Le Hamas s’est dit prêt à négocier en vue de la libération des otages et de la fin de la guerre, mais n’a pas mentionné son désarmement.
Analyse.
Alors que le monde entier, y compris Moscou, Pékin ou encore l’Onu et la quasi-totalité du monde arabe et des pays musulmans, applaudissait à deux mains le plan de paix américain pour Gaza, le Hamas avait-il d’autre choix que de brandir le drapeau blanc ? Et ce, d’autant plus que l’Égypte, la Jordanie, l’Arabie saoudite, le Qatar, les Émirats arabes unis, la Turquie, l’Indonésie et le Pakistan ont salué, dans un communiqué commun, « le rôle du président américain et ses efforts sincères visant à mettre fin à la guerre à Gaza », tout en affirmant « leur volonté de s’engager de manière positive et constructive avec les États-Unis et les parties prenantes afin de finaliser l’accord et d’assurer sa mise en œuvre ».
Ainsi, avant même la date limite du dimanche 5 octobre à minuit fixée par Donald Trump pour que le mouvement islamiste palestinien accepte son plan, sinon « l’enfer se déchaînera comme jamais contre le Hamas », a-t-il prévenu sur son réseau Truth Social, le Hamas s’est fendu, vendredi 3 octobre, d’un communiqué très politique, plein de sous-entendus pour annoncer qu’il accepte de négocier en vue de la libération des otages israéliens mais sans mentionner son désarmement.
Satisfecit américain
Réaction immédiate du président américain qui a salué cette décision en jugeant dans une vidéo diffusée vendredi que le mouvement islamiste « était prêt pour une paix durable », ajoutant que l’Etat hébreu « doit arrêter immédiatement le bombardement de Gaza ». Avant de conclure, euphorique : « C’est un grand jour spécial, sans doute sans précédent ».
« D’après la déclaration que vient de publier le Hamas, je pense qu’ils sont prêts pour une paix durable. Israël doit immédiatement cesser les bombardements sur Gaza afin que nous puissions libérer les otages rapidement et en toute sécurité ! Pour l’instant, cela est beaucoup trop dangereux. Nous sommes déjà en train de discuter des détails à régler. Il ne s’agit pas seulement de Gaza, mais de la paix tant attendue au Moyen-Orient», a-t-il écrit sur son réseau Truth Social.
Le « oui, mais » du Hamas
Rappelons que dans son communiqué publié hier vendredi, le Hamas a annoncé son accord « pour la libération de tous les prisonniers de l’occupation – les vivants et les dépouilles – selon la formule d’échange incluse dans la proposition du président Trump », en référence aux prisonniers palestiniens devant être libérés en échange des otages retenus à Gaza ; ajoutant « être prêt à des négociations immédiates » pour discuter des « détails » de la libération des otages.
D’autre part, le Hamas réitère son accord pour confier l’administration de Gaza à un organisme palestinien indépendant « sur la base d’un consensus national palestinien et bénéficiant du soutien des pays arabes et islamiques ».
Enfin, le mouvement islamiste ajoute qu’il « appréciait les efforts arabes, musulmans et internationaux, ainsi que les efforts du président américain Donald Trump, appelant à la fin de la guerre dans la bande de Gaza, à l’échange de prisonniers [et] à l’entrée immédiate de l’aide ».
Toutefois, le Hamas n’a pas précisé s’il accepte de se désarmer, une demande d’Israël et des États-Unis qu’il a déjà rejetée.
Mais quelles sont ces conditions posées par le Hamas ? Si, dans sa déclaration, le groupe armé palestinien a affirmé sa volonté de libérer les 48 otages restants − dont seulement vingt seraient encore en vie −, il a également exigé des engagements plus fermes de la part d’Israël sur son retrait militaire et une discussion sur son rôle dans un futur État palestinien unifié…
Reddition ?
Reste la question principale : le Hamas est-il disposé à rendre les armes en contrepartie de l’offre d’amnistie pour ses membres s’engageant à « coexister » pacifiquement avec Israël ?
Largement affaibli depuis l’assassinat par Israël de plusieurs de ses leaders, dont le chef Yahya Sinouar, ainsi que son frère et successeur Mohammed Sinouar, et ne pouvant plus compter sur le soutien de ses alliés historiques dans la région, l’Iran et le Hezbollah libanais, eux aussi mis à mal, le Hamas serait probablement acculé à accepter, la mort dans l’âme, de se plier au diktat américain.
« Dans un premier temps, le plan demandait au Hamas de renoncer à ses armes offensives, c’est-à-dire une destruction des tunnels d’attaques et des armes lourdes comme les roquettes et les mortiers. Désormais, ce qui est demandé par Israël, c’est un désarmement total, comprenant également les kalachnikovs par exemple. Pour le Hamas, cela reviendrait à une reddition », explique un expert militaire.
Une éventuelle reddition qui enterrerait l’idée même d’une solution à deux États puisque le plan américain sépare la bande de Gaza de la Cisjordanie occupée, avec de surcroît une gouvernance étrangère chapeautée par le sulfureux Tony Blair.
Les accords Sykes-Picot remis à jour dans le contexte de la Pax hebraïca ?
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