Le coup d’envoi des réunions de printemps a été donné. L’événement rassemble 191 pays membres du FMI. Dans son allocution d’ouverture, la directrice du FMI, Kristalina Georgieva, a rappelé les principales caractéristiques de l’économie mondiale actuellement : une croissance faible et une dette élevée. Certains pays affichent une résilience, mais elle est mise à l’épreuve par le trouble du système commercial mondial.
L’aggravation des tensions commerciales a fait chuter les cours des actions mondiales, rappelant que « nous vivons dans un monde de changements soudains et profonds ». La directrice du FMI lance un appel à réagir avec sagesse. Une économie mondiale mieux équilibrée et plus résistante demeure, toujours, à portée de main.
Un contexte mondial compliqué
Le FMI a qualifié les tensions commerciales actuelles comme « une marmite qui bouillonnait depuis longtemps et qui est en train de déborder ». Dans une large mesure, la situation actuelle est le résultat d’une érosion de la confiance aussi bien dans le système international qu’entre les pays.
Le constat est évident : l’intégration économique mondiale a permis à un grand nombre de personnes de sortir de la pauvreté et a amélioré la situation du monde dans son ensemble, mais tout le monde n’en a pas profité. Les communautés ont été vidées de leur substance par l’envoi de forces d’emplois à l’étranger; les salaires ont été comprimés par la disponibilité croissante d’une main-d’œuvre bon marché et les prix ont augmenté lorsque les chaînes d’approvisionnement mondiales ont été interrompues. Nombreux sont ceux qui accusent le système économique international d’être à l’origine de l’injustice qu’ils perçoivent dans leur vie.
Les distorsions commerciales, en particulier les barrières tarifaires, ont alimenté les perceptions négatives à l’égard d’un système multilatéral considéré comme n’ayant pas réussi à offrir des conditions de concurrence équitables. En parallèle, les barrières non tarifaires ont tendance à augmenter.
A cela s’ajoute un souci de sécurité nationale. Dans un monde multipolaire, l’endroit où les choses sont fabriquées peut avoir plus d’importance que leur coût. Cette logique veut qu’un large éventail de biens stratégiques, des puces informatiques à l’acier, soient fabriqués sur le territoire national, et que cela vaille la peine de payer pour cela.
La situation actuelle est que toutes ces préoccupations ont dépassé les bornes. L’industrie reçoit plus d’attention que le secteur des services ; les intérêts nationaux l’emportent sur les préoccupations mondiales; et les actions fermes déclenchent des réactions fermes.
Graves conséquences de la politique du FMI
Alors que les géants s’affrontent sur le sujet des tarifs douaniers américains, les petites économies sont prises dans les courants croisés. La Chine, l’Union européenne et les États-Unis sont les trois plus grands importateurs du monde, bien que leurs importations soient relativement faibles par rapport à leur PIB.
Principale conséquence : la taille compte. Leurs actions ont un impact sur le reste du monde. Les petites économies avancées et la plupart des marchés émergents dépendent davantage du commerce pour leur croissance et sont donc plus exposés, notamment au resserrement des conditions financières. Les pays à faible revenu sont confrontés au défi supplémentaire de l’effondrement des flux d’aide; alors que les pays donateurs s’efforcent de répondre à leurs préoccupations nationales.
L’incertitude est coûteuse. La complexité des chaînes d’approvisionnement modernes signifie que les intrants importés entrent dans la composition d’un large éventail de produits locaux. Le coût d’un article peut être affecté par les droits de douane appliqués dans des dizaines de pays. Dans un monde de tarifs douaniers bilatéraux, où chacun peut évoluer à la hausse ou à la baisse, la planification devient difficile. Les décisions d’investissement seront reportées, les marchés financiers deviendront volatils et l’épargne de précaution augmentera. Plus l’incertitude persiste, plus le coût est élevé.
L’augmentation des barrières commerciales frappe d’emblée la croissance. Les tarifs douaniers augmentent les recettes au prix d’une réduction et d’un déplacement de l’activité. Les importateurs en paient une partie sous la forme d’une baisse de leurs bénéfices et les consommateurs en paient une autre sous la forme d’une hausse des prix. En augmentant le coût des intrants importés, les droits de douane agissent d’emblée.
Bien entendu, si les marchés nationaux sont importants, ils incitent également les entreprises étrangères à répondre par des investissements à l’intérieur du pays. Ce qui permet de créer de nouvelles activités et de nouveaux emplois. Mais cela prend du temps.
En tout, le protectionnisme érode la productivité à long terme, en particulier dans les petites économies. Protéger les industries de la concurrence réduit les incitations à une allocation efficace des ressources. Les gains de productivité et de compétitivité obtenus par le passé grâce au commerce s’érodent. L’esprit d’entreprise cède la place à des plaidoyers spéciaux en faveur d’exemptions, de protection et de soutien de l’État. Cela nuit à l’innovation. Mais là encore, si les marchés nationaux sont vastes et la concurrence nationale dynamique, les effets négatifs peuvent être atténués.
En fin de compte, le commerce est comme l’eau : lorsque les pays dressent des obstacles sous la forme de barrières tarifaires et non tarifaires, le flux est détourné. Certains secteurs dans certains pays peuvent être inondés par des importations bon marché, d’autres peuvent connaître des pénuries. Le commerce se poursuit, mais les perturbations entraînent des coûts.
Que faire?
Tous les pays doivent redoubler d’efforts pour mettre de l’ordre dans leur propre maison. Les économies font face aux nouveaux défis dans une position de départ plus faible, avec une dette publique beaucoup plus élevée qu’il y a quelques années. C’est pourquoi la plupart des pays doivent prendre des mesures budgétaires résolues pour reconstituer leur marge de manœuvre, en définissant des trajectoires d’ajustement progressives qui respectent les cadres budgétaires. Toutefois, certains pays peuvent subir des chocs nécessitant un nouveau soutien ciblé et temporaire.
Pour protéger la stabilité des prix, la politique monétaire doit rester souple et crédible. Les banquiers centraux doivent garder un œil vigilant sur les données, y compris sur les anticipations d’inflation plus élevées dans certains cas.
Dans le domaine financier, une réglementation et une surveillance rigoureuses restent essentielles pour assurer la sécurité des banques, et les risques croissants émanant des établissements non bancaires doivent être surveillés et maîtrisés.
En matière de politique commerciale, l’objectif doit être de parvenir à un accord entre les principaux acteurs qui préserve l’ouverture et offre des conditions de concurrence plus équitables, afin de relancer la tendance mondiale à la baisse des droits de douane, tout en réduisant les barrières non tarifaires et les distorsions.
Un grand travail attend les décideurs, essentiellement aux Etats-Unis, dans l’Union européenne et en Chine. Mais d’ici l’obtention de résultats concrets, l’incertitude restera élevée.
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