La nouvelle géopolitique des routes maritimes
La mondialisation n’est pas terminée, elle a simplement changé de forme. C’est ce qu’affirme Neil Shearing, économiste en chef chez Capital Economics, dans son récent article intitulé « Comment la géopolitique redessine les routes maritimes mondiales ». Selon lui, nous ne vivons pas la fin du libre-échange, mais sa transformation en un système à deux vitesses, centré sur les États-Unis et la Chine.
Les données le confirment. Le volume du commerce mondial reste proche de ses sommets historiques, les ports fonctionnent à pleine capacité et les transports ne se sont pas effondrés. Cependant, l’architecture qui soutient ces flux est en train de changer. Le monde ne se « démondialise » pas, il se fragmente en blocs géopolitiques, économiques et commerciaux.
La géopolitique joue désormais un rôle décisif. Ni Washington ni Pékin ne conçoivent de politiques basées sur l’efficacité économique, la sécurité, la domination technologique et la résilience des chaînes d’approvisionnement.
Il en résulte un transfert de la production vers des pays amis (friend-shoring) et une réaffectation des voies de navigation. Les industries stratégiques, telles que celles des puces électroniques, des batteries, des produits pharmaceutiques et des drones, reconstruisent leurs chaînes d’approvisionnement dans des régions comme l’Asie du Sud, l’Amérique centrale et l’Europe de l’Est.
Pour le transport maritime, cette évolution ne se traduit pas par une diminution des échanges commerciaux, mais par une transformation des échanges. De nouvelles routes devraient accroître la demande de transport, les trajets devenant plus longs et plus complexes. Un fret qui quittait auparavant Shanghai directement pour Los Angeles peut désormais transiter par des hubs intermédiaires comme Hanoï ou Mumbai, créant ainsi de nouvelles routes et de nouveaux besoins en flottes.
Parallèlement, les risques d’instabilité augmentent. Tensions politiques, sanctions, nouveaux tarifs douaniers ou ruptures imprévues peuvent bouleverser les flux du jour au lendemain. Les armateurs sont invités à s’adapter rapidement, à changer de destination et à accroître la flexibilité de leurs flottes.
L’ère de la mondialisation prévisible est révolue. Les échanges commerciaux continuent de se dérouler, mais désormais sous des conditions politiques. Les routes maritimes sont redessinées non seulement par le marché, mais aussi par les confrontations géopolitiques.
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