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Par Mehdi Taje: De l’impératif d’un radar ou sonar géopolitique pour les entreprises tunisiennes (2ème partie)

22. September 2025 um 11:49

De l’impératif d’un radar géopolitique pour les entreprises tunisiennes

Dans ce contexte, dans un livre blanc paru le 16 janvier 2025 , le Forum Mondial de Davos invite les chefs d’entreprise à faire preuve de lucidité et de réalisme et à doter leurs entreprises d’un « radar ou sonar géopolitique ». A l’image d’un radar de navigation pour un avion ou un sonar pour un navire, le radar géopolitique balaie les champs géopolitiques et géoéconomiques dans lesquels s’insère l’activité d’une entreprise et identifie les risques, les menaces mais également les opportunités découlant de cet environnement et leur impact sur l’activité particulière de l’entreprise. C’est du sur-mesure, en fonction de l’activité de l’entreprise. Imagineriez-vous monter dans un avion en apprenant que le radar est en panne ou que les sondes picot sont défaillantes ? Il en est de même pour conduire de nuit, en roulant très vite et avec des phares portant de moins en moins loin. Le réflexe sera de ralentir, voire de s’arrêter au risque de faire un accident. Là encore, il en est de même pour l’entreprise. Or, pour une entreprise, ralentir, voire s’arrêter, ce sont des pertes sèches et lourdes avec le risque de disparaître.

Outre le radar, le sonar permet, sur la base de la mesure de concentrations de germes ou facteurs favorables à l’éclosion d’une menace ou d’une opportunité, de détecter des tendances plus profondes et plus lentes qui ne sont pas encore visibles, mais qui sont susceptibles d’avoir des impacts importants à moyen et long termes. Ainsi, la menace est prise en compte avant même d’avoir émergée et l’opportunité est saisie bien avant la concurrence.

Dans ce contexte, l’analyse géopolitique vise à affuter le regard, à « éduquer et repérer les zones de contact, de frictions et d’échanges où vont naître les événements porteurs d’avenir » . Comprendre, analyser le jeu des acteurs, notamment des concurrents, distinguer le structurel du conjoncturel, détecter les signaux faibles et les facteurs de changement, lister les risques, menaces et opportunités, telles sont les finalités poursuivies par une approche géopolitique et prospective appliquée à l’entreprise.

Par voie de conséquence, toute entreprise tunisienne exerçant une activité à l’étranger doit être en mesure d’anticiper les évolutions socio-politiques et géopolitiques de l’environnement dans lequel s’insère son activité. Cette démarche relève d’une approche anticipative des risques réduisant les coûts inhérents à toute gestion dans l’urgence. L’étude géopolitique d’une zone révèlera à une entreprise la personnalité stratégique de cet espace, ses enjeux, les dynamiques qui le structurent et ainsi les risques mais aussi les opportunités qu’il projette. L’analyse géopolitique, grille de lecture devenue incontournable afin de déchiffrer les enjeux régionaux et internationaux, constitue un outil managérial d’aide à la décision stratégique en environnement fortement incertain. Il s’agit de comprendre, de distinguer le structurel du conjoncturel afin de mieux agir et d’optimiser ses process en décidant mieux en toute lucidité.

Convenons que sans vision d’avenir, aucune décision n’est envisageable. En effet, en l’absence d’éléments suffisants d’aide à la prise de décision, laquelle, en termes de stratégie d’entreprise signifie toujours une prise de risque, le danger est qu’il y ait mauvaise décision, voire encore plus fréquemment absence de décision tout simplement ! En effet, décider, c’est prendre le risque de se tromper. Nombreux sont ceux qui préfèrent attendre que les événements décident pour eux, plutôt que de choisir de peser significativement sur ce qui leur arrive et va leur arriver au risque d’engager leur responsabilité.

Les gains espérés par la mise en place d’un radar géopolitique

Dans ce cadre, pour un chef d’entreprise confronté quotidiennement à des gestions de crises amenées à se multiplier, il convient d’être en mesure d’identifier les crises (et les risques), de les apprécier et d’en mesurer l’intensité (les tenants et les aboutissants). Dans ce contexte, les outils d’anticipation s’avèrent précieux. En effet, débouchant sur un modèle causal de la crise spécifique à chaque entreprise, ils permettent de s’affranchir du flou inhérent aux effets induits (la crise est là mais l’on ne comprend pas ce qu’il y a derrière) : diagnostic de la crise, modèle explicatif et scénarios de sortie de crise permettent de limiter les pertes qui peuvent s’avérer catastrophiques si la crise est mal gérée car mal comprise.

Plus globalement et de manière schématique et purement illustrative, voici les gains espérés pour un chef d’entreprise tunisien à travers la mise en place d’un radar géopolitique :
1. Protéger et sécuriser son entreprise

Anticiper les crises et réduire les pertes financières
• Exemple : Vous importez des matières premières ? Un radar géopolitique vous permet d’anticiper les hausses de prix liées aux tensions internationales (ex. guerre en Ukraine et flambée du blé, choc sur l’énergie, etc.). Vous pouvez ainsi sécuriser des contrats à l’avance et éviter des surcoûts.

• Résultat : Moins d’imprévus, une gestion optimisée des coûts et une meilleure rentabilité.
Protéger ses chaînes d’approvisionnement et sa logistique

• Exemple : Si vous dépendez d’importations de Chine ou d’Europe, un radar géopolitique vous alerte sur les risques de rupture de stock ou de retards (ex. crise en mer Rouge avec les Houthis bloquant les routes maritimes, actes de piraterie, risque de blocus naval, conflit armé menaçant une route maritime cruciale pour l’entreprise, etc.).

• Résultat : Vous trouvez des fournisseurs alternatifs à temps, ce qui vous évite des retards et des pertes de chiffre d’affaires.
Respecter les réglementations et éviter les sanctions

• Exemple : L’Union Européenne met en place une taxe carbone aux frontières (CBAM). Si votre entreprise exporte vers l’UE, vous devez adapter votre production aux normes écologiques pour éviter des surcoûts.

• Résultat : En anticipant ces changements, vous prenez de l’avance sur vos concurrents et restez conforme aux nouvelles règles du marché.
2. Développer l’Entreprise et accroître son chiffre d’affaires

Identifier de « Nouveaux marchés » et opportunités

• Exemple : Avec la ZLECAf (Zone de Libre-Échange Continentale Africaine), la Tunisie peut vendre plus facilement ses produits en Afrique. Un radar géopolitique aidera à repérer les pays les plus prometteurs et à adapter sa stratégie.

• Résultat : Vous diversifiez vos marchés, réduisez votre dépendance à l’Europe et accédez à de nouveaux clients en sécurisant votre investissement et en prenant de l’avance sur la concurrence.

Profiter des bouleversements géopolitiques pour croître et non subir avec des pertes

• Exemple : Si les tensions entre les États-Unis et la Chine ralentissent les exportations chinoises vers l’Europe, cela crée des opportunités pour les entreprises tunisiennes qui peuvent se positionner comme alternative.

• Résultat : Vous adaptez votre stratégie pour capter ces nouveaux marchés et développez vos parts de marché.
Optimiser les investissements et choisir les bons partenaires

• Exemple : Vous envisagez un investissement immobilier ou industriel ? Un radar géopolitique vous aide à comprendre les risques pays, la stabilité des zones et les tendances et lignes de force économiques et sociales.

• Résultat : Vous prenez de meilleures décisions d’investissement, en évitant les marchés à risque et en profitant des régions en croissance et à fort potentiel.

3. Améliorer et optimiser la gestion de l’Entreprise

Passer d’une gestion réactive à une stratégie proactive

• Exemple : Sans radar géopolitique, vous subissez les crises (hausse des coûts, rupture de stock, nouvelles taxes). Avec un suivi constant, vous prenez de l’avance et pouvez ajuster votre stratégie avant que les problèmes ne surviennent.

• Résultat : Vous réduisez l’incertitude, optimisez vos décisions et gagnez en sérénité.
Attirer des partenaires et investisseurs internationaux
• Exemple : Un investisseur étranger recherche une entreprise fiable en Tunisie. Si vous montrez que vous maîtrisez les risques géopolitiques et avez une vision claire de votre environnement, vous êtes plus attractif.
• Résultat : Vous attirez plus facilement des financements et de solides partenaires.
Former les équipes et développer une « Culture de la résilience »
• Exemple : En intégrant un radar géopolitique dans votre entreprise, vous sensibilisez vos équipes aux risques et opportunités liés aux évolutions locales, régionales et mondiales.

• Résultat : Vos équipes deviennent plus réactives, plus performantes et mieux préparées aux crises.

Comme le souligne un chef d’entreprise consulté par le forum économique mondial de Davos, « Mettre en place un radar géopolitique, c’est donner à votre entreprise les moyens de survivre et de prospérer dans un monde incertain ». Il s’agit de favoriser un leadership proactif, agressif et résilient : « renforcer la puissance géopolitique ne se résume pas à gérer les risques ; il s’agit de tirer parti des changements mondiaux pour créer des opportunités. Les dirigeants d’entreprise qui adoptent cette approche positionneront leurs organisations de manière à ce qu’elles prospèrent dans un contexte de complexité et d’incertitude ».

Il est possible de mentionner à titre illustratif et de manière schématique les exemples de deux célèbres cabinets de conseils :
1. McKinsey
• Positionnement : Créer des « units de veille géopolitique » internes aux entreprises.
• Approche : Passer d’une posture réactive à une posture proactive.

Méthodologie :
 « Understand, monitor, mitigate ».
 Questions guidant toute réflexion : “who, when, where, how ?”.
2. Deloitte
• Positionnement : Risque intégré dans une approche holistique de « permacrise ».

• Approche :
o Analyse de tendances à long terme : technologie, environnement, sociologie, multipolarité conflictuelle, etc.
o Propose des solutions de modélisation du risque (depuis 2014).
o Importance de la planification de résilience pour les dirigeants.
• Slogan implicite : Faire de la résilience un levier stratégique.

Ainsi, il est de coutume d’affirmer que pour éteindre un feu qui démarre, il faut un verre d’eau lors de la première minute, un seau au bout de cinq minutes et un camion de pompier après un quart d’heure . C’est pourquoi nous plaidons vivement pour la mise en place, au sein des entreprises tunisiennes, d’un radar ou sonar géopolitique, de cellules de veille et d’alerte (détection des germes), pouvant être également dénommées cellules de crise, afin de sensibiliser les dirigeants et les cadres à toutes situations constituant, compte tenu de leur montée en puissance, des menaces sérieuses à la performance de l’entreprise ou des opportunités à ne pas manquer face à une concurrence exacerbée.

En définitive, l’anticipation, c’est, certes des méthodes rigoureuses, mais c’est avant tout un état d’esprit, une méthode de travail, de nouvelles approches managériales incitant les entreprises tunisiennes à s’affranchir du poids du présent. Il ne s’agit pas de bouleverser les modes traditionnels de gestion mais d’optimiser et d’aménager afin d’accroître la rentabilité et la performance de ces entreprises. Les PME n’échappent pas à cette nouvelle réalité et nécessité : elles doivent être en mesure de se positionner sur des pôles de profit et non sur des pôles de coût : voilà l’optimisation !

Tunis, le 22 septembre 2025
Mehdi Taje
Directeur de Global Prospect Intelligence
Senior expert en géopolitique et en méthodologies de la prospective et de l’anticipation

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Par Mehdi Taje: De l’impératif d’un radar ou sonar géopolitique pour les entreprises tunisiennes ( 1ère partie)

22. September 2025 um 11:13

La réflexion stratégique et géopolitique, couplée à de rigoureuses méthodes d’anticipation et de prospective, s’impose plus que jamais face aux tumultes du monde : ce n’est plus une approche réservée à une élite, c’est un impératif de survie pour tout décideur tunisien public ou privé évoluant dans le grand tourbillon géopolitique et géoéconomique ambiant. « Gérer au jour le jour et toujours trouver un moyen de s’en sortir en limitant les pertes » était possible par le passé : aujourd’hui, cela relève d’un « suicide stratégique ».

La grande bascule géopolitique et géoéconomique mondiale

Face aux grands chambardements géopolitiques et géoéconomiques nous propulsant dans un monde chargé d’incertitudes, de menaces et de risques mais aussi d’opportunités, un monde émietté, « archipellisé », un monde fracturé, un monde en ébullition stratégique et dérégulé où les amortisseurs de chocs sont inopérants, un monde où les prédateurs sortent du bois, les décideurs tunisiens ne pourront indéfiniment faire le dos rond et attendre que cela passe !!!! La Tunisie n’est pas un espace clos protégé des turbulences. Nous sommes face à un nouveau monde encore en gestation et, cette fois-ci, ça ne passera pas sans remise en cause de notre manière d’appréhender cette nouvelle réalité nébuleuse dans laquelle nous baignons et sans changer radicalement de logiciel. Un « reset » mental et de management et de leadership s’impose. La guerre économique et monétaire en cours, la fragmentation géoéconomique recomposant les chaînes de valeur, la guerre technologique, l’impact majeur du changement climatique sur la rive sud de la Méditerranée, les chocs géopolitiques, sécuritaires, sanitaires, sociaux, cyber, etc. sont autant de vecteurs de profonds bouleversements amplifiant nos angles de vulnérabilité intérieure et impactant directement notre tissu économique et nos chefs d’entreprise. « La fin de l’histoire » fait place à un retour en force de l’histoire, de la géographie, de l’Homme, bref de la géopolitique. C’est le temps de la lucidité, du réalisme et du sursaut face à l’imprévisibilité croissante.

L’entreprise plus exposée que jamais

Longtemps, l’entreprise a cherché à évoluer à l’abri des préoccupations et des incidences géopolitiques, « comme si les marchés étaient des espaces commerciaux protégés, des bulles de paix et de prospérité, préservés des évolutions et des chocs géopolitiques ». Aujourd’hui, deux mots dominent la presse économique mondiale : géopolitique et innovation. Prise dans la tourmente d’une mondialisation effrénée de plus en plus remise en cause et rejetée par les peuples, cette vision idéale, quasi utopique, a volé en éclats. Aujourd’hui, à la lumière des bouleversements géopolitiques, économiques, sociaux et financiers, du jeu des forces profondes opaques et du reclassement en cours des puissances sur fond d’exacerbation des rivalités, tout marché est menacé, les frontières ne constituant plus ces barrières réputées infranchissables. En effet, historiquement, toute reconfiguration des rapports de puissance et des sphères d’influence ne s’est jamais faite dans la paix et la sérénité. Les entreprises tunisiennes ne peuvent plus prétendre échapper à cette réalité, à moins de faire preuve d’un aveuglement coupable. Des secousses, même lointaines, ne peuvent plus être ignorées et doivent être intégrées dans la stratégie de toute entreprise soucieuse d’assurer sa pérennité et de consolider ses parts de marché.

Aujourd’hui, globalisé ou inversement fragmenté, le marché de l’entreprise est paradoxalement un territoire « déterritorialisé », fuyant, incertain, évolutif et poreux. Dans cette optique, les marchés sont autant d’espaces à conquérir, à investir et à tenir face aux assauts d’une concurrence de plus en plus acerbe. Le caractère national est dilué et relativisé. Portés par la révolution numérique et digitale, de nouveaux acteurs aux pouvoirs surpassant parfois ceux des Etats émergent et redessinent les rapports de force par le contrôle de l’information. Les GAFA et leurs rivaux chinois sont le laboratoire de ce nouveau champ de confrontation risquant d’asservir les individus et les petites PME. Les conflits font naître ou disparaître des marchés de plus en plus conditionnés par l’évolution des rapports de force entre Etats ou tout autre acteur influent. Des ensembles régionaux se constituent ou se fragmentent, des acteurs disparaissent ou inversement émergent, constituant ainsi de puissantes dynamiques de restructuration des champs économiques.

Les risques vus par le Forum Economique Mondial de Davos (WEF) : polycrises, mégachocs, etc.

Dans le rapport « Global Risks Report 2025 » du Forum Economique mondial de Davos paru le 15 janvier 2025[1], pour la première fois depuis la fin de la Guerre Froide, le risque de conflit armé est classé en premier par les experts et chefs d’entreprises consultés. Le changement climatique arrive en second suivi de la confrontation géoéconomique, de la désinformation et de la guerre de l’information et de la polarisation, voire fragmentation, des sociétés.

[1] Ce rapport est téléchargeable avec toutes ces conclusions au lien suivant : https://www.weforum.org/publications/global-risks-report-2025/digest/

 

Cinq risques majeurs qui n’épargneront pas notre voisinage et la Tunisie. A titre simplement illustratif, sur fond d’exacerbation des tensions à l’échelle maghrébine dopée par une course à l’armement de plus en plus prononcée sur fond de déstabilisation et de risque de balkanisation ou de somalisation de la ceinture de sécurité du sud de la Tunisie, le Sahel africain, les impacts du changement climatique avec la multiplication d’événements extrêmes mettent à rude épreuve nos sociétés et nos économies. La Méditerranée se réchauffe 20% plus vite que le reste de la planète et la zone MENA, dont le Maghreb, sera la plus impactée par le stress hydrique à l’horizon 2050. Le manque d’eau et son impact sur l’agriculture vont lourdement peser sur l’avenir du Maghreb et de la Tunisie. Voici les risques classés par priorité pour la Tunisie selon le rapport du Forum Mondial de Davos du 15 janvier 2025 :

Dans ce contexte de stress hydrique sévère, classé en premier en 2025, des mesures urgentes doivent être adoptées pour en mitiger les effets. L’adaptation au changement climatique doit être érigée en urgence nationale. En effet, avec un probable réchauffement terre-océan de 2 à 4 degrés à l’horizon 2050 selon certains experts parmi les plus avertis, c’est une autre Tunisie qui se dessinera. Faisons en sorte que ce soit celle vers laquelle nous voulons tendre, c’est-à-dire le scénario volontariste et souhaitable. Face au stress hydrique, la carte de l’agriculture tunisienne risque d’être profondément bouleversée générant, si rien n’est mis en place à court et moyen termes, des migrations internes significatives. Certains experts, à la faveur de cet exode rural, estime que le Grand Tunis pourrait augmenter d’un million d’habitant à un horizon de 30 ans avec tous les coûts que cela signifie à l’échelle nationale. Certains experts évaluent ces coûts dans une fourchette oscillant entre 10 et 20 milliards de dinars à l’horizon 2050.

Une autre menace majeure pour le tissu économique tunisien serait incarnée par une possible extension vers l’UE du modèle de reshoring américain, en pleine expansion, qui frapperait de plein fouet et réduirait notre secteur de la sous-traitance, pourtant le plus dynamique, en particulier pour l’export.

Mutations, chocs violents et bouleversements internes et externes s’entremêlent suivant une alchimie complexe qu’il convient d’être en mesure de déchiffrer pour se prémunir des risques et saisir les opportunités. Sans boussole stratégique, le chef d’entreprise est comme un voyageur traversant le désert à l’aveugle, sans aucun savoir, ni instrument de navigation. Compte tenu des conditions extrêmes, il a peu de chance de s’en sortir.

Ainsi, « sans anticipation des enjeux et mutations géopolitiques, toute entreprise hypothèque son avenir, sa compétitivité, ses performances, voire sa survie par une dilution de l’action dans la gestion quotidienne et la tyrannie du présent ».

Tunis, le 22 septembre 2025

Mehdi Taje

Directeur de Global Prospect Intelligence

Senior expert en géopolitique et en méthodologies de la prospective et de l’anticipation

 

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Reconnaissance ou pas, le calvaire des Palestiniens continue

22. September 2025 um 11:00

Le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie et le Portugal ont annoncé hier 21 septembre leur reconnaissance de l’Etat palestinien. La France, la Belgique, Malte, Andorre, le Luxembourg et Saint Marin le feront aujourd’hui, lundi. Le président français, Emmanuel Macron, annoncera solennellement cette reconnaissance des Palestiniens à la tribune de l’Assemblée générale de l’ONU à New York lors du discours qu’il s’apprête à prononcer.

Sans surprise, fidèle à son habitude, Israël n’arrête pas de vociférer contre ces pays, et en particulier contre la France. Et ce, en lançant ses sempiternelles accusations d’antisémitisme et de « récompense du terrorisme » que personne au monde ne prend plus au sérieux.

La question qui se pose et s’impose est la suivante : en quoi ces dix nouvelles reconnaissances qui s’ajoutent aux 150 qui existent déjà vont-elles aider les Palestiniens qui font face depuis deux ans à un génocide à Gaza et à une guerre dévastatrice en Cisjordanie dont le gouvernement de génocidaires maniaques à Tel-Aviv n’arrête pas de brandir la menace d’annexion ?

Le plus important et le plus urgent pour les Palestiniens aujourd’hui est l’arrêt du génocide par les bombes et la faim, ainsi que l’arrêt de la colonisation rampante en Cisjordanie et des incursions sanglantes quotidiennes des hordes de colons et de la soldatesque qui les encouragent et les protègent.

Maintenant 160 pays dans le monde reconnaissent l’Etat palestinien censé, selon les accords d’Oslo de 1993, s’établir sur 22 % de la Palestine historique, c’est-à-dire la Cisjordanie, Jérusalem-Est et Gaza. On sait dans quel Etat se trouvent ces trois composantes de l’Etat palestinien présumé. Après 60 ans d’occupation, Jérusalem-Est est pratiquement judaïsée. La Cisjordanie est charcutée et ses villes et ses villages séparées par des douzaines de colonies densément peuplées et disséminées entre Ramallah au nord et Al Khalil au sud. Quant à l’enclave de Gaza, elle est réduite à un tas de débris de plusieurs dizaines de millions de tonnes, nécessitant des années de déblayage, et son peuple est l’objet de génocide dans l’indifférence générale.

Tel est l’état du territoire sur lequel est censé s’établir un Etat palestinien reconnu par 160 pays qui, depuis deux ans, se contentent d’observer l’holocauste du XXIe siècle perpétré par les descendants de l’holocauste du XXe siècle sans entreprendre la moindre action concrète pour y mettre fin.

Qu’est-ce qui empêcherait ces Etats de lancer un ultimatum à Israël de mettre fin à son génocide contre les Palestiniens et de permettre l’entrée de l’aide sans la moindre restriction sous peine de rompre toute relation diplomatique, économique et commerciale avec l’Etat hébreu ? L’auraient-ils fait, Israël et ses inconditionnels à Washington n’auraient eu d’autre choix que s’incliner. Mais comme on dit, avec des « Si », on mettrait Paris en bouteille…

Reconnaissance ou pas, rien ne changera de sitôt à la réalité tragique du peuple palestinien et l’Amérique ne semble pas prête d’arrêter de sitôt sa politique dévastatrice pour elle-même, pour Israël et pour le reste du monde.

Pour nous limiter à notre sujet, Trump, réagissant à l’initiative de dix pays alliés de reconnaitre l’Etat palestinien, a décidé de ne plus octroyer de visa à aucun responsable palestinien, y compris au président Mahmoud Abbas. Celui-ci prononcera cette fois son discours à l’Assemblée générale de l’ONU par vidéo-conférence depuis Ramallah.

Dans le même temps, Ahmed Joulani (Dieu sait le nombre d’Irakiens et de Syriens qu’il a massacrés par balles, explosifs et décapitation) est reçu avec les honneurs à New York où il prononcera son discours à la tribune de l’ONU…

Pourtant, quand New York connut le 11 septembre 2001 le plus grand acte terroriste de l’histoire, Ahmed Joulani se délecta en ces termes : « Je suis le disciple de Ben Laden et je suis inspiré par l’action héroïque des événements de New York ». George Galloway qui a rapporté les propos de Joulani dans son programme télévisé de dimanche soir, s’est dit certain que Trump le recevra aussi à la Maison Blanche.

Mahmoud Abbas qui était l’un des principaux négociateurs des accords d’Oslo, célébrés en septembre 1993 à Washington, est interdit de mettre les pieds à New York pour prononcer son discours. En revanche, Ahmed Joulani, qui a célébré à sa manière en septembre 2001 la destruction des deux tours jumelles et la mort de 3000 New-Yorkais, parade en président blanchi et innocenté de tous les crimes commis et de tout le sang versé pendant sa longue carrière de chef terroriste.

Beaucoup d’intellectuels américains de renom se demandent avec angoisse comment leur pays a-t-il pu perdre les pédales à ce point ? Réponse des deux éminents professeurs, Jeffrey Sacks et Richard Wolf, : « L’empire américain est dans une phase très avancée de son déclin. Plus son influence et son emprise sur le monde s’évaporent, plus il s’enfonce dans le déni et plus la fuite en avant s’accélère et l’irrationalité s’empare des centres de décision. »

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Plage de Soliman : Poissons morts échoués et mer brunie inquiètent les autorités

22. September 2025 um 10:06

Vendredi dernier, une mortalité massive de poissons a été observée sur la plage de Soliman, dans le gouvernorat de Nabeul. Le phénomène a conduit le ministre de l’Environnement, Habib Bouabid, à se rendre sur les lieux dimanche pour une inspection du littoral.

Des analyses en cours

Selon Souad Chatouti, coordinatrice du programme de l’Association Environnement et Développement de Soliman, les services de l’Institut national des sciences et technologies de la mer (INST) et de l’Agence nationale de protection de l’environnement (ANPE) ont été mobilisés pour effectuer les analyses nécessaires afin de déterminer les causes de cette mortalité.

Les services municipaux de Soliman ont pris en charge le ramassage des poissons morts, recouverts ensuite d’une couche de chaux avant enfouissement, conformément aux procédures en vigueur. Une commission comprenant la direction régionale de la protection du littoral, l’INST, la direction régionale de la santé, l’ANPE et les services de sécurité a inspecté le littoral et prélevé des échantillons de poissons morts, d’eau de mer et de sable en différents points de la plage.

Une mer qui change de couleur

Le phénomène le plus inquiétant reste le changement de couleur de la mer, qui tend désormais vers le brun. Cette anomalie nécessite une explication scientifique basée sur les résultats des prélèvements effectués, a fait savoir Souad Chatouti à l’Agence TAP.

Un phénomène similaire, avec une mortalité importante de poissons, avait déjà été observé en juin dernier dans la même région, signalant une récurrence inquiétante de ce type d’incident dans le littoral de Soliman.

Le rôle possible des microalgues

Des épisodes similaires ont également été observés dans d’autres régions du pays, comme le golfe de Monastir en juin dernier. Les premiers tests avaient révélé que la mortalité des poissons était liée à une prolifération excessive de microalgues (bloom).

Cette croissance anormale est favorisée par l’abondance de nutriments dans l’eau, conséquence des fortes pluies printanières et des rejets urbains, la décomposition massive d’algues vertes, la hausse des températures, la faible circulation des masses d’eau et l’absence de vents. Ces conditions entraînent une baisse drastique de l’oxygène dissous, parfois totale, provoquant la mort de nombreuses espèces marines.

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ECLAIRAGE – Revue économique et financière : un contexte international toujours fragile

22. September 2025 um 05:30

Les marchés internationaux évoluent dans un climat de forte incertitude.

Sur le plan politique, la proximité des élections partielles américaines accentue la volatilité, notamment autour des anticipations de politique commerciale et monétaire.

En Europe, la zone euro demeure sous pression avec une croissance atone et des politiques budgétaires contraintes. Tandis que l’Asie tente de résister au ralentissement chinois, dont la demande intérieure peine à se redresser malgré des mesures de relance ciblées.

Sur le plan financier, les grandes banques centrales adoptent une posture prudente. La Réserve fédérale, avec une inflation encore au-dessus de sa cible, a donc décidé de baisser de 25 points de base et maintient une pause monétaire afin d’éviter d’étouffer davantage l’activité. La Banque centrale européenne (BCE), de son côté, se retrouve face au dilemme entre persistance des tensions inflationnistes et affaiblissement économique.

 

Les prix du pétrole, soutenus par les tensions géopolitiques au Moyen-Orient, demeurent élevés, ajoutant un facteur de risque supplémentaire sur les équilibres externes des pays importateurs d’énergie.

 

Ces hésitations alimentent la volatilité des marchés obligataires et pèsent sur les devises des pays émergents, déjà fragilisés par des sorties de capitaux.

Les prix du pétrole, soutenus par les tensions géopolitiques au Moyen-Orient, demeurent élevés, ajoutant un facteur de risque supplémentaire sur les équilibres externes des pays importateurs d’énergie.

 

Lire aussi : ZOOM – Seuil d’inflation : pédagogie facile ou rigueur malmenée ?

 

La conjoncture tunisienne reste marquée par la recherche d’équilibre

Dans ce contexte incertain, la Tunisie tente de maintenir une relative stabilité monétaire et financière. Les derniers indicateurs montrent toutefois des pressions persistantes (*). 

Le solde du compte courant du Trésor s’est contracté à 1 284,9 MDT le 18 septembre, en forte baisse par rapport aux 1 891,6 MDT enregistrés un an plus tôt. Ce qui traduit une tension sur la liquidité publique. Le solde du compte courant des banques ressort également en repli à 358,9 MDT, signalant des conditions monétaires moins favorables.

La circulation fiduciaire reste élevée à 25 715 MDT, en hausse de plus de 3,4 milliards de DT sur un an. Ce qui traduit une préférence marquée pour la liquidité en dehors du système bancaire. Sur le marché monétaire, le volume global du refinancement de la BCT s’élève à 11 674,3 MDT, en baisse par rapport à l’année précédente (12 869,9 MDT), signe d’une moindre demande de liquidité, mais toujours à des niveaux élevés. Le taux directeur est maintenu à 7,5 %. Tandis que le taux du marché monétaire reflète une détente progressive à 7,49 % contre près de 8 % un an plus tôt, traduisant une volonté d’assouplissement relatif.

 

Du côté des finances publiques, la structure des Bons du Trésor montre une réallocation significative : les encours de court terme chutent à 2 995,9 MDT (contre plus de 10 529 MDT un an plus tôt). Alors que les Bons du Trésor Assimilables à moyen et long terme augmentent fortement à 28 403,5 MDT.

 

Du côté des finances publiques, la structure des Bons du Trésor montre une réallocation significative : les encours de court terme chutent à 2 995,9 MDT (contre plus de 10 529 MDT un an plus tôt); alors que les Bons du Trésor Assimilables à moyen et long terme augmentent fortement à 28 403,5 MDT. Cela confirme une stratégie de l’État visant à allonger la maturité de sa dette afin de réduire les tensions immédiates sur la trésorerie.

Les fondamentaux externes, eux, envoient des signaux contrastés. Les recettes touristiques progressent à 5 752,5 MDT (+8,5 % sur un an), tout comme les revenus du travail cumulés à 6 035 MDT. Ce qui soutient les entrées en devises. En revanche, le service de la dette extérieure demeure lourd, atteignant 9 843,4 MDT. Les avoirs nets en devises de la BCT reculent à 25 119,7 MDT, couvrant 108 jours d’importation, contre 115 jours un an plus tôt.

Sur le marché des changes, le dinar reste relativement stable face au dollar (2,897 TND/USD), mais s’affaiblit légèrement face à l’euro (3,421 TND/EUR). Cette évolution traduit un ajustement technique, mais aussi la dépendance structurelle de la Tunisie à ses partenaires européens.

 

Lire également : ECLAIRAGE – Tunisie : entre pressions extérieures et stabilité monétaire, un équilibre toujours fragile

 

Sur le marché des changes, le dinar reste relativement stable face au dollar (2,897 TND/USD), mais s’affaiblit légèrement face à l’euro (3,421 TND/EUR). Cette évolution traduit un ajustement technique, mais aussi la dépendance structurelle de la Tunisie à ses partenaires européens.

Marché boursier et perception des investisseurs

La Bourse de Tunis, bien que résiliente par rapport à d’autres places émergentes, demeure sensible au climat de confiance général. Le maintien de taux élevés et la contraction de la liquidité pèsent sur les perspectives de financement des entreprises. Tandis que la hausse de la dette publique continue d’alimenter les incertitudes. Les investisseurs restent sélectifs, privilégiant les valeurs défensives et celles bénéficiant directement des flux extérieurs (banques, tourisme, industries exportatrices).

Perspectives à court et moyen terme

À court terme, la Tunisie devrait continuer à naviguer entre la nécessité de préserver la stabilité financière et la pression sociale liée au ralentissement de la croissance et au pouvoir d’achat. L’inflation, même contenue autour de 5,2 % (**), demeure une contrainte forte sur la consommation et sur la marge de manœuvre de la BCT.

À moyen terme, les équilibres externes resteront la variable clé

Si les recettes touristiques et les transferts des Tunisiens à l’étranger se maintiennent, ils permettront d’atténuer la pression sur les réserves en devises. Mais la lourdeur du service de la dette et la dépendance énergétique constituent des vulnérabilités structurelles.

La politique monétaire, déjà restrictive, ne peut à elle seule absorber ces déséquilibres sans une coordination plus forte avec la politique budgétaire et des réformes structurelles.

 

La fenêtre d’opportunité pour consolider la stabilité financière existe, mais elle est étroite. Elle exige une stratégie intégrée qui combine discipline budgétaire, stimulation de l’investissement productif et renforcement des secteurs exportateurs, dans un environnement international où la marge de manœuvre reste limitée.

 

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Références :

(*) https://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/indicateurs.jsp

(**) https://www.ins.tn/

https://www.google.com/url?sa=t&source=web&rct=j&opi=89978449&url=https://www.bvmt.com.tn/market-place&ved=2ahUKEwiO4syZmeqPAxVGAPsDHfSOBsAQFnoECA4QAQ&sqi=2&usg=AOvVaw0oHKyp4hSIkiaxVdxeGQ9z

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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Les Bons du Trésor non encore échus affichent un taux moyen de 9,078 %

19. September 2025 um 15:53

La réduction de 50 points de base du Taux directeur cette année aurait un effet favorable sur les finances publiques. En tant que principal émetteur de titres de créance, l’État aurait allégé le poids des charges financières qu’il supporte.

 

Cependant, si l’effet prix joue en faveur de l’État, l’effet volume, lui, va dans le sens contraire. À fin juin 2025, l’encours total des bons du Trésor, toutes maturités confondues, a atteint 30 121,985 MDT, dont 4 651,198 MDT de BTCT. Cela représente une augmentation de 2 595,260 MDT en seulement six mois, alourdissant mécaniquement les charges d’intérêts dans le budget de l’État.

 

En juin 2025, le taux moyen pondéré des bons du Trésor en circulation a atteint un nouveau sommet à 9,078 %, contre 8,845 % un an plus tôt. Malgré la baisse du taux directeur, le remboursement d’anciennes émissions à rendements relativement réduits, remplacées par de nouveaux titres émis dans un contexte de taux toujours élevés, explique cette progression du taux moyen.

 

Du côté des maturités, celle de 9 ans est devenue la plus coûteuse, avec un taux moyen de 9,754 %. La seule échéance présentant un taux moyen inférieur à 7 % est celle de 11 ans, à 6,693 %.

 

À titre de comparaison, en décembre 2010, le taux moyen global n’était que de 6,216 %, soit une hausse de 286,2 points de base en presque 15 ans. Un écart significatif pour les finances publiques, d’autant plus que l’encours a été multiplié par 5,1 sur la période.

 

Le coût global de la dette intérieure serait encore plus élevé – de quelques dizaines de points de base – si l’on intégrait les obligations souveraines.

 

Toutefois, en net, la charge réellement supportée par l’État reste modérée. En effet, les établissements financiers ont été frappés d’une surtaxe sur les profits exceptionnels générés par leurs activités de marché, et les revenus d’intérêts sont soumis à une retenue à la source de 20 %.

 

Par ailleurs, la Banque centrale de Tunisie continue de dégager des bénéfices records, permettant un versement accru de dividendes à l’État. Il ne s’agit pas d’un jeu à somme nulle, mais cela contribue à atténuer l’impact global sur les comptes publics.

 

Pour les mois à venir, une hausse du taux moyen est attendue avant de se stabiliser. Une réelle baisse n’est envisagée qu’à partir de 2026, avec une possibilité de passer sous le seuil des 8 % à l’horizon 2027.

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Aménagement urbain en Tunisie : canaliser les capitaux transparents pour un développement durable

19. September 2025 um 09:01

Les villes tunisiennes, confrontées à des défis économiques et sociaux complexes, peuvent tirer un avantage stratégique d’un aménagement urbain conçu pour générer des effets directs et indirects tout en évitant les pièges de l’économie de rente.

Effets directs et indirects

Directement, ces aménagements créent des emplois dans la construction, la gestion des infrastructures et les services associés. Ils augmentent l’attractivité commerciale et résidentielle, valorisent le foncier et contribuent à renforcer les recettes fiscales locales.

Indirectement, ils dynamisent les chaînes économiques locales, favorisent l’innovation, l’émergence de clusters et accroissent l’attractivité touristique et économique des villes.

Risques de l’économie de rente et de l’informel

Ces effets peuvent être limités si l’aménagement nourrit une économie de rente, lorsque le secteur formel finance des flux qui sortent de l’économie locale.

On distingue deux formes d’informel :
Haut de gamme : capitaux des élites ou investisseurs étrangers échappant au circuit bancaire et fiscal, orientés vers des paradis fiscaux ou des investissements extérieurs.
Bas de gamme : activités informelles de subsistance, dont les revenus échappent également au circuit bancaire, limitant le réinvestissement public et local.

Confusion des acteurs économiques

À cela s’ajoute la confusion entre acteurs économiques : certains contribuent effectivement à la richesse nationale, tandis que d’autres, en agissant ou en restant passifs, participent à l’appauvrissement du pays. Ignorer cette dualité compromet l’efficacité des politiques d’aménagement.

Nouvelle approche : aménagements « capteurs » de capitaux transparents

Pour surmonter ces obstacles, les villes tunisiennes pourraient expérimenter une approche innovante : des aménagements urbains « capteurs » de capitaux transparents.

Ces dispositifs accueilleraient uniquement des fonds traçables, bénéficiant d’allégements fiscaux et soumis à un cahier des charges strict garantissant leur contribution à la création de valeur locale.

Avantages

  1. Sécurisation des flux financiers : seuls les capitaux transparents participent, limitant la fuite vers des circuits informels ou des paradis fiscaux.
    2. Rendement économique garanti : les fonds investis répondent à des critères précis, maximisant l’impact sur l’emploi, les infrastructures et la création de valeur locale.
    3. Stimulation de l’investissement formel : l’allégement fiscal et la clarté du cahier des charges incitent les investisseurs à s’engager dans l’économie nationale de manière productive et durable.

Cette approche transforme l’aménagement urbain en un levier stratégique capable de canaliser les flux informels et les interactions des acteurs en valeur économique réelle, tout en favorisant un développement inclusif et durable pour les villes tunisiennes.

Ilyes Bellagha
Architectes Citoyens

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ZOOM – La Tunisie, entre frémissements positifs et illusions de croissance

19. September 2025 um 05:04

L’intervention de mon estimable confère universitaire et analyste financier, Abdelkader Boudrigua, sur les ondes d’Express FM, le 15 septembre 2025, a eu le mérite de dresser un tableau nuancé de la situation économique tunisienne. Entre embellie conjoncturelle et faiblesses structurelles persistantes, son discours oscille entre réalisme et excès d’optimisme, révélant les paradoxes d’une économie en quête de souffle.

Pour autant, son constat sur la croissance mérite d’être relativisé. Le taux de 3,2 % enregistré au deuxième trimestre peut certes être perçu comme un signal encourageant; mais il s’agit avant tout d’une amélioration ponctuelle, liée aux effets de base et à une reprise partielle de certains secteurs. Le fait qu’il corrige lui-même ses prévisions annuelles à un niveau plus modeste de 2,2 à 2,5 % montre la fragilité de ce rebond.

Quant à l’hypothèse d’atteindre 4 % grâce au redressement du secteur des phosphates, elle repose sur des conditions aléatoires, tant cette filière reste soumise à des blocages récurrents, des problèmes logistiques et des tensions sociales qui en limitent la régularité.

Concernant l’inflation, M. Boudrigua souligne un léger repli, autour de 5,2 %, tout en la qualifiant de « critique ». Cette ambiguïté traduit bien la difficulté de lecture de l’inflation en Tunisie. Si la Banque centrale joue un rôle central dans le maintien de la stabilité des prix, limiter la problématique à la seule politique monétaire ou aux réserves de change disponibles réduit l’analyse.

Les racines de l’inflation se trouvent aussi dans la rigidité des circuits de distribution, la spéculation, la dépendance aux importations et les déséquilibres budgétaires. Dans ce contexte, l’hypothèse d’une baisse prochaine du taux directeur de 50 points de base apparaît prématurée et risquée, au regard des tensions monétaires et fiscales encore présentes.

L’analyste pointe aussi le manque criant de centres de recherche et d’agences privées capables de fournir des prévisions fiables. Cette remarque est juste et révèle une faiblesse structurelle de l’économie tunisienne : l’absence de données accessibles et transparentes qui empêche toute anticipation sérieuse. Toutefois, la critique reste incomplète, car elle n’esquisse pas les pistes institutionnelles nécessaires pour combler ce vide, qu’il s’agisse de renforcer l’Institut national de la statistique (INS), de dynamiser la recherche académique ou de stimuler la production de données privées.

Le point le plus discutable de son intervention concerne la projection d’une croissance à 6 ou 7 % sur quatre à cinq ans. Fondée (comment ?) sur l’idée d’une « exploitation optimale des capacités disponibles», cette perspective relève davantage du volontarisme que d’une évaluation réaliste. Dans un pays où les finances publiques sont contraintes, où les blocages politiques persistent et où la confiance des investisseurs reste fragile, envisager un tel scénario de rattrapage paraît largement irréaliste. Ce type de projection entretient un biais bien connu du discours économique tunisien : mettre en avant des potentiels théoriques sans mesurer les coûts sociaux et institutionnels de leur mise en œuvre.

Enfin, la conclusion appelant à une action collective de l’État, du gouvernement, des universités, du secteur privé et des médias est pertinente sur le plan normatif. Mais faute de propositions concrètes, elle reste une formule générale qui peine à se transformer en feuille de route. La refonte des politiques économiques suppose des choix précis et courageux : réforme fiscale, gouvernance des entreprises publiques, assainissement des finances, attractivité des investissements. Autant de chantiers que le discours de M. Boudrigua effleure sans les affronter directement.

En définitive, son intervention reflète bien la dualité actuelle du discours économique en Tunisie : une lucidité partielle sur certains indicateurs; et une propension à nourrir des attentes excessives. Elle traduit la tension entre le désir de rassurer et l’incapacité à proposer une vision réaliste et structurée.

La Tunisie n’a pas besoin de projections idéalisées, mais d’analyses rigoureuses et de réformes courageuses, capables de transformer les frémissements conjoncturels en dynamique durable.

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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DOSSIER | Université tunisienne : L’enseignement supérieur tunisien peut-il redevenir un moteur de développement ?

18. September 2025 um 09:50

Universités“L’éducation doit aider les jeunes à découvrir leur propre identité et à développer leur propre voix dans le monde” estime le psychopédagogue Bruno Humbeeck. Qu’en est-il en Tunisie et principalement dans l’enseignement supérieur où l’avenir des jeunes se dessine et où les destins des nations se décide ? Réformes fragmentées, une gouvernance centralisée et des programmes déconnectés du marché du travail, l’université tunisienne traverse une crise profonde même si le modèle Tunisien reste une référence à l’échelle régionale.

Sans une refonte ambitieuse, le système d’enseignement supérieur risque de devenir un facteur d’exclusion plutôt qu’un moteur de développement. A ce jour, les tentatives d’y mettre de l’ordre et de le mettre en phase avec les évolutions mondiales rapides dans les hautes technologies, la science, les nouveaux savoirs et les disciplines régnant aujourd’hui sur l’économie mondiale, ne permettent pas à l’enseignement supérieur tunisien de faire le saut qualitatif ambitionné.

Des réformes annoncées, mais lentes à réaliser

Depuis plus d’une décennie, les réformes visent à améliorer la gouvernance universitaire, l’autonomie, l’employabilité, la qualité de la pédagogie et la recherche — appuyées notamment par des financements internationaux comme ceux de la Banque mondiale. Mais les résultats restent timides, freinés par un manque de coordination, de vision et de volonté politique.

Gouvernance, autonomie et qualité : une tutelle administrative paralysante

Les universités tunisiennes restent sous forte tutelle administrative, limitant leur souplesse stratégique. L’autonomie promise demeure largement théorique, et les mécanismes d’assurance qualité peinent à se généraliser, ce qui réduit la compétitivité des établissements publics comme privés.

Employabilité et chômage des diplômés

Le chômage parmi les diplômés de l’enseignement supérieur est en hausse : il est passé de 29,2 % en 2011 à 30,1 % en 2021. Ce double phénomène d’évasion des cerveaux et d’échec à insérer localement les diplômés nourrit une crise de confiance et fragilise leur avenir.

« L’autonomie promise des universités demeure largement théorique. »

Même si une partie des diplômés du supérieur obsédés par l’idée que l’emploi est un droit constitutionnel et que l’État a l’obligation de leur offrir de postes d’emploi ne font aucun effort pour s’adapter au marché du travail et si nécessaire se reconvertir.

Conséquence : l’État est incapable d’absorber toutes les demandes d’emploi et le secteur privé soucieux d’efficience et de compétence est très sélectif ne peut satisfaire à toutes les demandes.

Un exode massif des talents

A ce jour, près de 39.000 ingénieurs ont quitté la Tunisie sur les 90.000 inscrits à l’Ordre des ingénieurs selon un communiqué de l’OIT en mars 2025, ce qui représente une perte de capital humain significative pour le pays.

Des départs massifs particulièrement dans le secteur de l’informatique expliqués par de meilleures opportunités professionnelles et financières à l’étranger. Même chose pour les médecins soit 6.000 qui ont quitté le pays entre 2021 et début 2025, dont une grande majorité de jeunes diplômés.

« Le chômage des diplômés est passé de 29,2 % en 2011 à 30,1 % en 2021. »

Rien qu’en 2024, ils étaient 1450 à partir principalement vers des pays comme la France, l’Allemagne, le Canada ou le Qatar. Une fuite attribuée aux mauvaises conditions de travail et de rémunération dans le système de santé tunisien.

Recherche et innovation en panne

La recherche universitaire souffre d’un sous-financement persistant, le budget consacré à la recherche scientifique est réduit et ne permet pas un transfert technologique important vers l’économie. L’absence d’un cadre national des qualifications, en chantier aujourd’hui, fragilise la structuration des compétences et la reconnaissance des diplômes.

Le système scolaire et universitaire déconnecté suscite une forte frustration parmi les jeunes, qui préfèrent s’exiler dès qu’ils en ont les moyens. Le décrochage est renforcé par le chômage élevé, l’absence de perspectives et le sentiment d’être sous-estimé.

Quelle refondation possible ?

Les experts convergent vers une refondation structurelle du système universitaire autour de trois axes :

  • accorder une autonomie réelle aux établissements, pour qu’ils décident de leur stratégie et s’adaptent à leur contexte ;
  • valoriser la recherche et l’innovation en finançant les laboratoires et en associant les enseignants-chercheurs à la définition des politiques ;
  • placer les étudiants et enseignants au cœur des décisions, pour transformer l’université en un lieu de concertation, de créativité et d’engagement.

Ces changements ne peuvent se faire sans une volonté politique solide, un engagement collectif et une rupture claire avec les logiques d’immobilisme.

« Sans refonte ambitieuse, l’enseignement supérieur restera un facteur d’exclusion. »

L’université tunisienne doit changer de vocation. Au lieu d’être une machine à fabriquer des diplômés sans débouchés sur le marché du travail, il faut déployer les moyens adéquats pour former une jeunesse compétente, capable de contribuer au développement du pays.

Sans cet engagement, l’enseignement supérieur risque de rester un facteur d’exclusion plutôt qu’un moteur d’ascension sociale et c’est tout le modèle de développement tunisien qui pourrait en pâtir.

Amel Belhadj Ali

EN BREF

  • L’université tunisienne traverse une crise profonde.
  • Les réformes engagées depuis plus d’une décennie avancent lentement.
  • Gouvernance centralisée et faible autonomie freinent la qualité et la compétitivité.
  • Le chômage des diplômés reste élevé, aggravé par l’exode des ingénieurs et médecins.
  • La recherche souffre d’un sous-financement chronique.
  • Une refondation est jugée nécessaire : autonomie réelle, valorisation de la recherche et implication des étudiants.
  • Sans ces changements, l’enseignement supérieur risque de rester un facteur d’exclusion.

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ZOOM – Seuil d’inflation : pédagogie facile ou rigueur malmenée ?

18. September 2025 um 05:18

Il est rare qu’un débat économique s’invite dans l’espace public tunisien. Mais quand il éclate, il tourne trop souvent à un dialogue de sourds. L’échange autour du fameux « seuil de 5 % d’inflation » censé déclencher une baisse du taux directeur de la Banque centrale en est une illustration frappante. D’un côté, un discours médiatique qui promet de la clarté en affirmant qu’en dessous de 5 % tout s’éclaircit. De l’autre, la voix de mon estimable confrère Ali Chebbi, universitaire, qui démonte point par point cette affirmation au nom de la rigueur scientifique (*).

La critique est implacable. La BCT n’a jamais annoncé de cible d’inflation. Elle ne suit pas de règle automatique. Son action reste discrétionnaire, soumise à des contraintes multiples : poids de la dette, pression sur les réserves, équilibre précaire du dinar. Imaginer qu’un simple chiffre puisse gouverner la politique monétaire relève de la fiction. Pis encore, réduire la complexité à une équation simpliste expose à un risque majeur : tromper non seulement les étudiants en économie, mais aussi les décideurs et acteurs de marché qui fondent leurs anticipations sur ce type de raccourci.

Mais au-delà de la démonstration, c’est la collision entre deux logiques qui saute aux yeux.

La première est celle de la communication médiatique, qui cherche à rassurer et à rendre compréhensible l’insaisissable, quitte à tordre la réalité.

La seconde est celle de l’universitaire, qui refuse le compromis et revendique la complexité, quitte à apparaître élitiste ou inaccessible.

La vérité, c’est que ni l’un ni l’autre ne suffisent. Le danger du premier est de fabriquer des illusions, celui du second est de s’enfermer dans une tour d’ivoire.

Ce face-à-face raté illustre le mal tunisien : l’absence d’un espace où la vulgarisation et la rigueur pourraient cohabiter. La simplification, si elle est honnête, peut être un outil pédagogique puissant. Mais elle doit s’accompagner de mises en garde, d’un effort pour dire que l’économie est faite de zones grises et d’incertitudes. À l’inverse, la rigueur ne doit pas se muer en posture professorale qui délégitime toute parole alternative.

Le débat autour du « seuil de 5 % » aurait pu être l’occasion d’éclairer le public sur les vrais ressorts de la politique monétaire. Il s’est transformé en polémique stérile, chacun campant sur son registre.

La Tunisie n’a pas besoin d’illusions chiffrées ni de discours d’autorité. Elle a besoin d’une pédagogie exigeante, capable de dire la complexité sans en faire un prétexte à l’opacité.

Tant que cette rencontre n’aura pas lieu, chaque controverse intellectuelle se réduira à une joute vaine, où l’on se parle sans jamais se comprendre.

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(*) https://www.facebook.com/chebbia2000us

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

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Les crédits à la consommation atteignent un pic en juin 2025

16. September 2025 um 05:32

L’effet de levier que procurent les crédits bancaires accordés aux ménages constitue l’une des sources d’inflation que la hausse des taux vise à contenir. La politique monétaire restrictive menée par la Banque centrale a partiellement réussi à ralentir la demande de ces financements.

Selon les dernières statistiques, l’encours des crédits bancaires aux particuliers a progressé de 168,021 MDT seulement depuis le début de l’année pour s’établir à 29 701,977 MDT fin juin 2025. Sur la même période en 2024, l’encours a évolué de 328,276 MDT, prouvant que l’engouement pour l’endettement des ménages se rapproche de son plafond.

Par catégorie, nous constatons que l’encours des crédits à la consommation s’est établi à 5 137,381 MDT, un pic historique. Il a augmenté de 108,331 MDT par rapport à décembre 2024. La demande sur ce type de financement demeure soutenue. Bien que les taux soient élevés, les Tunisiens continuent à recourir à cet endettement pour financer leurs dépenses ou leurs petits projets privés et peu structurés.

Les crédits d’aménagement de logement ont totalisé 11 183,350 MDT, une hausse de 203,618 MDT depuis le début de l’année. Ce type de financement sert parfois comme un crédit à la consommation et évolue généralement dans le même sens que ces derniers.

De plus, les travaux de petits chantiers dans les maisons ont été impactés par la hausse des prix des matières premières et de la main-d’œuvre. Ce qui limite la croissance de ces crédits.

Les prêts destinés au logement ont enregistré une baisse de l’encours de 178,287 MDT par rapport à fin 2024, à 12 949,449 MDT. Depuis des années, l’encours fait du yoyo, une autre illustration qui montre à quel point le secteur immobilier va mal.

Pour les prêts véhicules, l’encours a progressé, une première depuis un moment. Il est désormais à 417,487 MDT.

Enfin, les crédits universitaires sont de 14,309 MDT seulement. C’est au cours du troisième trimestre, lors de la période du choix universitaire pour les nouveaux bacheliers, que la demande s’accélère.

Nous pensons que d’ici la fin de l’exercice, le seuil des 30 milliards de dinars serait dépassé. La croissance serait au rendez-vous durant les mois à venir, surtout avec la vague de recrutement par l’Etat en 2026. Cela va créer de nouveaux clients ayant des postes stables. Ce qui ouvre la porte de l’endettement bancaire devant eux.

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France : quand la dette dicte la croissance

15. September 2025 um 11:36

La France emprunte aujourd’hui à un coût aussi élevé que celui de la Grèce (4,3 %). En effet, le taux à 30 ans des obligations assimilables du Trésor, indicateur du sentiment des investisseurs à long terme, atteint 4,38 %.

Les marchés financiers s’inquiètent de la situation économique et budgétaire de la France à long terme. Pour cause, les tumultes politiques amenant à la crainte d’une paralysie budgétaire. Le problème n’est pas tant de savoir si la France pourra continuer à emprunter, car les marchés continueront à financer sa dette, mais à quel coût. Plus le temps passe, plus le spread de taux d’intérêt entre la France et l’Allemagne s’élargit, et plus l’effort de correction du déficit pour stabiliser le taux d’endettement public devient douloureux.

La forte instabilité politique et les difficultés liées au bouclage des finances publiques, qui freinent déjà une économie en ralentissement (taux de croissance de 0,6 %), pousseront les ménages, dont le taux d’épargne est élevé (18,9 %), à épargner davantage. Ce qui risque d’accentuer le ralentissement de l’économie. D’ailleurs, la dette publique française, qui représente environ 3400 milliards d’euros, est détenue à 45% par des résidents.

En cas de perte de confiance, la Banque centrale européenne pourrait être amenée à intervenir en rachetant des obligations, afin d’alléger la pression exercée sur les taux d’intérêt et de stabiliser les conditions de financement. Mais son intervention s’accompagnerait certainement de conditions strictes, impliquant une consolidation budgétaire rapide et contraignante. Ce scénario reste peu probable pour le moment.

Quoiqu’il en soit, la dégradation des conditions d’emprunt du Trésor risque de se poursuivre. Réduire les dépenses publiques est un objectif difficile à atteindre dans un environnement politique hostile à toute mesure d’austérité.

Les autorités se retrouvent face à un dilemme. S’endetter pour rehausser la croissance et générer des recettes fiscales supplémentaires. Ce qui ne peut être obtenu qu’à long terme, avec l’amélioration de la qualité du système éducatif, l’investissement dans la transition énergétique… Et le statu quo avec son cortège de dette non soutenable et de croissance atone.

L’urgence est double, elle est à la fois institutionnelle et économique : trouver un consensus politique solide et repenser l’usage de la dette publique. Sinon, faute de marges suffisantes pour relancer l’économie, la sanction des agences de rating finira par frapper et la France risque de sombrer dans une trappe de croissance faible.

Article de Noura Harboub-Labidi 

Cet article est disponible dans le mag de l’Economiste Maghrébin n 927 du 10 au 24 septembre 2025 

 

 

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ECLAIRAGE – Tunisie : entre pressions extérieures et stabilité monétaire, un équilibre toujours fragile

15. September 2025 um 05:30

La dynamique économique mondiale reste marquée par une succession de chocs qui entretiennent un climat d’incertitude généralisée. Sur le plan géopolitique, les tensions persistantes au Moyen-Orient et en Asie orientale alimentent des inquiétudes durables sur la stabilité des flux énergétiques et sur la sécurité des chaînes d’approvisionnement stratégiques. Ces foyers de tension se traduisent par une volatilité accrue des prix du pétrole et du gaz, pesant directement sur les pays importateurs nets d’énergie, dont la Tunisie.

Dans le même temps, les grandes puissances économiques peinent à trouver un équilibre dans leurs politiques monétaires. La Réserve fédérale américaine (Fed) maintient une ligne dure, privilégiant la lutte contre une inflation encore au-dessus de sa cible; malgré les signaux de ralentissement de l’activité. Le dollar reste donc solidement installé comme valeur refuge, attirant des capitaux au détriment des économies émergentes.

En Europe, la Banque centrale européenne (BCE) a adopté une posture plus nuancée, ralentissant ses hausses de taux face à une croissance en berne; mais sans enclencher de véritable assouplissement monétaire.

 

Dans ce contexte, la Tunisie reste exposée à un environnement externe contraignant. Il est marqué par une compétition accrue pour attirer les capitaux et une dépendance forte vis-à-vis des flux extérieurs de devises.

 

Ces choix contrastés se traduisent par une forte volatilité des taux de change. Tandis que le billet vert conserve une vigueur remarquable, l’euro tente de se maintenir, bénéficiant d’une résilience relative mais fragilisée par des perspectives économiques ternes. Les marchés financiers, eux, oscillent entre la crainte d’une récession mondiale et l’espoir d’un retour progressif à la stabilité. Les investisseurs privilégient les actifs sûrs, limitant l’accès des pays émergents aux financements internationaux à des conditions avantageuses.

Dans ce contexte, la Tunisie reste exposée à un environnement externe contraignant. Il est marqué par une compétition accrue pour attirer les capitaux et une dépendance forte vis-à-vis des flux extérieurs de devises.

Conjoncture tunisienne : une stabilité monétaire sous tension (*)

Politique monétaire et conditions de liquidité

Les derniers indicateurs publiés par la Banque centrale de Tunisie (BCT) au 12 septembre 2025 mettent en évidence une stabilité apparente des conditions monétaires. Le taux directeur demeure fixé à 7,5 %, niveau inchangé depuis cinq mois, traduisant une volonté d’ancrer les anticipations d’inflation sans étouffer davantage l’activité économique. Le taux du marché monétaire s’aligne sur ce niveau, à 7,5 %, en recul par rapport aux 7,99 % enregistrés en 2024.

Le volume global du refinancement bancaire atteint 12 672 MDT, légèrement supérieur à celui de l’année précédente. Cette évolution illustre une tension persistante sur la liquidité, malgré une gestion plus équilibrée par la BCT. Les opérations d’Open Market se contractent fortement, avec un encours de 3 885 MDT contre 8 312 MDT un an plus tôt, traduisant une réduction des injections directes de liquidité.

 

Le volume global du refinancement bancaire atteint 12 672 MDT, légèrement supérieur à celui de l’année précédente. Cette évolution illustre une tension persistante sur la liquidité, malgré une gestion plus équilibrée par la BCT.

 

Par ailleurs, les facilités permanentes à 24h témoignent de besoins ponctuels de financement : la facilité de prêt atteint 1 35 MDT, en hausse; tandis que la facilité de dépôt s’élève à -1 575 MDT, confirmant une gestion active des excédents et déficits de liquidité par les banques.

Les billets et monnaies en circulation s’établissent à 25 943 MDT, en hausse de 3 482 MDT par rapport à 2024. Cette progression traduit une forte demande de cash, alimentée à la fois par les besoins de l’économie informelle et par la prudence des ménages face aux incertitudes.

Finances publiques et dette intérieure

Le solde du compte courant du Trésor atteint 2 006 MDT, contre seulement 754 MDT la veille et 1 144 MDT un an plus tôt, exprimant une gestion plus souple de la trésorerie publique. Néanmoins, c’est la structure de la dette qui attire l’attention.

L’encours des Bons du Trésor Assimilables (BTA) bondit à 28 403 MDT, contre 16 478 MDT en 2024, soit une augmentation spectaculaire de près de 12 milliards de dinars. En parallèle, les Bons du Trésor à court terme chutent à 2,95 milliards de dinars, contre plus de 10 milliards un an plus tôt. Cette recomposition traduit une stratégie délibérée d’allongement de la maturité de la dette, afin de limiter les risques de refinancement à court terme. Mais elle accroît mécaniquement la charge d’intérêts sur la durée et exerce une pression sur le marché financier local.

 

L’encours des Bons du Trésor Assimilables (BTA) bondit à 28 403 MDT, contre 16 478 MDT en 2024. Soit une augmentation spectaculaire de près de 12 milliards de dinars. En parallèle, les Bons du Trésor à court terme chutent à 2,95 milliards de dinars, contre plus de 10 milliards un an plus tôt.

 

Tourisme et transferts : deux moteurs essentiels

Les recettes touristiques cumulées s’élèvent à 5,753 milliards de dinars au 10 septembre, en hausse de 460 millions de dinars (MDT) par rapport à 2024. Cette progression témoigne de la bonne saison estivale et de la reprise graduelle du secteur, soutenue par le retour des marchés européens et maghrébins.

Les revenus du travail cumulés en devises atteignent 6,035 milliards de dinars. Soit une augmentation de 468 MDT par rapport à l’année précédente. Ces deux flux constituent aujourd’hui les principaux leviers de soutien de la balance des paiements. Permettant ainsi d’atténuer partiellement la pression exercée par le déficit commercial structurel.

Avoirs extérieurs et change

Les avoirs nets en devises de la BCT s’établissent à 25 527 MDT, soit l’équivalent de 110 jours d’importation, en recul par rapport aux 117 jours enregistrés un an plus tôt. Cette tendance à l’érosion reflète le poids du service de la dette extérieure, qui atteint 9 843 MDT cumulés au 10 septembre, contre 10 285 MDT l’an dernier. Malgré une légère baisse en valeur absolue, le service de la dette reste élevé et continue de grignoter les réserves.

Sur le marché des changes, le dinar affiche une évolution contrastée. Il s’apprécie face à l’euro, s’établissant à 3,41 TND pour 1 EUR contre 3,37 en 2024. Tandis qu’il se déprécie face au dollar, avec un cours de 2,91 TND pour 1 USD, contre 3,05 l’an dernier. Cette double évolution reflète la vigueur persistante du billet vert et la résilience relative de la monnaie européenne. Le dinar se renforce également face au dirham marocain, mais recule nettement face au yen japonais, traduisant une exposition différenciée selon les partenaires commerciaux.

 

Sur le marché des changes, le dinar affiche une évolution contrastée. Il s’apprécie face à l’euro, s’établissant à 3,41 TND pour 1 EUR contre 3,37 en 2024. Tandis qu’il se déprécie face au dollar, avec un cours de 2,91 TND pour 1 USD, contre 3,05 l’an dernier.

 

Analyse et perspectives à court et moyen terme

La situation actuelle de la Tunisie peut être qualifiée de « stabilité sous tension ».

À court terme, plusieurs signaux positifs se dégagent : la reprise du tourisme, la progression des transferts des Tunisiens à l’étranger et la stabilisation du taux directeur offrent un répit bienvenu. Ces facteurs contribuent à maintenir les réserves de change à un niveau relativement confortable, tout en soutenant le dinar face aux principales devises.

Cependant, cette apparente stabilité masque des fragilités structurelles profondes. La dette publique continue de croître, avec une dépendance accrue aux financements intérieurs par le biais des BTA. Cette stratégie, bien que nécessaire pour sécuriser le financement de l’État, augmente la pression sur le système bancaire local et réduit la capacité du secteur privé à accéder au crédit.

À moyen terme, la principale menace réside dans la soutenabilité extérieure. Les réserves de change, bien qu’encore confortables, montrent une tendance à l’érosion. Le service de la dette extérieure reste lourd et la Tunisie demeure exposée aux fluctuations des prix de l’énergie et aux chocs géopolitiques mondiaux. L’équilibre budgétaire et financier reste donc fragile et dépend largement de l’évolution des négociations avec les bailleurs de fonds internationaux, au premier rang desquels le FMI et la Banque mondiale.

Par ailleurs, le maintien de l’inflation autour de 5,2 % – Les prix des produits libres (non encadrés) augmentent de 6,2 % sur un an (**) – impose une vigilance accrue. Une détente trop rapide de la politique monétaire risquerait de relancer les tensions inflationnistes. Tandis qu’un resserrement supplémentaire pèserait sur une croissance déjà faible. La BCT se trouve donc dans une position délicate, devant arbitrer entre la stabilité des prix et la nécessité de préserver l’activité économique.

 

Le maintien de l’inflation autour de 5,2 % impose une vigilance accrue. Une détente trop rapide de la politique monétaire risquerait de relancer les tensions inflationnistes. Tandis qu’un resserrement supplémentaire pèserait sur une croissance déjà faible.

 

En définitive, la Tunisie évolue dans un environnement complexe où les soutiens ponctuels (tourisme, transferts, stabilité monétaire) ne suffisent pas à compenser les déséquilibres structurels (dette, déficit commercial, dépendance extérieure). La marge de manœuvre demeure étroite. Et seule la mise en œuvre de réformes profondes — qu’il s’agisse de la fiscalité, de la gouvernance des entreprises publiques ou de la diversification productive — permettra de transformer cette stabilité fragile en croissance durable.

 

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Sources :

(*) BCT

(**) INS

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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Editorial – Social

14. September 2025 um 05:00

 L ’Etat social ? Ancienne antienne remise au goût du jour. Le président Kaïs Saïed entend en faire l’alpha et l’oméga du budget de l’Etat 2026. La cheffe du gouvernement, Sarra Zaafrani Zenzri, s’en est fait l’écho au cours d’un récent Conseil ministériel consacré à cet effet. Elle prit soin d’insister également sur la nécessité de relancer l’économie nationale, sans quoi le budget de l’Etat ne serait pas ce qu’il est. C’est même, dira-t-on, le but ultime de toute architecture budgétaire.

 

Le budget de l’Etat, qui n’en est pas moins un plan de développement annuel, est l’expression de politiques publiques volontaristes à forte inflexion économique mâtinée de social, à moins que ce soit l’inverse. Ce qui ne manque pas de soulever quelques interrogations : où placer  prioritairement le curseur ? Sur les prévisions de croissance, et donc l’exigence économique, ou sur l’impératif social ? Le pari sur une croissance inclusive est beaucoup moins risqué que courir après son ombre. Une chose est sûre : le choix qui en résulte doit être le reflet de la détermination du gouvernement d’aller jusqu’à la limite de notre potentiel de développement. Ce choix est loin d’être une sinécure. Il relève d’un exercice de haute voltige, au regard des contraintes financières, de l’état de santé de l’économie, du climat des affaires intérieur, de l’état d’âme des acteurs économiques et des lignes de fractures géopolitiques, avec leur lot d’incertitudes. Sommes-nous à la veille du crépuscule de l’hyperpuissance et de l’hégémonie américaine qui veut tout changer à son gré pour que rien ne change ? Ou est-ce le réveil de la Chine qui est en passe de détrôner l’Amérique ? Un vrai séisme se profile à l’horizon, dont on n’a pas fini de mesurer les effets.

 

Il ne suffit pas d’être attentif à ce basculement géo-politico-économique. Il faut pouvoir l’exploiter au mieux de nos intérêts, sachant que les politiques économiques ne sont plus ce qu’elles étaient, désincarnées et désinhibées. Elles doivent intégrer cette nouvelle donne, du reste au contour assez flou. C’est dans ces eaux troubles que se construit le budget. Qui n’est rien d’autre que  l’affirmation d’une volonté, d’une vision, d’une ambition nationale, d’un cap et du refus de l’austérité qui ne fait qu’exacerber les crises et les tensions. Le budget de l’Etat est, de manière plus explicite, à la fois l’expression d’objectifs de croissance, de modes de répartition, de projets structurants et de transformations économiques et sociales.

 

L’ Etat a l’obligation  de redistribuer, via – et surtout – l’école, la santé, le transport, le logement, la régulation des marchés, un revenu minimum… Il ne peut distribuer que ce qui est produit, que les richesses nouvellement créées. Il sera mal inspiré de développer une forme d’assistanat sans lendemain, faute de moyens.

 

L’Etat a l’obligation  de redistribuer, via – et surtout – l’école, la santé, le transport, le logement, la régulation des marchés, un revenu minimum… Il ne peut distribuer que ce qui est produit, que les richesses nouvellement créées. Il sera mal inspiré de développer une forme d’assistanat sans lendemain, faute de moyens. Nos intérêts, sachant que les politiques économiques ne sont plus ce qu’elles étaient, désincarnées et désinhibées. Elles doivent intégrer cette nouvelle donne, du reste au contour assez flou. C’est dans ces eaux troubles que se construit le budget. Qui n’est rien d’autre que l’affirmation d’une volonté, d’une vision, d’une ambition nationale, d’un cap et du refus de l’austérité qui ne fait qu’exacerber les crises et les tensions. Le budget de l’Etat est, de manière plus explicite, à la fois l’expression d’objectifs de croissance, de modes de répartition, de projets structurants et de transformations économiques et sociales.

 

Se pose alors l’épineux problème du financement. Les caisses de l’Etat sont sous d’énormes  tensions, alors que le besoin de financement n’a jamais été aussi grand. Ce n’est pas tant le niveau de dépenses qui est en cause que l’usage qui en est fait. Les statistiques nationales sont, à cet égard, très révélatrices. Nous avons battu tous les records de dépenses budgétaires – en pourcentage du PIB – sans aucun effet ou presque sur la croissance, frappée d’un mal endémique. La raison est que l’essentiel de ces dépenses servait à couvrir les frais de fonctionnement d’un Etat boulimique. Les salaires de la fonction publique battent tous les records mondiaux, avec plus de 44% du total. Les dépenses de subventions et le remboursement du service de la dette se partagent quasiment le reste. Certes, les contraintes financières n’y sont pas pour rien, mais elles sont aggravées par une mauvaise affectation des ressources : les investissements productifs et d’avenir sont sacrifiés à l’autel du train de vie de l’Etat et des subventions sans discernement pour la consommation et les entreprises publiques.

Nous avons battu tous les records de dépenses budgétaires – en pourcentage du PIB – sans aucun effet ou presque sur la croissance, frappée d’un mal endémique. La raison est que l’essentiel de ces dépenses servait à couvrir les frais de fonctionnement d’un Etat boulimique. Les salaires de la fonction publique battent tous les records mondiaux, avec plus de 44% du total. Les dépenses de subventions et le remboursement du service de la dette se partagent quasiment le reste.

 

L’ennui est que le pays, devenu le mouton noir des marchés financiers, a du mal à se faire financer au plan international à des conditions qui ne soient pas onéreuses et dissuasives, sans que rien vienne stopper l’hémorragie des dépenses et l’implacable dérive réduisant à très peu de chose les dépenses d’équipement – à peine 5%. Exit ou presque les investissements d’avenir. Rien de bien consistant qui puisse motiver, stimuler, entraîner et tirer vers le haut toute la chaîne des investissements privés. Il est établi de longue date qu’il n’y a pas mieux que l’investissement public pour amorcer la pompe de l’investissement privé sous toutes ses formes. Ce n’est pas pour rien si le taux d’investissement (rapport au PIB) est tombé sous la barre des 10%. Moins de la moitié de son niveau d’avant la révolution et moins du tiers du taux marocain.

 

Certes, les contraintes financières n’y sont pas pour rien, mais elles sont aggravées par une mauvaise affectation des ressources : les investissements productifs et d’avenir sont sacrifiés à l’autel du train de vie de l’Etat et des subventions sans discernement pour la consommation et les entreprises publiques. L’ennui est que le pays, devenu le mouton noir des marchés financiers, a du mal à se faire financer au plan international à des conditions qui ne soient pas onéreuses et dissuasives, sans que rien vienne stopper l’hémorragie des dépenses et l’implacable dérive budgétaire.

 

Nous sommes au plus bas dans l’échelle d’appréciation des agences de notation qui nous ont relégués au rang de pays à haut risque. En butte au FMI, le pays est non seulement sanctionné par les marchés financiers, mais même les pays pompeusement qualifiés de frères et amis s’en détournent. Le marché local – crédit bancaire et emprunt national – ne saurait à lui seul servir de substitut, au risque de compromettre à jamais le financement de l’économie. Faute d’emprunts extérieurs à maturité longue et à des taux soutenables, le pays se livre à une sorte de cavalerie qui n’est pas d’un bon présage. Dans ces conditions, le « compter sur nous-mêmes » tourne au désastre pour le contribuable – personne physique ou morale – soumis à des taux d’imposition confiscatoire, les plus élevés d’Afrique et de la zone méditerranéenne.

 

Le poids des prélèvements obligatoires a fini par casser les ressorts de la consommation et de l’investissement. Et comme si cela ne suffisait pas, s’y ajoute le coût prohibitif du loyer de l’argent. Il n’en faut pas davantage pour provoquer l’arrêt des principaux moteurs de la croissance, à la grande satisfaction de nos compétiteurs de la région. Le pays est pris dans le tourbillon d’un cercle vicieux dont il a du mal à s’affranchir. La chute des investissements provoque le ralentissement sinon l’arrêt de la croissance, mettant encore plus à mal les ressources de l’Etat. Qui, dans l’urgence et pour éviter que ne s’écroule tout l’édifice, achève d’étrangler le contribuable et sollicite de nouveau les banques de la place, au risque d’aggraver l’effet d’éviction dont pâtit l’économie. Les banques sont dans leur zone de confort en finançant le déficit budgétaire sans risque aucun et à des taux à faire rêver les banquiers de la planète.

 

Pour les contribuables, ménages et entreprises, c’est la double peine. Ils sont victimes d’un  harcèlement fiscal et du loyer de l’argent quand les évadés fiscaux et les nababs de la contrebande cumulent les fortunes en reculant sans cesse les limites de l’économie informelle. Autant de sacrifices sans réelles contreparties, si l’on juge par l’état de délabrement des services publics. Au final, quoi d’autre sinon l’effritement de la classe moyenne, l’agonie et le dépérissement des PME/PMI, jadis fer lance de l’économie nationale ?

 

L’Etat social, c’est l’aboutissement d’une œuvre collective. A travers l’incarnation d’un Etat doté d’une plus grande sobriété en réduisant les dépenses inutiles et les impôts excessifs, d’acteurs économiques en pleine confiance qui ont foi en l’avenir et de salariés qui doivent se soucier autant de la courbe de productivité des entreprises que de leur fiche de paie.

 

Qu’adviendra-t-il de l’Etat social dans ces conditions ? Où trouver de nouvelles marges de  manœuvre avec un espace budgétaire aussi réduit et d’énormes contraintes financières qui pourraient s’aggraver si la croissance n’est pas de retour ? L’Etat a l’obligation de redistribuer, via – et surtout – l’école, la santé, le transport, le logement, la régulation des marchés, un revenu minimum… Il ne peut distribuer que ce qui est produit, que les richesses nouvellement créées. Il sera mal inspiré de développer une forme d’assistanat sans lendemain, faute de moyens. Il ne pourra pas tirer de la sorte des milliers de personnes de la misère et de la pauvreté. Il risque même de les condamner à terme au dénuement le plus total.

 

Nous sommes à un moment charnière, un moment de bascule où il faut repenser et réinventer le rôle de l’Etat. A l’ère de l’IA, le pays a besoin d’un Etat-stratège qui conçoit, anticipe, légifère, accompagne, incite, stimule, libère les énergies et la créativité et se projette dans le futur, ouvrant de la sorte de vastes horizons et perspectives. Moins d’Etat et mieux d’Etat là où sa présence n’est pas dictée par des considérations régaliennes ou stratégiques. Au risque de nous répéter, l’Etat doit libérer les initiatives, l’investissement, la croissance et endosser l’habit d’un prestataire de service, coresponsable du développement des entreprises, des plus petites aux plus grandes. Le moment est venu – cela doit être porté au crédit du budget de l’Etat 2026 – de faire tomber le mur de la bureaucratie d’Etat à travers la généralisation de la digitalisation, comme ont réussi à le faire les pays aujourd’hui en émergence rapide.

 

La mondialisation a mis à mal l’Etat-providence, qui a su s’adapter sans disparaitre pour autant et sans freiner l’essor et les nécessaires transformations économiques et sociales. L’Etat social, épine dorsale du projet présidentiel, doit emprunter les mêmes voies de l’efficacité et de la rationalité. Sans investissements à forte valeur ajoutée, sans croissance portée à son plus haut niveau, il n’y aura pas suffisamment de création de richesses, d’emplois et de revenus pour mettre en place les jalons d’un Etat social, qui n’est pas sans coût (il a un prix des plus élevés). La cohésion sociale, l’apaisement politique et social, le consentement à défaut de consensus n’en sont pas les moindres.

 

L’Etat social, c’est l’aboutissement d’une œuvre collective. A travers l’incarnation d’un Etat doté d’une plus grande sobriété en réduisant les dépenses inutiles et les impôts excessifs, d’acteurs économiques en pleine confiance qui ont foi en l’avenir et de salariés qui doivent se soucier autant de la courbe de productivité des entreprises que de leur fiche de paie. Sans quoi, on privera d’espoir et d’espérance les sans-emplois, les jeunes d’aujourd’hui et de demain et les plus pauvres parmi les pauvres, laissés depuis longtemps sur le bas-côté de la route. Vaste programme pour le budget 2026 !

Cet éditorial figure dans le numéro 927 de l’Économiste Maghrébin, paru du 10 au 24 septembre 2025 et disponible actuellement en kiosque.

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Caisses sociales en 2024 : entre équilibre apparent et fragilités structurelles

13. September 2025 um 06:00

À défaut de disposer des états financiers des caisses sociales, les comptes de la Nation offrent un aperçu global de la situation des organismes de sécurité sociale. Certains indicateurs peuvent sembler positifs à première vue, mais il est important de rappeler au lecteur qu’un équilibre comptable ne garantit pas nécessairement une situation de liquidité satisfaisante.

 

Il convient aussi de souligner que nous parlons ici d’un secteur dont la valeur ajoutée s’élève à 551,5 millions de dinars à la fin de l’année 2024.

 

 

Des cotisations en hausse

Du côté des revenus, les cotisations sociales ont atteint un record de 14 584,2 millions de dinars (MTND) en 2024. C’est seulement pour la deuxième année que le seuil des 14 milliards de dinars est franchi.

 

À ce montant s’ajoutent des transferts courants de 1 579,9 millions de dinars, dont 984,5 millions proviennent des administrations publiques. Autrement dit, l’effort budgétaire direct de l’État pour soutenir les caisses sociales. Les ressources totales atteignent ainsi 16 164,1 MTND.

 

Par ailleurs, les revenus de propriété se sont élevés à 171,4 millions de dinars, répartis entre 147,3 millions de dinars d’intérêts et 24,1 millions de dinars de dividendes issus des participations détenues par les caisses dans diverses entreprises. Ce chiffre relativement faible constitue un point de vulnérabilité majeur.

 

Le modèle économique actuel des caisses sociales repose entièrement sur la consommation immédiate des cotisations perçues au cours d’une année pour financer les prestations sociales de la même période. Elles ne parviennent pas à capitaliser ni à investir sur le long terme.

 

Durant les années d’excédent, les surplus n’ont pas été investis de manière stratégique, par exemple dans l’immobilier ou dans des titres à revenus fixes susceptibles de générer des revenus réguliers. Au lieu de cela, ces fonds ont été orientés vers des projets à visée politique, tels que le financement de la voiture populaire ou des prêts universitaires.

 

Bien que ces initiatives aient eu un impact social indéniable, elles n’ont pas renforcé la viabilité du système d’un point de vue technique et financier.

 

Des emplois appelés à croître rapidement

En ce qui concerne l’utilisation des ressources, les prestations sociales en espèces ont atteint un total de 12 559,1 millions de dinars en 2024. À cela s’ajoutent d’autres transferts courants s’élevant à 1 095,8 millions de dinars, comprenant notamment 1,1 million de dinars de primes nettes d’assurance-dommages et 1 049,2 millions de dinars de transferts courants entre administrations publiques.

 

Les caisses sociales, en raison de leur situation financière tendue, ont dû contracter des emprunts, générant des charges d’intérêts de 23,7 millions de dinars. En parallèle, elles supportent une masse salariale de 506,6 millions de dinars pour la rémunération de leur personnel.

 

Les dépenses de consommation finale, quant à elles, se sont élevées à 2 607,5 millions de dinars.

 

Cette structure financière, qui peut donner l’impression d’un certain équilibre à première vue, ne doit pas masquer les tensions réelles rencontrées en cours d’exercice. Le respect strict des dates de versement des pensions est un impératif. Il constitue un filet de sécurité vital pour des centaines de milliers de retraités. Or, le nombre de départs à la retraite ne cessera d’augmenter dans les années à venir, ce qui impose de trouver des sources de financement supplémentaires.

 

C’est dans ce contexte que s’inscrit, en partie, la volonté de l’administration publique de recruter davantage, dans l’espoir de générer des cotisations sociales additionnelles. Toutefois, cela ne suffira pas à garantir la viabilité du système. Il sera indispensable d’intensifier la lutte contre la sous-déclaration des revenus, notamment dans le régime des indépendants géré par la CNSS.

 

Par ailleurs, une réforme en profondeur du marché du travail est nécessaire. Le rendre plus flexible permettrait aux entreprises de recruter plus facilement. Toutefois, à l’ère de l’intelligence artificielle et de l’automatisation, il ne faut pas négliger le fait que certaines entreprises pourraient être tentées d’augmenter leur productivité par des licenciements. Cela souligne l’urgence de trouver un équilibre entre performance économique et protection sociale.

 

Assurer la soutenabilité financière des caisses sociales, tant à court qu’à long terme, constitue un exercice technique complexe, mais indispensable pour préserver le pacte social.

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