Dominique de Villepin : « La Tunisie a de nombreux atouts pour devenir un lieu de rencontre et d’interconnexion entre Europe, Afrique et mondes émergents »
La mondialisation libérale vacille sur ses fondations, minée par quatre disruptions majeures. Face à cette reconfiguration en pôles d’influence, la Tunisie dispose d’atouts uniques et de compétences humaines, avec un tissu économique diversifié et une position géostratégique méditerranéenne, pour devenir un lieu de rencontre et d’interconnexion entre Europe, l’Afrique et les mondes émergents. Tels sont les mots d’ordre de Dominique de Villepin, l’invité d’honneur des 39èmes Journées de l’Entreprise. Lesquelles se déroulent, du 11 au 13 décembre 2025, à Sousse, sur le thème du « Nouvel ordre économique ».
Lors de son allocution, Dominique de Villepin a mis l’accent sur quatre piliers en péril. Il rappelle à cet effet la suprématie technologique américaine qui est contestée. Tout en soulignant : « La Chine a progressé dans la recherche en IA de 76 % contre 6% pour les États-Unis, en communications optiques avancées de 29 % contre 12 % (USA), et 45 % contre 8 % en aimants et supraconducteurs. Pékin progresse à vive allure dans la métrologie quantique, les capteurs quantiques et le calcul quantique ».
Puis évoquant la guerre commerciale trumpienne, relancée par des traités bilatéraux inégaux, Dominique de Villepin souligne qu’il s’agit d’un « empire économique » américain. Depuis janvier 2025, 8 000 milliards de dollars d’investissements ont été rapatriés aux États-Unis, capturant les ressources minières, les capitaux et les rentes numériques auprès de consommateurs captifs. L’essor des crypto-actifs et stablecoins révolutionne la politique monétaire, érodant la souveraineté des banques centrales et transformant les banques et les paiements. Enfin, les énergies fossiles s’essoufflent : pic pétrolier imminent, réchauffement climatique et cours contraints mettent fin à un siècle de commerce maritime massif et de production de masse ouvrant de nouveaux marchés.
Il estime que « le trumpisme est une logique impériale de reconquête. Ces chocs provoquent une réaction impérialiste avec l’accaparement de ressources minérales et énergétiques via des accords miniers (protection américaine contre accès au sous-sol), des asymétries économiques et le recours à la force. L’objectif étant la suprématie technologique et le contrôle des services numériques mondiaux.
Et de poursuivre : « La bataille de l’IA cible la Chine, mais aussi l’Europe, accusée par l’administration Trump d’excès de souveraineté économique. Ce sont des risques contagieux pour l’économie mondiale. Et ces turbulences menacent avec une stagnation inflationniste liée à la hausse des droits de douane qui comprime la croissance et la production tout en gonflant les prix. Aux États-Unis, on note une inversion de la baisse des prix à l’été 2025, avec des pressions persistantes (politique monétaire relâchée, chèques aux ménages, nouvelle offensive contre la Chine dès novembre). La spéculation est circulaire, rendant la finance vulnérable, comme Nvidia investissant dans OpenAI via GPU, créant un cercle auto-alimenté. Ainsi, un crack du dollar est envisageable : des déficits abyssaux (7 000 milliards de dettes supplémentaires sous Trump) signalent une fragilité croissante, accélérant une multipolarité en pôles et aires d’influence. »
Dans cette « géographie économique réorganisée », comme l’évoque Dominique de Villepin, « la Tunisie peut jouer un rôle pivot. Et ce, en matière de diplomatie proactive, diversification des partenariats, attraction des investissements en IA et énergies vertes. Ses atouts humains et sectoriels en font un hub naturel d’interconnexion », conclut-il.
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