Au moment où la population de Gabès manifestent quasi-quotidiennement pour exiger le démantèlement des usines du Groupe chimique tunisien (GCT), dont les rejets toxiques, dans l’air et en mer, leur causent de graves problèmes de santé, la Pre Amel Hamza Chaffai (au centre de la photo) a donné une conférence sur ce sujet de grande actualité nationale : «Le golfe de Gabès entre richesse biologique et pollution chronique-État des lieux des impacts sur l’écosystème et la santé humaine (1990–2025)», hier, vendredi 5 décembre 2025, à l’Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts (Beït al-Hikma), à Carthage.
Situé sur la côte sud-est de la Tunisie, le golfe de Gabès représente à lui seul 33 % du littoral national. Il se caractérise par des eaux peu profondes, des courants faibles, une salinité élevée et des marées exceptionnellement prononcées.
Surnommé la «pouponnière de la Méditerranée», il abrite d’importants herbiers de Posidonia oceanica et de Caulerpa, véritables zones de frai, de nurserie et de refuge pour de nombreuses espèces marines.
Grâce à cette richesse écologique, le golfe contribue à près de 65 % de la production halieutique nationale et accueille une large part de la flotte de pêche tunisienne. Ses ressources, principalement benthiques, incluent des espèces à forte valeur commerciale telles que la crevette royale, le poulpe, la seiche, la palourde et plusieurs poissons benthiques.
Cependant, depuis les années 1990, cet écosystème subit une dégradation rapide et préoccupante, liée à l’intensification des activités humaines et industrielles (phosphates, chimie, tanneries, plasturgie).
Parmi les impacts les plus marqués figurent : la régression des herbiers de Posidonie, la diminution de la production halieutique, la contamination chimique et microbiologique du milieu marin.
Pour suivre et évaluer cette évolution, un programme national de surveillance a été instauré dès 1995, et qui s’articule autour de plusieurs réseaux : Remi (surveillance microbiologique) ; Rephy (suivi des phytoplanctons toxiques) ; Recno (surveillance des contaminants chimiques) ; Rebi (contrôle des biotoxines en cas d’alerte) ; Repidemio (suivi des parasites).
Malgré ces efforts, la multiplication des contaminants, leur complexité, leur persistance et l’ampleur de la pression anthropique maintiennent une situation alarmante, tant pour la biodiversité que pour les populations humaines riveraines.
La conférence, qui a présenté une synthèse des travaux de recherche menés sur le golfe de Gabès, depuis 1990, s’est articulée autour de deux volets :
1- Les effets de la pollution sur la santé des organismes marins, et ce à travers : a- des approches in situ, in vivo, in vitro et des expériences de transplantation in situ et in vivo; b-la cartographie spatiale et temporelle de la pollution ; c- l’analyse des réponses biologiques à différents niveaux d’intégration (organisme, tissu, cellule, molécule); d- la validation et l’utilisation de bioindicateurs et biomarqueurs de pollution.
2- Les effets de la pollution sur la santé humaine, et ce à partir de deux enquêtes épidémiologiques portant sur la relation entre l’exposition aux polluants et les cancers des voies aérodigestives supérieures et les cancers de la vessie.
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