Frappes israéliennes au Qatar : la duplicité américaine
Doha lâché par son protecteur américain ? C’est en tout cas l’amer sentiment qui prévaut au Qatar. Tandis que la Maison Blanche ne s’est pas opposée aux plans malveillants de l’Etat hébreu, ni n’a condamné formellement les frappes contre son territoire.
Vent de panique sur les monarchies du Golfe inquiètes d’être prises pour cible à leur tour. Cependant que Tel-Aviv ne semble plus avoir de frein pour frapper à sa guise tout pays de la région, y compris les alliés des États-Unis. Faudra-t-il désormais se fier aux Yankees pour leur propre défense? Et ce, alors même que le Qatar- membre fondateur du Conseil de coopération du Golfe (CCG), l’organisation régionale créée en 1981, aux côtés de l’Arabie saoudite, de Bahreïn, du Koweït, d’Oman et des Émirats arabes unis- vient de subir les foudres d’Israël ?
Inquiétudes légitimes d’autant plus que ce richissime Emirat gazier se croyait à l’abri sous le parapluie américain en sa qualité d’allié majeur non-membre de l’OTAN des Etats-Unis, médiateur dans le conflit entre Israël et le Hamas et pays abritant la base militaire la plus importante au Moyen-Orient. Lequel pays avait signé avec les Etats-Unis lors de la dernière visite de Donald Trump à Doha en mai 2025 un accord censé générer des échanges économiques d’au moins 1200 milliards de dollar. Et allant même jusqu’à lui offrir un avion présidentiel estimé à 400 millions de dollars en signe d’amitié. En vain.
Trahison
En effet, l’Etat hébreu a annoncé mardi 9 septembre avoir ciblé des responsables du Hamas dans des frappes à Doha. Mais le mouvement islamiste palestinien a assuré que les négociateurs visés avaient survécu, tout en faisant état de six morts dans l’attaque.
Ainsi, le mouvement palestinien a affirmé que « l’ennemi n’avait pas réussi à assassiner les membres de la délégation en charge des négociations ». Cependant, il a fait état de six morts : le fils du négociateur en chef du Hamas Khalil al-Hayya, le chef de son bureau et trois gardes du corps, ainsi qu’un policier qatari.
« Le fait de prendre pour cible les négociateurs au moment même où ils discutent de la dernière proposition de Trump, confirme que Netanyahu et son gouvernement ne souhaitent parvenir à aucun accord et cherchent délibérément à faire échouer les efforts internationaux, sans se soucier de la vie de leurs prisonniers », a indiqué le Hamas.
Pour sa part, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu qui dit assumer seul la décision, explique avoir ordonné ces frappes après une fusillade, revendiquée lundi par le Hamas, qui a fait six morts à Jérusalem-Est.
« L’action menée aujourd’hui contre les principaux chefs terroristes du Hamas était une opération israélienne totalement indépendante », a déclaré le bureau du Premier ministre dans un communiqué. « Israël l’a préparée, Israël l’a menée et Israël en assume l’entière responsabilité ».
Une « rare erreur tactique israélienne », estime l’éditorialiste du Washington Post David Ignatius. Car ce dernier constate que si « l’attaque n’a pas réussi à éliminer les hauts dirigeants du Hamas. Elle a en tout cas détruit l’un des rares canaux permettant d’arrêter le conflit ».
Le journaliste estime encore que les responsables qataris, qui jouent un rôle de médiateur dans le conflit, ont été « choqués par l’attaque et se sont sentis trahis. Des sources qataries m’ont confié qu’Israël et les États-Unis leur avaient promis le mois dernier que les responsables du Hamas ne seraient pas ciblés sur leur territoire. Cette promesse s’est révélée vide ».
Flou artistique
Trahison, duplicité ? Soit le président américain ne s’est pas opposé au raid israélien, soit, crime de lèse-majesté, Tel-Aviv s’est estimé en position d’agir sans l’en informer au préalable.
Dans les deux cas de figure, la communication de la Maison Blanche était floue et même contradictoire. En effet, tout en condamnant la frappe israélienne, la porte-parole de la Maison-Blanche, Karoline Leavitt a affirmé mardi qu’ « éliminer le Hamas, qui a profité de la misère de ceux qui vivent à Gaza, constitue un but louable ».
Elle a également ajouté que « sous instruction de Donald Trump, Steve Witkoff (le promoteur immobilier new-yorkais devenu envoyé spécial personnel de Donald Trump au Moyen-Orient. NDLR) avait informé Doha avant les événements ». Ce que le Qatar, dont un membre des forces de sécurité a été tué dans l’attaque, a immédiatement réfuté.
Trump « pas ravi »
Même attitude ambigüe de la part du locataire de la Maison Blanche- apparemment très mal à l’aise, vu que son pays est allié à la fois avec Israël et le Qatar qui abrite la plus grande base américaine de la région- qui a nié en bloc qu’Israël l’avait prévenu au préalable, même si son administration a été avertie « par l’armée américaine ».
La décision de lancer une attaque au Qatar «a été prise par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu » a écrit Trump sur son réseau social », qualifiant l’opération d’« incident regrettable ».
« Je ne suis pas ravi » et « je suis très mécontent », a-t-il indiqué mardi soir, lors d’un bref échange avec la presse.
En signe de représailles, le richissime Emirat gazier avec ses 330 000 habitants « se réserve le droit de riposter à cette attaque flagrante », a déclaré son premier ministre, Cheikh Mohammed ben Abdulrahmane Al Thani. L’ennemi sioniste en tremble d’avance !
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