Mehdi Houas: « Un hub régional d’IA grâce à l’ingéniosité et à l’intelligence collective »
Dans un échange sous forme de questions-réponses, Mehdi Houas, président fondateur de Talan, détaille les atouts du pays, les défis à relever et les leviers à actionner pour faire de la Tunisie un acteur incontournable dans le domaine de l’IA.
Quels sont les principaux atouts de la Tunisie pour devenir un acteur clé de l’IA spécialisée ?
A mon avis, il faut mettre en avant la capacité tunisienne à développer avec une grande profondeur des agents intelligents spécialisés dans des domaines précis. La capacité à fabriquer des agents spécialisés dans un domaine d’activité ouvre un champ immense de possibilités. Ce potentiel repose sur la combinaison des technologies avancées développées à l’international et sur des expertises locales solides.
Pourquoi la santé est-elle un secteur stratégique pour l’IA en Tunisie ?
La santé occupe une place centrale dans cette dynamique. Je rappelle que nous avons une assise universitaire exceptionnelle en matière de santé, avec des données collectées depuis des décennies. Ces données, exploitées dans le respect de la confidentialité, pourraient permettre de développer de nouveaux protocoles médicaux, des médicaments innovants. Et si on arrive à avoir un accord d’utilisation, avec les confidentialités qui vont avec bien sûr, de ces données médicales, on pourra faire de la recherche et anticiper les maladies rares.
Quel rôle joue le vivier d’ingénieurs tunisiens dans cette révolution technologique ?
Le capital humain est un levier fondamental. Je souligne que nos écoles et universités, souvent jumelées avec les meilleures institutions d’Europe et d’Amérique du Nord, forment des talents à la pointe de la technologie. Ainsi, « cette ingéniosité frugale », c’est-à-dire la capacité des ingénieurs tunisiens à réaliser grand avec peu, est un atout précieux pour développer des solutions IA adaptées aux réalités locales et mondiales.
Comment construire un écosystème d’innovation dynamique autour de l’IA ?
Pour concrétiser ce potentiel, la création d’un écosystème intégré s’impose. Il faut réunir les clusters universitaires, les données publiques, les financements nationaux et internationaux, pour permettre aux jeunes talents de créer et d’innover. Un cadre réglementaire favorable, à l’image du Startup Act, est également important. Il donne la possibilité à nos jeunes et moins jeunes aussi de créer, d’échanger, de circuler, de dynamiser leurs idées.
Quelle place accorder à la recherche et à l’innovation dans cette stratégie ?
La recherche appliquée est un pilier essentiel. Ainsi, nous devons bâtir des partenariats solides entre industriels et universitaires, pour que la recherche soit opérationnelle et rapidement appliquée à des cas concrets. Autrement dit, la recherche ne doit pas rester théorique, mais devenir un levier d’innovation pragmatique. Objectif : avoir le mindset d’importateur de technologies et d’exportateur de services à valeur ajoutée.
Quel est le rôle de l’intelligence collective dans le succès de l’IA en Tunisie ?
L’intelligence collective est au cœur de la réussite. Ceci explique l’importance de mixer des compétences pluridisciplinaires, la santé, l’éducation, l’agriculture, l’énergie… Tout en insistant sur l’importance aussi d’intégrer ces compétences dès la conception des projets pour éviter les erreurs et assurer un passage à l’échelle efficace. Car le vrai challenge, c’est le passage à cette étape. Il est également indispensable de faire appel à des experts techniques et des acteurs de terrain.
Comment la position géopolitique de la Tunisie peut-elle être un avantage ?
Je pense qu’il faut mettre en avant la position géopolitique de la Tunisie. Notre pays a toujours su trouver un positionnement utile et pertinent. Notre situation géopolitique, à la croisée de trois continents, est stratégique et nous place dans une position unique. D’ailleurs, la Tunisie est comme un pont entre le monde méditerranéen, africain et européen. Elle est capable de comprendre rapidement la profondeur des technologies émergentes et de créer des services adaptés aux besoins du continent africain, avant de les diffuser à l’échelle mondiale.
Un message d’espoir pour l’avenir ?
Pour conclure, j’appelle à l’unité et à la mobilisation collective. Pour la simple raison que ce rêve est à notre portée, à condition que nous unissons nos forces dans une intelligence collective où chacun apporte sa pierre à l’édifice pour servir l’intérêt général et, en retour, nos intérêts particuliers. Plus précisément, j’appelle à faire de la Tunisie un hub régional d’intelligence artificielle grâce à l’ingéniosité et à l’intelligence collective.
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Une publication partagée par L’Economiste Maghrébin (@leconomiste.maghrebin)
Cette interview a été réalisée à l’occasion de la 26ᵉ édition du forum de l’Economiste Maghrébin, dans le cadre d’une série de podcasts. Et qui est disponible dans le mag de l’Economiste Maghrébin n 922 du 18 juin au 2 juillet 2025.
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