L’Afrique dispose d’environ 4 000 milliards de dollars de ressources domestiques mobilisables, un potentiel qui pourrait servir de levier pour réduire les risques liés à l’investissement dans les innovations circulaires, a déclaré Davinah Milenge Uwella, Coordinatrice principale de programme, à la Banque africaine de développement (BAD).
Dans une interview accordée à l’agence TAP, en marge de la réunion annuelle de l’Alliance africaine pour l’économie circulaire (AAEC), qui se tient du 14 au 16 octobre courant, à Addis-Abeba (capitale de l’Éthiopie), la responsable a plaidé en faveur d’une approche de financement panafricaine pour accélérer la transition vers l’économie circulaire en Afrique.
Elle a, également, saisi cette occasion pour inviter les pays, comme la Tunisie, qui n’ont pas encore rejoint l’Alliance, à le faire.
Quels sont les obstacles qui entravent le développement de l’économie circulaire en Afrique ?
L’accès au financement reste le principal frein au développement de l’économie circulaire en Afrique. Pourtant, le continent dispose d’environ 4 000 milliards de dollars de ressources domestiques mobilisables. Ces capitaux pourraient servir de levier pour réduire les risques liés aux investissements dans les innovations circulaires.
Tant que les financements locaux ne seront pas pleinement mobilisés, il sera difficile d’attirer les investissements.
C’est pourquoi la BAD œuvre à la mise en place de mécanismes de financement innovants, capables de combiner les ressources nationales et de favoriser leur implantation à l’échelle régionale, pour d’éviter que chaque pays n’agisse de manière isolée.
Souvent ancrées dans le quotidien des populations, les solutions d’économie circulaire sont difficiles à financer individuellement. Elles nécessitent la création d’un écosystème de financement intégré. L’objectif est, ainsi, de promouvoir une approche panafricaine en matière de financement de ces innovations, en vue de réduire les risques d’investissement.
La BAD, à travers sa nouvelle approche axée sur le capital africain, la souveraineté financière et le développement des petites et moyennes entreprises (PME), s’inscrit pleinement dans cette dynamique.
Lors des travaux de cette réunion annuelle, la question du renforcement des capacités a été souvent soulevée par les participants comme un frein à l’économie circulaire. Que recommandez-vous pour résoudre cette problématique ?
Le renforcement des capacités demeure, en effet, un défi majeur. Les solutions circulaires africaines sont souvent le fruit d’innovations locales, directement inspirées des besoins réels du marché. Par conséquent, elles méritent d’être valorisées et développées à plus grande échelle.
Pour ce faire, il est essentiel de promouvoir le transfert des savoirs locaux et endogènes, tout en renforçant les liens entre les universités, les centres de recherche et les besoins économiques. Aujourd’hui, l’enseignement et la recherche restent encore insuffisamment alignés sur les exigences du marché, ce qui freine la capacité du continent à transformer son potentiel d’innovation en moteur de croissance durable.
A la Banque, nos programmes de renforcement des compétences visent à garantir que les institutions de formation préparent les jeunes Africains aux métiers, et ce, en adéquation avec les besoins réels du marché continental.
Quelles sont vos attentes par rapport à cette réunion annuelle de l’Alliance africaine pour l’économie circulaire ?
Hébergée par la BAD, l’Alliance existe depuis cinq ans maintenant. À sa création, cinq secteurs prioritaires avaient été identifiés pour accélérer la circularité sur le continent, à savoir les systèmes alimentaires durables, les déchets électroniques, le bâtiment et l’environnement bâti, les textiles, et les autres produits électroniques. Ces domaines ont été au cœur de nos discussions lors des précédentes réunions annuelles, mais aujourd’hui, nous voulons renforcer le travail accompli.
L’Alliance compte désormais 21 pays membres sur 54 pays africains. Nous nous attendons à ce que d’autres pays nous rejoignent bientôt. Chaque nouveau membre apporte son expérience et ses connaissances, ce qui enrichit cette plateforme d’échanges et de mutualisation. Notre approche n’est pas descendante, mais ascendante, pilotée par les pays eux-mêmes.
À ce jour, Nous avons aidé quatre pays dont le Cameroun, l’Éthiopie, le Tchad et le Bénin à élaborer leurs feuilles de route nationales en matière d’économie circulaire. Chaque pays définit sa vision propre, en fonction de son contexte. Les partenaires à l’instar des Nations Unies et de la BAD interviennent; ensuite; pour soutenir les priorités identifiées.
En créant cet espace de coopération, l’Alliance permet aux pays et à leurs partenaires de collaborer concrètement et de définir la circularité conformément à la perspective africaine.
Cette dynamique s’inscrit désormais dans le cadre du Plan d’action continental pour l’économie circulaire 2024-2034, adopté, récemment, par l’Union africaine. Il s’agit d’un plan décennal qui trace la feuille de route du continent pour sa transition vers une économie circulaire.
Quel message souhaiteriez-vous adresser aux pays qui n’ont pas encore rejoint l’Alliance, comme la Tunisie ?
Le partenariat et la collaboration sont une véritable force. D’ailleurs, le dernier des Objectifs de développement durable (l’ODD 17) est consacré aux partenariats. L’économie circulaire repose, entièrement, sur cette idée de coopération.
Dans chacun de nos 54 pays, il existe des solutions circulaires locales. Chaque pays a quelque chose à apporter et à partager. C’est pour cela que cette plateforme commune est si importante : elle permet à tous les pays d’échanger leurs expériences et de s’enrichir mutuellement. Nous encourageons donc, vivement les pays qui n’ont pas encore rejoint l’Alliance à le faire. L’Alliance offre une voie concrète et accessible vers une croissance durable pour tout le continent.
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