Avant sa rencontre avec Volodymyr Zelensky à Washington, prévue cet après-midi, le président américain Donald Trump a exigé de l’Ukraine qu’elle abandonne ses ambitions de récupérer la Crimée et d’adhérer à l’OTAN. Une position qui vise à pousser Kiev vers un accord de paix avec Moscou, après avoir reçu Vladimir Poutine en Alaska.
Lundi, Donald Trump a posé de nouvelles conditions à l’Ukraine : accepter de renoncer à la Crimée, annexée par la Russie en 2014, et mettre de côté son projet d’intégrer l’OTAN. Ces exigences interviennent avant une série de rencontres prévues à Washington : d’abord avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, puis avec les dirigeants du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de la France, de l’Italie, de la Finlande, ainsi que des représentants de l’Union européenne et de l’OTAN.
L’Europe solidaire avec Kiev
Vendredi dernier, Trump avait déjà déroulé le tapis rouge au président russe Vladimir Poutine en Alaska, affirmant sa volonté de mettre fin à la guerre en Europe, la plus meurtrière depuis la Seconde Guerre mondiale.
Les dirigeants européens, attendus à Washington, affichent leur solidarité avec Kiev. Ils entendent exiger de fortes garanties de sécurité pour l’Ukraine, face à une proposition américaine perçue comme une concession majeure à Moscou.
La Crimée, une ligne rouge
Depuis février 2022, la guerre en Ukraine a fait des dizaines de milliers de morts et provoqué des millions de déplacés. La question de la Crimée reste une ligne rouge pour Kiev, qui refuse toute négociation impliquant l’abandon de ses territoires. L’adhésion à l’OTAN est quant à elle considérée comme une garantie existentielle de sécurité.
La position américaine risque de tendre les discussions à Washington et de fragiliser l’unité occidentale face à la Russie.
L’avenir de l’Ukraine sera discuté cet après-midi, lundi 18 août, à Washington lors d’une réunion exceptionnelle entre Donald Trump, Volodymyr Zelensky et plusieurs dirigeants européens. Cette rencontre intervient moins de trois jours après le sommet entre le président américain et Vladimir Poutine, vendredi à Anchorage, en Alaska.
Les deux présidents seront ensuite rejoints par le secrétaire général de l’Otan, Mark Rutte, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, le chancelier allemand, Friedrich Merz, le premier ministre britannique, Keir Starmer, le président français, Emmanuel Macron, la première ministre italienne, Giorgia Meloni, et le président finlandais, Alexander Stubb.
La rencontre annoncée entre Donald Trump et Vladimir Poutine, prévue le 15 août à Anchorage, en Alaska, intervient dans un contexte géopolitique particulièrement tendu. Au cœur des discussions se trouve une proposition russe visant à instaurer un cessez-le-feu en Ukraine, mais à une condition majeure : l’acceptation par Kyiv de concessions territoriales significatives dans l’est du pays.
Le président russe a ainsi soumis aux États-Unis une offre claire : un arrêt immédiat des hostilités contre un retrait ukrainien des zones stratégiques du Donbass, région où les combats sont les plus intenses. Cette démarche traduit une stratégie russe de pression maximale, cherchant à transformer des gains militaires en reconnaissance diplomatique.
Une ligne rouge pour Kyiv et ses alliés
Pour l’Ukraine, cette proposition est inacceptable. Le président ukrainien a déjà fermement rejeté toute idée d’abandon territorial, rappelant que la souveraineté nationale est non négociable. La communauté internationale, notamment les alliés occidentaux, soutient cette ligne, craignant qu’une telle concession n’encourage d’autres agressions.
La rencontre Trump-Poutine sera donc suivie de près, tant elle pourrait redéfinir les contours du conflit et du processus diplomatique. Malgré son statut d’ancien président, Trump conserve une influence non négligeable et son rôle dans ces négociations pourrait peser sur la scène mondiale.
Dans ce contexte, la paix reste fragile, suspendue à des concessions territoriales que l’Ukraine refuse, creusant ainsi un fossé entre les ambitions russes et les exigences ukrainiennes. Le défi sera donc d’identifier une voie capable de mettre fin aux violences tout en respectant l’intégrité territoriale.
Difficile de trouver plus pragmatiques que les Britanniques. Après la rencontre chaotique du 28 février qui avait tourné au pugilat entre le président américain Donald Trump et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le Premier ministre britannique Keir Starmer a pris les choses en main pour coacher Zelensky dans sa relation avec l’actuel président américain et son administration. L’actuel locataire du 10 Downing Street et d’autres dirigeants européens ont également décidé de ne plus laisser le président ukrainien seul à la manœuvre par crainte d’une capitulation américaine face à Poutine.
Imed Bahri
Le journal britannique The Telegraph a révélé que le Premier ministre britannique avait joué un rôle essentiel dans la formation du président ukrainien pour maîtriser le langage du président américain et savoir le gérer.
Dans un article de Ben Riley-Smith, le journal rapporte qu’il était difficile d’exagérer l’anxiété et la frustration ressenties par le personnel de Downing Street en voyant Trump et Zelensky échanger des piques lors de leur rencontre du 28 février dans le Bureau ovale à Washington.
La veille, le 27 février, Starmer avait remporté ce que les médias et les partisans du Parti travailliste avaient qualifié de «triomphe diplomatique» lors de sa première rencontre avec le président américain. Il avait fait preuve d’un remarquable sens politique, trouvant un équilibre entre satisfaire l’ego de Trump et transmettre les points clés de la politique britannique.
Dans un rare hommage du Telegraph, connu pour son parti pris pro-conservateur, l’issue de la rencontre entre le Premier ministre britannique et le président américain a été qualifiée de satisfaisante. Trump s’est réjoui de l’invitation officielle à se rendre en Grande-Bretagne, a soutenu l’accord de Starmer sur la restitution des Îles Chagos, contestées à Maurice et a fait des commentaires positifs sur un accord commercial conclu.
La rencontre de M. Zelensky le lendemain s’est déroulée différemment, lorsqu’il a été sermonné par le vice-président américain J.-D. Vance pour ne pas avoir remercié l’Amérique. Une scène chaotique qui avait horrifié des alliés de l’Ukraine.
Le contraste entre ces deux rencontres –et la façon dont le clash lors de la seconde a sapé les progrès réalisés sur la question ukrainienne lors de la première– a laissé Sir Keir et son équipe s’en vouloir.
Pourquoi n’avaient-ils pas fait davantage pour préparer le président ukrainien alors qu’ils l’avaient fait pour leur propre Premier ministre ? De hauts responsables du 10 Downing Street ont depuis confié au Telegraph avoir le sentiment d’avoir manqué leur coup.
Dès lors, Londres, comme d’autres capitales européennes, a adopté une nouvelle approche, qui semble se traduire par la rencontre qui s’est tenu lundi à la Maison-Blanche entre Zelensky et Trump avec la participation sans précédent d’éminents dirigeants européens. Ils n’ont pas voulu laisser Zelensky seul face à Trump cette fois-ci.
Un voyage similaire avait failli avoir lieu quelques jours après l’escarmouche du Bureau ovale de février alors que Starmer, Emmanuel Macron, le président français et d’autres tentaient de réparer les dégâts. Cependant, ces tentatives pour ramener M. Zelensky à la Maison Blanche, accompagné des dirigeants européens, n’avaient finalement pas abouti à l’époque.
Le Premier ministre a finalement fait autre chose pour véhiculer un message similaire : il a serré M. Zelensky dans ses bras devant la porte noire du 10 Downing Street.
Apprendre à parler le langage de Trump
Depuis ce jour, un travail en coulisses a eu lieu pour «apprendre» au président ukrainien à «parler le langage de Trump». The Telegraph précise que Zelensky entame désormais ses discussions avec les responsables américains en remerciant les États-Unis pour leur soutien à son pays face à la Russie, en réponse directe à la demande de Vance lors de leur première rencontre il y a plus de six mois, un clin d’œil à l’escarmouche avec M. Vance.
Les leçons de Starmer à Zelensky pour pouvoir gérer Trump et essayer de l’influencer reposent sur trois point :
– ne pas répondre à chaque déclaration provocatrice du président américain;
– ne pas débattre publiquement avec Trump ni l’assaillir de questions car une réaction négative peut avoir lieu de sa part s’il sent que son orgueil a été entaché;
– le couvrir d’éloges en public, tout en exerçant pression et influence en coulisses pour servir les intérêts nationaux.
Le journal britannique explique que Jonathan Powell, conseiller à la sécurité de Starmer et l’un des esprits les plus éminents de la politique étrangère britannique, était responsable de la formulation de cette approche et de son élaboration auprès de la délégation ukrainienne pour la rencontre de lundi avec Trump.
Cependant, la décision des responsables européens de se rendre à Washington n’est pas uniquement motivée par la volonté de ne pas laisser Zelensky tout seul face à Trump. C’est aussi un signe d’inquiétude. Le fait que les dirigeants les plus influents abandonnent leurs plans de vacances en plein mois d’août et se rassemblent, passant de nombreuses heures de voyage loin de chez eux, accentue le sentiment d’incertitude et de peur.
Deux anciens ambassadeurs britanniques à Washington ont déclaré au Telegraph que la ruée vers la Maison Blanche montre qu’ils savent combien il est important de décrypter ce qui s’est passé en Alaska entre Trump et Poutine.
Lord Darroch, ancien ambassadeur pendant le premier mandat de M. Trump, a déclaré : «Cette délégation européenne de haut niveau, rapidement constituée, accompagnant Zelensky à Washington témoigne d’une profonde inquiétude quant à deux aspects de l’issue du sommet en Alaska. Premièrement, l’annonce selon laquelle le président Trump estime désormais qu’un accord de paix global devrait précéder un cessez-le-feu. Et deuxièmement, les suggestions selon lesquelles la voie de la paix pourrait impliquer que l’Ukraine cède encore davantage de territoire dans le Donbass».
Sir Peter Westmacott, représentant du Royaume-Uni à Washington sous Barack Obama, a déclaré : «Cela me montre que plus ils examinent ce qui s’est passé en Alaska, plus ils se rendent compte que tout a mal tourné et que Trump s’est fait avoir. Poutine n’a rien cédé et est rentré chez lui très satisfait. Ainsi, quels que soient les arguments qu’il a fait croire à Trump concernant la responsabilité de Zelensky dans le conflit ou le droit de la Russie à reconquérir ses anciens sujets en Europe de l’Est, il faudra une riposte vigoureuse». Il ajoute : «Le président doit vraiment trouver une meilleure solution que de simplement remercier Poutine d’avoir reconnu sa victoire aux élections qu’il a perdues en 2020 et de renoncer à toutes ses menaces de sanctions contre la Russie simplement parce que Poutine dit ne pas vouloir de cessez-le-feu». Le Telegraph rapporte que les trois choses que les Européens souhaitent obtenir de Trump sont les suivantes : Premièrement, repousser l’idée de céder l’intégralité du Donbass à Poutine. Deuxièmement, exiger la fin des attaques russes avant de véritables négociations. Troisièmement, des garanties de sécurité significatives pour l’Ukraine après la paix, soutenues par les États-Unis.
Tous les spots de l’actualité sont braqués sur l’Ukraine. Tout le monde veut sauver Volodymyr Zelensky, dont une partie du pays est occupée par la Russie, alors que son ami israélien, Benjamin Netanyahu continue d’occuper Gaza et des pans entiers de Cisjordanie et de tuer en masse les Palestiniens… La mentalité coloniale occidentale a encore de beaux jours devant elle…
Abdelaziz Dahmani *
Ces derniers temps, toutes les lumières sont braquées sur la guerre d’Ukraine, et l’urgence de l’arrêter, pour empêcher un désastre, la chute de l’ami Zelensky, «Sauver le Soldat Zelensky» et empêcher Vladimir Poutine d’affirmer plus de puissance et prétention… Les dernières images des principaux dirigeants européens assis docilement, à la Maison Blanche, à Washington, comme dans une salle d’attente d’un médecin, avant qu’ils ne soient reçus, sont humiliantes, mais que ne feraient-ils pas, pour sauver le régime du président ukrainien, après avoir admis que ses anciennes prétentions d’adhérer à l’Otan et à l’Union européenne, et devenir le poste le plus avancé de l’Occident face à Poutine et sa Sainte Russie sont irréalisables…
Toutes ces chimères se sont en effet fracassées sur le mur de ka réalité, et il ne s’agit plus que de sauver Zelensky et son régime… Il faut dire que ce régime fait pièce d’une cohérence européenne, américaine et pro-israélienne.
C’était avant le 7 Octobre 2023… La paix israélo-américaine roulait sur un boulevard dégagé. La cause palestinienne oubliée et même l’Arabie Saoudite était presque prête à adhérer aux Accords d’Abraham. Zelensky n’est qu’un pion dans tout cela. Et lui, l’ancien acteur professionnel était prêt à ce jeu. BHL est même devenu l’un de ses mentors, et il le couvait de mille grâces. Souvenons-nous de ses exaltations de la Place Maidan… Et des affirmations de Zelensky sur la grande démocratie israélienne de… Netanyahu.
Mais voilà, et cela s’est énormément aggravé avec Gaza, devenu le plus grand cimetière du monde, après en avoir été la plus grande prison, avec ses assassinats en masse, vieux, femmes et enfants, par dizaines et dizaines de milliers, et destructions de crèches, écoles et hôpitaux sauvagement bombardés …
Et voilà Zelensky, l’Européen, le pro-israélien, le fidèle ami de Netanyahu, l’assassin, l’occupant, le colon, le tueur sans état d’âme, condamne l’occupation de territoires ukrainiens par la Russie de Poutine. Mais ne condamne pas l’occupation de territoires Palestiniens par Israël. De la même façon, il reconnaît à Israël le droit de défendre sa sécurité contre le Hamas en allant occuper Gaza, tout en reniant ce même droit à la Russie, laquelle n’acceptera jamais de voir les fusées de l’Otan installés en Ukraine et s’approcher ainsi dangereusement de Moscou ou de Saint-Pétersbourg, ex-Leningrad, ville d’élection de Poutine.
Trump, qui cherche à peaufiner sa vaniteuse gloire, veut trouver solution au drame ukrainien, sans désobliger… Poutine, et avant-hier, il l’a dit, ce règlement lui permettrait, peut-être, d’accéder au Paradis (sic !), comme il l’a déclaré à Fox News. Celui des chrétiens et des juifs, bien entendu.
Et les Palestiniens ? Quels Palestiniens ?
Regardez, la photo, ci-jointe… En janvier 2020, Zelensky, chemise blanche et cravate, kippa sur la tête, plein de dévotion, posant la main sur le Mur des Lamentations à Jérusalem. Il était venu, ce jour-là, pour exprimer son soutien et sa solidarité à Netanyahu, soutien et solidarité qu’il lui renouvelé en pleine occupation de Gaza et du génocide perpétré contre les Palestiniens… Et, en journalisme, une photo parle parfois mieux que dix mille mots.
Les humiliations que Trump ne cesse de faire subir aux Européens en négociant derrière leur dos, et à leurs dépens, avec la Russie, la Chine et l’Inde, c’est-à-dire avec ceux qui comptent, vont-elles réveiller l’Europe et l’inciter à accélérer sa construction politique pour ne plus être un appendice négligeable des politiques américaines ? (Les Etats-Unis et l’Union européenne : Quand le «grand» parle, les «petits» n’ont qu’à bien se tenir.)
Cherif Ferjani *
En adepte du néolibéralisme et de la révolution conservatrice, Trump mène une politique identitaire –America First, voire Only America ! – appliquant la conception politique du conservateur Carl Schmitt fondée sur l’opposition «ami/ennemi», les rapports de force et la loi du plus fort – ou de la jungle –, et nullement sur le droit, la délibération, la concertation rejetés comme entraves à l’exercice de la «souveraineté» de celui qui a le pouvoir.
L’Etat de droit, la démocratie, le respect des institutions sont balayés aussi bien au niveau de la politique intérieure que sur le plan des relations internationales.
Trump, depuis sa réélection, se comporte comme les cowboys qui ne tiennent compte que de ceux qui ont la force de se faire respecter et de rendre coup pour coup. On l’a vu, à titre d’exemple, aussi bien à travers sa politique douanière, concernant les taxes, que dans ses rencontres au sujet la guerre en Ukraine. Volodymyr Zelensky a été humilié ouvertement lors de sa première rencontre avec Trump, retransmise en direct, contrairement à Poutine pour qui le tapis rouge fut déroulé et avec qui l’échange se déroula à huis clos, pour ménager les susceptibilités des protagonistes.
Lors de la dernière réunion à la Maison Blanche avec Volodymyr Zelensky, à laquelle les dirigeants européens se sont invités pour ne pas laisser celui-ci tout seul face au cowboy, les entretiens étaient entrecoupés de coups de fil entre le patron de la Maison Blanche et le Maître du Kremlin, comme pour lui dire que tout se passait conformément à leurs accords en Alaska et que les «petits» ont été bien roulés dans la farine. Il en est de même pour les taxes : avec les puissants, Trump négocie et cherche des compromis; avec les «petits» – dont l’Europe paralysée par ses divisions, son incapacité à parler d’une seule voix, et sa difficulté à rompre les liens de soumission aux Etats-Unis – Trump passe en force et impose ses décisions.
L’Europe n’a pas compris que pour Trump et les isolationnistes américains de l’AFC (America First Comittee) qui l’ont porté au pouvoir, l’Occident ne veut rien dire, sinon un moyen pour imposer l’hégémonie des Etats-Unis à ceux qu’ils ont maintenus, depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, dans la peur d’un Orient à géométrie variable, selon l’ennemi du moment.
Pour l’AFC inspirant la politique de Trump, l’Occident est devenu un fardeau pour les Etats-Unis qui ne leur apporte plus rien, ou pas autant qu’ils le souhaitent.
Les Européens n’ont pas encore compris que l’Occident, comme l’a bien montré Georges Corm (‘‘L’Europe et le mythe de l’Occident’’, Paris, La Découverte, 2009), n’est qu’un mythe battu en brèche par l’évolution du monde à l’ombre du triomphe de la mondialisation du néolibéralisme et de la révolution conservatrice. Seules les victimes de cette mondialisation, au Nord, dont l’Europe, et au Sud, croient encore en cette chimère. L’Europe a encore du mal à réaliser que ce mythe ne correspond plus à aucune réalité; c’est cette illusion qui la fait encore courir derrière les Etats-Unis, malgré toutes les humiliations qu’ils lui font subir, en croyant qu’ils peuvent la protéger dans le cadre d’un Otan qui n’a plus aucune raison d’être depuis la disparition du Pacte de Varsovie et l’implosion de l’Union Soviétique.
Les humiliations que Trump ne cesse de faire subir aux Européens en négociant derrière leur dos, et à leurs dépens, avec Poutine, la Chine et l’Inde, c’est-à-dire avec ceux qui comptent, vont-elles réveiller l’Europe et l’inciter à accélérer sa construction politique pour ne plus être un appendice négligeable des politiques américaines ? Pour cela, il faut beaucoup de conditions dont la première est de renoncer au dollar comme monnaie d’échange internationale à l’instar du choix des pays du Brics; car le dollar était le principal moyen de domination des Etats-Unis depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale et, surtout, depuis 1971, suite à la décision unilatérale de la Maison Blanche mettant fin à sa convertibilité en or, condition de son adoption comme monnaie internationale à Bretton Woods, en 1944. Les dirigeants qui continuent à se faire humilier par la Maison Blanche auront-ils le courage de prendre une telle décision ? Espérons-le, pour l’intérêt de leur pays et, surtout, pour renforcer la lutte contre l’hégémonisme et l’arrogance des Etats-Unis.
L’exacerbation de la crise en Europe et la marginalisation internationale de son premier partenaire économique ne manqueront pas d’avoir des retombées négatives sur une Tunisie qui connaît depuis une quinzaine d’années une conjoncture difficile et peine à se relancer.
Elyes Kasri *
Le sommet américano-russe du 16 août 2025 en Alaska a été accueilli par moultes gesticulations euro-otaniennes prétendument pour soutenir un président ukrainien ayant dépassé son mandat et qui est reconnu par de nombreux observateurs comme un pion de l’Otan doublé d’un despote et d’un corrompu de haut vol.
Les préparatifs de la réunion de Washington censée être bipartite Trump-Zelensky et les tentatives puériles d’incrustation de l’Europe pour y participer et tenir la main au satrape ukrainien en dépit de la réticence de la Maison Blanche, révèlent l’inadéquation de l’Europe avec le nouvel ordre mondial qui a du mal à surmonter la bipolarité russo-américaine de la guerre froide en dépit des prétentions d’autres puissances émergentes mais qui ne peuvent cacher leur statut encore secondaire dans le conflit russo-ukrainien qui a cumulé sur le terrain les attributs d’un conflit élargi à l’Otan, l’Europe et l’Asie.
Vanité et hypocrisie
Les déclarations du président français Macron et de la présidente de la commission européenne Von Der Leyen à la veille du sommet de Washington avec les dirigeants européens et ukrainien face au président américain montrent s’il le fallait encore une fois la vanité et l’hypocrisie de l’Europe dont les leaders ne cessent de crier sur les toits leur attachement inébranlable au respect du droit international et l’interdiction morale et légale de toute légitimation de l’acquisition de territoires par la force et autres professions de foi qui ne semblent pas s’appliquer à Israël en dépit des preuves accablantes du génocide palestinien et de son mépris flagrant du droit international et de toute morale humaine.
En plus de sa faillite morale, démasquée à Gaza avec ce que beaucoup considèrent comme une complicité dans un génocide confirmé par la Cour Internationale de Justice, l’Europe est désormais confrontée à sa marginalisation internationale et aux nombreux indices de son insignifiance géostratégique.
Exacerbation de la crise
Le problème que cela pose à la Tunisie, c’est qu’il s’agit d’un voisin proche (la capitale la plus proche de Tunis étant européenne en l’occurrence Rome) et son principal partenaire économique et destination migratoire qui en plus de sa marginalisation géostratégique s’enferre dans une logique belliciste qui dépasse ses moyens militaires et économiques.
Il est indéniable que l’exacerbation de la crise européenne ou pire une guerre européenne généralisée ne manqueront pas d’avoir des retombées négatives et même tragiques sur une Tunisie qui connaît depuis une quinzaine d’années une conjoncture difficile qui a considérablement exacerbé sa vulnérabilité à toute dégradation supplémentaire de son environnement international.