Ni Washington ni Pékin : Mehdi Houas prône une voie méditerranéenne pour l’IA
Le président fondateur de Talan et administrateur de Numeum est intervenu lors de la 26ème édition du Forum de l’Economiste maghrébin qui s’est tenue le 20 mai 2025 à Tunis. Son intervention a porté sur : « L’IA pour plus d’indépendance et moins de dépendance… ».
Mehdi Houas a appelé à construire une nouvelle forme d’interdépendance stratégique face aux deux grands modèles dominants de l’IA. Il décrit un monde fragile où « la crise économique nous a montré du doigt notre profonde dépendance à la Chine ». Yandis que d’autres crises internationales nous interrogent sur nos valeurs fondamentales.
Face à ce constat, l’entrepreneur identifie deux modèles prépondérants : « La voie américaine basée sur le rapport de force » et « la voie chinoise basée sur le contrôle et un respect limité des libertés individuelles et collectives ». Il propose alors de développer « une troisième voie » en alliance avec l’Europe, plus conforme aux « valeurs gouvernementales et universitaires » méditerranéennes.
La Tunisie comme pont entre l’Europe et l’Afrique
Pour M. Houas, la position géopolitique de la Tunisie représente un atout majeur : « La Tunisie a une position géographique stratégique parce qu’elle est le préjugé idéal de ces deux continents », soulignant l’opportunité de devenir « un phare IA dans la Méditerranée » qui se tournerait à la fois vers l’Europe et l’Afrique.
Cette position privilégiée permettrait, précise-t-il, de développer « une voie de dépendance, d’indépendance, et donc d’affaires dépendantes individuelles, mixées, choisies et pilotées ».
Le dirigeant de Talan propose un modèle économique inspiré de l’histoire récente : « Nous avons importé les matières premières et exporté des produits chimiques. Je pense qu’aujourd’hui, nous pouvons suivre un chemin analogue en disant que les matières premières, ce sont les technologies que nous allons importer, et nous allons construire des services à valeur ajoutée que nous pouvons exporter. »
Il préconise une acceptation lucide de la dépendance technologique : « On n’est pas en mesure aujourd’hui de rattraper le retard qu’on a pris sur le développement des technologies […] Il faut que nous acceptions d’être dépendants de ces technologies. »
Des atouts locaux à capitaliser
Mehdi Houas souligne plusieurs avantages comparatifs pour la Tunisie. Il met d’abord en avant un capital humain de qualité : « Nous avons une population des universités de premier plan, qui forment des médecins […] On a des ingénieurs aussi de premier plan ». Il valorise ensuite une jeunesse dynamique et pragmatique : « Nous avons une jeunesse qui est à l’âge et aussi à la précarité, c’est-à-dire qu’elle est habituée à faire plus avec moins ». Enfin, il évoque un environnement propice à l’innovation frugale, capable de développer « des services qui peuvent être utilisés par le monde entier ».
L’intervenant identifie plusieurs domaines d’application prioritaires pour l’IA en Tunisie. Il évoque d’abord la transition énergétique : « Nous pouvons réellement innover sur la structure de réseaux électriques et solaires, particuliers، intercommuniqués pilotés par des IA ». Il met également en avant la gestion de l’eau : « Nous pouvons aussi utiliser l’intelligence artificielle pour réellement contrôler la façon dont l’eau est distribuée ». Dans le domaine agricole, il rappelle que « plus de 40 % des récoltes agraires en Afrique sont perdues […] Nous pouvons aussi utiliser l’intelligence artificielle pour aider les agriculteurs à mieux développer leurs récoltes ». Enfin, il souligne l’importance du secteur de la santé : « Nous avons énormément de richesses en matière de santé, la recherche dans la santé est un point sur lequel nous pouvons réellement nous positionner. »
L’éducation comme priorité absolue
Mehdi Houas insiste sur l’importance fondamentale de l’éducation : « Nous devons continuer à investir de manière thématique sur l’éducation. 30 % de la population africaine a moins de 25 ans, cette population va doubler dans les 25 prochaines années. Nous devons prendre la mesure de cet enjeu et de ce défi en investissant de manière massive dans l’éducation, l’éducation primaire, sinon… »
Le dirigeant observe une dynamique positive sur le continent africain : « Le continent africain est en train de bouger, le continent africain est en train de rattraper son retard ». Il note que « l’année dernière, plus de 3 milliards de dollars ont été investis dans les startups africaines dans les nouvelles technologies ». Soit un montant comparable aux « 2,7 milliards de dollars investis pour le premier trimestre en Europe ».
Cette évolution s’explique selon lui par l’engagement total des entrepreneurs africains : « La startup pour eux n’est pas un jouet, la startup pour eux n’est pas une façon, c’est réellement le seul moyen qu’ils ont de se faire agir ».
Un positionnement stratégique pour la Tunisie
En conclusion, Mehdi Houas identifie les atouts stratégiques de la Tunisie pour se positionner dans l’économie de l’IA :
- Sa position géographique privilégiée;
- Son héritage éducationnel et culturel;
- Ses compétences de premier niveau dans le domaine de la santé;
- Son potentiel énergétique pour l’hébergement de centres de calcul.
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