La 25ᵉ édition des Journées Théâtrales de Carthage (JTC) s’est ouverte en grande pompe samedi soir, avec une cérémonie officielle au Théâtre municipal de Tunis, suivie du spectacle inaugural Star Returning, une œuvre visionnaire du metteur en scène polynésien Lemi Ponifasio. La soirée a commencé par une prestation au piano sur l’avenue Bourguiba, attirant un large public au cœur de la capitale tunisienne.
Sous l’égide du ministère des Affaires culturelles, les JTC sont un rendez-vous incontournable pour le théâtre arabe, africain et international. La ministre des Affaires culturelles, Amina Srarfi, ainsi que plusieurs diplomates et artistes, étaient présents pour célébrer cet événement culturel. L’actrice tunisienne Saoussen Maalej a animé la cérémonie, ponctuée de moments forts comme l’hymne national et une scénographie éclatante signée Ghazi Zoghbani.
Le directeur des JTC, Mohamed Mounir Argui, a mis en lumière la vocation de ce festival : célébrer l’art, défendre les causes justes et offrir une plateforme unique pour la diversité culturelle. Cette édition, placée sous le signe de « Le théâtre de toutes les résistances… l’art de la vie », aborde des thèmes profondément humanitaires. La guerre en Palestine, notamment à Gaza et au Liban, occupe une place centrale dans la programmation, avec des performances marquantes comme celle du guitariste et compositeur palestinien Shadi Zaqtan.
Des hommages ont été rendus à des figures emblématiques du théâtre tunisien et international, vivantes et disparues, marquant ainsi la mémoire collective. Parmi elles, le regretté Yasser Al-Jaradi, honoré par une prestation de l’artiste Raoudha Abdallah.
Au programme de cette édition 2024 : 125 spectacles de 32 pays, dont 12 en compétition officielle. La Tunisie y est représentée par Danse Céleste de Taher Aissa Ben Arbi et Toxic Paradise de Sadok Trabelsi. Le jury, présidé par Mohamed El Ouni, réunit des figures internationales du théâtre, garantissant une compétition riche et variée.
Les JTC se poursuivront jusqu’au 30 novembre avec des spectacles hors compétition, des créations de la diaspora et des projets axés sur le théâtre de la liberté et de l’intégration sociale. Cet événement, véritable fenêtre sur le monde, fait vibrer Tunis au rythme des arts vivants.
La 25ème édition des Journées Théâtrales de Carthage (JTC) a été ouverte, samedi soir, au cours d’une cérémonie officielle organisée, au Théâtre municipal de Tunis, précédée par une prestation au piano, devant le théâtre, sur l’avenue Bourguiba au coeur de la Capitale.
A l’issue de la cérémonie officielle, la Cité de la culture a abrité le spectacle d’ouverture, « Star Returning » de Lemi Ponifasio, présenté à la grande salle du Théâtre de l’opéra de Tunis.
La soirée inaugurale a été marquée par la présence de la ministre des Affaires Culturelles Amina Srarfi et d’un certain nombre de diplomates et d’invités dont des artistes arabes, africains et d’ailleurs.
Organisé sous l’égide du ministère des Affaires culturelles, le festival des JTC est un rendez-vous annuel d’envergure arabe et africaine, ouvert sur le théâtre dans le reste du monde.
L’actrice Saoussen Maalej était la maîtresse de la cérémonie d’ouverture démarrée par l’interprétation de l’hymne national tunisien.
Le metteur en scène Ghazi Zoghbani est le concepteur de la scénographie du spectacle inaugural, riche en couleurs et porteuse d’un message d’espoir et de paix dans le monde.
Le directeur des JTC, l’homme de théâtre Mohamed Mounir Argui, a déclaré ouverte cette édition 2024 tout en soulignant la ferme position du festival en faveur des causes justes. Il a notamment évoqué une édition spéciale pour ce rendez-vous théâtral arabe et africain ouvert sur le théâtre dans le monde entier.
Il a également exprimé sa solidarité avec les délégations étrangères qui n’ont pas pu participer au festival en raison de difficultés en lien avec le visa tout en rappelant la vocation des JTC qui offrent une occasion unique pour célébrer l’art et la culture.
Les questions humanitaires sont au cœur de cette édition ayant pour slogan “Le théâtre de toutes les résistances… l’art de la vie”. La guerre dans les Territoires palestiniens occupés et notamment dans la Bande gaza ainsi qu’au Liban sud sont au cœur de la programmation. Dans ce contexte, la soirée a été marquée par une prestation de l’artiste guitariste et compositeur palestinien Shadi Zaqtan.
Une chorégraphie a été interprétée par des enfants appartenant au cirque Paparouni en hommage aux « enfants du monde » notamment ceux vivant dans des conditions de guerre.
Certaines figures du théâtre et de la télévision en Tunisie étaient à l’honneur dont Amel Baccouche, Wajiha Jendoubi, Mokdad Salhi, Yahya Al Faydi, Fatma Bahri, et Mounir Ben Youssef.
Un hommage posthume a été également rendu à Abdelmajid Jemâa, Mourad Karrout, Saadi Zidani, Abdelhak Khamir, Abdel Aziz BelGaied Hassine, Mahjouba Ben Saad et Mohamed Mourali ainsi que l’artiste engagé Yasser Al-Jaradi, récemment décédé, pour lequel a chanté l’artiste Raoudha Abdallah.
La soirée s’est poursuivie avec le spectacle d’ouverture, « Star Returning » du metteur en scène Lemi Ponifasio. Cette œuvre profonde et visionnaire de l’artiste de théâtre polynésien Lemi Ponifasio, a été créée en collaboration avec le peuple Yi de la région de Daliangshan en Chine.
De longues files d’attentes étaient visibles depuis le hall central de la Cité de la culture jusqu’à l’entrée principale du Théâtre de l’Opéra de Tunis. Prévu à 20h, le spectacle a finalement commencé vers 21h devant un public assez nombreux. Après son avant-première chinoise le 8 novembre courant, dans la ville de Xichang (Province de Sichuan), ce spectacle a fait sa première mondiale aux JTC.
Organisé du 23 au 30 novembre 2024, à Tunis, le festival des JTC présente une sélection de 125 spectacles issus de 32 pays arabes, africains et d’ailleurs. 12 spectacles sont dans la compétition officielle, exclusivement destinée aux structures théâtrales professionnelles, arabes et africaines.
Le théâtre tunisien est dans la course aux Tanits à travers « Danse Céleste » de Taher Aissa Ben Arbi et « Toxic paradise » de Sadok Trabelsi.
Le jury de la compétition officielle, présidé par l’auteur, poète et critique tunisien Mohamed El Ouni, réunit le griot, dramaturge et comédien burkinabé Hassan Kassi Kouyaté, le dramaturge et académicien irakien Khazaal Al Mejidi, la comédienne et autrice palestinienne Raeda Taha, la comédienne syrienne Hala Omrane et un universitaire tunisien, Yacine Ouni, en tant que rapporteur.
Le festival présente des spectacles hors compétition avec notamment des expressions théâtrales de la diaspora et des spectacles issus de divers pays dans la section Théâtre du monde. La Tunisie présente divers spectacles pour adultes et pour enfants et autres dédiés au théâtre d’intégration sociale et au théâtre de la liberté.
Le théâtre syrien, la cause palestinienne et la guerre contre la Bande de Gaza et le Liban sont au coeur de la programmation des JTC 2024 pour une semaine riche en spectacles et autres rendez-vous autour du théâtre arabe et africain.
L’écrivain libanais Charbel Dagher est le lauréat de la 30ème édition du Prix Abou el Kacem Chebbi de la littérature arabe pour un recueil de poésie. Quant à l’écrivain et penseur tunisien Abdel Majid Sharfi a remporté le prix d’honneur décerné à une personnalité du secteur culturel.
La cérémonie de remise du Prix Abou el Kacem Chebbi a été organisée samedi 23 novembre à Tozeur, ville natale d’Abou el Kacem Chebbi, par la Banque de Tunisie (BT) à l’occasion de la commémoration du 90ème anniversaire de la disparition du grand poète et en hommage à son œuvre universelle.
A noter au passage que le prix Abou el Kacem Chebbi de la littérature arabe est doté de 25 mille dinars attribués au lauréat.
Charbel Dagher a été primé pour un recueil de poésie qui s’intitule « Yaghtassilo annathrou fi nahrehe » (littéralement: La prose baigne dans sa rivière), paru aux éditions Khotot w Thelal, en Jordanie (254 pages, 2024).
Le jury présidé par le poète Moncef Louhaibi a décerné son prix pour une « poésie en prose qui se distingue par la modernité de sa structure poétique et cognitive et l’esthétique de son style narratif qui verse dans tous les genres littéraires ».
Abdelmajid Charfi fut à l’honneur lui aussi « pour l’ensemble de son œuvre et en reconnaissance de son projet intellectuel moderniste, à portée arabo-islamique et universelle », a annoncé le président du jury.
Le Prix Abou el Kacem Chebbi de la littérature arabe est dédié à l’œuvre prolifique d’Abou El Kacem Chebbi (24 février 1909 – 9 octobre 1934) qui ne cesse de nourrir la mémoire des peuples aspirant à la liberté. Outre la poésie, les écrits de littéraires de Chebbi en prose sont également aussi importants.
Le « poète des lumières », comme on le surnomme, a écrit une centaine de poèmes sur divers thèmes qui se rapportent notamment à la vie, la mort, la liberté, la révolte, la mélancolie et l’exil. La poésie de ce grand poète arabophone des temps modernes est traduite dans plusieurs langues, enseignée dans les universités et adaptée dans des œuvres musicales.
Après l’échec du rêve unitaire arabe dont sa population a longtemps été bercée, l’Irak est aujourd’hui un pays contrôlé par les Américains mais pas suffisamment pour empêcher les milices pro-iraniennes de tirer des salves de missiles et de drones sur Israël. Et son avenir paraît toujours aussi compromis, même à l’issue de la fin (officielle) de l’occupation américaine.
Dr Mounir Hanablia *
L’Irak est ce pays ancien bien connu correspondant grosso modo à la Mésopotamie, peuplé d’une mosaïque de communautés. Considéré comme un jalon important sur la route des Indes devant être verrouillé pour interdire l’accès au golfe Arabo-persique aux Allemands alliés des Ottomans, durant le premier conflit mondial, son accession à l’ère moderne commence en 1917 par sa conquête sur les Ottomans par les Anglais et par la découverte et l’exploitation du pétrole par une filiale de l’Anglo-persian Oil Company. Aux provinces de Basra et de Bagdad, ils adjoignent celle pétrolière kurde de Kirkouk, au grand dam des Turcs qui n’auront de cesse d’ambitionner de la reconquérir.
Une monarchie, celle des Hachémites originaires du Hedjaz, y est installée dans les années 1920 après l’expulsion du Roi Fayçal de Syrie par les Français. Et toutes les révoltes sont matées par la Royal Air Force, qui n’hésite pas à bombarder les populations et les habitations civiles sans aucune considération du nombre de victimes. Ainsi Sulaymaniyah dans le Kurdistan est pratiquement détruite en 1926.
La monarchie hachémite en Irak est étroitement dépendante du pouvoir anglais, et sa principale ressource est constituée par les maigres dividendes concédées par l’Irak Petroleum Company. Cela n’empêche pas le pays d’adopter le parlementarisme britannique, mais celui-ci n’est que le reflet de la domination exercée sur la société par les classes éduquées des villes et les grands propriétaires terriens. Le pays demeure essentiellement rural et agricole, sans toutefois assurer ses besoins alimentaires.
Le paradoxe de l’Irak tout comme l’Egypte soumise à la domination anglaise, est son incapacité à produire suffisamment dans l’agriculture malgré ses immenses ressources hydriques. Quant à l’industrie, elle est, mis à part le pétrole, inexistante.
Durant la seconde guerre mondiale, un groupe d’officiers nationalistes, plus précisément anti-anglais, le carré d’or, prend le pouvoir et veut fournir une base à la Luftwaffe à Kirkouk dans l’espoir de voir la Wehrmacht débouler des montagnes du Caucase et du désert de Syrie pour libérer le pays de l’occupation anglaise. Le projet tourne court lorsque le chef de l’escadrille allemande envoyé à Kirkuk est tué accidentellement. Mais rares sont les Irakiens qui ont approuvé de voir leur pays s’associer aux Nazis.
Avènement de l’idéologie panarabiste
Après la seconde guerre mondiale, et avec la guerre froide, la Grande Bretagne veut faire de l’Irak une pièce essentielle du dispositif anticommuniste, avec la Turquie, l’Iran, et le Pakistan, dans ce qu’il est convenu d’appeler le pacte de Bagdad.
Entretemps s’est formé un puissant Parti communiste irakien essentiellement au sein de la communauté chiite, la plus nombreuse mais aussi la plus opprimée. Un autre parti, le Baath, créé par le visionnaire utopiste syrien Michel Aflaq, prônant la renaissance d’une mythique nation arabe, ne fait que quelques adeptes au début des années 50. Mais l’arrivée au pouvoir en Egypte des officiers libres et l’émergence du nationaliste égyptien, Nasser en tant que leader de la nation arabe, à son corps défendant semble-t-il, fournit à l’idéologie panarabiste une impulsion décisive dans sa revendication contre les puissances coloniales anglo-françaises, et sioniste. C’est peut être faire abstraction des événements d’Iran et de la lutte engagée par l’Anglo Iranian Oil Company contre Mossadeq sur la région. Mais en juillet 1958 se produit un coup d’État militaire issu d’ officiers nationalistes irakiens contre le régime royal anglophile dont la figure de proue est un ancien officier de l’armée ottomane, Nouri Saïd. La population de Bagdad se soulève à l’appel des putschistes et massacre les principales personnalités du régime dans les rues.
De Abdelkarim Kassem à Saddam Husseïn
Le nouveau régime militaire dirigé par Abdelkarim Kassem s’appuie sur les communistes, instaure la république, mais face aux Nassériens, se prétend avant tout nationaliste irakien. Kassem prétend réintégrer le Koweït à la mère patrie irakienne par la force et veut la réforme agraire, ce qui lui assure certes une réelle popularité dans la population mais désorganise la production agricole. Il est prudent en s’abstenant de remettre en question le statu quo dans le domaine du pétrole, mais se place néanmoins en porte à faux contre les puissances occidentales, les pays arabes du Golfe, ainsi que et surtout, Nasser. Il refuse néanmoins de se jeter dans les bras du Parti communiste, pourtant son seul soutien, qu’il n’hésite pas à marginaliser.
En fin de compte, après le soulèvement de Mossoul dirigé par un officier, Abderrahmane Chawaf, qui se conclut par un bain de sang perpétré contre les nationalistes arabes et les baathistes, puis plusieurs tentatives d’assassinats dont l’une dans laquelle est impliquée un certain Saddam Hussein, Kassem malgré sa popularité, et malgré l’appui de la population descendue dans la rue le soutenir, est renversé et exécuté en 1963 par des officiers nassériens soutenus par des militaires du Baath, qui ne lui ont pas pardonné les exécutions de manifestants, qu’on lui attribue. Les communistes sont pourchassés dans les rues et massacrés en masse par les militants du Baath. Pourtant l’Union syro-égyptienne s’est conclue deux années auparavant par un échec retentissant.
Le nouveau président, Abderrahmane Aref, quoique nationaliste arabe, ne veut pas être sous la coupe de Nasser. Et l’union tripartite envisagée avec l’Egypte et la Syrie est cantonnée à un simple slogan. Les militaires au pouvoir sont conservateurs sur le plan économique et social et ne veulent pas du socialisme prôné par Nasser. Ils sont hostiles aux revendications autonomistes kurdes et se lancent dans une guerre absurde au Kurdistan qui se conclut par un échec retentissant.
En 1965, ces militaires s’allient aux conservateurs du Baath et à son fondateur Michel Aflaq pour réprimer l’aile gauche du parti dirigée par l’ancien ministre de l’Intérieur Ali Salah Saadi accusé de vouloir prendre le pouvoir et de faire le jeu de la branche syrienne du parti.
Des militants armés comprenant l’inévitable Saddam Hussein font irruption dans le siège du Congrès en scandant : «Une seule nation arabe au message éternel» au moment même où la scission au sein de leur parti est consommée.
Abderrahmane Aref meurt dans un mystérieux accident d’hélicoptère. Son frère lui succède en 1967 mais il n’a pas le charisme nécessaire. Il essaie bien d’obtenir un consensus minimum et de conférer au gouvernement une apparence civile, mais c’est peine perdue. Il est renversé par les militaires du Baath dirigés par Ahmed Hassan Al Bakr qui cette fois s’assurent de la réalité du pouvoir malgré l’instauration d’un conseil du commandement de la révolution. La suite on la connaît. Saddam Hussein qui est un parent du président s’assure progressivement le contrôle de la police secrète, du parti, de l’administration, de l’armée. En 1973 il élimine Nazem Al Kazzaz, le puissant chef de la police secrète, qui tente de prendre le pouvoir, et qui semble en l’occurrence avoir été victime d’une provocation soigneusement préparée. Cette affaire permet d’éliminer quelques autres rivaux et sert d’avertissement à tous ceux qui s’opposent à l’ascension du nouvel homme fort qui joue des communistes et des Kurdes les uns contre les autres afin de neutraliser toute opposition et incrimine le parti frère ennemi de Damas dans des complots dont la réalité n’est le plus souvent pas prouvée.
Saddam n’hésite pas à nationaliser le pétrole en 1972 en s’assurant le soutien de la France sans encourir l’hostilité des Britanniques et la hausse du prix du pétrole de 1973 sert ses intérêts en décuplant les revenus de l’État. Il a alors en main les moyens nécessaires pour transformer le pays et commence par mener une guerre coûteuse dans le Kurdistan qui n’aboutit pas du fait de l’appui apporté aux autonomistes par le Shah d’Iran, l’Amérique, et Israël. Les accords d’Alger avec l’Iran en 1975 en consacrant l’abandon des Kurdes lui fournit l’occasion de «pacifier» la région du nord par une politique d’arabisation forcée, de déportation, et de réinstallation des populations.
Contrôle total sur la population et culte de la personnalité
Il est vrai que l’époque est à la prospérité et la population irakienne jouit d’une élévation considérable de son niveau de vie dont le Baath tire profit pour assurer son contrôle total sur la population. Mais à partir de 1977, un nouvel adversaire apparaît, le clergé chiite. Les forces de sécurité n’hésitent pas à tirer sur la foule des pèlerins dans les lieux saints. La capture opportune sur les lieux d’un soldat syrien permet au régime d’étoffer sa thèse du complot extérieur mais Saddam est obligé de donner des gages aux religieux au détriment de la politique officiellement laïque jusque-là pratiquée.
Il est vrai que la Révolution Islamique d’Iran survenue en 1979, année à laquelle Saddam accède à la présidence, en fait désormais l’un de ses principaux ennemis. Il enfile alors les bottes du conquérant arabe musulman face au perse païen et du défenseur des régimes du Golfe. Il envahit l’Iran en 1981 avec l’appui des Occidentaux et des régimes arabes conservateurs qui financent son armée, et ses opérations militaires. La guerre lui permet d’instaurer un véritable culte de la personnalité et d’exercer un contrôle absolu sur l’armée en nommant des personnes de sa famille et de son clan aux postes les plus sensibles.
A partir de 1983, le front se stabilise grosso modo de part et d’autre de la frontière. C’est le statu quo que plusieurs offensives iraniennes meurtrières ne parviennent pas à modifier. La guerre se termine en 1989 avec l’acceptation par l’Iran des résolutions des Nations unies, et l’usage d’armes chimiques par l’armée irakienne devenue coutumière du fait contre les populations kurdes provoque le célèbre massacre de Halabja.
L’Irak a la fin de la guerre est un pays surarmé par l’Occident qui lui a même livré des usines de fabrication de gaz de combat, et ruiné, qui doit rembourser ses créanciers arabes, alors que les prix du pétrole baissent. Saddam croit alors obtenir le feu vert des Américains pour envahir le Koweït. Il juge que c’est le seul moyen pour lui de sauver ce qui lui paraît essentiel, son propre pouvoir. Le pays est alors détruit par la campagne militaire américaine sous couverture internationale Tempête du Désert, puis soumis à un sévère embargo qui fait plus de victimes que la guerre. Le Kurdistan irakien jouit d’une sécession de fait.
Le régime de Saddam est liquidé en 2003 avec l’occupation du pays par les troupes américaines opérant pour le compte d’Israël. Lui-même est pris, jugé et exécuté, pour des crimes dont on ne peut pas l’exonérer, et sa mort courageuse ne doit pas occulter sa responsabilité.
Un pays contrôlé par les Américains
En effet, le rêve unitaire arabe prôné par le Baath ne fut pour lui qu’un moyen de réaliser ses propres ambitions et il ne chercha jamais à masquer ses mesures expéditives, dont la plus spectaculaire reste sans aucun doute cette trentaine de personnes cueillies par la sécurité d’Etat à l’appel de leurs noms dans la salle du Congrès du Parti, sans avoir la possibilité de se justifier et emmenées sans autre considération vers des destinations inconnues.
On peut certes l’accréditer des nombreuses réalisations économiques et sociales du pays. Mais il ne s’agissait là que d’un vernis. La société irakienne qui pouvait se targuer de posséder la classe la plus cultivée du Moyen-Orient dans les années 50, ne s’est pas sous le Baath laïc modernisée en profondeur, et la meilleure preuve en est l’irruption de Daech de ses entrailles quelques années après.
D’autre part, les succès attribués au régime exclusivement issus de la rente pétrolière n’ont pas assuré la transition vers une société sans pétrole. La réforme agraire n’a pas assuré au pays l’autosuffisance alimentaire que ses ressources en eau eussent dû lui assurer. Au contraire, les huit années de guerre contre l’Iran ont assuré à la Turquie voisine l’opportunité pour réaliser le gigantesque projet Atatürk de barrages de retenue sur les cours de l’Euphrate et du Tigre. Quant à l’industrialisation militaire dont elle avait acquis le savoir-faire avec la guerre contre l’Iran, l’occupation américaine l’en a privée.
Aujourd’hui l’Irak est toujours un pays contrôlé par les Américains mais pas suffisamment pour empêcher les milices pro-iraniennes de tirer des salves de missiles et de drones. Et son avenir paraît plus dans un modèle de cohabitation de communautés disparates à la libanaise que dans l’émergence véritable d’une nation. Pour tout dire, son avenir paraît toujours aussi compromis, même à l’issue de la fin (officielle) de l’occupation américaine.
* Médecin de libre pratique.
‘‘Iraq Since 1958: From Revolution to Dictatorship’’, de Marion Farouk-Sluglett et Peter Sluglett, éd. I. B. Tauris, 25 août 2001, 416 pages.
Dans un paysage littéraire algérien où les langues officielles — arabe, français et tamazight — se disputent, Rabeh Sebaa choisit de bousculer les conventions en publiant ‘‘Fahla’’, un roman audacieux écrit en langue algérienne, dans les deux versions graphiques arabe et latine, invitant à une réflexion profonde sur la société algérienne, en abordant des sujets sensibles qui touchent à la fois à la culture, à l’histoire et aux défis contemporains du pays..
Guettala Djamal
Ce choix linguistique novateur donne une voix écrite à l’algérien, souvent relégué au statut de dialecte, et permet de toucher un public plus large, y compris les jeunes générations de la diaspora.
Dans cet entretien, Rabeh Sebaa nous parle de son œuvre et de son engagement pour la reconnaissance de cette langue, tout en explorant les thèmes centraux de ‘‘Fahla’’ : la lutte des femmes pour leurs droits, la résistance face aux forces de l’obscurantisme, et la quête d’un idéal de beauté et de vérité.
À travers ‘‘Fahla’’, l’auteur nous invite à une réflexion profonde sur la société algérienne, en abordant des sujets sensibles qui touchent à la fois à la culture, à l’histoire et aux défis contemporains du pays.
Kapitalis: Qu’est-ce qui vous a incité à écrire ‘‘Fahla’’ en dialecte algérien et en lettres latines ?
Rabah Sbeaa : L’absence de la langue algérienne dans un paysage littéraire dominé par un triptyque linguistique (arabe, français et tamazight) m’a interpellé. La langue parlée par la majorité des Algériens n’avait pas droit de cité. Il était donc nécessaire de réparer cette anomalie.
‘‘Fahla’’ est sorti simultanément en deux versions graphiques, arabe et latine. Cette dernière vise les locuteurs ayant appris l’algérien par transmission orale mais qui ne connaissent pas l’alphabet arabe, comme les enfants d’émigrés ou les étrangers ayant vécu en Algérie.
Comment le contexte sociopolitique actuel de l’Algérie a-t-il influencé votre écriture et les thèmes abordés dans ce roman ?
Beaucoup de critiques littéraires considèrent ‘‘Fahla’’ comme un roman sociologique. L’intrigue est donc ancrée dans la réalité sociale algérienne, et tous les thèmes abordés reflètent des aspects qui traversent la société algérienne.
Pourriez-vous nous parler du personnage principal, Fahla? Quelles sont les qualités et les défis qui la définissent tout au long du récit ?
Fahla est le prénom du personnage principal, mais c’est aussi un qualificatif désignant une femme déterminée, courageuse et loyale. Elle incarne des valeurs de progrès et d’épanouissement pour l’ensemble de la société.
La lutte des femmes contre la marginalisation et le patriarcat est un thème central de votre roman. Quelles sont les motivations derrière cette représentation, et comment espérez-vous qu’elle résonne avec vos lecteurs ?
Le combat des femmes algériennes pour leur émancipation a commencé bien avant la lutte de libération contre le joug colonial. Il est important de lui donner la visibilité qu’il mérite. La motivation principale derrière cette représentation est de parvenir à faire reconnaître ce combat comme une nécessité, à sa juste valeur.
Quels sont les idées majeures que vous souhaitez transmettre à travers ‘‘Fahla’’, et comment se développent-ils dans le récit ?
C’est fondamentalement la lutte du Beau contre la laideur. Au sens métaphorique, mais aussi comme confrontation entre des valeurs sociales et morales. Les «soldats des ténèbres», ces faussaires de la foi, ennemis jurés de Fahla et de ses compagnons, cherchent à obscurcir la société en imposant de fausses valeurs religieuses, assorties d’interdits et de tabous de leur invention.
Pourquoi avez-vous choisi d’écrire ‘‘Fahla’’ en utilisant le dialecte algérien plutôt que l’arabe classique ? Quel impact pensez-vous que cela a sur la portée de votre œuvre ?
La langue algérienne n’est pas un dialecte. C’est une langue à part entière, avec sa grammaire, sa syntaxe, sa sémantique et sa personnalité. Écrire en algérien, c’est s’adresser à l’ensemble de la société algérienne, tandis que l’écriture en arabe classique s’adresse à une minorité qui ne l’utilise qu’à des fins officielles, car l’arabe classique est principalement une langue de formalité.
Comment décririez-vous votre style d’écriture dans ‘‘Fahla’’, et en quoi ce style contribue-t-il à l’authenticité et à la force de votre message ?
Mon style dans ‘‘Fahla’’ est le même que dans l’ensemble de mes ouvrages : un style personnel, qui dépasse la rigidité et l’exiguïté linguistique, et qui se caractérise par l’invention et l’usage de néologismes.
Comment votre roman a-t-il été accueilli par le public et les critiques ? Y a-t-il des retours qui vous ont particulièrement marqué ?
‘‘Fahla’’ a reçu un excellent accueil, aussi bien du public que des médias, y compris étrangers, comme BBC News. Mais ce qui m’a particulièrement marqué, c’est l’engouement universitaire et scientifique autour de ‘‘Fahla’’. De nombreuses recensions, des articles dans des revues scientifiques, et même des thèses de master et de doctorat, en Algérie et à l’étranger, ont vu le jour. ‘‘Fahla’’ est devenu un objet d’étude scientifique.
Quel impact espérez-vous que ‘‘Fahla’’ ait sur la perception des droits des femmes en Algérie et sur les discussions autour de la condition féminine ?
Le titre est en lui-même un programme. La réception par les femmes, comme par les hommes en Algérie, a été forte et, bien entendu, cela a contribué à sensibiliser davantage de personnes. Ce qui m’a le plus surpris, c’est l’adhésion à la justesse du combat des femmes algériennes pour l’amélioration de leur condition.
Comment ‘‘Fahla’’ s’inscrit-il dans le paysage littéraire algérien contemporain, notamment par rapport à d’autres œuvres traitant de thèmes similaires ?
Comme je l’ai précisé plus haut, ‘‘Fahla’’ est le premier roman qui s’inscrit dans un cadre brisant le triptyque arabe-français-tamazight, introduisant ainsi une nouvelle langue, celle de l’algérien. Les œuvres traitant de thèmes similaires, comme le combat des femmes algériennes pour leur dignité, n’ont ni la même sensibilité, ni la même lisibilité, ni la même capacité de transmission.
Y a-t-il des auteurs ou des œuvres qui vous ont inspiré dans l’écriture de ‘‘Fahla’’? Et comment ces influences se manifestent-elles dans votre travail ?
À la sortie du roman, une critique littéraire a écrit : «Après ‘‘Nedjma’’, nous avons ‘‘Fahla’’». Je ne suis pas contre cette comparaison, car l’œuvre de Kateb Yacine est, sans conteste, une source d’inspiration. D’autant plus que les deux romans associent l’Algérie aux noms de leurs héroïnes. Beaucoup considèrent que Fahla n’est pas seulement le nom du personnage principal, mais aussi une métaphore pour désigner l’Algérie, en tant que «Blad Fahla», pays d’endurance et de résilience.
Quelle a été votre expérience personnelle en écrivant ‘‘Fahla’’ ? Y a-t-il des moments ou des défis qui vous ont particulièrement marqué ?
Je suis encore étonné par la facilité et la fluidité avec lesquelles le roman a été rédigé en peu de temps, bien que ce soit ma première expérience d’écriture en algérien. Le texte a coulé de source dans les deux graphies, latine et arabe, comme s’il avait mûri pendant des années. Je vis la même expérience avec le second roman, qui est en cours de finalisation.
Quel message ou quelle leçon principale espérez-vous que les lecteurs retiennent de ‘‘Fahla’’ ?
Deux messages. Tout d’abord, contrairement à une opinion largement partagée, la langue algérienne est une langue qui peut s’écrire. Elle n’est ni une darija, ni une âamiya, ni une chafa’hiya (c’est-à-dire une langue uniquement orale).
Ensuite, un personnage féminin avec un nom aussi symbolique est le meilleur moyen d’illustrer le combat de la Beauté contre la laideur, aussi bien à l’échelle des individus qu’à celle de la société dans son ensemble.
Né en 1935, Ahmed Abd Al-Mu’ti Hijazi (أحمد عبد المعطي حجازي) est poète, journaliste et critique égyptien. Considéré comme l’un des pionniers de la modernité poétique arabe, il dirigea la revue Ibda’ (création).
D’idéologie panarabe nassérienne qu’il représenta en Syrie lors de l’Union, en 1959, il s’opposera par la suite à Sadate qui l’exclura de son emploi de journaliste. Il s’installe en France en 1974 où il enseigna à l’université. Revint en Egypte où il poursuit ses activités littéraires et culturelles.
Parmi ses recueils (en arabe) : Une ville sans cœur, 1959 ; Elégie du bel âge, 1972 ; Les arbres de ciment, 1989.
Tahar Bekri
Le temps vient et s’en va Sans que l’ombre change de place Ces arbres de ciment comme des champignons couvrent l’écorce de la terre Il n’y a pas d’endroit pour l’herbe Ni de sens pour cette pluie forte Sur les pierres silencieuses Il ne pousse que rouille Ou mousse sans racines
Le vent arrive et s’en va
Sans traverser ce silence Ou pouvoir porter secours aux villages Ni aux bateaux qui font naufrage Les arbres de ciment partout S’élancent et croulent Comme des monstres Chassent les oiseaux qui tombent des arbres Dans les radars Et se pendent les oisillons de leurs cous Sur les fils d’écoute Dans ces ciels dont nous savons de nos balcons Que les oiseaux y meurent Quand leurs nuées s’entrechoquent Les antennes du métal incandescent s’élèvent Dans la dernière lumière
La nuit arrive et s’en va Sans que l’on ait assouvi son sommeil Les arbres de ciment nous cernent Les nouveau-nés dont les pères sont habitués au silence Naissent petits Au physique amputé Aucune voix ne sort de leur bouche Ni leurs testicules ne croissent
Les poubelles que rejette le plaisir Chaque matin par lassitude non à satiété Se déposent par tas aux portes Les machines rejettent d’autres, écume et vin Dans les rivières qui mènent vers les marchands Pendant que la terre tourne
Le Centre national de la calligraphie, Dar Mestiri, célèbre le trentième anniversaire de sa création, le 18 novembre 1994. A cette occasion, une manifestation ayant pour thème « trente ans au service de la calligraphie arabe et de la décoration islamique » se déroule du 11 au 18 novembre, au siège du Centre.
Yassine Mokrani, directeur du centre national de la calligraphie et Conservateur du patrimoine à l’Institut National du Patrimoine, a présenté une manifestation visant à faire connaitre le Centre et ses activités auprès du grand public.
Une série d’ateliers sont au programme de cet l’évènement ouvert, lundi 11 novembre, par une exposition calligraphique. Les jeunes et moins jeunes peuvent participer aux divers ateliers et découvrir les œuvres des étudiants du centre, exposées dans le hall du Palais. Une journée d’étude sur la calligraphie arabe et la décoration est également au menu.
Calligraphie arabe et numérisation : la calligraphie kairouanaise comme modèle :
Lors d’une conférence qui s’intitule « Calligraphie arabe et numérisation : la calligraphie Kairouanaise comme modèle », organisée, mardi 12 novembre, Béchir Darraji, professeur de calligraphie arabe au Centre national de la calligraphie et Concepteur publicitaire numérique a parlé des logiciels de numérisation de la calligraphie arabe. Il a évoqué son expérience dans la numérisation de la calligraphie Kairouanaise, en coordination entre le Tunisien Amer Ben Jeddou et le Yéménite Sultan Maqtari.
Le calligraphe Amer Ben Jeddou a mentionné un projet réalisé grâce à l’expertise de Sultan Maqtari, propriétaire de la fameuse police Sultan, chercheur, calligraphe, concepteur de polices de caractères et artiste numérique professionnel.
Maqtari a conçu plus de 50 polices de caractères arabes qui ont été publiées gratuitement sur Internet en tant que polices expérimentales non commerciales. Il est le premier à informatiser, l’ancienne écriture sud-arabe, Musnad, qui a été approuvée, en 2008, par le comité international des chercheurs et scientifiques américains et accepté d’être inclue dans le code standard international (Unicode).
Notons que la salle des manuscrits au Musée National des Arts Islamiques de Raqqada, -qu’abrite la ville de Raqqada site de la seconde Capitale des Aghlabites-, qui se trouve à un Kilomètre de la ville de Kairouan, renferme « une riche collection de feuillets de coran sur parchemin appartenant à la bibliothèque de la Grande mosquée de Kairouan témoignant de l’évolution des styles d’écriture et d’ornementation (du IIle H./VIIIe ap. J.C. au VIIIe H./XIV siècle ap. J.-C. ».
Créé en 1994, le Laboratoire national pour la sauvegarde et la restauration des manuscrits de Raqqada est une unité à caractère scientifique relevant de l’Institut national du Patrimoine (INP) et qui a son siège du Musée National des Arts Islamiques de Raqqada. Préserver le fonds national des manuscrits et les restaurer, recourir aux méthodes scientifiques et techniques modernes, utilisées dans ce domaine, en collaboration avec les institutions étrangères et internationales spécialisées, sont parmi ses attributions.
La Calligraphie arabe au patrimoine mondial de l’Unesco :
La « calligraphie arabe : compétences, savoirs et pratiques » est inscrite sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. Annoncée fin 2021, l’inscription est le fruit d’une candidature arabe commune déposée en 2020 par 16 pays : Algérie, Arabie Saoudite, Bahreïn, Égypte, Émirats arabes unis, Iraq, Jordanie, Koweït, Liban, Mauritanie, Maroc, Oman, Palestine, Soudan, Tunisie et Yémen.
« Trait majeur de la culture arabo-musulmane, la calligraphie s’est affirmée comme un socle identitaire et une pratique complexe où se côtoient, sinon se croisent, l’art, le sacré et les médiations philosophiques au sein de la société avec sa mémoire, ses valeurs et les tendances qui la marquent, selon les époques. », lit-on dans la description de cet élément du patrimoine immatériel.
Selon le même document, «la calligraphie pratiquée en Tunisie fait partie intégrante de la calligraphie arabe en général, et celle du Maghreb en particulier. Si sa genèse s’inscrit dans le contexte de la conquête arabo-musulmane du Maghreb, elle a vite évolué, notamment après la fondation de Kairouan, en 670, qui devient la capitale de l’Etat aghlabite et le centre scientifique et culturel de tout le nord de l’Afrique, ce qui a donné naissance à la calligraphie kairouanaise inspirée de Koufa et son dérivé le coufique ou le kairouanais fleuri ».
La calligraphie arabe désigne la pratique artistique consistant à retranscrire l’écriture arabe manuscrite avec fluidité, afin d’exprimer harmonie, grâce et beauté, indique le site de l’Unesco. Elle utilise les vingt-huit lettres de l’alphabet arabe, rédigé en écriture cursive de droite à gauche.
Cet art arabo-islamique est caractérisé par la fluidité de l’écriture qui offre des possibilités infinies dans l’usage des lettres, dans les œuvres traditionnelles aussi bien modernes.
Traditionnellement, les tiges de roseau et de bambou forment les techniques d’écriture le plus souvent en usage sur du papier qui est fabriqué à la main et enduit d’amidon, de blanc d’œuf et d’alun. Ces matériaux naturels constituent des outils d’écriture avec de l’encre, fabriqué à partir d’ingrédients tels que le miel, la suie et le safran.
La calligraphie moderne utilise fréquemment des marqueurs et des peintures synthétiques et de la peinture en bombe spray est utilisée pour les calligraffiti peints sur les murs, les panneaux et les bâtiments. Les artisans et les designers ont recours à la calligraphie arabe pour réaliser des ornementations artistiques, par exemple sur le marbre, les sculptures sur bois, la broderie et la gravure sur métal.
L’Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts, Beït Al-Hikma, a organisé sa conférence inaugurale de l’année académique 2024-2025, le 9 novembre 2024, à son siège, à Carthage-Hannibal, consacrée à la poésie préislamique.
Présentée par le membre de l’Académie Moncef Ben Abdeljelil, professeur d’histoire de la pensée islamique ancienne, la conférence a posé de nouveau la problématique des débuts de la poésie arabe, à la lumière de deux inscriptions yéménites anciennes, «Unshûda ilâ-Kahl», ou le «Poème du Temple de Bilqîs» et le «Tarnîmat al-shams» ou le «Hymne au Soleil», un «poème himyarite».
Dans une première partie, le conférencier a présenté les deux inscriptions ainsi que leurs structures poétiques. La deuxième partie a passé en revue les interprétations des historiens archéologues des deux textes.
Les premiers poèmes arabes de l’époque préislamique ont, souvent, été inspirés par des éléments visuels et culturels de leur environnement, y compris les inscriptions et les représentations artistiques du Yémen antique. Des civilisations comme celles de Saba, Qataban et Himyar ont produit des bas-reliefs et des monuments qui témoignent de leur histoire et de leur culture riche en symbolisme. Et les poètes yéménites ont été influencés par ces œuvres. Les sites comme Ma’rib, la capitale du royaume de Saba, contiennent encore aujourd’hui des sculptures dont les inscriptions ont inspiré l’imaginaire poétique.
Dans la troisième et dernière partie, Pr Ben Abdeljelil a proposé quelques conclusions portant sur les débuts de la poésie arabe et son rapport à la religion. Il a, par ailleurs, appelé à approfondir l’étude de l’influence de la civilisation sud-arabique sur le Coran.
Cet article est une réaction à l’article du Dr Mounir Hanablia «Le crochet gauche de Hamma Hammami», qui est une note de lecture à propos du livre : ‘‘La révolution trahie: le dernier quart d’heure de la transition démocratique’’, de Mohamed Kilani.
Helal Jelali *
J’avais publié ici-même en avril 2022 un article dont le titre : «La rupture démocratique» qui dit en résumé que la révolution tunisienne a été enterrée le soir même du départ de Ben Ali quant les Tunisiens ont découvert à 20 heures à la télévision publique les têtes des caciques de l’ancien régime sur les devants de la scène. Quant à la gauche tunisienne et arabe en général, voici pour quelles raisons, elle n’a jamais existé et ne pourrait jamais émerger…
Qu’est-ce c’est la gauche, ou la social démocratie ou le socialisme? N’en déplaise à beaucoup de penseurs dans les pays arabes, ce sont des concepts exclusivement européens. Ce sont les conditions économiques, sociales et politiques dans les pays européens qui étaient à la source de l’émergence de la gauche européenne. La gestation de cette gauche remonte au XVIIe siècle, et peut-être avant avec un XVIe marqué par des frondes sociales et des jacqueries presque chroniques.
La gauche européenne n’a pris son envol que grâce à une classe ouvrière politisée et syndiquée. En Tunisie, l’UGTT est un syndicat de fonctionnaires et n’a jamais été proches des ouvriers ou des mineurs de phosphate… Ou des ouvrières du textile.
En Europe, la gauche s’est fortement appuyée sur une classe moyenne éclairée et des leaders dont les convictions politiques étaient inébranlables. Ses dirigeants ont su créer des partis de masses et non de petits groupuscules de 300 militants à la Hamma Hammami.
La confusion à tous les étages
Ce que nous appelons la gauche arabe, c’est la confusion à tous les étages: le nationalisme arabe serait-il de gauche, alors que c’était le nationalisme des chars?
Le socialisme de Gamal Abdel Nasser et de Saddam Hussein n’était que le vernis des juntes militaires.
De quelle gauche arabe parlons-nous quand les premiers pendus en public par le vice-président Saddam Hussein sont les communistes irakiens avec une aide de la CIA ? Le journaliste d’Europe1 Pierre Lauer passera 6 mois en prison dans une prison irakienne, dans des conditions effroyables parce qu’il avait dénoncé ces exécutions expéditives.
Nasser ne sera pas non plus tendre avec les communistes égyptiens, ils sont exclus de l’amnistie générale après la révolution de 1952 et deux seront exécutés quelques années plus tard après des mouvements sociaux dans le secteur du textile.
Le socialisme arabe a créé des entreprises publiques, mais en réalité ce sont des entreprises étatisées. Et dans ce chapitre, il existe une sacrée différence. Une entreprise publique à un contrat d’objectifs (CO) avec l’Etat mais défend son indépendance bec et oncles. L’entreprise étatisée est dirigée par les hauts fonctionnaires des ministères, par conséquent sa gestion devient techniquement incontrôlable.
Nassériens, Baathistes, Kadhafistes, nationalistes arabes, avec leurs slogans creux, continuent de nous faire croire que la gauche arabe existe…
Paris était leur capitale et leur refuge. Une seule fois, j’ai franchi le pas et participé à la réunion d’un parti de gauche tunisien, mon sentiment à la sortie était affligeant de tristesse. C’était un groupuscule d’«illettrés politiques». Il leur manquait même la «courtoisie du dialogue». Le bouquet de la soirée : une vraie bagarre à coups de poings…
Au Parti communiste tunisien des années 1970, on interdisait aux jeunes militants d’avoir une petite amie…
La perle est venue de l’ancien ministre «socialiste» Ahmed Ben Salah. Réfugié à Paris après son limogeage et sa fuite du pays, il avait déclaré : «Puisque le socialisme assure l’égalité entre les citoyens, nous n’avons pas besoin de pluralisme politique».
Une autre force de la gauche européenne : un tissu associatif très puissant et surtout pérenne, pas comme certains associations tunisiennes qui organisent des séminaires et des colloques dans les hôtels cinq étoiles et sont toujours à l’affut de subventions…
La prétendue gauche arabe préfère défendre un leader – un zaïm –, mais rarement des idées. Peut-on demander à un leader de la «gauche» tunisienne, Hamma Hammami en l’occurrence, qui a fait le voyage de Caracas pour féliciter le président Maduro pour sa réélection, de lire les rapports des Nations-Unies sur les disparitions forcées et les arrestations massives dans ce pays ?
Et on n’oublie pas les déboires du Mouvement Perspectives. C’est vrai, quelques uns de ses dirigeants ont souffert, beaucoup souffert dans les prisons de Bourguiba. L’aile maoïste avait disparu avec la débâcle de la Révolution Culturelle – qui était en fait un coup d’Etat de Mao Tsé Toung.
Beaucoup de «perspectivistes» ont d’ailleurs rejoint la haute fonction publique et sont devenus ministre sous Bourguiba et Ben Ali… Une stratégie bien connue en politique dans le monde arabe : infiltration, implosion puis absorption politique.
Une gauche est populaire ou elle ne l’est pas. La gauche européenne des années 1970 était active sur le terrain, même dans les fêtes de villages. Elle avait des programmes politiques et sociaux bien ficelés et réalisables. Elle était loin du délire onirique des groupuscules tunisiens, algériens, ou marocains… Dans les années 1970-1980, l’USFP marocaine était devenue une filiale du parti Baâth de Saddam Hussein…
Un vivier intellectuel et culturel
A-t-on sous nos cieux des hommes de gauche comme Mitterrand, Chevènement, Soares, Gonzales, ou encore Schröder?
Si on tient compte de l’Histoire et de la dialectique en politique, le concept de la gauche européenne n’est «transposable» nulle part ailleurs. Ni en Afrique, ni en Asie, ni en Amérique Latine. La gauche européenne est le résultat de deux siècles de luttes sociales massives, d’une succession de révolutions parfois très violentes, et d’une élite presque messianique. Elle était née dans les mines de charbon, dans une industrialisation intensive au XIXe siècle. Sur le plan psychologique, elle était une revanche des classes ouvrières et moyennes contre les marchands des guerres où elle avait longtemps servi de chair à canons.
Enfin, en Europe, la gauche a bien résisté face à la droite grâce à son «armature» culturelle, intellectuelle et artistique. D’Émile Zola à Albert Camus en passant par Jean-Paul Sartre… des peintres comme Pablo Picasso ou Marcel Duchamp, sans compter les surréalistes autour d’André Breton, le Théâtre de l’Odéon de Jean-Louis Barrault, que Mme De Gaulle a voulu fermer en mai 1968… Le cinéma de la Nouvelle vague avec François Truffaut, Jean- Luc Godard, Éric Rohmer… et les chansons à textes de Léo Ferré, Georges Brassens, Jean Ferrat, Jacques Brel… Tout ce monde culturel avait donné à la gauche française une amplitude et une popularité qui l’ont propulsée au pouvoir en 1980 avec Mitterrand.
Une gauche digne de ce nom ne pourrait survivre sans ce brassage et ce vivier intellectuel et culturel qui est aussi une nourriture nécessaire pour les citoyens.
* Journaliste retraité; ancien rédacteur en chef à RFi.