Anis Ben Said : « Sur une voiture, l’État perçoit parfois plus que le fabricant »
L’enseignant universitaire et conseiller fiscal Anis Ben Said a dressé un tableau sévère du secteur automobile, dénonçant l’impact de la fiscalité sur le coût des véhicules et remettant en question la cohérence des récentes initiatives législatives, notamment celles du projet de loi de finances (PLF 2026).
Il affirme que la fiscalité constitue la principale cause de la cherté des voitures en Tunisie, soulignant que l’État perçoit parfois davantage que le fabricant lui-même, entre droits de douane, TVA et autres taxes. Il met également en lumière les marges jugées excessives des concessionnaires.
Pour les voitures populaires, la marge est encadrée par le ministère du Commerce entre 500 000 et 1 000 000 de dinars, le prix étant également réglementé. En revanche, pour les autres véhicules, les prix sont libres, et l’intervenant estime que la marge ne descend jamais sous les 10% (soit 10 millions de dinars sur un véhicule à 100 millions de dinars).
Une initiative jugée insuffisante
À propos de l’initiative « voiture pour tous », ajoutée au PLF 2026 pour répondre à la dégradation du transport public, l’expert la juge insuffisante. Il critique notamment le seuil de revenu permettant de bénéficier de l’avantage fiscal : pour un célibataire, il est fixé à dix fois le SMIG brut (566 dinars), soit environ 4,5 millions de dinars par mois. Il considère ce seuil absurde et craint qu’il n’encourage les salariés à sous-déclarer leurs revenus pour devenir éligibles. Il propose plutôt un système progressif, où l’avantage fiscal diminuerait à mesure que le revenu augmente — par exemple, avantage réduit jusqu’à 20 fois le SMIG et nul au-delà de 50 fois le SMIG. Il relève aussi que certains concessionnaires redoutent que la mesure n’« inonde le marché » de voitures. Cependant, il rappelle que l’objectif de l’initiative est d’aider les citoyens à acquérir un véhicule, compte tenu de l’état du transport public.
Tunisiens résidant à l’étranger (TRE) et régime FCR
Une mesure du PLF vise à modifier l’article 109 du Code des droits et procédures fiscaux, en dispensant les Tunisiens non résidents de présenter le reçu de leur déclaration annuelle lors du changement de carte grise. Anis considère cette évolution comme une correction logique, puisque le statut de non-résident découle déjà de la carte grise et non d’un avantage fiscal.
Concernant le régime FCR, rétabli par la loi de finances 2023 tous les dix ans pour les TRE, il rappelle que les concessionnaires craignaient un impact sur les transferts de devises, estimant que les TRE importeraient des voitures au lieu d’envoyer des fonds en Tunisie. Il conteste cette crainte, soulignant que les TRE paient de toute façon leurs véhicules en devises à l’étranger.
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