexité excessive dans les procédures d’enregistrement des entreprises, l’obtention de permis, et la navigation dans un système administratif souvent peu transparent. Cette bureaucratie freine non seulement les nouvelles entrées sur le marché, mais également les expansions des entreprises déjà implantées.
Par ailleurs, le cadre juridique tunisien, bien qu’ayant connu des réformes depuis la révolution, reste marqué par des ambiguïtés, des incohérences et un manque de clarté dans la mise en œuvre des lois. Les investisseurs cherchent un environnement où les règles sont prévisibles et stables. Or, la Tunisie n’a pas encore réussi à offrir cette stabilité.Ce qui décourage les investisseurs de projets à long terme.
- Corruption endémique et déficit de gouvernance :
La corruption est un problème persistant en Tunisie. Il constitue un frein majeur pour les investisseurs. Le pays se classe régulièrement mal dans les indices mondiaux de perception de la corruption. Ce qui impacte négativement la confiance des investisseurs étrangers. Les pratiques de corruption généralisée augmentent le coût des affaires et créent un environnement d’incertitude où les entreprises doivent naviguer à travers des obstacles illégitimes pour obtenir des services ou des autorisations.
Les déficits de gouvernance se manifestent également par une faible transparence dans les marchés publics, ainsi qu’une perception d’inefficacité dans la gestion des ressources de l’État. Le manque de réformes pour renforcer les institutions et la gouvernance réduit la compétitivité du pays, laissant les investisseurs se tourner vers d’autres marchés plus prévisibles et transparents.
- Instabilité politique et perception de risque sécuritaire :
Depuis la révolution de 2011, la Tunisie traverse une phase d’instabilité politique chronique, avec des changements fréquents de gouvernements, des tensions sociales et des troubles politiques réguliers. Cette instabilité crée un climat d’incertitude qui dissuade les investisseurs étrangers de prendre des engagements financiers à long terme.
De plus, bien que la Tunisie ait réussi à maintenir un certain niveau de sécurité, la perception de risque sécuritaire demeure une barrière pour de nombreux investisseurs. Les attentats terroristes qui ont touché le secteur touristique en 2015, par exemple, ont eu un effet durable sur l’image du pays, notamment dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre comme le tourisme et l’hôtellerie. Le rétablissement de la confiance dans la sécurité nationale est un préalable essentiel pour attirer à nouveau des flux significatifs d’IDE.
- Manque de réformes économiques structurelles :
L’absence de réformes économiques profondes empêche la Tunisie de devenir un marché attrayant pour les investisseurs internationaux. Des secteurs clés comme l’industrie et les technologies de l’information nécessitent des investissements massifs pour se moderniser et se conformer aux normes internationales. Toutefois, le manque de flexibilité sur le marché du travail, la faiblesse des infrastructures et des coûts de production relativement élevés, freinent la compétitivité du pays.
En parallèle, l’État tunisien a longtemps été perçu comme jouant un rôle trop dominant dans l’économie, au détriment de l’initiative privée. Cette centralisation économique a généré un environnement où la concurrence est limitée et où les innovations sont rares, réduisant ainsi l’attrait pour les entreprises qui cherchent des opportunités de croissance dynamique.
- Difficultés à attirer des capitaux pour la relance, des conséquences à court terme :
À court terme, sans réformes structurelles destinées à améliorer le climat des affaires, la Tunisie continuera à attirer peu de capitaux étrangers, un facteur essentiel pour soutenir la reprise économique postpandémie. L’absence d’IDE compromet la capacité du pays à financer des projets d’infrastructures indispensables et à soutenir la création d’emplois dans les secteurs moteurs de l’économie. Cela affecte particulièrement des secteurs comme le tourisme, qui dépend fortement des investissements internationaux pour se remettre des chocs successifs liés à la pandémie et à l’instabilité politique.
Le manque de nouveaux capitaux limite également les opportunités d’innovation et de transfert de technologie, essentiels pour accroître la productivité et la compétitivité du tissu industriel tunisien. Les investisseurs préfèrent souvent des marchés où les perspectives de croissance sont meilleures et où le cadre réglementaire et fiscal est plus stable.
- Retard dans la modernisation et la compétitivité globale, des conséquences à moyen terme :
À moyen terme, l’absence d’IDE risque de freiner la modernisation des secteurs stratégiques de l’économie tunisienne, tels que l’industrie, le tourisme, les technologies de l’information. Ces secteurs, essentiels à la création d’emplois et à la croissance inclusive, nécessitent des flux d’investissements pour se moderniser, adopter de nouvelles technologies et améliorer leurs capacités productives. Sans ces investissements, la Tunisie risque de rester en retard par rapport à ses concurrents régionaux et mondiaux, réduisant ainsi sa compétitivité à long terme.
De plus, la faiblesse des investissements dans les infrastructures, les transports et l’énergie, pourrait ralentir le développement économique du pays, limitant les perspectives de diversification économique et d’intégration dans les chaînes de valeur mondiales.
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* Dr. Tahar EL Almi,
Economiste-Economètre.
Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,
Psd-Fondateur de l’Institut Africain
D’Economie Financière (IAEF-ONG)
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