Avec un coût de 850 millions d’euros et une mise en service prévue pour 2028, le projet ELMED ambitionne de relier la Tunisie à l’Italie via un câble sous-marin de 200 kilomètres. Au-delà de l’infrastructure, cette interconnexion électrique de 600 MW pourrait redéfinir le positionnement énergétique de la Tunisie en Méditerranée et transformer le pays en acteur clé du futur réseau euro-méditerranéen.
Ezzedine Khalfallah, consultant international en énergie, décrypte les enjeux stratégiques, économiques et géopolitiques de ce projet d’intérêt commun reconnu par l’Union européenne, tout en alertant sur les défis qu’il faudra relever pour en maximiser les bénéfices.
Avant de parler du projet ELMED, pourriez-vous nous rappeler en quoi consiste ce projet ?
Le projet ELMED consiste à réaliser une interconnexion électrique entre la Tunisie et l’Italie à travers la construction d’un câble sous-marin haute tension en courant continu et à flux bidirectionnel de 400 kV d’une longueur de 200 kilomètres. Ce câble reliera le Cap Bon à la Sicile pour une capacité de 600 MW et une profondeur d’eau maximale d’environ 800 mètres. L’infrastructure du projet comprend également deux stations de conversion courant continu/courant alternatif, l’une à Partanna en Sicile et l’autre à Mlaabi dans la région du Cap Bon.
Cette infrastructure comprend aussi un câble terrestre souterrain de 18 kilomètres qui relie le point d’atterrissage du câble sous-marin sur la côte sicilienne à la station de Partanna, ainsi qu’un câble terrestre souterrain de 6 kilomètres reliant le point d’atterrissage du câble sous-marin sur la côte tunisienne à Kélibia sud jusqu’à la station de Mlaabi.
La réalisation du projet sera assurée par les sociétés qui gèrent les réseaux électriques des deux pays, à savoir Terna du côté italien et la STEG du côté tunisien. Le coût total du projet est estimé à environ 850 millions d’euros avec une contribution financière de la part de l’Union européenne sous forme de subvention de 307 millions d’euros à travers le Connecting Europe Facility, un programme européen dédié au soutien de projets visant le développement des infrastructures énergétiques de l’Union européenne. C’est la première fois que des fonds du CEF sont alloués à un projet d’infrastructure impliquant un État membre et un pays tiers.
La réalisation du projet sera assurée par les sociétés qui gèrent les réseaux électriques des deux pays, à savoir Terna du côté italien et la STEG du côté tunisien. Le coût total du projet est estimé à environ 850 millions d’euros avec une contribution financière de la part de l’Union européenne sous forme de subvention de 307 millions d’euros à travers le Connecting Europe Facility…
L’infrastructure à réaliser sur le territoire tunisien, comprenant le tronçon du câble sous-marin d’environ 100 kilomètres, le tronçon du câble souterrain de 6 kilomètres et la station de conversion à Mlaabi, est financée par différents bailleurs de fonds.
À quelle étape d’avancement se trouve actuellement le projet ELMED, et quel est le niveau global de sa progression ?
Le projet a connu plusieurs étapes importantes. Son inclusion depuis 2017 par la Commission européenne dans la liste des projets d’intérêt commun et sa confirmation dans la cinquième liste des PIC en 2021 constituent les premiers jalons. L’accord intergouvernemental Italie-Tunisie a été établi le 30 avril 2019 et est entré en vigueur le 25 janvier 2022.
La procédure de passation des marchés a commencé en mai 2023 lorsque les avis de préqualification pour le câble sous-marin et les stations électriques de conversion ont été publiés au Journal officiel de l’Union européenne, dans les médias et sur les sites web concernés.
Actuellement, le projet se trouve à un avancement notable en matière de passation des marchés avec la sélection du constructeur pour le lot relatif à la fourniture et à l’installation du câble sous-marin. Les deux partenaires Terna et STEG ont retenu le groupe Prysmian pour un coût d’environ 460 millions d’euros.
Quant à la construction des deux stations de conversion de Mlaabi côté tunisien et de Partanna côté italien, les procédures de choix des entreprises adjudicataires sont en cours. Toutefois, on ne peut parler d’un vrai avancement qu’une fois que les travaux de construction auront démarré, sachant que l’achèvement de l’ouvrage est prévu pour 2028.
Pouvez-vous préciser quelles études économiques ou stratégiques ont été réalisées par le ministère tunisien de l’Industrie et de l’Energie afin de garantir que ce projet contribue réellement à l’intérêt national et au renforcement de la souveraineté énergétique du pays ?
Le projet ELMED a fait l’objet de différentes études qui devaient garantir sa faisabilité sur les plans technique, économique, financier et environnemental. Les premières études achevées en 2016 et 2017 ont concerné l’évaluation économique du projet réalisée par le bureau italien CESI et son analyse financière à travers une analyse coût-bénéfice. Les résultats de ces études ont confirmé l’intérêt du projet aussi bien du côté tunisien que du côté italien.
D’autres études nécessaires à l’avancement de la préparation du projet ont été lancées en 2019 et achevées en 2022. Il s’agit de l’étude du tracé du câble sous-marin réalisée par RINA Consulting et COMETE Engineering, de l’étude du tracé du câble terrestre réalisée par KWARSA et COLENCO Consulting, ainsi que de l’étude d’impact environnemental et social réalisée par le groupement HPC, IDEA Consult, PROGER, ELARD et PLEXUS Energy. Ces études ont confirmé la faisabilité du projet en optimisant ses tracés et son impact environnemental. Toutes ces études ont bénéficié d’un soutien technique et financier de la part des différents bailleurs, ce qui montre l’intérêt stratégique du projet pour une connexion Tunisie-Europe.
Peut-on considérer que le projet ELMED constituera, une fois mis en œuvre, une garantie de l’indépendance énergétique du pays ?
Le projet ELMED présente divers avantages tant pour l’Italie et l’Europe en général que pour la Tunisie en particulier. Du côté tunisien, le principal avantage réside dans la contribution du projet à la diversification et à la sécurisation de l’approvisionnement énergétique, vu la forte dépendance de notre pays au gaz naturel, majoritairement importé, pour la production d’électricité.
ELMED pourrait également représenter une option de moindre coût pour la STEG en termes d’approvisionnement en électricité dans la mesure où ce projet permettrait d’éviter ou de reporter des investissements en moyens de production, notamment le report de la construction d’une centrale électrique conventionnelle d’au moins 500 MW. Il permettrait aussi de baisser la consommation de gaz naturel pour la production d’électricité et donc de réduire la dépendance de la Tunisie à l’égard de ce combustible, de contribuer à une meilleure maîtrise du coût de revient du kilowattheure à travers le développement des échanges commerciaux avec le réseau européen, et de renforcer la sécurité du système électrique tunisien en termes de stabilité et de flexibilité tout en augmentant sa réserve.
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Du côté tunisien, le principal avantage réside dans la contribution du projet à la diversification et à la sécurisation de l’approvisionnement énergétique, vu la forte dépendance de notre pays au gaz naturel, majoritairement importé, pour la production d’électricité.
Le projet apporterait également un secours instantané en cas d’incident sur le réseau national et contribuerait à l’amélioration de l’intégration des énergies renouvelables dans le système électrique du pays. Il permettrait aussi de renforcer les échanges industriels entre l’Italie et la Tunisie, avec des retombées positives sur l’économie du pays mais aussi sur sa transition énergétique et écologique.
Enfin, ELMED assurerait une plus grande sécurité, durabilité et résilience dans l’approvisionnement en énergie, ainsi que le développement des échanges d’électricité produite à partir de sources renouvelables, constituant ainsi un levier vers de nouveaux investissements dans les centrales de production d’énergie propre.
ELMED peut-il aider la Tunisie à devenir un acteur régional, que ce soit pour l’Afrique du Nord ou pour l’Europe du Sud ?
Le projet ELMED a été reconnu comme un projet d’infrastructure transfrontalier clé de l’Union européenne et identifié comme un projet d’intérêt commun par la Commission européenne. Cette interconnexion électrique qui constitue un véritable pont entre l’Italie et la Tunisie et qui reliera deux grands systèmes électriques Europe-Afrique du Nord pourra contribuer à la sécurité et à la durabilité énergétique des pays de l’Union européenne et donner une impulsion significative à la création d’un réseau électrique méditerranéen reliant l’Europe à l’Afrique du Nord en vue d’une intégration notable du marché de l’électricité.
Avec ce projet considéré comme un pilier du développement du réseau de transmission euro-méditerranéen, la Tunisie, compte tenu de sa position régionale, pourra bénéficier de plusieurs opportunités. Il s’agit entre autres d’un accès direct au marché européen de l’électricité, de l’attraction d’investissements pour de grands projets solaires et éoliens économiquement et d’intérêt pour la Tunisie, ainsi que du renforcement du rôle géopolitique de la Tunisie qui devient une liaison entre l’Afrique du Nord et l’Europe, permettant d’augmenter son poids dans les discussions énergétiques régionales.
Au-delà des avantages, potentiel, qu’apporterait ELMED, quels sont les défis majeurs que la Tunisie devra relever pour transformer cette infrastructure en un véritable levier de souveraineté énergétique et de positionnement stratégique sur l’échiquier euro-méditerranéen ?
À la lumière des intérêts et avantages présentés par le projet ELMED, que ce soit au niveau des deux pays directement interconnectés, la Tunisie et l’Italie, ou bien à l’échelle de la région Europe-Afrique du Nord, on ne peut que saluer cet acquis qui milite en faveur d’un avenir énergétique de plus en plus sûr, durable et renouvelable. Toutefois, le projet pourrait présenter certaines limites qu’il ne faut pas sous-estimer et qui sont de différents ordres.
Au niveau réglementaire et de marchés, la vente d’électricité vers l’Union européenne nécessite des cadres commerciaux clairs tels que les tarifs d’export, les garanties d’origine et les contrats à long terme.
Au niveau commercial, des gains importants sont attendus après 2030 ou 2035, et l’effet immédiat sur l’économie et les recettes sera donc modeste.
Au niveau du réseau national, l’export de l’électricité demande un transport de la production renouvelable locale jusqu’aux points d’injection, et donc des investissements en lignes et en stockage sont nécessaires.
Au niveau de la capacité du projet, les 600 MW semblent corrects à court terme, mais en cas d’export massif ultérieurement, cette capacité s’avèrera insuffisante et mériterait d’être augmentée.
Pour que la Tunisie devienne un acteur régional majeur, il faut monter en capacité renouvelable, moderniser et renforcer le réseau, et créer des marchés et des contrats d’export crédibles, afin de rendre notre pays compétitif et stratégique sur l’échiquier euro-méditerranéen.
Enfin, au niveau des prix européens, nous risquons d’avoir une certaine dépendance et éventuellement de la concurrence avec d’autres pays d’Afrique du Nord, notamment le Maroc et l’Algérie, pour les prix à l’export.
Pour que la Tunisie devienne un acteur régional majeur, il faut monter en capacité renouvelable, moderniser et renforcer le réseau, et créer des marchés et des contrats d’export crédibles, afin de rendre notre pays compétitif et stratégique sur l’échiquier euro-méditerranéen.
La Société tunisienne des industries de pneumatiques (STIP) a clôturé l’exercice 2024 sur une forte détérioration de ses indicateurs financiers. C’est ce qui ressort de ses états consolidés arrêtés au 31 décembre 2024.
Si le chiffre d’affaires a légèrement progressé, la rentabilité du groupe s’est fortement dégradée.
Le résultat net consolidé de la STIP affiche un déficit d’environ 10 millions de dinars (MDT) en 2024, contre une perte d’environ 1,6 MDT en 2023. Cette aggravation de plus de huit millions de dinars traduit un recul significatif de la performance financière du groupe.
Le total du bilan consolidé est passé d’environ 228 MDT en 2023 à 205 MDT en 2024, soit une diminution de près de 23 MDT en un an.
Les capitaux propres ont suivi la même tendance, chutant à 5,2 MDT contre 15,1 MDT un an plus tôt.
Sur le plan opérationnel, les produits d’exploitation ont légèrement progressé, atteignant 143,2 MDT en 2024 contre 139,2 MDT l’année précédente. Cette hausse résulte principalement d’une augmentation des ventes sur le marché local, estimée à 9,7 MDT, tandis que les exportations ont reculé d’environ 5,2 MDT.
Malgré cette croissance modérée du chiffre d’affaires, la rentabilité d’exploitation s’est nettement détériorée. Le résultat d’exploitation s’établit à 173 000 dinars, contre 9,4 MDT en 2023. Dans le même temps, les charges financières nettes ont augmenté pour atteindre 12,8 MDT, soit 1,8 MDT de plus qu’en 2023.
Face à une accumulation de stocks évalués à environ 50 MDT, la direction générale de la STIP a décidé, le 16 avril 2024, de suspendre temporairement la production dans ses deux usines pour une durée de deux mois. La reprise progressive des activités s’est effectuée entre fin avril et fin mai 2024, tandis que la commercialisation des produits est restée active pendant cette période.
Après la clôture de l’exercice, le groupe a également fait face à un mouvement social. Une grève syndicale, survenue du 13 mars au 2 avril 2025, a perturbé la production, les ventes et les opérations d’importation. L’impact financier de ce mouvement sur les résultats de 2025 n’a pas encore été chiffré.
L’Institut national de la statistique annonce un léger repli de l’inflation à 5% en septembre 2025. Cette accalmie apparente suffit-elle à redonner du souffle au pouvoir d’achat des ménages tunisiens ? Pour Amal Khmiri, membre du Laboratoire de recherche en économie et gestion (LEG), la réponse est bien plus nuancée. Entre les limites de l’Indice des prix à la consommation, une inflation alimentaire toujours virulente à 5,7%, et des fragilités structurelles profondes, l’économiste décrypte les enjeux d’un ralentissement qui relève davantage de l’ajustement conjoncturel que du redressement durable.
L’inflation a reculé de 5,2% en août à 5% en septembre 2025. Comment interprétez-vous ce ralentissement ?
Ce recul de 0,2 point mérite une analyse nuancée qui tient compte des limites de la mesure même de l’inflation. L’Indice des prix à la consommation (IPC) utilisé par l’INS repose sur un panier de biens représentatif d’un ménage moyen, ce qui pose un problème majeur de représentativité dans le contexte tunisien. Les habitudes de consommation varient considérablement selon les régions, les classes sociales et les zones géographiques. Les ménages à faibles revenus consacrent une part disproportionnée de leur budget aux produits alimentaires de base et subissent donc une inflation réelle bien supérieure au chiffre officiel de 5%. Cette distorsion statistique masque des réalités socioéconomiques hétérogènes et crée un décalage profond entre le chiffre officiel et l’inflation ressentie par les familles, particulièrement celles dont les dépenses en santé, éducation et transport sont incompressibles.
Le panier de référence, révisé périodiquement mais figé entre deux révisions, ne capture pas les stratégies d’adaptation des ménages qui se reportent vers des produits de substitution. Il sous-estime également l’inflation dans les services et le logement, secteurs en forte expansion urbaine, ainsi que dans les médicaments et services de santé qui affichent des hausses continues, ou encore la restauration et l’hôtellerie qui progressent de plus de 10%. Pour une interprétation plus fine, il faudrait adopter des indices différenciés selon les quintiles de revenus et les zones géographiques, approche que certains pays émergents adoptent progressivement.
Ce léger ralentissement reflète davantage un ajustement conjoncturel qu’un changement profond. Plusieurs facteurs temporaires l’expliquent : la stabilisation relative du dinar face aux principales devises, la détente saisonnière des prix agricoles suite à des récoltes correctes, et l’effet d’une demande intérieure comprimée par la stagnation du pouvoir d’achat. La baisse observée résulte davantage d’une contraction de la demande liée à l’érosion des revenus que d’une amélioration de l’offre ou d’une dynamique économique vertueuse.
Cependant, les fragilités systémiques demeurent intactes. La dépendance aux importations de produits de base, notamment les céréales et l’énergie, expose l’économie aux chocs externes. Le secteur informel représente près de 40% de l’économie et échappe aux mécanismes de régulation. Les circuits de distribution restent inefficients avec des marges excessives qui amplifient les variations de prix, tandis que la faiblesse de la concurrence maintient des rentes. L’économie tunisienne demeure emprisonnée dans un cercle vicieux de stagnation de la productivité, d’absence d’investissement créateur de valeur et de rigidités qui alimentent les tensions inflationnistes indépendamment de la politique monétaire.
En conclusion, si le ralentissement de septembre est bienvenu, il ne peut être considéré comme un signal de stabilisation durable sans une amélioration des fondamentaux économiques : diversification productive, réduction de la dépendance énergétique, formalisation de l’économie et réformes de compétitivité. L’inflation restera volatile tant que ces déséquilibres persisteront.
Quelles sont les implications pour le pouvoir d’achat et la politique monétaire de la BCT dans les prochains mois ?
Ce ralentissement place la Banque centrale de Tunisie face à un dilemme stratégique complexe, car l’outil conventionnel de la politique monétaire restrictive atteint ses limites dans le contexte tunisien. La BCT maintient son taux directeur à 7,50% depuis juillet 2025, après l’avoir réduit de 50 points de base en mars. Cette prudence reflète la reconnaissance implicite que l’inflation tunisienne résulte principalement de facteurs d’offre et de chocs externes plutôt que d’une surchauffe de la demande. Augmenter davantage les taux directeurs serait contre-productif : cela amplifierait le coût du crédit pour les entreprises, réduirait l’investissement productif et pénaliserait une demande intérieure déjà contrainte, sans s’attaquer aux causes fondamentales de l’inflation par les coûts et l’inflation importée.
La BCT reconnaît d’ailleurs que l’atténuation récente provient davantage de la stabilisation relative du dinar et de la détente des cours internationaux que de l’impact direct de sa politique monétaire. Dans les prochains mois, elle devra naviguer entre deux écueils : maintenir une orientation suffisamment restrictive pour ancrer les anticipations inflationnistes sans étouffer la croissance économique fragile anticipée autour de 2 à 2,5% pour 2025. Une baisse prématurée des taux risquerait de raviver les pressions sur le dinar et de réimporter l’inflation, tandis qu’un maintien prolongé à 7,50% pénalise l’accès au crédit pour les PME et les ménages, freinant l’investissement et la consommation.
Pour le pouvoir d’achat des ménages tunisiens, le ralentissement à 5% constitue un signal modérément encourageant mais insuffisant pour inverser la tendance à l’érosion des revenus réels. Les augmentations du SMIG et les ajustements salariaux moyens de 3% à 9% selon les catégories restent inférieurs à l’inflation cumulée sur plusieurs années. Les produits alimentaires, qui représentent 26,2% du panier de consommation, affichent encore une inflation de 5,7%, avec des hausses alarmantes sur les produits essentiels comme les légumes frais, la viande d’agneau et les poissons frais. Cette configuration frappe disproportionnellement les ménages à faibles revenus qui consacrent une part majeure de leur budget à l’alimentation, aggravant les inégalités sociales.
À la lumière de la situation actuelle, pensez-vous que cette baisse puisse améliorer le pouvoir d’achat des ménages ?
Le recul de l’inflation de 5,2% à 5% ne peut se traduire par une amélioration significative du pouvoir d’achat des ménages tunisiens. Même une inflation à 5% continue d’éroder les revenus réels tant que les salaires progressent moins vite et que l’économie ne crée pas les conditions d’une prospérité partagée. La soutenabilité du pouvoir d’achat dépendra moins des décisions de la BCT que de réformes visant à améliorer l’offre domestique, réduire les coûts de distribution et diversifier les sources de croissance vers des secteurs à plus forte valeur ajoutée.
Sans transformation de l’appareil productif, sans diversification économique et sans gains de productivité substantiels, la désinflation observée ne peut être qu’un ajustement temporaire qui ralentit la dégradation du pouvoir d’achat sans l’inverser. La relance économique nécessaire pour générer une croissance vertueuse fait cruellement défaut. L’investissement privé reste atone face à l’incertitude et au coût élevé du crédit, tandis que l’innovation productive demeure marginale dans un tissu économique dominé par le commerce et les services à faible valeur ajoutée.
L’expérience des économies émergentes confirme que la désinflation, lorsqu’elle résulte d’un resserrement monétaire et d’une demande contrainte, tend surtout à modérer la dégradation du revenu réel plutôt qu’à le restaurer. Elle agit comme un frein à la spirale prix-salaires, mais ne recrée pas les conditions d’un accroissement du bien-être matériel. Sans ces transformations profondes, la politique monétaire continuera de jouer un rôle d’accompagnement limité, incapable de résoudre une inflation alimentée par des contraintes d’offre et des vulnérabilités externes.
Wifak Bank continue de renforcer son maillage territorial avec l’inauguration, le 10 octobre 2025, de sa 55ᵉ agence à Ezzahrouni, dans le gouvernorat de Ben Arous. La cérémonie s’est déroulée en présence du directeur général adjoint, Thamer Derbel, marquant une nouvelle étape dans la stratégie d’expansion de l’établissement.
Cette ouverture s’inscrit dans la volonté de la banque d’accroître sa proximité avec la clientèle, notamment dans la région du Grand Tunis. Elle traduit également l’engagement de Wifak Bank à soutenir l’accès aux services financiers dans les zones à fort potentiel de développement.
Parmi les principaux arguments mis en avant par l’institution figure son offre de financements à taux fixes, conçue pour garantir aux particuliers et aux entreprises des mensualités stables, même en période de fluctuations économiques. Ce positionnement vise à consolider la relation de confiance avec les clients et à offrir une visibilité accrue sur la gestion de leurs engagements financiers.
Lors de son intervention, Thamer Derbel a mis en avant le dynamisme de la région d’Ezzahrouni et la détermination de la banque à s’y ancrer durablement. Il a également souligné la jeunesse et la motivation des équipes de Wifak Bank, dont l’âge moyen s’élève à 34 ans, reflet d’une culture d’innovation et d’agilité interne.
Le directeur général adjoint a profité de cette occasion pour saluer le travail de l’ensemble des collaborateurs, rappelant leur rôle central dans les performances enregistrées ces dernières années. « Nos équipes constituent notre première force. Leur engagement nous permet de poursuivre une croissance solide et durable », a-t-il affirmé.
Avec cette nouvelle implantation, Wifak Bank confirme son ambition de consolider sa présence nationale et de renforcer son rôle dans l’inclusion financière, en particulier dans les régions encore peu desservies par les services bancaires classiques.
La Tunisie a lancé, ce vendredi 10 octobre 2025, un projet de coopération de 7 millions de dollars visant à stimuler l’investissement responsable dans le secteur agricole, à favoriser l’emploi des jeunes et à renforcer le développement durable. Le programme, baptisé « Projet de coopération pour l’investissement responsable, l’emploi des jeunes et le développement durable », est mis en œuvre par le ministère de l’Agriculture à travers l’Agence de promotion des investissements agricoles (APIA), en partenariat avec l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’Organisation internationale du travail (OIT).
S’étalant jusqu’en 2028, ce projet ambitionne de créer 1 600 emplois pour les jeunes des gouvernorats de Bizerte, Zaghouan, Nabeul, Siliana, Sfax et Médenine, à travers la mise en place de projets agricoles durables et la promotion de l’entrepreneuriat rural.
Lors du lancement officiel, le ministre de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, Ezzeddine Ben Cheikh, a souligné que cette initiative traduit « la vision stratégique du ministère pour transformer l’agriculture en moteur économique, social et environnemental ». Selon lui, « l’agriculture durable et responsable est la clé de la sécurité alimentaire du pays, de la prospérité des zones rurales et de la stabilité nationale ».
Le ministre a rappelé que le secteur agricole représente environ 14% des emplois en Tunisie et constitue « un pilier essentiel de la croissance, du développement rural et de la préservation de l’environnement ». Il a ajouté que plus de 58 000 jeunes ont déjà bénéficié de terres agricoles appartenant à l’État, mises à leur disposition dans le cadre des programmes publics d’inclusion économique.
Tout en saluant les avancées réalisées, Ezzeddine Ben Cheikh a reconnu que le financement reste la principale barrière pour les jeunes entrepreneurs agricoles malgré les efforts consentis par le gouvernement.
De son côté, Inji Doggui Hanini, directrice générale de l’APIA, a précisé dans une déclaration à Mosaïque FM que le projet permettra non seulement de générer de nouveaux emplois, mais aussi de renforcer la résilience du secteur agricole face aux défis climatiques et économiques. Elle a souligné que cette initiative s’inscrit dans une approche intégrée visant à soutenir les jeunes porteurs de projets à travers la formation, l’accompagnement technique et l’accès aux financements.
Ce programme, fruit d’un partenariat international, place la Tunisie parmi les pays de la région engagés dans la promotion d’une agriculture durable, inclusive et créatrice d’emplois, au service du développement équitable des territoires ruraux.
Dans un post publié sur son compte officiel du réseau social Facebook, l’économiste Ridha Chkoundali a vivement critiqué l’Agence Tunis Afrique Presse (TAP). Et ce, après la publication d’une dépêche affirmant que la Tunisie aurait remboursé 125 % de sa dette extérieure à fin septembre 2025, dépassant ainsi le montant prévu par la loi de finances. Selon la TAP, le pays aurait versé 10,549 milliards de dinars à ses créanciers étrangers, alors que le montant initialement programmé s’élevait à 8,469 milliards.
Pour Ridha Chkoundali, ce chiffre est « absurde et trompeur ». Il juge impossible qu’un État rembourse davantage que le montant auquel il est légalement tenu, sauf à « avoir trouvé le trésor d’Ali Baba », ironise-t-il. Selon l’économiste, ce type de communication donne l’impression que le gouvernement cherche à mettre en avant le remboursement de la dette comme un accomplissement majeur, faute d’autres réussites à présenter. Il rappelle que la Tunisie n’a jamais manqué à ses engagements extérieurs depuis l’indépendance, rendant ce type de “performance” sans véritable nouveauté.
M. Chkoundali accuse par ailleurs la TAP d’avoir mal interprété les données de la BCT. L’agence aurait confondu le montant global du service de la dette extérieure, qui inclut les remboursements effectués par l’ensemble des acteurs économiques— État, banques publiques et privées, entreprises du secteur privé- avec la dette propre de l’État tunisien.
A cet égard, il précise que le chiffre de 10,549 milliards de dinars concerne tous les agents économiques et non la seule administration publique. Comparer ce total au montant du principal de la dette publique, fixé à 8,469 milliards, constitue une erreur méthodologique majeure.
L’économiste appelle donc la TAP à davantage de rigueur et à s’entourer de spécialistes avant de publier des données économiques. Et ce, afin de préserver sa crédibilité auprès du public et des médias. En réalité, précise-t-il, la Tunisie a simplement honoré les paiements prévus dans la loi de finances 2025, à l’exception de deux échéances restant à régler. A savoir un dernier versement de 258 millions de dinars à la Banque africaine d’import-export prévu pour décembre. Et un paiement de 256 millions de dinars au Fonds monétaire international attendu en octobre.
Ridha Chkoundali rappelle enfin que la Tunisie envisage, dans le cadre de la même année budgétaire, de contracter de nouveaux emprunts extérieurs d’un montant total d’environ 6,131 milliards de dinars, auprès notamment du Fonds monétaire arabe, de la Banque mondiale et de la Banque africaine d’import-export. Ainsi que par le biais d’autres prêts affectés à des projets publics. Il souligne qu’aucune aide financière n’est prévue, à ce stade, ni de la part de l’Algérie ni de l’Arabie saoudite.
La 3ᵉ édition de l’African ESG Summit a été le théâtre d’échanges cruciaux lors du panel intitulé « Comment l’IA transforme les industries africaines dans une logique ESG ». Réunissant des acteurs majeurs de la finance, du textile et de l’automobile, la discussion a mis en lumière une convergence. A savoir que l’Intelligence Artificielle est un outil préparatoire essentiel; mais que la compétitivité et la résilience durable dépendent fondamentalement de l’engagement humain et de la collaboration stratégique.
Mourad Ben Mahmoud, Expert-comptable et consultant en Business Performance & Sustainability, a ouvert le débat en définissant la portée actuelle de l’IA. Il a noté que si les pratiques tunisiennes se limitent souvent à des systèmes internes d’automatisation de la collecte de données, l’IA est capable, à l’échelle internationale, de combiner et de synthétiser des rapports pour identifier tous les impacts et risques potentiels d’une entreprise. Elle sert à définir l’intégralité du cadre de la démarche ESG. De même qu’elle peut synthétiser les comptes-rendus des parties prenantes pour générer un reporting conforme à plusieurs référentiels.
Ce travail, qualifié de préparatoire et répétitif, est bien géré par l’IA. Cependant, M. Ben Mahmoud a insisté sur une distinction fondamentale : la définition des actions adaptées à l’entreprise et l’engagement ne peuvent jamais être proposés par l’IA. L’IA peut aider à atteindre des objectifs, mais c’est l’humain qui doit décider, s’engager, réviser les objectifs et modérer l’action pour s’adapter à un terrain qui bloque. Il recommande aux entreprises d’élaborer leur premier rapport ESG par elles-mêmes, en connaissant bien leur terrain. Et ce, avant de déléguer certaines tâches à l’IA afin de garantir une vision propre à l’entreprise. L’IA est un moyen d’apporter de l’objectivité, notamment en synthétisant des rapports internes et externes ainsi que des articles de presse, permettant d’intégrer les risques et les impacts actuels et potentiels.
Le secteur textile : Un impératif « durable » né d’une rupture sociale
Ziad Kadhi, CEO de Key Values, a partagé une perspective historique du secteur textile, préférant l’usage du terme « durable » à celui d’ESG. Il a rappelé que l’industrie a longtemps été dominée par la triade Qualité-Coût-Délai (QCD) avant l’an 2000.
Le point de rupture est survenu en 1996, suite à la publication d’un article dans un magazine américain révélant le travail d’un garçon de 12 ans au Pakistan. Cette prise de conscience a entraîné des boycotts rapides des consommateurs, une baisse de la côte boursière des marques et a contraint les grands distributeurs (comme Monoprix) et les grandes marques à s’organiser en adoptant des codes de conduite. Dès 1997, des normes purement sociales comme la SA8000 ont vu le jour. Suivirent l’Initiative Clause Sociale (ICS) française, initialement sociale, puis, vers 2003, l’initiative britannique Ethical Trading Initiative (ETI) qui intégrait la Santé, la Sécurité et l’Environnement. Aujourd’hui, l’intégration des quatre piliers (Environnement, Social, Gouvernance, Éthique) est une exigence mandataire pour les grandes marques internationales. Ne pas s’y conformer après les années 2000 entraînait une perte de commandes.
Concernant l’IA, M. Kadhi a indiqué qu’elle est exploitée dans une logique de conformité pour optimiser les processus et réduire les déchets. Mais, plus stratégiquement, l’IA est utilisée pour développer des produits connectés qui envoient des informations pour la traçabilité.
L’automobile : La durabilité comme pilier de compétitivité
Issam Jemli, membre du comité directeur de la Tunisian Automotive Association (TAA) et Directeur général de BONTAZ Tunisie, a mis en avant les efforts structuraux du secteur automobile tunisien. La TAA, créée en 2016 pour soutenir la compétitivité, a développé un référentiel digitalisé et interactif pour aider les entreprises à intégrer une stratégie de durabilité devenue primordiale, répondant aux exigences mandataires des donneurs d’ordre.
Il a signalé l’ajout récent d’un sixième pilier portant sur la durabilité au pacte de compétitivité signé avec l’État en 2022. Le référentiel de la TAA évalue la maturité des entreprises sur les trois piliers E, S, et G. Le secteur s’engage activement pour l’optimisation des ressources et le développement de l’économie circulaire (réutiliser les produits). M. Jemli a aussi souligné l’importance croissante des systèmes et logiciels embarqués, avec des développements réalisés en Tunisie, notamment ceux qui reprennent des développements de Renault ou des opérations pour les nouvelles voitures chez BONTAZ. Des startups œuvrent à développer des outils spécifiques pour réduire les impacts des entreprises.
BYD : maîtriser la chaîne de valeur pour une mobilité durable
Hajer Chekir, Responsable commerciale BYD Tunisie, a illustré l’intégration de l’IA et de la durabilité à travers l’exemple de BYD, qui maîtrise la totalité de la chaîne de valeur, de la technologie de la batterie à l’assemblage (intégration verticale). Elle a insisté sur la nécessité de passer du rôle de « futuriste » à celui de concepteur qui intègre la donnée, l’intelligence artificielle et la durabilité dès la conception.
Les résultats sont chiffrés : plus de 13 millions de véhicules électriques BYD circulent dans le monde, ayant évité 110 milliards de kilomètres d’émissions de carbone. Pour rendre la mobilité électrique plus accessible, BYD a mis en place un simulateur financier pour calculer le retour sur investissement après 10 ans. Prochainement, un nouvel outil fournira un rapport d’impact environnemental et financier complet, incluant les émissions de CO2 évitées.
Concernant la technologie des batteries, la batterie BYD offre 2 millions de kilomètres de longévité (soit 5000 cycles de recharge). Après son utilisation dans le véhicule, cette batterie peut servir au stockage d’énergie.
Enfin, Mme Chekir a salué le rôle des incitations fiscales tunisiennes (exemption de droits de douane, TVA réduite à 6 %, exemption du programme général de quota) visant à accélérer la transition énergétique, économiser l’importation de carburant et sensibiliser le consommateur aux avantages économiques et environnementaux.
ESG et compétitivité : nécessité de l’ouverture et de la résilience
Mourad Ben Mahmoud a traité de la question de l’articulation entre compétitivité et exigences réglementaires ESG. Il a rappelé que la compétitivité est l’élément principal pour la survie et la pérennité de l’entreprise. Contrairement à une idée reçue, l’engagement RSE (ou ESG) ne nuit pas à la profitabilité, mais assure au contraire la résilience de l’entreprise dans un contexte de risques et d’impacts accrus. Un rapport ESG sans actions concrètes devient du « window dressing » ou du « machin » et ne sert à rien. La rentabilité est atteinte lorsque l’entreprise est consciente de ses risques et parvient à les gérer par des stratégies d’action.
M. Ben Mahmoud a martelé que la démarche ESG n’est pas seulement nécessaire pour l’accès aux marchés, mais surtout pour l’accès à l’investissement. Les investisseurs exigent en effet une transparence et une gestion des risques pour être rassurés et déterminer combien de temps ils pourraient se désengager sans subir de risque réputationnel.
Sa recommandation principale pour les entreprises est de s’ouvrir à la collaboration, notamment avec les startups et les universités. Il est plus rentable de s’associer à des acteurs spécialisés dans des thématiques de niche (économie circulaire, décarbonation) pour réduire les impacts ou les risques, plutôt que de financer de coûteux projets internes. Adopter une démarche globale en s’appuyant sur des spécialistes garantit l’efficacité des actions et permet d’éviter les blocages, transformant ainsi l’exigence ESG en véritable facteur de profitabilité.
Réuni à Tunis, dans le cadre de la 3ème édition de l’African ESG Summit, un panel de haut niveau sur l’IA responsable a mis en lumière la nature paradoxale de cette technologie. A savoir : un catalyseur puissant de performance ESG d’une part; et une source de risques éthiques et énergétiques d’autre part. Les experts ont convergé vers des recommandations claires : intégrer les critères ESG dès la conception des systèmes d’IA; privilégier les modèles légers et ciblés plutôt que les architectures surpuissantes; établir une gouvernance stricte des agents autonomes émergents; et surtout maintenir impérativement l’humain au centre de toute boucle décisionnelle.
Pour l’Afrique en particulier, le défi est double : saisir la révolution de l’IA comme levier de développement tout en évitant le piège d’une croissance carbonée qui consommerait la moitié du budget carbone mondial restant. La durabilité ne doit plus être un ajout cosmétique, mais le socle même de toute innovation technologique.
Portant sur le thème « Responsible AI &Footprint : AI’s Double-EdgedRole in ESG », le panel a révélé la nature profondément ambivalente de l’Intelligence artificielle dans notre société contemporaine. Les experts réunis ont mis en lumière comment cette technologie se présente simultanément comme un catalyseur incontournable de la performance ESG, englobant les dimensions environnementale, sociale et de gouvernance. Tout en constituant une source préoccupante de risques éthiques et énergétiques qui appellent une régulation immédiate et réfléchie.
Au cœur de ces discussions, un consensus s’est dégagé autour d’un impératif fondamental : placer l’humain et la durabilité au centre même de la conception des systèmes d’intelligence artificielle.
L’IA par conception : intégrer l’ESG dès l’origine
Maledh Marrakchi, fondateur de Mind of Mind, a posé les fondations conceptuelles du débat en introduisant la notion cruciale de l’IA par conception. Un principe qui insiste sur la nécessité d’intégrer les exigences ESG dès les premières étapes du cycle de vie des systèmes technologiques. Cette approche proactive repose sur quatre règles essentielles qui constituent le socle d’un développement responsable de l’IA.
La première règle concerne le choix d’infrastructures durables. Une décision qui doit impérativement prendre en compte les défis considérables de consommation énergétique ainsi que les multiples aspects éthiques inhérents au déploiement de l’IA.
La deuxième règle s’articule autour de la conception pour la circularité. Un principe qui exige l’intégration de choix respectueux de l’environnement et de la durabilité tout au long du parcours du système, depuis sa conception initiale jusqu’à sa fin de vie.
Quant à la troisième règle, elle plaide pour une approche résolument centrée sur l’humain. Ce qui implique un respect rigoureux de l’éthique, des droits humains fondamentaux, de la vie privée, de l’inclusion et de l’équité. Ces considérations ne doivent jamais être reléguées au second plan, mais maintenues au cœur des développements technologiques.
Enfin, la quatrième règle appelle à la nécessité d’une gouvernance solide et efficace dès le lancement de tout produit ou système d’intelligence artificielle.
En conclusion de son intervention, Monsieur Marrakchi a réaffirmé avec force que l’intégration des critères ESG devait impérativement se faire dès la phase de conception. Et ce, notamment à travers l’élaboration minutieuse de la feuille de route du produit. Garantissant ainsi que ces préoccupations fondamentales ne soient pas de simples ajouts tardifs mais des éléments structurants du projet.
Les piliers des cadres d’IA responsable
Poursuivant cette réflexion sur la structure des cadres de référence, Ahmed Kaddour, Executive Technology Advisor – Industry Solutions Engineering Microsoft, a apporté un éclairage sur les six piliers principaux qui soutiennent les cadres d’IA responsable adoptés par les grands acteurs technologiques mondiaux.
Ces piliers comprennent :
l’équité, garantissant un traitement juste et non discriminatoire;
la fiabilité et la sécurité, assurant le bon fonctionnement et la protection des systèmes;
la confidentialité, protégeant les données personnelles et sensibles;
l’inclusion, permettant l’accès et le bénéfice pour tous;
la transparence, rendant les processus compréhensibles et vérifiables;
et enfin la responsabilité, établissant des mécanismes de redevabilité clairs.
Toutefois, Monsieur Kaddour n’a pas manqué de souligner avec pragmatisme que ces cadres théoriques, aussi bien conçus soient-ils, ne peuvent produire leurs effets bénéfiques que s’ils sont accompagnés d’une culture organisationnelle véritablement adéquate et d’un programme de formation continue des équipes, permettant une appropriation réelle et durable de ces principes au sein des organisations.
L’IA comme moteur de transformation du Reporting ESG
Jean Syrille Kossi, Senior Manager Sustainability & ESG – KPMG, s’appuyant sur son expérience approfondie chez KPMG où il pilote les pratiques de durabilité pour l’Afrique de l’Ouest et centrale, a repositionné l’IA comme un véritable transformateur radical de la performance et du reporting ESG. Il a souligné que le reporting, loin d’être une simple formalité administrative, constitue une étape finale absolument essentielle à la prise de décision éclairée des investisseurs et des parties prenantes, et que l’IA responsable apporte dans ce domaine un triple bénéfice structurant.
Dans un premier temps, l’IA assure la collecte et la fiabilisation automatique des données, une capacité transformatrice qui permet de structurer des volumes massifs d’informations provenant de sources extrêmement diverses telles que les chaînes d’approvisionnement complexes, les capteurs environnementaux déployés sur le terrain, ou encore les systèmes comptables intégrés. Cette fiabilisation automatisée améliore considérablement la transparence des processus, renforce la traçabilité de l’information et garantit l’auditabilité des informations rendues publiques.
Dans un deuxième temps, l’IA facilite l’analyse et le pilotage approfondi de la performance organisationnelle. L’IA responsable permet d’aller bien au-delà du simple chiffre brut pour explorer l’information qualitative qui se cache derrière les données quantitatives. À titre d’exemple, elle peut décortiquer et analyser en profondeur les conditions précises qui ont conduit à un certain taux de fréquence d’accidents de travail. Donnant ainsi au décideur la capacité réelle d’agir de manière préventive plutôt que de simplement anticiper ou réagir après coup.
Enfin, dans un troisième temps, l’IA renforce considérablement l’auditabilité en permettant la mise en place systématique des éléments de preuve nécessaires à la vérification rigoureuse des informations collectées et diffusées auprès des parties prenantes.
Monsieur Kossi a conclu cette partie de son intervention en insistant sur le rôle de l’IA comme outil au service de l’humain. Soulignant que ce dernier doit toujours rester celui qui prend la décision finale. Garantissant ainsi la responsabilité ultime et la redevabilité du processus. Pour lui, la priorité absolue et non négociable demeure de maintenir l’humain au cœur du processus décisionnel et au cœur même du business.
Le défi africain : croissance et durabilité
Elyes Ben Rayana, Co-Founder and CEO at Value, a apporté une perspective continentale essentielle en recentrant la réflexion sur les enjeux spécifiques du continent africain. Il a souligné avec force que la première priorité stratégique pour l’Afrique est de ne pas manquer la révolution de l’intelligence artificielle, un impératif qui pourrait déterminer la trajectoire de développement du continent pour les décennies à venir. Il a mis en évidence le saut de développement considérable que l’Afrique est contrainte d’opérer dans un contexte démographique et économique particulièrement tendu.
Le continent fait face à une véritable bombe sociale : il représente actuellement environ 18 % de la population mondiale. Une proportion qui devrait augmenter significativement pour atteindre 28% d’ici 2050. Avec une part croissante de jeunes de moins de quinze ans. Pourtant, malgré ce poids démographique considérable et croissant, l’Afrique ne représente que 4 % du PIB mondial. Dans ce contexte de déséquilibre profond, l’IA apparaît comme un levier fondamental de transformation, absolument indispensable pour révolutionner des secteurs clés tels que l’éducation. Permettant alors une formation massive et de qualité, la santé, améliorant l’accès aux soins et leur qualité, et la finance, facilitant l’inclusion financière et le développement économique.
Cependant, cet impératif de croissance rapide et de rattrapage économique se trouve mis en tension considérable par la question climatique globale. Monsieur Ben Rayana a exposé un dilemme crucial : si l’Afrique suivait le même modèle de croissance fortement carbonée que d’autres nations ont emprunté lors de leur propre rattrapage économique historique, elle pourrait consommer près de 50 % du budget carbone restant qui est encore disponible pour limiter le réchauffement climatique à un niveau de 1,5 degré Celsius, le seuil critique identifié par les scientifiques.
Face à cette équation complexe, la double priorité pour les gouvernements africains s’impose avec évidence : ils doivent investir massivement et simultanément dans la technologie, particulièrement l’intelligence artificielle; tout en développant de manière accélérée les énergies renouvelables pour atténuer significativement l’impact environnemental de leur décarbonation progressive et de leur développement économique.
Monsieur Ben Rayana a également exprimé une préférence marquée pour le concept plus englobant de durabilité plutôt que pour celui, plus restrictif selon lui, de cadre réglementaire ESG. Ce dernier étant souvent perçu comme une source de complexité excessive dans le reporting et un terrain propice au green washing superficiel. Selon sa vision, l’IA doit être utilisée de manière stratégique pour aider les entreprises africaines à concevoir des stratégies de durabilité véritablement pertinentes et adaptées à leur contexte. Et ce, en s’assurant méticuleusement que ces critères de durabilité ne contredisent pas leurs objectifs stratégiques fondamentaux. Il a pris l’exemple de l’industrie minière, un secteur particulièrement important pour de nombreux pays africains, où l’impact sur les communautés locales est absolument déterminant pour la pérennité même de l’activité extractive. Sa priorité opérationnelle demeure de mesurer l’impact réel et tangible avant de procéder à l’innovation ou au lancement de tout projet d’envergure.
Les défis émergents : cognition, énergie et gouvernance
Les intervenants du panel ont également soulevé avec acuité les risques nouveaux et considérables que la prolifération rapide de l’IA, notamment à travers l’émergence des agents autonomes, fait peser sur la gouvernance sociétale et sur l’humanité elle-même dans ses fondements cognitifs et organisationnels.
Ahmed Kaddour a particulièrement insisté sur l’émergence des agents IA autonomes, des systèmes dotés de capacités de raisonnement et de prise de décision indépendante. Le défi imminent et pressant concerne la gouvernance de ces agents aux capacités sans précédent. Il a évoqué la nécessité urgente de développer ce qu’il appelle des Constitutions IA, c’est-à-dire des ensembles structurés de lois et de règles destinés à encadrer rigoureusement ces systèmes, exactement de la même manière que les êtres humains sont régis par le droit positif et les normes sociales. Ces agents autonomes ont impérativement besoin de règles clairement définies par l’humain avant même d’être mis en œuvre dans des environnements réels.
Deux risques majeurs émergent selon l’analyse de Monsieur Kaddour. Le premier concerne l’implication cognitive profonde de l’usage massif de l’IA. Il a évoqué le phénomène bien documenté du Google Effect, ce processus par lequel le cerveau humain externalise progressivement sa fonction mémorielle vers Internet et les moteurs de recherche. Il craint légitimement que l’externalisation croissante de l’intelligence vers des systèmes conversationnels comme ChatGPT ne conduise à une diminution progressive des capacités cognitives humaines fondamentales, menant potentiellement à une perte dangereuse de contrôle du raisonnement critique. Il a martelé que l’humain doit absolument conserver sa capacité de raisonnement critique autonome, cette faculté qui constitue le cœur de l’intelligence humaine.
Le second risque majeur concerne l’impact énergétique considérable de l’infrastructure de l’IA. Les centres de données nécessaires au fonctionnement des systèmes d’intelligence artificielle représentent déjà environ 1,5 % de la consommation électrique mondiale totale. Une proportion qui atteint même 5 % aux États-Unis, le pays hébergeant la plus forte concentration de ces infrastructures.
Pour pallier à cet impact énergétique préoccupant et croissant, Maledh Marrakchi et Ahmed Kaddour ont conjointement plaidé avec conviction pour une rationalisation profonde de l’usage de l’IA. Il est absolument impératif, estiment-ils, de ne pas utiliser des modèles surpuissants pour des tâches relativement simples qui ne nécessitent pas une telle puissance de calcul. Ils ont utilisé la métaphore parlante de la voiture de Formule 1 : il serait absurde d’utiliser un tel véhicule ultra-performant pour effectuer de simples courses quotidiennes. La solution pragmatique et écologiquement responsable réside dans l’adoption généralisée de Small Language Models, des modèles linguistiques de petite taille. Lesquels sont considérablement moins gourmands en énergie tout en étant parfaitement ciblés et efficaces sur des domaines précis et délimités.
Monsieur Kaddour a également souligné l’importance cruciale du Prompt Engineering, cette ingénierie des instructions données aux systèmes d’IA. Il a insisté sur le fait que l’humain doit investir du temps et de la réflexion en amont pour développer méticuleusement l’architecture conceptuelle et le plan détaillé d’un projet, afin d’optimiser véritablement l’utilisation des capacités de l’IA et de s’assurer fermement de ne pas mobiliser inutilement une machine trop puissante pour des tâches qui ne le justifient pas. L’IA doit impérativement rester un outil auxiliaire qui aide à résoudre des problèmes préalablement et clairement analysés par l’intelligence humaine.
Maintenir l’humain au centre
Face à l’ensemble de ces défis techniques, éthiques et environnementaux, tous les panélistes ont réitéré avec une unanimité remarquable l’importance absolument fondamentale de maintenir le principe de l’human in the loop, c’est-à-dire l’humain dans la boucle décisionnelle. Ce principe garantit que l’outil technologique, aussi sophistiqué et puissant soit-il, ne se substitue jamais au décideur final humain. Préservant ainsi la responsabilité ultime, le jugement éthique et la capacité de discernement qui caractérisent l’humanité et qui doivent demeurer au cœur de toute utilisation de l’intelligence artificielle.
Le secrétaire d’État chargé de la Transition énergétique auprès du ministère de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie, Wael Chouchène, est intervenu lors de l’African ESG Summit, organisé par nos confrères de Managers et centré cette année sur le thème « AI X ESG : From Insight to Impact ».
Dans son intervention à l’African ESG Summit, M. Chouchène a souligné que le continent africain se trouve à un moment décisif où il doit transformer ses défis en opportunités et faire de la durabilité non pas un simple sauveur, mais un moteur de croissance, d’innovation et de souveraineté.
Le secrétaire d’Etat a insisté sur le fait que l’Afrique doit affirmer sa place dans la dynamique mondiale en tant que simple importateur de modèles, mais plutôt comme un acteur souverain porteur de solutions ancrées dans sa réalité et dans sa jeunesse. Le continent dispose des ressources naturelles, humaines et intellectuelles nécessaires pour tracer sa propre voie, dit-il. Car, l’Afrique représente notamment 60 % du potentiel solaire mondial, détient une quantité considérable de ressources critiques et bénéficie d’une population jeune et créative, fait-il savoir. Ces atouts doivent servir une vision de développement fondée sur la durabilité, la responsabilité et la confiance en ses propres capacités.
La Tunisie, pour sa part, s’inscrit pleinement dans cette dynamique, tient à souligner M. Chouchène. Sa stratégie industrielle et énergétique à l’horizon 2035 démontre un engagement clair pour une économie verte, la croissance inclusive et la préservation de l’environnement; ainsi qu’une participation active aux initiatives africaines et méditerranéennes.
Tunisie, pôle africain et euro-méditerranéen dans des secteurs stratégiques
Sur le plan industriel, la Tunisie s’est imposée comme un pôle africain et euro-méditerranéen dans plusieurs secteurs stratégiques. En effet, le pays compte plus de 6 000 entreprises industrielles, dont 2 000 sont totalement exportatrices et intégrées aux chaînes de valeur africaines et européennes.
La Tunisie bénéficie d’une main-d’œuvre hautement qualifiée, avec plus de 10 000 ingénieurs diplômés chaque année, dont environ 300 sont spécialisés dans la digitalisation.
Grâce à ses partenariats historiques avec l’Union européenne et son ancrage africain, la Tunisie est considérée comme un pont naturel entre l’Afrique et l’Europe, offrant une plateforme stratégique pour les investissements technologiques et la coopération industrielle. Ces réalisations traduisent une volonté claire d’être non seulement un acteur national engagé, mais aussi un partenaire africain de confiance et un centre continental de compétence.
Le thème du sommet, consacré à l’intelligence artificielle (IA) responsable, notamment dans le contexte de l’Industrie 4.0, résonne particulièrement avec les priorités nationales et régionales.
L’IA, si elle est bien encadrée, peut devenir un levier exceptionnel pour accélérer la transition énergétique, moderniser les industries et renforcer la transparence. Elle peut optimiser la gestion des réseaux électriques, améliorer la maintenance prédictive des infrastructures et renforcer l’efficacité énergétique.
Cependant, cette transformation numérique doit être responsable : elle doit respecter les principes éthiques, garantir la protection des données et, surtout, servir l’humain et le bien commun.
L’Industrie 4.0 ouvre la voie à une nouvelle ère de compétitivité en combinant numérisation, automatisation et énergie propre. L’objectif est de bâtir des modèles industriels sobres, résilients et inclusifs, capables de créer de la valeur localement tout en renforçant la souveraineté énergétique et technologique des pays africains.
Le secrétaire d’État a rappelé lors de l’African ESG Summit qu’aucune stratégie ESG ni aucun modèle de croissance durable ne peut réussir sans énergie. L’énergie étant la condition de toute transformation, la transition énergétique constitue la colonne vertébrale de la politique nationale tunisienne.
En Tunisie, une transformation structurelle a été engagée pour accélérer le déploiement des énergies renouvelables, moderniser les infrastructures électriques et mobiliser l’investissement, qu’il soit public ou privé.
M. Chouchène a affirmé que l’énergie verte est un choix de souveraineté, de compétitivité et d’avenir. Elle crée de l’emploi, soutient l’innovation industrielle et offre aux jeunes ingénieurs des perspectives concrètes dans leur propre pays. Dans ce contexte, des cadres réglementaires sont développés pour favoriser l’investissement durable, la transparence et la responsabilité totale. Alignant ainsi les politiques économiques nationales sur les objectifs de durabilité.
En outre, il exhorte l’Afrique à écrire sa propre transition, fondée sur la solidarité régionale, l’innovation partagée et l’exploitation de ses ressources. Il a insisté sur le fait que l’Afrique doit être un espace d’investissement durable, de technologie et de compétence, conditions essentielles pour s’imposer comme un acteur stratégique dans la construction de l’ordre mondial.
La responsabilité collective est de bâtir une Afrique qui produit son énergie, valorise ses données et forme ses talents. Tout en conjuguant intelligence artificielle, industrie innovante et énergie verte pour une croissance souveraine et responsable.
À l’horizon 2026, la Tunisie s’engage dans une refonte économique et sociale d’envergure. Le gouvernement a détaillé, mercredi, les piliers de sa feuille de route pour les prochaines années, lors d’un Conseil ministériel présidé par la cheffe du gouvernement, Sarra Zaâfrani Zenzri.
L’année 2026 marquera un tournant avec le lancement officiel du plan de développement 2026-2030. Particularité de ce programme : une élaboration ascendante, partant des réalités locales vers les échelons régionaux et national. Objectif affiché : éviter les déséquilibres territoriaux et instaurer une croissance mieux répartie.
La politique présentée s’articule autour de plusieurs axes stratégiques. Le ministre de l’Économie et de la Planification, Samir Abdelhafidh, a insisté sur la protection du pouvoir d’achat des ménages modestes et moyens. La relance productive, le rétablissement des équilibres financiers et l’accélération des grands projets structurants complètent ce dispositif.
Dans le détail, l’exécutif mise sur une meilleure intégration économique, la garantie de l’égalité des chances et un filet social renforcé. L’amélioration du système de santé, la lutte contre le chômage et le soutien au logement social figurent également parmi les engagements clés.
Réformes structurelles et investissement dans l’humain
Le volet compétitivité n’est pas en reste. Le gouvernement promet une modernisation de l’administration et des mesures pour améliorer le climat des affaires. Le développement du capital humain est érigé en priorité, avec des investissements annoncés dans l’éducation, la recherche et la formation professionnelle.
Le secteur agricole et la transition énergétique sont aussi dans le collimateur : modernisation des pratiques, gestion durable de l’eau et promotion des énergies renouvelables sont au programme.
Le citoyen au cœur du dispositif
Sarra Zaâfrani Zenzri a rappelé l’impératif des réformes structurelles. Celles-ci devront, selon elle, concilier justice sociale et impératifs de croissance, en plaçant systématiquement « le citoyen au centre de toutes les politiques ». Reste désormais à passer de la stratégie à la mise en œuvre.
Le ministère de la Santé a annoncé le recrutement de 20 pharmaciens et 20 médecins dentistes pour le secteur public, selon deux arrêtés publiés le 7 octobre 2025 au Journal officiel de la République tunisienne (JORT).
Le concours sur titres et travaux pour les pharmaciens débutera le 11 décembre 2025 et se poursuivra les jours suivants. Les dossiers de candidature devront être déposés avant le 11 novembre 2025, conformément au premier arrêté ministériel.
Quant au concours pour les médecins dentistes de la santé publique, il se tiendra à partir du 16 décembre 2025. La date limite de dépôt des candidatures est fixée au 17 novembre 2025, selon le second arrêté du ministère de la Santé. Ces recrutements s’inscrivent dans le cadre du renforcement du personnel médical du secteur public.
Malek Kashlaf, directeur général de la coopération internationale au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, a déclaré mercredi 8 octobre 2025, lors de son intervention dans l’émission « Midi Mag », que 10% des étudiants tunisiens, soit plus de 30 000 personnes, poursuivent leurs études à l’étranger. Ce taux représente trois fois la moyenne mondiale.
M. Kashlaf a précisé que la France demeure la première destination des étudiants tunisiens, suivie de l’Allemagne, du Canada, de l’Italie, de l’Espagne, de la Turquie, de la Russie, des États-Unis et du Royaume-Uni.
Il a également fait état de l’émergence de nouvelles destinations prisées par les étudiants tunisiens, notamment la Hongrie et la Chine. Le responsable a souligné que le phénomène des études à l’étranger s’est amplifié à l’échelle mondiale, le nombre d’étudiants internationaux ayant quadruplé au cours des 25 dernières années.
M. Kashlaf a affirmé que le ministère de l’Enseignement supérieur propose des programmes de bourses et de coopération pour les études à l’étranger. Il a ajouté que l’étudiant tunisien qui se distingue à l’international et devient un acteur économique actif représente une grande valeur et profite au ministère lui-même. « De nombreux professeurs universitaires qui exercent en Tunisie ont poursuivi leur formation à l’étranger et sont diplômés d’universités internationales », a-t-il précisé.
Tunis abrite cette semaine la 21ᵉ édition du CorporateRegisters Forum (CRF), la plus importante association mondiale des registres de commerce. Placé sous le thème « Nouveaux défis pour les registres du commerce : plus de transparence et d’efficacité », l’événement réunit 180 délégués représentant 65 pays. Il s’agit de la première organisation du forum au Maghreb et dans un pays francophone, marquant ainsi une étape symbolique dans l’histoire de cette instance internationale.
Le secrétaire général du CRF, Martin Fidler Jones, a confirmé la tenue de cette édition à Tunis en saluant « un dossier magnifique » présenté par la Tunisie. Il a souligné que cette rencontre mondiale place la lutte contre le blanchiment d’argent et le renforcement de la transparence économique au cœur des priorités. Selon lui, les registres de commerce à travers le monde sont confrontés à une tension permanente entre la nécessité de transparence, la lutte contre le blanchiment et la protection de la vie privée. Cette problématique universelle pose la question du niveau d’information que les pays doivent exiger des entreprises pour pouvoir combattre efficacement les flux financiers illicites.
Interrogé sur le rôle de la technologie dans ce combat, Martin Fidler Jones s’est montré optimiste. Il considère l’intelligence artificielle comme un outil essentiel pour renforcer la capacité des registres à détecter les comportements suspects et à anticiper les risques. Cette vision trouve un écho particulier en Tunisie, où le Registre National des Entreprises (RNE) a annoncé une stratégie ambitieuse de modernisation. Son directeur général, Mohamed AdelChouari, également directeur de cette session du CRF, a affirmé que le RNE vise une digitalisation complète d’ici 2027, dans le but de devenir un registre intelligent capable de repérer automatiquement les fraudes et d’anticiper les menaces liées au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme.
Selon Mohamed AdelChouari, près des trois quarts des services du RNE sont déjà digitalisés. L’objectif est d’atteindre le 100 % numérique dans les prochaines années afin de permettre aux usagers d’effectuer l’ensemble de leurs démarches à distance. Cette transformation nécessite une mise à niveau parallèle de l’infrastructure nationale, notamment en matière de signature électronique et de sécurisation des dépôts en ligne, pour garantir la valeur juridique des documents électroniques. Le directeur général a également évoqué la possibilité d’adopter à terme le « smart contracting », ou contrat électronique, pour éliminer totalement l’usage du papier.
Les discussions au sein du forum ont permis d’identifier plusieurs défis majeurs pour les registres à l’ère de la mondialisation. Le premier concerne l’équilibre délicat entre l’ouverture des données au public et la protection des informations personnelles, dans un contexte où les exigences de transparence se multiplient. Le second défi réside dans la nécessité d’assurer un accès rapide et fiable aux informations, en particulier pour les institutions financières et les organismes publics. Le troisième enjeu découle des pressions réglementaires internationales, notamment celles du Groupe d’action financière (GAFI), qui impose des règles strictes en matière de conformité, d’analyse de données et de lutte contre le blanchiment.
Cette édition du CRF à Tunis se distingue également par son ouverture au secteur privé. Le RNE a souhaité dépasser le cadre strictement institutionnel en intégrant une dimension économique et technologique. Des entreprises partenaires ont participé au forum à travers des expositions et des échanges dédiés, favorisant les rencontres entre acteurs publics et privés. Une plateforme numérique a été créée pour mettre en relation les participants avant même le début de l’événement, tandis que des espaces de rencontre ont été aménagés à Tunis pour faciliter les échanges entre représentants des gouvernements, institutions et entreprises.
L’Institut national de la statistique (INS) a enregistré un léger recul du taux d’inflation en septembre 2025, passant de 5,2 % en août à 5 %. C’est ce que révèle une note consacrée à l’indice des prix à la consommation publiée dimanche. Dans une déclaration accordée à l’Economiste Maghrébin, l’expert en économie et finance Maher Belhadj a analysé cette baisse et ses implications sur la politique monétaire tunisienne.
Maher Belhadj considère cette régression comme « la récompense de la politique menée précédemment ». L’expert explique que cette diminution de l’indice des prix permet désormais d’envisager une baisse du Taux d’Intérêt Directeur (TID) ou Taux du Marché Monétaire (TMM). Il rappelle que l’objectif initial fixait le plafond de l’inflation à 5 %. Cette baisse envisagée du TID vise principalement à renflouer la demande et à orienter l’investissement afin de booster les fonds et de stimuler la croissance économique. Maher Belhadj insiste sur le fait que cette politique est suivie étape par étape.
Il estime que plusieurs facteurs ont accéléré la baisse de l’inflation, notamment le contrôle exercé sur les circuits de distribution qui étaient auparavant, dixit l’expert, débridés et sans aucune régulation. Maher Belhadj souligne que la pression exercée sur ces circuits s’avère essentielle pour la compression des prix, particulièrement ceux des produits de première nécessité, permettant ainsi d’espérer une amélioration du pouvoir d’achat des ménages.
La détente sur l’inflation importée
L’expert met également en avant le recul de l’inflation importée comme facteur clé. Il rappelle que cette inflation était très élevée lorsque le dollar était fort, le panier de devises national étant historiquement composé de 80 % de dollars et de 20 % d’euros. La configuration actuelle, avec un euro qui monte tandis que le dollar baisse, joue en faveur de la Tunisie. Maher Belhadj identifie également la diminution des importations abusives comme un facteur important de cette décrue inflationniste.
Le marché parallèle, ennemi persistant de la stabilité des prix
L’expert a souligné que la hausse initiale du taux d’inflation n’était pas uniquement due à la demande sur les fonds ou la liquidité, mais principalement causée par un marché parallèle qui fonctionnait jusqu’à 80 %. Cette situation a entraîné une demande importante de liquidité et de monnaie fiduciaire, atteignant environ 25 milliards de dinars. De plus, l’absence de numérisation de l’administration empêche la traçabilité des circuits de vente, maintenant ainsi une présence significative du marché parallèle.
Bien que l’inflation soit mesurée à 5 %, Maher Belhadj estime que ce chiffre reflète un combat constant. L’État lutte depuis environ trois ans contre des pratiques de « marginalité sauvage » et des acteurs qui s’y sont habitués. À titre d’exemple, l’expert mentionne la pénurie actuelle de beurre. Le beurre étant un produit libéré, des acteurs du marché chercheraient à faire monter son prix en interrompant sa production ou en détournant la matière première, comme le lait, vers d’autres produits plus rentables.
Le secrétaire général du Corporate Registers Forum (CRF), la plus importante association mondiale des registres de commerce, a confirmé la tenue de l’événement mondial « CRF Tunisia 2025 » en Tunisie cette semaine. Tout en plaçant la lutte contre le blanchiment d’argent et le renforcement de la transparence des affaires au cœur des priorités.
Martin Fidler Jones a identifié avec précision le défi central auquel sont confrontés les registres d’entreprises à travers le monde : « La bataille constante entre la nécessité de transparence; la lutte contre le blanchiment d’argent; et la question de la vie privée ». Cette tension universelle soulève une question cruciale concernant le niveau de détail que les pays devraient détenir sur les sociétés pour pouvoir combattre efficacement le blanchiment de l’argent.
Interrogé sur le rôle de l’intelligence artificielle dans ce combat, le secrétaire général a adopté une position résolument optimiste. Loin d’y voir une difficulté supplémentaire, Martin Fidler Jones considère l’IA comme « un outil majeur pour aider à contrecarrer le blanchiment de l’argent ». Cette vision technologique s’inscrit dans une stratégie globale de modernisation des registres de commerce visant à renforcer leur capacité de détection et d’anticipation des activités suspectes.
La sélection de la Tunisie comme pays hôte découle de la présentation d’un « dossier magnifique », selon les termes de Martin Fidler Jones. Le CRF adopte une stratégie itinérante en déplaçant son forum chaque année dans différents pays, qu’ils soient grands ou petits, développés ou en développement, dans le but d’explorer la perspective spécifique de chaque nation et de « fêter la diversité » de son association. Cette édition tunisienne marque une double première historique puisqu’il s’agit du premier événement organisé au Maghreb et du premier accueilli par un pays francophone. Le continent africain avait déjà reçu le forum, notamment en Ouganda en 2020 sous format virtuel et au Botswana en 2015.
Le Registre National des Entreprises (RNE) vise la digitalisation totale d’ici 2027 et l’intégration de l’intelligence artificielle pour transformer la Tunisie en « registre intelligent » capable de détecter automatiquement les fraudes. C’est ce qu’a annoncé son directeur général Mohamed Adel CHOUARI, dans une déclaration aux médias. Et ce, lors du Corporate Register Forum 2025 qui s’est tenu à Tunis, avec une participation record de 180 délégués venus de 65 pays.
Cette première édition tunisienne du forum international marque un tournant historique puisque le pays accueille pour la première fois cette conférence mondiale des registres de commerce qui en est à sa trentième session environ. D’ailleurs, c’est pour la première fois que l’événement se tient dans un pays francophone et au Maghreb. Le directeur général du RNE, Mohamed Adel CHOUARI, également directeur de cette session 2025, a révélé une stratégie ambitieuse de modernisation basée sur une maturité digitale déjà avancée, avec « pratiquement les trois quarts des services du RNE déjà digitalisés ». L’objectif affiché est d' »atteindre le 100 % digital dans les deux ou trois ans à venir », permettant ainsi aux usagers d’effectuer l’intégralité de leurs démarches à distance.
Le DG a particulièrement insisté sur le rôle stratégique de l’intelligence artificielle dans la mutation du registre. « Si l’IA peut aider à détecter la non-conformité dans les dossiers, elle deviendra un outil très efficace et redoutable », a-t-il déclaré. Tout en précisant que cette technologie permettrait « d’anticiper sur ce qui pourrait advenir ». Cette évolution transformerait le RNE d’un « registre passif » qui se contente de recevoir et transcrire des dossiers, en un « registre intelligent » capable de détecter la fraude ou les présomptions de fraude avant qu’elles ne se concrétisent. L’analyse massive de données via l’IA constituerait ainsi un outil redoutable pour la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.
Trois défis majeurs identifiés
Placée sur le thème « Nouveaux défis pour les registres du commerce : plus de transparence et d’efficacité », cette 21ème édition a permis au directeur général d’identifier les enjeux cruciaux auxquels font face les registres à l’ère de la mondialisation.
Le premier défi concerne « l’équilibre délicat entre l’ouverture des registres au public et la protection des données personnelles ». Un arbitrage devenu complexe dans un contexte d’exigence croissante de transparence économique.
Le deuxième enjeu porte sur « la nécessité d’assurer un accès rapide et à des informations fiables en temps réel pour les utilisateurs, en particulier les institutions financières et les établissements publics comme la justice ».
Le troisième défi découle des pressions réglementaires internationales, notamment les recommandations du GAFI qui « imposent au RNE de suivre certaines règles strictes en matière de prudence, de conformité, d’analyse de données et de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme ».
Une infrastructure nationale à moderniser
Pour concrétiser cette vision du tout digital, le directeur général a souligné la nécessité d’une mise à niveau parallèle de l’infrastructure nationale, notamment concernant la signature électronique et les clés de dépôt garantissant la valeur probante des documents électroniques. L’ambition ultime du RNE vise l’adoption du « smart contracting » ou contrat électronique pour éliminer complètement l’usage du papier ». Cette transformation concerne un fichier qui englobe actuellement 850 000 entités réparties entre personnes physiques comme les commerçants, artisans et professions libérales, et personnes morales incluant toutes formes de sociétés et associations.
Innovation majeure de cette édition, le directeur général a annoncé avoir voulu « dépasser le simple cadre intellectuel pour en faire également un forum de business ». Pour cette session, le RNE a fait le choix stratégique de « faire participer activement le secteur privé, notamment par le sponsoring et l’exposition de solutions technologiques ». Et ce, en justifiant cette approche par le fait que « le registre de commerce est de plus en plus basé sur la nouvelle technologie ». L’objectif consistait à « offrir une opportunité d’échanges entre le secteur privé qui propose des solutions techniques et technologiques, et le secteur public (les registres) qui en a besoin ».
Une plateforme digitale a été spécialement créée pour mettre en relation les participants avant même le forum. Tandis que des salles ont été dédiées à Tunis pour des rencontres physiques facilitant les échanges « B2B (Business to Business), B2G (Business to Government) ou G2G (Government to Government) ».
Le Musée d’art de Tokyo Fuji abrite depuis vendredi l’exposition « Tunis : voies d’échanges culturels avec le monde », un événement marquant les 70 ans de relations diplomatiques entre la Tunisie et le Japon. L’initiative met en avant la culture tunisienne dans une perspective de coopération économique et touristique.
Organisée par la mission diplomatique tunisienne à Tokyo, l’exposition s’inscrit dans une démarche de diplomatie culturelle visant à renforcer la visibilité de la Tunisie sur la scène asiatique. En valorisant l’artisanat, les arts plastiques et le patrimoine immatériel du pays, l’événement entend consolider les échanges culturels et encourager un dialogue durable entre les deux nations.
Le parcours proposé au public japonais combine approche artistique et immersion sensorielle. Les visiteurs découvrent des œuvres d’art contemporain, des objets artisanaux, un espace consacré à la promotion touristique ainsi qu’un stand de produits du terroir. Cette organisation cherche à illustrer la diversité du patrimoine tunisien et à stimuler l’intérêt pour ses filières créatives et touristiques.
La présence d’ambassadeurs, de diplomates et de figures influentes du secteur culturel japonais à la cérémonie d’ouverture traduit la portée institutionnelle de l’événement. Au-delà de la promotion culturelle, cette exposition constitue un instrument de valorisation économique : elle soutient les exportations artisanales, renforce l’image de marque du pays et ouvre des perspectives de partenariats dans les industries culturelles et touristiques.
En se poursuivant jusqu’à la fin janvier 2026, « Tunis : voies d’échanges culturels avec le monde » offre un cadre durable pour développer les échanges entre les acteurs culturels des deux rives. Les retombées escomptées concernent autant la diversification de l’offre touristique tunisienne que le positionnement de la Tunisie comme passerelle culturelle entre l’Afrique, le monde arabe et l’Asie.
À partir du 23 septembre 2025, les entreprises prestataires de services sont tenues de constituer une garantie financière représentant 20 % du montant de chaque contrat signé. Cette mesure, issue de la loi n°2025-9 encadrant la sous-traitance, vise à sécuriser le versement des salaires et cotisations sociales en cas de défaillance. Elle s’applique dans un délai de trois jours après la signature du contrat et reste mobilisable pendant toute son exécution.
Jusqu’à présent, en cas de défaut de paiement d’un prestataire, les salariés risquaient l’impayé et les entreprises clientes devaient engager des procédures judiciaires longues et coûteuses pour régulariser la situation. Ce dispositif entend répondre à ce double enjeu : protéger les travailleurs et simplifier le recouvrement des créances.
Hafedh Laamouri, ancien ministre de la Formation professionnelle et de l’Emploi, a salué sur Express FM, le 6 octobre 2025, cette avancée réglementaire. Le mécanisme permet à l’entreprise bénéficiaire d’intervenir directement si le prestataire ne règle pas les sommes dues sous sept jours après échéance. Celle-ci peut alors se faire rembourser via la garantie bancaire, sans passer par une action en justice.
Le texte rend la garantie obligatoire pour tous les marchés conclus avec des établissements publics. Les entreprises privées conservent quant à elles le choix d’y recourir. Le ministère des Affaires sociales pourra moduler le taux de 20 %, afin de prendre en compte la situation des petites et moyennes entreprises. Seules les missions ponctuelles ou spécialisées sont concernées. Les activités permanentes, comme le nettoyage ou la sécurité, restent exclues du champ de la sous-traitance autorisée. Ce dispositif renforce la sécurité contractuelle et la trésorerie des travailleurs. Il limite les interruptions de paiement et réduit les litiges. Favorisant ainsi un environnement économique plus prévisible. La flexibilité du taux de garantie et son application ciblée visent à concilier protection sociale et soutien aux TPE-PME.