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« Round 13 » de Mohamed Ali Nahdi remporte le Crystal Simorgh du Meilleur Film au Festival Fajr

03. Dezember 2025 um 22:26

Le long métrage tunisien “Round 13” de Mohamed Ali Nahdi a remporté le prix Crystal Simorgh du meilleur film, lors de la 43ème édition du Fajr International Film Festival, qui s’est tenue dans la ville de Shiraz, en Iran, du 26 novembre au 3 décembre 2025.

Le film, qui a concouru dans la compétition des premiers et deuxièmes films, est une fiction autour de la résilience et des luttes modernes. Réalisé par Mohamed Ali Nahdi et écrit par Sophia Haoues, il réunit en tête d’affiche Helmi Dridi (Kamel) et Afef Ben Mahmoud (Samia), deux protagonistes au cœur d’un drame qui raconte la vie de Kamel, ancien champion de boxe ayant troqué la célébrité pour une existence paisible auprès de sa femme, Samia, et de leur fils, Sabri. Mais lorsqu’un simple accident révèle que Sabri est atteint d’une tumeur osseuse, leur monde bascule.

“Round 13” sera présenté lors d’une séance spéciale dans le cadre de la sélection officielle Hors Compétition de la 36ème édition des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC, 13-20 décembre 2025).

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JCC 2025 : La Tunisie rend hommage à Ziad Rahbani, voix de l’engagement critique

Von: walid
03. Dezember 2025 um 21:40

La 36e édition des Journées Cinématographiques de Carthage rendra hommage à Ziad Rahbani, disparu le 26 juillet 2025 à l’âge de 69 ans, en mettant en avant les films auxquels il a contribué comme compositeur ou acteur.

La programmation inclut notamment “Le Cerf-volant” de Randa Chahal, “Nahla” de Farouk Beloufa, “Retour à Haïfa” de Kassem Hawal et “Après cet âge” de Jad Gosn, ainsi que d’autres œuvres où son empreinte musicale et dramaturgique est perceptible.

Fils de Fayrouz et d’Assi Rahbani, Ziad a grandi dans un environnement artistique unique, qu’il a enrichi d’un style personnel mêlant jazz oriental, satire sociale et engagement critique. Au-delà du cinéma, il s’est produit sur scène, notamment au Festival International de Hammamet en 2019, laissant des traces mémorables dans la musique arabe contemporaine.

Aux JCC, son nom résonnera comme celui d’un créateur transversal dont l’œuvre continue de vibrer entre musique, théâtre et cinéma.

La 36e édition des Journées Cinématographiques de Carthage se déroulera du 13 au 20 décembre 2025.

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JCC 2025 : Seize films arabes et africains en compétition officielle des courts-métrages

Von: walid
03. Dezember 2025 um 17:36

Seize films représentant dix pays arabes et africains figurent dans la sélection officielle de la compétition des courts-métrages de la 36e édition des Journées cinématographiques de Carthage.

La liste des films vient d’être dévoilée sur la page Facebook du festival, dont la 36e édition se déroulera du 13 au 20 décembre 2025.

Trois films tunisiens sont en compétition : Sursis de Walid Tayaa, Tomates maudites de Marwa Tiba et Le fardeau des ailes de Rami Jarboui.

L’Égypte, le Liban, la Palestine et le Sénégal sont représentés par deux films chacun. Les cinq courts restants proviennent d’Afrique du Sud, d’Algérie, du Cap-Vert, du Togo et de Syrie.

Liste des courts-métrages en compétition :

Aasvoëls, Dian Weys (Afrique du Sud)
Gardiennes de nuit, Nina Khada (Algérie)
A Última Colheita, Nuno Bonaventura Miranda (Cap-Vert)
Oranges Road, Sami Farah (Syrie)
Une Mémoire en Ruine, Mathias Noussougnon (Togo)

Breaking Out of Ali and Maher’s Base, Abanoub Youssef (Égypte)
32 B, Mohamed Taher (Égypte)

ELLE, Michèle Tyan (Liban)
She’s Swimming, Liliane Rahal (Liban)

Coyotes, Said Zagha (Palestine)
Intersecting Memory, Shayma Awawdeh (Palestine)

Rafet, Khadidiatou Sow (Sénégal)
Café?, Bamar Kane (Sénégal)

Sursis, Walid Tayaa (Tunisie)
Tomates maudites, Marwa Tiba (Tunisie)
Le fardeau des ailes, Rami Jarboui (Tunisie)

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JCC 2025 : Hommages à Fadhel Jaziri, Souleymane Cissé et Paulin Vieyra, Pères du Cinéma Tunisien et Africain

Von: walid
03. Dezember 2025 um 17:16

Livrant d’ores et déjà un avant-goût de sa programmation, la 36ème édition des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC, 13-20 décembre 2025) a choisi de consacrer ses hommages posthumes à d’éminentes figures du cinéma tunisien, africain et arabe, réaffirmant ainsi son rôle dans la valorisation des parcours qui ont contribué à l’évolution du cinéma dans le pays et au-delà.

S’ouvrant comme une vaste fenêtre sur le passé, laissant remonter les voix, les visages et les récits qui ont façonné le cinéma, les JCC demeurent une occasion de rappeler des parcours, des œuvres et des mémoires qui éclairent encore le grand écran.

Du côté de la Tunisie, un hommage est consacré au cinéaste et homme de théâtre Fadhel Jaziri (1948-2025), avec la projection de deux œuvres majeures auxquelles il a pris part “La Noce” (1978), réalisé par le collectif du Nouveau Théâtre, restauré et présenté pour la première fois en Tunisie et “Traversées” (1982) de Mahmoud Ben Mahmoud, où feu Fadhel Jaziri a joué le rôle principal. Deux œuvres qui rappellent la présence singulière de Fadhel Jaziri à l’écran, et qui retracent une partie de son long parcours artistique.

Le plus grand festival de cinéma en Afrique et dans le monde arabe célèbrera également le centenaire de la naissance de Paulin Soumanou Vieyra (1925-1987), réalisateur béninois de naissance et sénégalais d’adoption, considéré comme le précurseur du cinéma africain. L’hommage comprend la projection de trois œuvres “C’était il y a 4 ans” (1954), “En résidence surveillée” (1981) et “Vieyra, le précurseur innovant” (2025). Une exposition qui lui est dédiée viendra par ailleurs retracer son œuvre et rappeler l’importance de ce bâtisseur dont la pensée, l’engagement et les films ont accompagné le développement du 7ème art africain.

Dans cette même ligne de reconnaissance envers les grandes voix du continent, les JCC honorent la mémoire du cinéaste malien Souleymane Cissé (1940-2025), considéré comme l’un des pères du cinéma africain. Trois de ses films majeurs seront projetés à savoir “Den Muso” (1975), “Finyè” (1982) et “Yeelen” (1987), œuvres emblématiques qui ont dessiné une nouvelle manière de filmer l’Afrique, ses luttes, ses maux et ses espoirs. L’hommage s’enrichit de la présence de sa fille, la cinéaste Fatou Cissé, qui présentera son film “Hommage d’une fille à son père”, (2022) retraçant l’enfance, la jeunesse et l’œuvre de Souleymane Cissé, et dévoilant les moments qui ont façonné son regard et son influence sur l’histoire du cinéma africain.

Le festival rend également hommage à Claudia Cardinale, figure légendaire du monde du cinéma, née à Tunis et dont la carrière a traversé six décennies. Les JCC proposeront trois films qui racontent différentes facettes de son parcours et de son lien profond avec son pays natal : “Les Anneaux d’or” (1956) de René Vautier et Mustapha Fersi, “Claudia Cardinale : La plus belle Italienne de Tunis” (1994) de Mahmoud Ben Mahmoud et “Claudia Cardinale : La Tunisie… splendeur et beauté” (2025) de Lotfi Bahri.

Walid Chmait, grande voix de la critique cinématographique au Liban, dont l’œuvre a marqué le paysage audiovisuel arabe, sera également à l’honneur à travers le documentaire “Walid Chmait, une vie au cœur du cinéma”, réalisé par son fils Selim Saab Chmait. La projection sera suivie d’un débat pour revisiter le parcours de ce passionné, témoin attentif et acteur de la mémoire cinématographique du monde arabe.

Au fil de ces hommages, les JCC réaffirment leur vocation de préserver, de transmettre et de rappeler que le cinéma demeure un univers qui invite à chaque fois à regarder en arrière pour mieux comprendre ce qui, encore aujourd’hui, fait vibrer le 7ème art.

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JCC 2025 : La Palestine et « Palestine 36 » en Ouverture, Gaza au Cœur du Festival de Carthage

Von: walid
03. Dezember 2025 um 17:10

A une dizaine de jours de son ouverture, la 36ème édition des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC, 13-20 décembre 2025) a révélé, sur sa page officielle, pour le plus grand bonheur des cinéphiles et de son public fidèle, un avant-goût de sa programmation, portée par des hommages, des images et des voyages à travers les continents, les époques et les cultures.

Pour cette édition 2025, les JCC, entre parole, mémoire et images du monde, invitent le public à une traversée qui passe par la Palestine, rejoint l’Arménie, l’Amérique latine, l’Espagne, les Philippines, tout en mettant le cap sur le cinéma tunisien et arabe.

La Palestine au cœur des JCC: Gaza sera à l’honneur sur les écrans de Carthage Film Festival avec des récits qui témoignent de la douleur, de la résilience et de l’espoir. Des voix cinématographiques qui reflètent la réalité et touchent l’âme et la conscience. Les cinéastes du film documentaire “From Ground Zero”, porté par le cinéaste palestinien Rashid Masharawi pendant la guerre lancée après les attaques du 7 octobre 2023, s’adressent au monde à travers un cinéma qui change, un cinéma qui rêve, un cinéma qui pense. De la mémoire, de l’identité et de la résistance, “Palestine 36”, de la réalisatrice Annemarie Jacir, candidat de la Palestines aux Oscars 2026, fera l’ouverture des JCC 2025, invitant à découvrir l’art de la narration et des histoires humaines.

Focus Arménie : Les JCC 2025 invitent à un voyage cinématographique en Arménie, un pays dont le cinéma a connu de multiples évolutions depuis plus d’un siècle, présentant une multitude de récits anciens et contemporains. Ce cinéma suit le rythme des évolutions mondiales tout en préservant son identité narrative unique : porteur de mémoire et de l’esprit d’une nation, forgé par l’histoire et le temps. Dans les salles, les cinéphiles auront rendez-vous avec un cinéma arménien qui mêle émotion, poésie et résilience, abordant mémoire, deuil, identité diasporique et beauté, tout en explorant reconnaissance et persévérance humaine.

Focus Philippines : Le cinéma philippin, l’une des plus anciennes industries cinématographiques asiatiques, occupe une place importante dans cette édition. Caractérisé par une riche histoire et de larges traditions dans le cinéma populaire et indépendant, il a connu de nombreuses réussites internationales et trouve sa place dans les salles des JCC avec une programmation variée : Thy Womb de Brillante Mendoza, Sakaling Hindi Makarating d’Ice Idanan, Paglipay de Zig Madamba Dulay, John Denver Trending d’Arden Rod Condez et Insiang de Lino Brocka.

Nouveau cinéma arabe : La 36ème édition des JCC propose une programmation spéciale de films ayant marqué les esprits et s’étant imposés comme des œuvres majeures dans l’histoire du cinéma arabe. Ces films ont représenté un bond qualitatif, tant sur le fond que sur la forme, s’affranchissant de certaines restrictions et conventions, et traçant une nouvelle voie pour eux-mêmes et pour leurs successeurs. Au cours du premier quart du XXIème siècle, ces œuvres et autres expérimentations cinématographiques arabes ont façonné un nouveau cinéma arabe et une nouvelle génération de réalisateurs désireux de bousculer les stéréotypes et d’offrir un regard neuf sur des sujets ancrés dans la réalité, reflétant l’évolution des sociétés et leurs transformations socio-politiques et économiques.

Voyage dans le cinéma latino-américain : Les JCC rendent hommage à la force libre et indocile du cinéma d’Amérique latine avec une sélection d’œuvres racontant un territoire traversé par la mémoire, la lutte et l’imaginaire. Des Andes aux littoraux chiliens, des villes en tension aux communautés autochtones, ces films dessinent un continent vibrant où l’universel et l’intime se mêlent. Avec Les Bruits de Recife, La Chute du Ciel, Le Sang du Condor, Utama, L’Eté des Poissons Volants, Mon Pays Imaginaire et La Noche de 12 Años, cette section célèbre des cinéastes qui ont façonné un cinéma de résistance, à la croisée de l’enquête, du réalisme et des luttes populaires.

Les JCC s’emploient ainsi à réaffirment leur engagement envers un cinéma très peu visible sur les écrans malgré sa puissance, et envers les peuples qui se battent pour leur terre et leur dignité.

Ces films latino-américains, courageux et sensibles, témoignent de cette même volonté : filmer pour comprendre, filmer pour résister, filmer pour ne pas disparaître.

Regard sur le cinéma espagnol : Les JCC ouvrent un espace dédié au cinéma espagnol, un cinéma qui illumine l’humain au cœur de ses fragilités. La sélection explore une Espagne multiple : villages où le temps s’attarde, familles qui se réinventent, territoires traversés par des fractures sociales et espaces où l’intime devient un lieu de résistance. Des films tels que Morlaix de Jaime Rosales, Romería de Carla Simón, La Casa d’Alex Montoya, El 47 de Marcel Barrena et Deaf d’Era Libertad révèlent un cinéma façonné par la mémoire et par les liens qui unissent les êtres.

Films GREEN/Cinéma Vert : Les JCC mettent en avant des films engagés sur l’environnement et proposent Les Enfants de Fatma d’Abdelhamid Bouchnak, La Colline aux serpents de Joëlle Abou Chabké, L’Arbre de l’enfer de Raed Zeno, Une mémoire d’arbre de Wassim Tanios et The Earth Weavers de Rima Kaddissi.

Traversée cinématographique avec Mahmoud Ben Mahmoud : Le festival propose une immersion dans l’œuvre du cinéaste Mahmoud Ben Mahmoud avec la projection de six de ses films et une masterclass pour explorer son parcours et sa vision artistique : Anastasia de Bizerte (1996), Traversées (1982), Siestes Grenadine (1999), Wajd, Les Mille et une voix soufies (2001), Le Professeur (2012) et Fatwa (2018).

Hommage au producteur tunisien Abdelaziz Ben Mlouka : Les JCC offrent à découvrir une sélection de films produits par Abdelaziz Ben Mlouka qui incarne une génération de producteurs conjuguant exigence artistique, audace thématique et professionnalisme. La liste des films comprend “La Villa”, “Fleur d’oubli”, “Making of”, “Les Palmiers blessés”, “Star Wars I : La Menace fantôme” (copie 35 mm), “Le Dernier Mirage”, “Le Festin”, “Keratin Day”, “Clé de Sol”, “Croix X” et “Poussières d’étoiles”.

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ICC 2025 : retour de la compétition et des ICC Awards à l’INSAT

02. Dezember 2025 um 17:17

La septième édition de “L’INSAT Célèbre le Cinéma” (ICC), premier festival en son genre de courts-métrages amateurs en milieu universitaire, aura lieu le samedi  6 décembre 2025. Organisée par le club ciné-radio INSAT (Institut National des Sciences Appliquées et de Technologie), la journée sera consacrée à des projections continues de courts-métrages, suivies de débats avec les jeunes réalisateurs.

Au programme également, une exposition artistique mettant en avant une variété de médiums et d’artistes émergents.

Cette édition marque aussi le grand retour de la compétition ICC et un jury qui aura la mission de décerner les ICC Awards aux meilleurs films projetés lors de cette édition.

Pour conclure ce voyage artistique, une performance musicale sera assurée par de jeunes musiciens du CinéRadio Band, lors de la cérémonie de clôture.

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JCC 2025 : Quels sont les films tunisiens en lice ?

02. Dezember 2025 um 16:36

A l’approche du grand marathon du septième art qui vient clôturer les grands rendez-vous culturels de l’année 2025, et à quelques jours de la rencontre avec les médias (le 4 décembre 2025 au Théâtre des Jeunes Créateurs à la Cité de la Culture Chedly-Klibi à Tunis), le comité d’organisation des Journées cinématographiques de Carthage (JCC) vient de dévoiler la liste complète des films sélectionnés dans les trois compétitions officielles de sa 36ème édition, qui se déroulera du 13 au 20 décembre 2025.

Pour cette édition 2025, 42 films issus de 19 pays arabes et africains (Burkina Faso, République du Congo, Egypte, Irak, Jordanie, Maroc, Sénégal, Nigeria, Soudan, Tchad, Arabie Saoudite, Algérie, Palestine, Liban, Afrique du Sud, Cap-Vert, Togo, Syrie et Tunisie), répartis dans les 3 grandes compétitions du festival, seront en course pour le Tanit, dont 9 films tunisiens (dans les trois catégories).

Compétition officielle des longs métrages documentaires :

12 films portant les couleurs de 8 pays -Burkina Faso, République du Congo, Egypte, Irak, Jordanie, Maroc, Sénégal et Tunisie- seront en lice, dont 3 œuvres tunisiennes : “Le Para-dis” de Majdi Lakhdar, “Notre Semence” d’Anis Lassoued et “On The Hill” de Belhassen Handous.

Liste des 12 films sélectionnés :

L’homme qui plante les baobabs, K. Michel Zongo (Burkina Faso)
Home Movie on Location, Viola (Egypte)
The Other… Raeburn, David-Pierre Fila (République du Congo)
Løvene ved elven Tigris, Zaradasht Ahmed (Irak)
Tales of the Wounded Land, Abbas Fadhel (Irak)
Cinema Kawakeb, Mahmoud Al Massad (Jordanie)
Five Eyes, Karim Debbagh (Maroc)
Cimetière de vie, Mamadou Moustapha Gueye (Sénégal)
Liti Liti, Mamadou Khouma Gueye (Sénégal)
Le Para-dis, Majdi Lakhdar (Tunisie)
Notre Semence, Anis Lassoued (Tunisie)
On The Hill, Belhassen Handous (Tunisie)

Compétition officielle des longs métrages fiction

14 films représentant 11 pays -Nigeria, Soudan, Irak, Tchad, Arabie Saoudite, Egypte, Jordanie, Algérie, Burkina Faso, Palestine et Tunisie- concourront pour le Tanit d’or, dont 3 films tunisiens : “Promis le Ciel” d’Erige Sehiri, “La Voix de Hind Rajab” de Kaouther Ben Hania et “Where the Wind Comes From” d’Amel Guellaty.

Liste des 14 films sélectionnés :

My Father’s Shadow, Akinola Davis Jr (Nigeria)
Cotton Queen, Suzannah Mirghani (Soudan)
Irkalla : Gilgamesh’s Dream, Mohamed Jabarah Al-Daradji (Irak)
Diya, Achille Ronaimou (Tchad)
Hijra, Shahad Ameen (Arabie Saoudite)
My Father’s Scent, Mohamed Siam (Egypte)
Sink, Zain Duraie (Jordanie)
Roqia, Yanis Koussim (Algérie)
Katanga : La danse des scorpions, Dani Kouyaté (Burkina Faso)
The Stories, Abu Bakr Shawky (Egypte)
Once Upon a Time in Gaza, Arab & Tarzan Nasser (Palestine)
Promis le Ciel, Erige Sehiri (Tunisie)
La Voix de Hind Rajab, Kaouther Ben Hania (Tunisie)
Where the Wind Comes From, Amel Guellaty (Tunisie)

Compétition officielle des courts métrages

16 films, issus de 10 pays -Liban, Afrique du Sud, Egypte, Algérie, Cap-Vert, Sénégal, Palestine, Togo, Syrie et Tunisie- ont été retenus, dont 3 oeuvres tunisiennes : “Sursis” de Walid Tayaa, “Tomates maudites” de Marwa Tiba et “Le fardeau des ailes” de Rami Jarboui.

Liste des 16 courts métrages sélectionnés :

ELLE, Michèle Tyan (Liban)
Aasvoëls, Dian Weys (Afrique du Sud)
Breaking Out of Ali and Maher’s Base, Abanoub Youssef (Egypte)
Gardiennes de nuit, Nina Khada (Algérie)
A Última Colheita, Nuno Bonaventura Miranda (Cap-Vert)
32 B, Mohamed Taher (Egypte)
Rafet, Khadidiatou Sow (Sénégal)
Café?, Bamar Kane (Sénégal)
Coyotes, Said Zagha (Palestine)
Intersecting Memory, Shayma Awawdeh (Palestine)
Une Mémoire en Ruine, Mathias Noussougnon (Togo)
Oranges Road, Sami Farah (Syrie)
She’s Swimming, Liliane Rahal (Liban)
Sursis, Walid Tayaa (Tunisie)
Tomates maudites, Marwa Tiba (Tunisie)
Le fardeau des ailes, Rami Jarboui (Tunisie)

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Ciné-Sud Patrimoine lance Ciné-Musée 2025 : un festival gratuit dédié au cinéma et à la restauration des films

Von: walid
02. Dezember 2025 um 12:00

L’association Ciné-Sud Patrimoine organise du 5 au 10 décembre à Sousse et les 13 et 14 décembre à Tozeur la 8e édition de sa manifestation annuelle “Ciné-Musée”, consacrée à la valorisation du patrimoine cinématographique tunisien et international.

L’événement prévoit la projection de films tunisiens récemment restaurés, des séances hommages à de grandes figures de la culture tunisienne, des ateliers et des rencontres-débats sur les métiers du cinéma, ainsi que des expositions photographiques présentant des affiches de films, du matériel audiovisuel et des documents rares.

Toutes les activités sont gratuites et ouvertes au public dans la limite des places disponibles, indique un communiqué de l’association.

Le programme de Sousse débutera le 5 décembre à l’Institut Supérieur de Musique avec un hommage vibrant à Ahmed Bennys et la projection d’ “El Mhammedia”, accompagnée d’un ciné-concert mêlant films muets de Sousse et de Naples. Les jours suivants, la Maison de la Culture Ali Douagi rendra hommage à Nouri Bouzid avec la projection restaurée de “L’Homme de Cendres”, tandis que le 7 décembre sera consacré à une rencontre-débat sur la préservation de la mémoire et l’accès aux archives, ainsi qu’à l’avant-première de « H’mida ».

Les 8 et 9 décembre seront consacrés aux Leçons de Cinéma autour de “Caméra d’Afrique” de Férid Boughedir et à un hommage au Collectif Nouveau Théâtre, suivi de la projection de “La Noce”. Le 10 décembre clôturera cette étape avec un hommage à Fadhel Jaziri et la projection de “Traversées” de Mahmoud Ben Mahmoud.

À Tozeur, les 13 et 14 décembre, les festivaliers découvriront “Les Baliseurs du Désert” de Nacer Khemir et le premier épisode de “La Guerre des Étoiles”, tourné à Tozeur et Nefta, accompagnés d’un concert panafricain rassemblant des musiciens du Mali, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, du Cameroun et de Tunisie.

Deux ateliers de formation sont également proposés, dont l’un sur l’écriture et l’improvisation musicale pour films muets, dirigé par Guido Sodo, et l’autre sur la restauration numérique image par image avec le logiciel Diamond Film Restauration, encadré par Francesca Chelu Deiana avec une intervention à distance de Walter Plaschzug, inventeur du logiciel.

Cette étape sera marquée par deux expositions inédites sur ‘Le Djerid dans la Mémoire de l’Image’ et ‘Les affiches du Cinéma tunisien’.

L’édition 2025 est organisée en partenariat avec le Centre national du cinéma et de l’image (CNCI), la Cinémathèque tunisienne, le Musée Dar Cheraït, l’Institut Culturel Italien, la Cinémathèque de Bologne ainsi que plusieurs institutions universitaires et culturelles locales.

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Cinéma tunisien : L’ARP adopte la création d’un Fonds d’encouragement à l’investissement audiovisuel

Von: walid
02. Dezember 2025 um 11:47

L’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a adopté, lors d’une séance plénière tenue samedi au palais du Bardo (Tunis), la création d’un Fonds d’encouragement à l’investissement dans le secteur cinématographique et audiovisuel, prévu par l’article 61 amendé, avec 74 voix pour, 9 abstentions et 40 voix contre.

Selon le texte adopté, ce fonds sera logé auprès du Centre national du cinéma et de l’image (CNCI), installé à la cité de la culture à Tunis. Il financera la modernisation des infrastructures cinématographiques, la création de nouvelles salles dans les régions et la réhabilitation des espaces existants afin de renforcer le réseau de diffusion à l’échelle nationale.

Le mécanisme de fonctionnement du fonds prévoit également la mise en place de studios de tournage modernes et de laboratoires numériques spécialisés, ainsi que le développement des industries techniques du cinéma. Il vise aussi à attirer des productions étrangères en Tunisie et à moderniser les procédures administratives liées aux autorisations de tournage pour les opérateurs nationaux et internationaux.

Le fonds soutiendra par ailleurs la production cinématographique tunisienne, la formation de scénaristes, réalisateurs et techniciens, ainsi que l’organisation de festivals nationaux et internationaux. La préservation du patrimoine cinématographique et audiovisuel figure également parmi ses priorités, à travers le renforcement des mécanismes d’archivage.

Le financement du fonds reposera sur une contribution de 1,75 % du chiffre d’affaires des distributeurs de services Internet et des entreprises soumises à la redevance sur les télécommunications, ainsi qu’une redevance de 1 % sur l’importation d’équipements numériques. A cela s’ajouteront les recettes de la publicité audiovisuelle, la billetterie des salles et les dons prévus par la législation.

La gestion du fonds sera confiée au CNCI dans le cadre d’une convention avec le ministère des Affaires culturelles, avec l’allocation de 50 % au mécanisme de garantie de prêts destiné aux entreprises du secteur cinématographique et audiovisuel.

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JCC 2025 : 42 films de 19 pays se disputent les Tanit dans les trois compétitions officielles

02. Dezember 2025 um 09:30

Les Journées cinématographiques de Carthage ont révélé la liste intégrale des films retenus pour leur 36ᵉ édition. Quarante-deux œuvres arabes et africaines concourront dans les catégories documentaires, fictions et courts-métrages, avec une présence tunisienne affirmée.

Panorama général

À quelques jours de la traditionnelle rencontre avec la presse prévue le 4 décembre au Théâtre des Jeunes Créateurs, le comité d’organisation des JCC a dévoilé la sélection complète de sa 36ᵉ édition, qui se tiendra du 13 au 20 décembre 2025.

Cette édition rassemble 42 films provenant de 19 pays, répartis dans trois compétitions majeures. Neuf œuvres tunisiennes figurent parmi les prétendants aux Tanit.

La sélection couvre une large aire géographique, depuis l’Afrique sahélienne et australe jusqu’au Levant et la péninsule Arabique, confirmant la dimension panafricaine et arabe du festival.

Longs métrages documentaires : 12 œuvres en lice

Douze documentaires issus de huit pays entreront en compétition pour le Tanit d’or, avec trois productions tunisiennes. Les thèmes abordés vont du rapport au territoire aux interrogations mémorielles, en passant par des récits intimes ou politiques.

Films sélectionnés :

  • L’homme qui plante les baobabs, K. Michel Zongo (Burkina Faso)
  • Home Movie on Location, Viola (Égypte)
  • The Other… Raeburn, David-Pierre Fila (République du Congo)
  • Løvene ved elven Tigris, Zaradasht Ahmed (Irak)
  • Tales of the Wounded Land, Abbas Fadhel (Irak)
  • Cinema Kawakeb, Mahmoud Al Massad (Jordanie)
  • Five Eyes, Karim Debbagh (Maroc)
  • Cimetière de vie, Mamadou Moustapha Gueye (Sénégal)
  • Liti Liti, Mamadou Khouma Gueye (Sénégal)
  • Le Para-dis, Majdi Lakhdar (Tunisie)
  • Notre Semence, Anis Lassoued (Tunisie)
  • On The Hill, Belhassen Handous (Tunisie)

Longs métrages fiction : 14 films représentant 11 pays

Quatorze fictions concourront pour le Tanit d’or, reflétant une palette de styles et de dramaturgies. Trois réalisateurs tunisiens se distinguent dans cette catégorie : Erige Sehiri, Kaouther Ben Hania et Amel Guellaty.

Films sélectionnés :

  • My Father’s Shadow, Akinola Davis Jr (Nigeria)
  • Cotton Queen, Suzannah Mirghani (Soudan)
  • Irkalla : Gilgamesh’s Dream, Mohamed Jabarah Al-Daradji (Irak)
  • Diya, Achille Ronaimou (Tchad)
  • Hijra, Shahad Ameen (Arabie Saoudite)
  • My Father’s Scent, Mohamed Siam (Égypte)
  • Sink, Zain Duraie (Jordanie)
  • Roqia, Yanis Koussim (Algérie)
  • Katanga : La danse des scorpions, Dani Kouyaté (Burkina Faso)
  • The Stories, Abu Bakr Shawky (Égypte)
  • Once Upon a Time in Gaza, Arab & Tarzan Nasser (Palestine)
  • Promis le Ciel, Erige Sehiri (Tunisie)
  • La Voix de Hind Rajab, Kaouther Ben Hania (Tunisie)
  • Where the Wind Comes From, Amel Guellaty (Tunisie)

Courts-métrages : 16 films issus de 10 pays

La compétition des courts-métrages réunit seize œuvres, avec des signatures confirmées et de jeunes réalisateurs émergents. Trois films tunisiens y sont engagés.

Films sélectionnés :

  • ELLE, Michèle Tyan (Liban)
  • Aasvoëls, Dian Weys (Afrique du Sud)
  • Breaking Out of Ali and Maher’s Base, Abanoub Youssef (Égypte)
  • Gardiennes de nuit, Nina Khada (Algérie)
  • A Última Colheita, Nuno Bonaventura Miranda (Cap-Vert)
  • 32 B, Mohamed Taher (Égypte)
  • Rafet, Khadidiatou Sow (Sénégal)
  • Café?, Bamar Kane (Sénégal)
  • Coyotes, Said Zagha (Palestine)
  • Intersecting Memory, Shayma Awawdeh (Palestine)
  • Une Mémoire en Ruine, Mathias Noussougnon (Togo)
  • Oranges Road, Sami Farah (Syrie)
  • She’s Swimming, Liliane Rahal (Liban)
  • Sursis, Walid Tayaa (Tunisie)
  • Tomates maudites, Marwa Tiba (Tunisie)
  • Le fardeau des ailes, Rami Jarboui (Tunisie)

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CIFF 2025 – « Complaint No. 713317 » : un réfrigérateur, un couple, une lutte pour la dignité

01. Dezember 2025 um 09:35

Présenté en première mondiale dans la section « Horizons du cinéma arabe » de la 46ᵉ édition du Festival international du film du Caire, Complaint No. 713317, premier long métrage du jeune réalisateur égyptien Yasser Shafiey, prouve qu’un beau film peut naître d’un incident domestique minuscule. Pas de grands décors, pas de distribution pléthorique, pas de récit spectaculaire : un appartement modeste à Maadi, un couple de retraités, un réfrigérateur qui ne ferme plus. À partir de là, Yasser Shafiey déploie un film qui est à la fois chronique conjugale, satire sociale, portrait du vieillissement et réflexion têtue sur la dignité. Le film a remporté le Prix du Meilleur scénario lors de cette 46ᵉ édition, consacrant la finesse de son écriture et la précision de son observation du quotidien.

Le point de départ est presque risible : la porte du congélateur qui refuse de se fermer, un peu de glace qui bloque, un mari qui s’obstine à « dépanner » lui-même l’appareil, et qui finit par percer la paroi. Sauf que dans cet univers clos, ce détail devient la première fissure visible d’un ensemble déjà fragilisé : le couple, l’économie domestique, le rapport au temps, la manière dont chacun se perçoit dans ce duo à la fois solide et vacillant.

Yasser Shafiey s’inspire d’une expérience personnelle, enregistrée à l’époque sous le numéro de dossier « 71 ». En allongeant ce nombre pour en faire Complaint No. 713317 (Réclamation N°713317), il inscrit d’emblée l’histoire dans la logique d’un système qui multiplie les chiffres, les dossiers et les plaintes, jusqu’à vider les individus de leur énergie. Le numéro n’est pas qu’un détail administratif : il dessine le cercle sans fin des réclamations, des attentes, des promesses non tenues, et de la lassitude.

Dans cet appartement de Maadi, Magdy et Sama vivent ensemble depuis trente-sept ans. Leur intérieur raconte leur histoire : meubles un peu datés, objets accumulés, souvenirs d’un autre temps, ordinateur poussiéreux, bibelots et magnets en forme de légumes accrochés sur la porte du frigo. Tout donne l’impression d’un lieu figé, à la fois refuge et cage. C’est un espace où l’on sent la vie passée – les années de travail, les repas, les fêtes – mais où l’avenir semble réduit à la répétition des mêmes gestes, des mêmes phrases, des mêmes silences.

Le film s’attache à ce couple dans ce moment précis de bascule : Sama s’apprête à partir à la retraite, avec une prime qui dépasse ce que Magdy touche lui-même. Ce simple décalage financier ouvre une brèche dans la perception que Magdy a de lui-même. Pour lui, qui a déjà vu son rôle social diminuer au fil des années, le fait que sa femme reçoive davantage devient une blessure sourde, difficile à nommer. Le scénario ne l’explicite pas lourdement, mais tout ce qui se joue autour du réfrigérateur en porte la trace : quand Magdy insiste pour prendre les décisions, pour régler le problème, pour assumer le rapport avec l’entreprise de maintenance, c’est autant une question de fierté intime qu’une affaire domestique.

Sama, elle, est dans une autre logique. Elle veut que la maison fonctionne, que les choses soient simples, que l’on répare ou que l’on remplace, mais qu’on cesse d’envenimer la situation. Elle a porté le foyer pendant des années, elle a assumé la gestion pratique de la vie quotidienne, et elle aspire à une retraite apaisée. Le film capte très précisément cette asymétrie : lui veut prouver qu’il existe encore, qu’il compte, qu’il est capable de « tenir tête » ; elle voudrait simplement que l’on retrouve un minimum de confort, sans y sacrifier les derniers fragments de paix conjugale.

Le réfrigérateur devient ainsi bien plus qu’un objet. C’est un miroir implacable qui renvoie au couple son propre état : rempli de restes, de choses qu’on accumule sans jamais tout vider, d’habitudes qu’on garde par automatisme. Quand la porte ne ferme plus, ce n’est pas seulement le froid qui s’échappe, c’est tout ce qui était maintenu en place par l’inertie qui commence à se dérégler. À partir de cette panne, les sentiments étouffés, les jalousies muettes, les frustrations anciennes trouvent un chemin vers la surface.

CIFF 2025 - Complaint No. 713317

Ce qui frappe, c’est la façon dont Yasser Shafiey filme la relation de Magdy et Sama sans jamais la juger ni la caricaturer. Il montre un couple pris entre amour et lassitude, solidarité et rancune, tendresse et exaspération. Ils continuent à se préparer du thé, à se parler à voix basse, à se regarder parfois avec une forme de douceur, mais le moindre incident peut provoquer un éclat. Une remarque maladroite, un mensonge de fierté autour de l’argent versé au réparateur, une allusion à la retraite, et le ton monte. Ces disputes ne sont pas spectaculaires, mais elles sont précises : ce sont des conflits miniatures où affleurent des décennies de compromis non-dits.

L’une des forces du film est de montrer que Magdy et Sama, malgré tout, restent liés. Leurs gestes parlent plus que leurs mots. Ils s’énervent, se blessent, se crispent, mais ne se quittent pas. Cette ambivalence, cette impossibilité de se séparer autant que celle de continuer comme avant, est au cœur du film.

L’autre grand axe du film, indissociable du premier, est le combat obstiné de Magdy contre l’entreprise de maintenance. Dès qu’il appelle pour demander une réparation, il entre dans un théâtre de l’absurde où chaque interlocuteur est un acteur d’un système qui promet beaucoup et accomplit peu. Le technicien qui se présente à la maison – interprété par Mohamed Radwan – est le prototype du réparateur hâbleur qui noie ses lacunes sous un flot de récits invraisemblables : il se dit ingénieur brillant, spécialisé en soudures, ancien salarié à l’étranger, marié à une Américaine, presque héros de guerre. À chaque visite, il raconte une histoire plus extravagante que la précédente, promet une solution définitive, repart en laissant la situation à peine modifiée.

Ce personnage n’est pas seulement un ressort comique. Il incarne une forme de discours qui s’est substitué au service réel : des mots, des promesses, une mise en scène de compétence qui masque l’incapacité ou le désintérêt. La patronne de l’entreprise, elle, apparaît polie, souriante, presque maternelle, mais parfaitement inefficace. Elle écoute, rassure, promet de « suivre le dossier », de « faire le nécessaire », sans que rien ne change vraiment. On devine qu’elle a vu défiler des centaines de clients comme Magdy, et qu’elle a appris à désamorcer leur colère par un mélange de gentillesse et de vide.

Face à ce système, Magdy refuse de se taire. Il ne se contente pas de se plaindre une fois ou deux. Il rappelle, il insiste, il argumente, il demande des comptes, il exige des explications. Lorsqu’il comprend qu’on se moque de lui, il décide de porter l’affaire plus loin : il saisit une association de défense des consommateurs, il cherche à formaliser sa plainte, à la traduire en langage administratif pour qu’elle soit entendue. Ce n’est plus une simple histoire de frigo : c’est le moment où un homme qui a passé sa vie à accepter, à encaisser, à minimiser, décide enfin de ne plus laisser passer.

C’est là que le film touche à quelque chose de profondément politique, sans jamais sortir du cadre intime. Le combat de Magdy n’a rien d’héroïque au sens traditionnel : il ne renverse aucun système, ne provoque aucune révolution. Mais pour lui, c’est une question de dignité. Il l’a dit lui-même : il a vécu, il s’est approché de la mort sans jamais « prendre son droit », sans jamais obtenir ce qu’il estimait juste. Cette fois, il ne lâchera pas. Même si le prix à payer est lourd dans sa relation avec Sama, même si tout le monde autour de lui le trouve excessif ou pénible, il veut que justice soit faite – pour un appareil qu’il a payé et qui doit être réparé comme promis.

Ce double mouvement – la fissure du couple et la révolte de Magdy – est porté par deux interprètes qui donnent au film sa densité émotionnelle. Mahmoud Hemida fait de Magdy un homme à la fois ridicule et très digne. Ridicule, parce qu’il s’acharne sur un frigo comme si sa vie en dépendait ; digne, parce que derrière cet acharnement se devine une existence entière de renoncements, de petites humiliations avalées. Il joue sur les nuances : une colère brusque, une voix qui tremble, un regard fuyant, un sourire satisfait quand il croit reprendre le dessus sur le réparateur ou sur la responsable de l’entreprise. Mahmoud Hemida a été parfait dans ce rôle. Il a incarné Magdy avec une justesse bouleversante, lui donnant une âme, une profondeur humaine rare. C’est sans doute l’un de ses plus beaux rôles, un personnage qu’il habite de l’intérieur, sans artifice, avec une sincérité désarmante.

Sherine, en face, compose une Sama d’une discrétion trompeuse. Elle n’est pas seulement l’épouse patiente qui subit les humeurs de son mari. Elle a ses propres blessures, ses propres frustrations : le sentiment d’avoir donné sa vie au travail et au foyer, pour se retrouver au seuil de la vieillesse dans un appartement qui tombe en morceaux, dans un couple qui se dispute à propos d’un congélateur. Elle essaie de tempérer, de négocier, de ménager les uns et les autres, mais elle finit elle aussi par exploser, par dire qu’elle en a assez des mensonges, des faux-semblants, des excuses. La relation avec leur fils, qui esquive les invitations et se dérobe derrière le prétexte du travail, ajoute une couche de solitude : ce sont deux parents qui se retrouvent face à face, sans plus personne pour les détourner d’eux-mêmes.

La mise en scène de Yasser Shafiey accompagne ces mouvements avec une grande maîtrise. La caméra reste souvent à distance, dans des plans fixes, comme si l’appartement lui-même observait ses habitants. Les cadres sont construits de manière presque théâtrale : une porte entrebâillée, un couloir étroit, un fauteuil qui occupe le centre de l’image, le frigo qui revient sans cesse, comme un personnage silencieux. La lumière, souvent douce et légèrement jaunie, donne à l’ensemble la patine des lieux qui ont beaucoup vécu. Rien n’est tape-à-l’œil, tout est au service du regard que le film porte sur ce couple et sur ce combat.

L’ambiance évoque parfois celle de Villa 69 d’Ayten Amin : même huis clos habité par la mémoire, même lenteur méditative, même atmosphère d’enfermement à la fois physique et intérieur. On y retrouve cette sensation du temps suspendu, où les objets et les murs deviennent des témoins du passé.

CIFF 2025 - Complaint No. 713317
Complaint No. 713317 –
Sama (Sherine), Magdy (Mahmoud Hemeda) et le réparateur (Mohamed Radwan).

L’humour, lui, naît de la collision entre cette mise en scène posée et l’absurdité des situations. Quand le réparateur, sûr de lui, expose ses exploits imaginaires, ou quand la patronne du service fait mine de tout comprendre sans rien résoudre, le film touche à une forme de comédie noire très reconnaissable, ancrée dans la réalité égyptienne mais universelle dans ce qu’elle dit des rapports entre citoyens et institutions. On rit, mais c’est un rire teinté de malaise, car on sait que ce type d’histoire pourrait arriver à n’importe qui.

Au fil du récit, le numéro de la plainte – Complaint No. 713317 – prend tout son sens. Ce n’est pas seulement le titre d’un dossier ; c’est le signe d’une série infinie de cas similaires, empilés dans des archives que personne ne consulte jamais. Yasser Shafiey joue avec cette idée de boucle : les démarches se répètent, les interlocuteurs changent sans que rien n’évolue, les promesses se renouvellent au même rythme que les déceptions. Ce mouvement circulaire se retrouve dans le motif visuel de la porte du réfrigérateur, tantôt entrouverte, tantôt bloquée, tantôt enfin réparée – du moins en apparence.

La dernière image, où l’on voit Magdy et Sama enlacés, reflétés dans cette même porte, dit à la fois la victoire et ses limites. Oui, Magdy a tenu bon, il a obtenu quelque chose. Oui, le couple se retrouve, au moins pour un instant, dans un geste de tendresse. Mais ils restent enfermés dans ce cadre étroit, dans ce décor qui les contient, avec les mêmes murs, les mêmes meubles, les mêmes blessures. La vie continuera, avec d’autres pannes, d’autres attentes, d’autres frustrations.

Complaint No. 713317 reste longtemps en tête après la projection parce qu’il conjugue plusieurs lignes de force sans en sacrifier aucune : le portrait très fin d’un couple en fin de parcours ; l’observation précise d’un système de services et de bureaucratie qui use les individus ; et le récit d’un homme qui, tardivement, décide de refuser l’injustice, même minuscule, qui lui est faite. Le réfrigérateur n’y est jamais seulement un objet : il est le condensé d’une vie de compromis, le lieu où se joue ce qui reste de fierté, de colère et d’amour.

Yasser Shafiey signe ainsi un premier film où la comédie de l’absurde et la douleur du réel cohabitent, où l’intime et le social se répondent. À travers Magdy et Sama, il raconte tous ces couples qui ont vieilli ensemble en silence, et tous ces citoyens qui, un jour, décident de ne plus se laisser marcher sur les pieds – fût-ce pour une simple réparation.

Neïla Driss

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JCC 2025 – Hommage à Claudia Cardinale et Walid Chmait

26. November 2025 um 15:30

Les Journées Cinématographiques de Carthage, dans leur 36ᵉ édition, célèbrent cette année deux figures emblématiques du 7ᵉ art : Claudia Cardinale, icône mondiale et fille de Tunis, et Walid Chmait, pionnier de la critique cinématographique au Liban. Deux parcours d’exception, unis par un même amour du cinéma et un profond attachement à la culture arabe.

L’hommage consacré à Claudia Cardinale revêt une dimension toute particulière. Celle que le monde entier connaît comme l’icône des films de Visconti, Fellini ou Leone est honorée dans le pays qui l’a vue naître et auquel elle n’a jamais cessé d’être attachée. Son histoire cinématographique commence et s’achève en Tunisie, entre fidélité, mémoire et émotion.

Trois projections accompagnent cet hommage : Les Anneaux d’or (1956) de René Vautier et Mustapha El Fersi, Claudia Cardinale : La plus belle Italienne de Tunis (1994) de Mahmoud Ben Mahmoud, et Claudia Cardinale : La Tunisie… splendeur et beauté (2025) de Lotfi Bahri. Trois œuvres qui racontent, chacune à leur manière, une histoire d’amour durable entre une femme et sa terre natale.

JCC 2025 
Claudia Cardinale

C’est en Tunisie, au cœur de Tunis, que tout a commencé. Adolescente, Claudia Cardinale y remporte le concours de “la plus belle Italienne de Tunis”, organisé par l’ambassade d’Italie. Ce prix lui ouvre les portes du cinéma : elle tourne alors son tout premier film, Les Anneaux d’or, réalisé en partie à Sidi Bou Saïd. Ce court métrage, produit par le Centre National du Cinéma Tunisien, fut le point de départ d’une carrière exceptionnelle. De ce tournage, elle gardera toujours une tendresse particulière — celle d’une jeunesse tunisienne bercée par la lumière, la langue arabe et les ruelles familières de sa ville natale.

Des décennies plus tard, Claudia Cardinale continue de revenir en Tunisie, de s’y ressourcer et d’y tourner. Son dernier film, L’Île du pardon (2022) de Ridha Behi, la ramène une fois encore à ce pays qu’elle n’a jamais quitté de cœur. Entre ce premier rôle à Sidi Bou Saïd et ce dernier tournage à Djerba, c’est toute une vie de fidélité et d’amour qui se dessine — celle d’une artiste qui, tout en appartenant au monde, n’a jamais cessé d’appartenir à la Tunisie.

En lui rendant cet hommage, les Journées Cinématographiques de Carthage saluent non seulement une star internationale, mais aussi une fille de Tunis, symbole d’un attachement indéfectible et d’un lien vivant entre la Tunisie et le cinéma mondial.

JCC 2025
Walid Chmait

La même édition rend également hommage à Walid Chmait, pionnier de la critique cinématographique au Liban et figure respectée du 7ᵉ art arabe, à travers la projection du documentaire Walid Chmait, une vie au cœur du cinéma, réalisé par son fils Selim Saab Chmait. Un hommage sobre et juste, à l’image d’un homme qui a consacré sa vie à faire aimer le cinéma et à transmettre sa passion.

Neïla Driss

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CIFF 2025 – Namir Abdel Messeeh, l’intime en partage : « La vie après Siham »

26. November 2025 um 12:00

Un voyage à travers les festivals

Présenté pour la première fois à Cannes, dans la sélection de l’ACID, La Vie après Siham de Namir Abdel Messeeh a depuis entamé un long parcours international. Arrivé en Égypte, à El Gouna, le film a remporté deux distinctions – le Prix du meilleur documentaire et celui du meilleur documentaire arabe – avant d’être présenté hors compétition au Festival international du film du Caire, lors de sa 46ᵉ édition (12 au 21 novembre 2025), dans la section « Projections spéciales ».

D’une enfance entre Paris et l’Égypte à une œuvre profondément intime

Ce film profondément personnel, à la fois journal de deuil, geste de fidélité et exploration de la mémoire, prolonge la démarche d’un auteur qui, depuis ses débuts, n’a cessé de sonder la frontière entre la vie et le cinéma. Né à Paris en 1974 dans une famille copte égyptienne, formé à la FEMIS, Namir Abdel Messeeh a toujours fait dialoguer ses deux mondes : la France où il a grandi et l’Égypte dont il porte la mémoire.

Toi, Waguih et La Vierge, les Coptes et moi : les premières pierres d’un triptyque

Après le court métrage Toi, Waguih (2005), consacré à son père, il s’était fait connaître avec La Vierge, les Coptes et moi (2011), sélectionné à Cannes à l’ACID et récompensé du Tanit d’argent documentaire aux Journées Cinématographiques de Carthage en 2012. Ce film, à la frontière du documentaire et de la fiction, posait déjà les questions qui traversent toute son œuvre : comment filmer ses proches, comment faire du cinéma avec eux, sans les trahir ni les enfermer.

Filmer les siens pour interroger la foi, le cinéma et l’héritage

Dans La Vierge, les Coptes et moi, Namir Abdel Messeeh filmait déjà sa propre famille. Parti dans le village de ses parents, il interrogeait les récits d’apparitions de la Vierge Marie tout en filmant sa mère, ses oncles, ses tantes et les habitants du village. En cherchant à comprendre ces phénomènes, il signait un film à la fois spirituel, drôle et lucide, où la quête de vérité religieuse se mêlait à une réflexion sur le cinéma lui-même. En mêlant documentaire et reconstitution, sérieux et humour, il s’y mettait déjà en scène, interrogeant sa place de cinéaste, de fils et d’héritier. Ce geste intime, où l’autodérision côtoie la tendresse, annonçait déjà La Vie après Siham.

La Vie après Siham, un récit de deuil et de transmission

Ce nouveau film s’inscrit dans cette même continuité. Huit ans après la mort de sa mère, Siham, puis celle de son père, Waguih, le cinéaste se retrouve face à un double deuil et à une promesse : raconter leur histoire. De ce serment naît un film de mémoire et de transmission, où le réalisateur convoque des images d’archives, des séquences filmées en Égypte et en France, et des extraits de films de Youssef Chahine pour tisser un récit à la fois intime et universel.

Au Caire, l’émotion d’un retour symbolique

Lors de la projection au Caire, l’émotion était palpable. Pour Namir Abdel Messeeh, montrer ce film dans le pays de ses parents avait une résonance particulière : « C’était la première fois que je voyais la version arabe de La Vie après Siham avec le public égyptien, et c’était angoissant pour moi », confie-t-il. « Chaque projection a été différente : en Égypte, en Espagne, en Allemagne, en France… À chaque fois, les réactions changeaient. »

Il se souvient : « Au Caire, le public a applaudi à plusieurs reprises, en plein milieu du film. C’est quelque chose que je n’avais jamais vécu ailleurs. En Allemagne, les gens m’ont dit qu’ils avaient aimé, mais leurs émotions restaient plus silencieuses. Et c’est ça, la force du cinéma : chaque projection a sa propre vie, influencée par le lieu, la taille de la salle, le nombre de spectateurs. »

Cette projection au Caire, entre compatriotes, amis et proches, avait valeur de retour symbolique. « Je suis né en France, mais je suis égyptien. Mon père et ma mère sont restés égyptiens même après avoir émigré en France. Ils n’ont jamais renié leur égyptianité, même s’ils ont été enterrés là-bas. Et moi aussi, je suis égyptien. C’est pour cela que j’ai voulu raconter cette histoire, cette hadouta masreya (clin d’œil à Youssef Chahine ?!). »

Une rencontre avec les étudiants : pourquoi et comment filmer ?

Après la projection, le réalisateur a animé une rencontre intitulée La vie après Siham : construire la mémoire à travers le documentaire (étude de cas), essentiellement destinée aux étudiants en cinéma, où il a livré un témoignage dense, empreint d’humour et d’émotion, sur sa relation au cinéma, à ses parents et à lui-même.

CIFF 2025
Namir Abdel Messeh

Des tournages insatisfaisants à la découverte de son véritable sujet

« J’ai étudié le cinéma en France et pendant mes études, j’ai tourné des films, mais je n’en étais jamais satisfait. J’ai compris qu’un film doit dire quelque chose de toi. Les miens ne disaient rien de moi. » Cette réflexion, à la fois simple et décisive, marque pour lui un tournant.

Il raconte ses débuts : « Même après l’école, j’ai fait un court métrage, mais je n’étais toujours pas content. J’ai senti qu’en filmant, j’avais face à moi quarante personnes que je ne connaissais pas. J’avais pris du temps pour écrire un scénario, et je me trouvais face à des étrangers, comme s’ils me volaient quelque chose. J’ai compris qu’il fallait que je filme des gens que j’aimais, des gens que je connaissais. »

Cette prise de conscience change son regard : « J’ai arrêté de me demander : qu’est-ce que je veux raconter ? et j’ai commencé à me demander : qui est-ce que je veux filmer ? La réponse m’est venue instinctivement : je voulais filmer mon père. »

Filmer le père : un refus, dix mois de supplications et un film de relation

Son premier film sur son père est né presque par hasard. « J’avais déposé un projet à un concours et je l’avais oublié. Un jour, j’ai appris que j’avais gagné un prix de 10 000 euros, à condition de livrer le film en un an. J’ai voulu faire un court documentaire, d’une trentaine de minutes. Mon père a refusé. Il ne comprenait pas pourquoi je voulais le filmer. »

Dix mois de discussions et de supplications s’ensuivent. « J’ai dû le supplier. Et puis, j’ai compris que je devais trouver un moyen de filmer quelqu’un qui refusait d’être filmé. La seule solution, c’était que le film soit sur nous deux. Notre relation devant la caméra. Je devais être là pour le rassurer. »

Cette décision donne naissance à un film d’une nature nouvelle : non plus un portrait, mais une conversation. Le cinéma devient une manière de recréer un lien. « C’est à ce moment-là que j’ai compris que le cinéma pouvait être un moyen d’aimer, de comprendre. »

Sa mère, apprenant le projet, ne cache pas sa jalousie. « Elle m’a dit : pourquoi lui et pas moi ? » racontera-t-il en souriant. Cette remarque, à la fois drôle et sincère, deviendra le point de départ d’un autre film, et d’une réflexion sur la manière de filmer ceux qu’on aime.

Un père cultivé, des désaccords de cinéma et une larme fondatrice

« Ma relation avec les films est plus importante qu’avec les êtres humains. Un film parle, un film communique, un film est émotions… un film est vivant. »
C’est à ce moment précis qu’il découvre ce qu’est un réalisateur : « Et c’est ainsi que j’ai compris qu’il existe quelqu’un qui s’appelle le réalisateur. C’est lui qui raconte cette histoire. Pourquoi et comment ? Un film est le portrait d’un réalisateur. C’est ce qui m’a fait aimer les films. »

Namir Abdel Messeeh évoque souvent son père avec admiration. « Mon père était très instruit : il lisait beaucoup, allait au théâtre, au cinéma. Mais nous n’aimions pas les mêmes films. »

Cette différence de goût nourrit leurs échanges, parfois leurs désaccords. « Il n’a pas aimé La Vierge, les Coptes et moi. Il ne comprenait pas qu’on puisse faire un film pour raconter une personne, ou une famille, ni comment ce film avait pu obtenir des prix. »

Et pourtant, c’est une scène muette de ce père cultivé et pudique qui devient le cœur de son inspiration. « Le jour de sa retraite, il devait faire un discours. Il n’avait pas pu. Une collègue a pris la parole à sa place. J’ai commencé à filmer notre famille et tous nos événements très tôt. Donc ce jour-là, j’étais là, je filmais la fête. Et j’ai filmé une larme qui a glissé sur sa joue. C’est à ce moment-là que j’ai compris que je voulais faire un film pour qu’il puisse dire ce qu’il n’avait jamais dit. »

CIFF 2025
Namir Abdel Messeh
CIFF 2025 – Namir Abdel Messeh lors de la rencontre avec les étudiants

La peur du ridicule et la décision d’assumer sa famille à l’écran

Le réalisateur, en préparant La Vierge, les Coptes et moi, et alors qu’il devait aller filmer sa famille dans leur village, décide d’appeler sa mère via Skype. « J’ai demandé à mon équipe de filmer la conversation sans qu’elle le sache. Elle posait plein de questions. Quand elle a su que j’allais filmer ma famille, elle s’est mise en colère. Elle m’a dit qu’elle allait leur dire de refuser de tourner, qu’elle porterait plainte contre moi s’il le faut. »

« Je ne savais plus quoi faire et je regarde le caméraman, il riait. »

Ce moment, aussi drôle que violent, révèle une peur enfouie. « Ma mère avait peur que les gens se moquent de sa famille, de leur pauvreté, de leur ignorance. » En revoyant les rushs, il comprend que cette peur est elle-même un sujet, et décide de garder cette scène pour son film. « J’ai pris cette responsabilité et j’accepte la réaction des spectateurs. Peut-être que certains se sont moqués d’eux. Peut-être que certains les ont détestés. Mais d’autres les ont aimés, parce qu’ils ont senti que moi, je les aimais. »

Pour lui, filmer quelqu’un, c’est avant tout une question d’amour. « J’ai demandé à Yousry Nasrallah s’il aimait ses acteurs. Il m’a répondu : oui, comme un père. Cet amour est essentiel. Moi, je ne peux filmer une personne que si je l’aime. »

« Je reviens à la question : pourquoi tu fais des films ? Si c’est pour que les gens t’aiment, c’est ton droit. Moi, je veux aimer mes films et les spectateurs sont libres d’aimer ou pas ! »

Cannes : une projection éprouvante, entre fatigue et panique

Quand il évoque La Vie après Siham, la voix du réalisateur se charge d’émotion. « Pendant la projection à Cannes, j’ai pleuré. C’était dans la section ACID, il y avait quatre cents exploitants de salles. C’était le troisième jour, tout le monde était fatigué. »

Il se souvient d’une scène censée être comique : personne n’a ri. Aucune réaction. Aucune réaction jusqu’à la fin. « J’étais assis, et je commençais à paniquer. J’avais ouvert les portes de chez moi et j’y ai invité des inconnus, et je me disais que je ne voulais plus les voir chez moi. Je pleurais aussi parce que pendant dix ans, j’avais travaillé mon film, il était mon bébé et en même temps je sentais ma mère avec moi. Mais c’était fini, je perdais le contrôle de mon film. Je devais accepter que c’était fini : ma mère est morte et le film ne m’appartient plus. Je devais dire adieu à un process, comme si j’avais un enfant qui venait d’atteindre dix-huit ans et qu’il fallait le laisser vivre sa vie, et accepter qu’il allait prendre ses propres décisions. »

Les films de Youssef Chahine comme mémoire collective et refuge

Il en tire une leçon : « Si ton film réussit, tant mieux. Sinon, il faut comprendre les raisons de son échec et apprendre pour mieux faire ensuite. Mon premier court, que j’ai détesté, m’a appris beaucoup de choses. »

Il raconte ensuite comment est née l’idée d’utiliser des extraits des films de Youssef Chahine. « Je ne me rappelle plus exactement comment j’ai eu cette idée, mais j’ai compris que les films de Chahine font partie de notre mémoire collective. En les utilisant, je créais une connexion entre ma mère et les spectateurs. »

Pendant le montage, il réalise que montrer trop de photos de sa mère ne produirait pas l’effet espéré. « Les spectateurs ne la connaissent pas. Ces images ne les toucheraient pas. Mais tout le monde connaît les films de Chahine. Ils font partie de notre inconscient collectif et ces scènes créent un lien et expriment des émotions. »

Il se souvient d’une scène bouleversante : « Ma mère était très malade. Sa bouche était enflée, elle avait du mal à articuler. Elle m’a dit : Namir, tu avais dit que tu irais à Cannes un jour. Tu n’as encore fait aucun film qui y soit allé. Si un jour tu y vas, sache que je serai avec toi et que je te ferai un signe de la main. »

Cette scène, son monteur et lui l’ont revue plusieurs fois, mais elle était insoutenable. « Son visage était trop enflé. Je ne pouvais pas la montrer ainsi. J’ai remplacé cette séquence par des images de Chahine. Elles disaient la même chose, sans la montrer diminuée. »

Dépression, doute et nécessité d’une équipe qui croit au film

Mais La Vie après Siham n’a pas été un film facile à faire. « Après avoir commencé le tournage, j’ai fait une dépression pendant trois ans. J’ai cru que le film ne se ferait jamais. »

C’est son monteur qui l’a poussé à continuer. « Il m’a dit : il te faut un producteur et un scénariste qui croient en toi. » Namir rencontre alors une productrice passionnée, prête à défendre le projet. « Il faut quelqu’un qui ait du recul, qui comprenne ton film et qui te soutienne. »

Faire un film personnel, dit-il, demande de la force et de la patience. « Ce genre de cinéma est difficile, pas seulement pour des raisons artistiques, mais parce qu’il t’oblige à te confronter à toi-même. Il faut accepter d’être fragile. »

Un homme, sa caméra et une famille qui le prend pour un idiot

Le sujet du film, c’est celui d’un type qui, depuis toujours, filme sa famille, toujours, et sa famille le traite d’idiot. C’est comme si la caméra, depuis toujours, était sa mémoire. Ce film a été difficile à trouver. Il a fallu trouver le personnage principal et, contrairement à ce qu’on aurait pu croire, ce n’est pas Siham, c’est Namir. C’est son histoire avec la caméra depuis de très longues années, avant même l’idée de ces films.

Au Caire, devant les étudiants, il parle de cette fragilité avec une franchise rare. « La Vie après Siham est un film douloureux, mais il est aussi plein de vie. Ce genre de sentiments, on passe souvent notre existence à essayer de les éviter. Le film m’a obligé à les affronter. »
Et il conclut simplement : « Filmer, c’est aimer. C’est comprendre. C’est dire adieu sans oublier. »

S’enraciner entre l’Égypte et la France, et transmettre cet héritage

À travers ses trois films, Namir Abdel Messeeh n’a cessé de creuser un même sillon : celui de la mémoire et de l’appartenance. En filmant son père, sa mère, sa famille égyptienne, son village, puis leur souvenir, il a voulu retenir ce qui risquait de s’effacer : les gestes, les voix, les visages, la langue d’un pays quitté mais jamais perdu. Son cinéma s’enracine dans cette Égypte intérieure, transmise par ses parents. Il la porte en lui, au plus profond de son être. Et il cherche à la préserver du temps, comme s’il craignait que ses racines se diluent.

Ce travail de mémoire est aussi une manière de se construire. Français par la naissance et par la vie, égyptien par le sang et par le cœur, il relie ces deux parts de lui-même pour en faire un lieu de passage : un pont entre deux histoires, deux imaginaires, deux façons d’exister. Il documente pour se souvenir, mais aussi pour ne pas rompre la chaîne – pour que le lien continue à vivre à travers les images.

Et lorsque La Vie après Siham referme ce long chapitre de deuil et de transmission, une autre question demeure, suspendue : cet héritage qu’il a sauvé, le transmettra-t-il à son tour ? Ses enfants poursuivront-ils cette œuvre de mémoire, ce dialogue ininterrompu entre les racines et le présent, entre l’Égypte et la France, entre la vie et ce qu’elle laisse ?

Neïla Driss

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CIFF 2025 – Un voyage à travers le jeu et la mise en scène : Conversation avec Hiam Abbass

25. November 2025 um 20:27

L’après-midi tombait doucement sur l’enceinte de l’Opéra du Caire, où se déroule le Festival international du film du Caire (CIFF), lorsqu’Hiam Abbass s’est avancée sur la scène. Élégante, calme, d’une présence à la fois douce et assurée, elle imposait immédiatement cette force tranquille que l’on retrouve dans chacun de ses rôles. Il y avait dans ses gestes la maîtrise d’une comédienne, et dans sa voix cette profondeur qui capte l’attention et fait taire les bruits autour.

La rencontre, intitulée « Un voyage à travers le jeu et la mise en scène – Conversation avec Hiam Abbass », s’est tenue dans le cadre de la 46ᵉ édition du CIFF, organisée du 12 au 21 novembre 2025, et était modérée par Nahed Nasr. Quelques heures plus tard, le même jour, l’actrice palestinienne monterait sur scène pour recevoir la Pyramide d’Or en hommage à l’ensemble de sa carrière.

À cette occasion, le CIFF a également édité un ouvrage écrit par la critique Nahed Saleh, intitulé « Hiam Abbass – Cette femme-là et cette Palestinienne-ci : lecture du parcours d’une star entre art et identité », distribué à tous les festivaliers. Un titre qui résume admirablement le double regard que porte Hiam Abbass sur son parcours : celui de la femme et celui de la Palestinienne, indissociables l’un de l’autre.

Sa devise, qu’elle répète avec simplicité — « vouloir, c’est pouvoir » —, résonne à chaque étape de sa vie : du village de Galilée jusqu’à Hollywood, sans jamais rompre le lien avec le cinéma arabe ni avec la mémoire de la Palestine.

CIFF 2025
Hiam Abbass

Hiam Abbass, une actrice palestinienne au rayonnement international

Hiam Abbass est née en Palestine, dans un village de Galilée. Actrice palestinienne, elle s’est imposée au fil des décennies comme l’un des visages les plus marquants du cinéma arabe et international. Elle a tourné dans de nombreux pays arabes, mais aussi en Europe et aux États-Unis.

On l’a découverte dans des rôles qui ont fait date, notamment dans La fiancée syrienne (The Syrian Bride, Eran Riklis, 2004), Le visiteur (The Visitor, Tom McCarthy, 2007), Satin rouge (Raja Amari, 2002), Bab el Shams (Porte du soleil) (Youssry Nasrallah, 2004), Paradise Now (Hany Abu-Assad, 2005), Dégradé (Tarzan et Arab Nasser, 2015) et Gaza mon amour (Tarzan et Arab Nasser, 2020).

Dans le monde des séries, elle a conquis un nouveau public avec Succession (Jesse Armstrong, 2018–2023), fresque familiale et politique sur le pouvoir, où elle campe Marcia, figure à la fois discrète et déterminée. Elle apparaît également dans Ramy (Ramy Youssef, 2019–2023), plongeant dans l’univers d’une famille musulmane américaine et interrogeant les identités multiples.

Sur le grand écran, elle continue à lier son nom à la Palestine : elle joue dans Palestine 36, le film qui représente la Palestine aux Oscars 2026. Et sa propre histoire familiale se retrouve dans Bye Bye Tibériade (2023), très beau film réalisé par sa fille Lina Soualem, consacré au parcours de plusieurs femmes palestiniennes, entre exil, transmission et mémoire.

Hiam Abbass est aussi réalisatrice : elle a signé Inheritance (2012), long métrage tourné au sein de sa communauté en Galilée, et qui mêle fiction et mémoire familiale.

Cette position — entre cinéma arabe, cinéma européen, séries américaines et films palestiniens — donne à la conversation du Caire une profondeur particulière : c’est toute une vie d’actrice, construite loin des slogans mais au plus près des rôles, qui se dévoile.

Le rêve a commencé : le théâtre, le hakawati et la première « magie »

« Je ne sais pas où commencer », confie Hiam Abbass au début de la rencontre. Puis elle remonte le fil jusqu’à Jérusalem, où se trouvait le théâtre, El Hakawati . Depuis l’enfance, dit-elle, elle sentait que l’art, l’expression artistique, lui convenaient parfaitement, sans savoir encore par quel biais.

Étudiante, elle découvre le théâtre. On lui confie le rôle d’une mère, alors que le jeune homme qui joue son fils a son âge. La situation prête presque à sourire, mais ce qui l’intéresse, ce n’est pas cette incongruité : c’est ce qui se passe à la fin de la pièce. Quand le rideau tombe, elle découvre que la salle est en larmes : des pères, des mères, des spectateurs bouleversés. Elle ressent alors « comme de la magie ». C’est comme si quelque chose était sorti d’elle pour atteindre le public.

C’est ce moment-là, explique-t-elle, qui lui révèle la puissance de l’interprétation : « Comment traduire cela en devenant adulte ? L’artiste peut faire parvenir plein de messages au public. » Ce qu’elle vient de vivre n’est pas seulement un succès de scène : c’est la découverte d’un langage qui passe par le corps, la voix, le regard, et qui touche directement les autres.

Un village sans théâtre ni cinéma, puis la rencontre avec Michel Khleifi

Elle revient ensuite à son village de Galilée : « J’ai vécu dans un village où il n’y avait ni théâtre, ni cinéma. » Rien ne prédisposait donc cette enfant palestinienne à devenir actrice. C’est à Jérusalem, lorsqu’elle commence à travailler au théâtre, qu’un horizon s’ouvre. Elle y est à moitié artiste, à moitié employée de bureau.

Michel Khleifi arrive dans ce contexte, un peu pessimiste, se souvenant qu’il n’y a pas d’infrastructures, pas de structures professionnelles dignes de ce nom. Il demande de l’aide. Elle accepte. Il l’engage d’abord comme secrétaire de production. Puis, un jour, il lui confie un petit rôle.

Elle découvre alors la caméra, comme elle avait découvert la scène. Et là encore, quelque chose en elle reconnaît ce territoire : elle ressent la même chose que la première fois au théâtre. Le même mouvement intérieur qui va vers le public, même si cette fois-ci il est derrière la caméra. Elle comprend que c’est le chemin qui l’attend.

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Hiam Abbass

Quitter la Palestine pour respirer

Pourtant, Hiam Abbass insiste : elle n’a jamais rêvé de voyager pour « devenir actrice ». Elle a quitté son pays parce qu’elle avait besoin de respirer. « Il n’était pas facile pour une femme de s’épanouir en ces temps-là en Palestine », dit-elle. Politiquement, socialement, la société imposait des limites.

Elle raconte qu’elle avait imaginé fonder une école de cirque à Londres. L’idée, déjà, disait son désir d’inventer un espace de liberté, de jeu, de création. Mais une fois arrivée, elle comprend qu’elle a besoin d’autres expériences, de plus de liberté encore. Le voyage n’est pas un caprice : c’est la seule façon de continuer un parcours artistique qui, sur place, se heurtait à trop de barrières.

Elle le répétera plus tard, dans une formule très claire : elle n’est pas partie par « amour du monde occidental », mais parce qu’elle voulait poursuivre un chemin artistique qui, pour une femme de son époque en Palestine, était extrêmement difficile. Il lui fallait de l’air, des expériences nouvelles, des rôles impossibles à obtenir dans un pays alors très fermé.

Londres, Paris, la maternité et l’apprentissage d’une nouvelle langue

Après Londres, vient la France. « J’ai connu un homme à Londres, j’en ai été amoureuse, je l’ai épousé et je l’ai suivi à Paris pour vivre une histoire d’amour. Il est le père de mes deux filles. Je ne parlais pas un mot de français. »

À ce moment-là, son plus grand projet n’est pas un rôle, ni un film : « Mon plus grand projet à cette époque était de devenir maman. » Hiam assume pleinement ce choix. Elle veut consacrer du temps à la maternité, à ses filles, mais elle n’abandonne pas pour autant l’idée de continuer à grandir comme artiste.

Elle profite donc de cette période pour travailler sur elle-même, apprendre la langue, observer, écouter. Environ quatre ans après la naissance de Lina, elle commence à tourner en français. Entre-temps, sa deuxième fille, Mona, est née. Elle insiste sur ce point : sa vie familiale est une partie distincte de sa vie d’actrice, mais c’est une partie qui nourrit sa sensibilité, sa capacité à comprendre les personnages.

Apprendre une nouvelle langue, s’ancrer dans un autre pays, équilibrer vie personnelle et travail d’actrice : tout cela se fait sans éclat, sans discours héroïque, mais avec une persévérance continue.

Lina Soualem et Bye Bye Tibériade : faire le chemin inverse

La question se pose alors : comment réagit-on lorsqu’une fille, devenue cinéaste, demande à sa mère de revenir en Palestine pour un film ?

« Lina t’a demandé de faire le chemin inverse, de revenir en Palestine… » Hiam Abbass raconte que la décision n’a pas été facile à prendre. Lina cherchait ce qu’elle voulait dire avec ce film. La mère, elle, craignait que le projet ne se réduise à un documentaire sur sa propre vie.

Les discussions ont été nombreuses. Il fallait que Hiam comprenne que Lina ne voulait pas filmer « sa mère » comme unique sujet, mais raconter une histoire plus vaste, dans laquelle sa mère n’est qu’une pièce du puzzle, aux côtés de plusieurs femmes de la famille. Quatre femmes, quatre expériences personnelles, qui font toutes partie de la mémoire collective palestinienne.

« C’était donc un devoir pour moi de faire ce film, pour travailler la mémoire collective à travers une histoire personnelle », dit-elle. Bye Bye Tibériade, très beau film, devient ainsi non seulement un geste de cinéma, mais un geste de transmission : la fille filme la mère, mais aussi les femmes d’avant, les exils, les ruptures, les retours, les absences.

Une actrice palestinienne qui n’oublie pas le cinéma arabe

« Pourquoi avoir choisi de beaucoup travailler avec les Arabes, alors que tu avais une carrière internationale ? »

La réponse est limpide : « Si je suis palestinienne, donc arabe, comment oublier mon identité ? Il ne s’agissait pas de défendre une cause, mais c’est une partie de moi-même, de mon identité. » Elle a commencé en tant qu’actrice arabe avec le film Satin rouge de Raja Amari.

Elle raconte le travail que ce rôle exige : elle ne connaît pas le dialecte tunisien, il lui faut donc l’apprendre et le travailler jusqu’à rendre le personnage crédible à cent pour cent. « C’est du travail sérieux. Je n’aime pas ce qui est facile, au contraire, j’ai besoin de travailler, de me surpasser, de relever des défis. »

Lorsqu’on lui demande si elle a « voulu » avoir une carrière arabe ou si cela est venu par hasard, elle répond que ce n’est ni un plan de carrière ni un hasard total. Elle choisit en fonction de ce que le projet lui dit : la cause, les questions soulevées, les droits des femmes, la manière dont le personnage porte une responsabilité dans le récit.

Raja Amari, Dorra Bouchoucha et un film qui devait exister

Elle revient sur le trio formé par Raja Amari, Dorra Bouchoucha et elle autour de Satin rouge. « Nous étions trois, nous avons défié toutes les difficultés. C’était mon premier grand film, et mon premier grand rôle. »

Après la sortie du film, elle se souvient du déferlement de critiques, surtout morales, visant le sujet, le personnage, la liberté qu’il revendiquait. Mais elle insiste : ce film devait se faire et exister. C’est lui qui a relevé ses défis pour exister en tant qu’actrice, et c’est lui qui l’a fait connaître dans le monde arabe. Pour elle, c’est la première grande expérience filmique qui l’a installée dans le regard du public.

Cette aventure tunisienne en a ouvert d’autres. Avec la réalisatrice Moufida Tlatli, elle tourne Nadia et Sarra (2004), où elle interprète une mère confrontée à la liberté naissante de sa fille ; un film sensible sur la transmission et le passage de relais entre générations. Quelques années plus tard, elle retrouve Raja Amari et Dorra Bouchoucha pour Corps étranger (2016), une œuvre sur l’exil et la solitude, où elle incarne une femme déracinée vivant entre deux mondes. Deux collaborations portées, là encore, par des femmes de conviction, prolongeant le dialogue artistique et la fidélité à la parole féminine initiée avec Satin rouge.

Bab el Shams (La Porte du soleil) : un devoir envers la Nakba et la famille

À propos de Bab el Shams (La Porte du soleil) de Youssry Nasrallah, la voix de Hiam Abbass se fait plus grave. « J’ai de bonnes relations avec Youssry, et j’aime ce qu’il fait. Lorsqu’il m’a proposé La Porte du soleil, j’ai trouvé que ce film est un devoir pour nous, parce qu’il raconte la Nakba. »

Elle explique qu’en acceptant ce rôle, elle a eu le sentiment de rendre hommage à son grand-père maternel, qui a perdu sa terre, sa maison, sa vie telle qu’il la connaissait. Comme le personnage d’Om Younes, il a tout perdu. Il a perdu la raison après cette dépossession, puis il est mort. Jouer ce rôle, c’était, pour elle, assumer une partie de cette histoire et la faire exister sur l’écran.

Elle souligne que Youssry Nasrallah a su la « remplir » – faire remonter en elle des choses profondément enfouies – et les mettre au service d’un film qui est devenu très important pour la cause palestinienne, y compris à ce jour.

Le réalisateur, présent, témoigne à son tour. Il raconte qu’elle n’a pas travaillé seulement comme actrice, mais aussi comme une sorte d’assistante : elle aidait les acteurs, en particulier la Tunisienne Rim Turki, à adopter l’accent palestinien, elle corrigeait les inflexions, conseillait chacun. Il affirme que travailler avec elle, devant comme derrière la caméra, a été une véritable richesse, à la fois artistique et humaine.

Ne pas choisir un rôle par nationalité, mais par responsabilité

Interrogée sur sa manière de choisir ses rôles, Hiam Abbass décrit un double mouvement. D’abord, on vient la chercher : un réalisateur, une réalisatrice, un scénariste lui propose un projet. Ensuite, elle se pose deux questions : est-ce qu’elle peut incarner l’identité de ce personnage ? Est-ce qu’elle peut parler pour lui ?

Elle précise qu’elle n’a jamais accepté un rôle en fonction de l’étiquette nationale : égyptien, tunisien, français, américain… Ce qui l’intéresse, c’est le personnage et l’histoire, ce qu’ils portent. Elle ne veut pas « jouer pour jouer », mais « jouer pour faire parvenir un message », ou plutôt contribuer à poser des questions – qu’on y réponde ou non.

Elle insiste aussi sur la nature des œuvres qu’elle préfère : elle ne penche ni pour la facilité ni pour les récits trop simplifiés. La vie est complexe, dit-elle, et ce sont les rôles difficiles, les personnages composés, qui lui permettent de plonger dans les détails psychologiques et sociaux. Ce sont ces rôles-là qui construisent un nom, une trajectoire, et qui la poussent à se dépasser.

Pour elle, la fonction essentielle de l’artiste est là : sortir de la zone de confort, éclairer ce dont on ne parle pas, mettre en lumière ce qui est passé sous silence.

Travailler avec des réalisatrices arabes et soutenir les femmes

La modératrice lui rappelle qu’elle a travaillé avec de nombreuses réalisatrices arabes, y compris des débutantes. Elle répond simplement : « Je suis une femme, et si je ressens un lien avec un projet de femme, il est important de travailler avec les femmes. La femme arabe traverse une période difficile pour faire un film, et si je peux aider, je suis partante, mais bien sûr le projet doit me plaire et le personnage me convenir. »

Ce soutien n’est pas un slogan : il passe par la présence, l’écoute, la décision de s’engager dans des projets parfois fragiles en termes de financement, mais forts par leur nécessité artistique.

Les jeunes réalisateurs et le refus de faire passer l’argent en premier

Quand la conversation aborde son « devoir » envers la nouvelle génération, Hiam Abbass évoque les frères Tarzan et Arab Nasser. Elle raconte qu’elle a fait leur connaissance via Skype. Ils sont palestiniens, ont le même âge que sa fille. Elle ressent immédiatement une forme d’instinct maternel, mais aussi la conviction qu’ils ont quelque chose à dire, un angle de vue singulier.

Elle sait qu’ils n’ont pas de financements. « Mais je m’en fous », dit-elle. L’aspect financier n’est pas ce qui guide son choix. Ce qui compte, c’est la nécessité du film, la sincérité du regard, la dignité du projet. Elle se souvient qu’elle aussi, au début, était inconnue. Tous les jeunes, répète-t-elle, ont le droit de rêver et de réussir, et il faut les aider pour qu’à leur tour ils aident ceux qui viendront après eux.

Hiam tournera avec eux deux films, Dégradé et Gaza mon amour, qui a été diffusé en première arabe lors de la 42ᵉ édition du CIFF, où il remportera le Prix du meilleur film arabe et une mention spéciale du jury de la compétition internationale.

Elle évoque de la même manière sa collaboration avec Ramy Youssef qu’elle ne connaissait pas lorsqu’il lui propose de tourner un pilote. Il n’avait pas de budget. Elle accepte pourtant, parce qu’elle aime le projet, parce qu’elle sent qu’il porte quelque chose. Et elle sait, dès ce moment-là, qu’elle continuera avec lui.

Plus tard, en conclusion de la session, elle résume cette attitude en une idée simple : si elle aide les jeunes comédiens et cinéastes, c’est parce qu’elle considère que cette génération doit aller de l’avant et retenir en mémoire que tout le monde, un jour, a été aidé afin que le rêve du cinéma devienne possible.

CIFF 2025
Hiam Abbass

Avant et après le 7 octobre : rester palestinienne, quoi qu’il en coûte

« En tant qu’actrice palestinienne qui travaille à Hollywood, quelle est la différence entre l’avant et l’après 7 octobre ? »

Hiam Abbass remonte la question : « La question est : comment eux se comportent avec moi ? Je n’ai jamais caché d’où je viens, ce que je pense et les rôles que je joue. »

Elle affirme que le 7 octobre n’a rien changé, en apparence, dans sa vie quotidienne d’actrice : « C’est comme 1948, avec un génocide en plus. Ils essayent de détruire notre identité. » Elle rappelle qu’elle est arrivée comme actrice palestinienne et que cela ne plaît pas à tout le monde. Il est évident, dit-elle, que certains refusent de travailler avec elle pour cette raison. Sa conclusion est nette : « En tant que Palestinienne, tant pis pour eux. »

Ce refus de se renier, cette fidélité à son identité, traverse l’ensemble de son parcours, des premiers pas sur les planches de Jérusalem jusqu’aux séries américaines, en passant par les films arabes et les œuvres sur la Palestine.

Face au racisme : le rire comme arme et comme protection

On lui demande enfin : « Comment faites-vous avec les gens qui ont des préjugés racistes ? »

Sa réponse surprend par sa simplicité : « C’est très simple, je le prends avec le rire. Je montre que je ne suis pas touchée par les remarques racistes. Je suis plus forte. »

Elle décrit ensuite ce qui se passe en face : soit la personne persiste dans son racisme, et dans ce cas elle l’ignore, elle passe son chemin, elle ne donne ni temps ni énergie à cette violence. Soit la personne commence à réfléchir, à se remettre en question. Alors, dit-elle, il devient possible de parler, d’échanger, de « avancer ensemble ».

Là encore, on retrouve sa manière de faire : ne pas nier les blessures, mais refuser de se laisser définir par elles, et déplacer la conversation vers un endroit où l’on peut questionner, discuter, partager.

Une figure palestinienne majeure du cinéma, entre force et sensibilité

Dans la lumière de cette journée au Caire, Hiam Abbass ne se présentait pas comme une légende célébrée, mais comme une femme debout. Ce qui frappe chez elle, au-delà du talent et de la longévité, c’est la force tranquille avec laquelle elle tient le cap de sa vie et de ses convictions. Elle parle avec la même fermeté que douceur, avec une lucidité qui ne connaît ni peur ni calcul.

Sa présence impose le respect non par l’autorité, mais par la droiture. Elle n’a jamais cédé à la facilité : ni dans ses rôles, ni dans ses choix, ni dans sa manière d’assumer son identité. Hiam Abbass n’a pas seulement construit une carrière, elle a construit une cohérence : celle d’une femme qui agit avec cœur, avec principes, et qui continue, film après film, à interroger ce que signifie être libre, être juste, être soi.

Car au fond, c’est cela qui la distingue : cette alliance rare entre la rigueur et la tendresse, entre la pudeur et la parole franche. Dans chaque rôle qu’elle incarne, comme dans chaque réponse qu’elle donne, on perçoit une fidélité à elle-même, à ses racines, à une idée de dignité qui ne transige pas.

Hiam Abbass n’est pas seulement une actrice palestinienne qui a conquis le monde : elle est une conscience, une voix, une présence qui rappelle que la liberté n’a de sens que lorsqu’elle s’accompagne de vérité.

Neïla Driss

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Bayouna est décédée : une icône qui s’éteint à 73 ans après un long combat contre la maladie

25. November 2025 um 10:38
Bayouna est décédée : une icône qui s’éteint à 73 ans après un long combat contre la maladie

La scène artistique algérienne, maghrébine et française est en deuil après l’annonce du décès de la célèbre actrice Bayouna, figure incontournable du cinéma et de la télévision. Hospitalisée depuis plusieurs jours à Beni Messous en raison d’une dégradation brutale de son état de santé, l’artiste de 73 ans luttait courageusement contre de graves complications respiratoires […]

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CIFF 2025 – Entre identité et interprétation : conversation avec Adam Bakri

24. November 2025 um 19:54

Un hommage chargé de sens au Caire

Lors de la 46ᵉ édition du Festival international du film du Caire (CIFF), qui s’est tenue du 12 au 21 novembre 2025, le jeune acteur palestinien Adam Bakri a été honoré au cours d’une cérémonie organisée à l’hôtel Sofitel, en présence de nombreux professionnels du cinéma et de la presse. Hussein Fahmy, président du festival, a salué la carrière de l’acteur et son parcours international, rappelant l’importance des liens entre les peuples égyptien et palestinien, et soulignant que « le Palestinien est considéré en Égypte comme une partie intégrante du tissu national ».

Visiblement ému, Adam Bakri a exprimé sa profonde gratitude envers le public égyptien, le festival et son président. Il a dit combien cet hommage venu d’Égypte, pays dont il a grandi en regardant les films, revêtait pour lui une dimension symbolique. Il a ajouté que Hussein Fahmy faisait partie de ces artistes qui avaient accompagné son enfance, et qu’entendre de sa bouche les mots « tu es égyptien » était une reconnaissance immense. Il a affirmé considérer cette distinction comme une étape précoce mais essentielle dans sa carrière, et un encouragement pour la suite.

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Adam Bakri

Une conversation autour de l’art et de la mémoire

Quelques jours plus tôt, une rencontre publique lui avait été consacrée dans le cadre des Cairo Industry Days, animée par le journaliste Sherif Nour Eldin, sous le titre Entre identité et interprétation : conversation avec Adam Bakri. Cette discussion, à la fois intime et lucide, a permis de retracer un parcours marqué par la mémoire, la conscience identitaire et une fidélité profonde à l’art comme forme de résistance.

Des débuts marqués par la filiation et la rigueur

Dans ce parcours, la filmographie d’Adam Bakri occupe une place centrale. Révélé par Omar (2013) de Hany Abu-Assad, il enchaîne avec Ali and Nino (2016), Slam (2018), Official Secrets (2019) aux côtés de Keira Knightley, If You See Something (2024) et All That’s Left of You (2025) de Cherien Dabis. Il apparaît également dans la série arabe Bab Al-Jaheem (La Porte de l’Enfer, 2021), qui marque son retour vers le monde arabe. Ces œuvres, parmi les plus marquantes de sa carrière, s’ajoutent à d’autres films et séries internationales qui ont contribué à installer son visage dans un paysage cinématographique à la fois arabe et global.

Le Caire, entre cinéma et réalité

Invité pour la première fois en Égypte, Adam Bakri a confié au public son émotion à découvrir une ville qu’il connaissait par le cinéma. « C’est ma première fois au Caire, et la ville est exactement comme je l’imaginais. J’ai grandi avec les films égyptiens et, en arrivant ici, je me suis senti comme dans un film. Cela ne fait que deux jours que je suis en Égypte, et j’ai envie de tout visiter : les pyramides, les musées… »

Une naissance marquée par la mémoire palestinienne

L’acteur, dont la carrière s’étend aujourd’hui entre le monde arabe et les États-Unis, a rappelé le lien intime qui l’unit à l’histoire de son peuple. « Je suis né le 15 mai, le jour de la Nakba. Drôle de coïncidence, peut-être, mais je ne crois pas aux coïncidences. Être né ce jour-là me rappelle, dans chacun de mes choix, d’où je viens. Certains diraient que c’est nahss, un porte-malheur, mais pas pour moi. Au contraire : c’est une responsabilité. »

Entre Haïfa et New York : la formation d’un acteur

Né à Haïfa, il a grandi dans une famille d’artistes. Son père, le réalisateur et acteur Mohammad Bakri, est l’une des grandes figures du cinéma palestinien engagé, et ses frères, Saleh et Ziad, sont eux aussi acteurs. « J’ai été élevé avec le cinéma de mon père, ses pièces, ses histoires. Mais quand on naît dans une famille où quelqu’un a déjà accompli de grandes choses, il devient difficile d’atteindre ce même niveau. »

Après Haïfa, Adam Bakri s’installe à New York pour étudier au Lee Strasberg Theatre & Film Institute. « C’était une expérience très riche et très difficile, mais aussi belle. » Seul Arabe — et surtout seul Palestinien — de son école, il travaille sans relâche : « Je devais faire plus d’efforts que les autres pour être accepté. Je ne savais pas ce que voulait dire aller à une fête. Heureusement que la voix de ma mère m’accompagnait toujours, comme une présence constante. » De ces années, il garde une leçon essentielle : « Quand tu es passionné, tu fais abstraction des difficultés. »

Une rigueur héritée du père

Son apprentissage a été marqué par un épisode décisif. « La première fois que je suis monté sur scène, je n’ai pas pu terminer la représentation. Mon père était dans la salle, je ne voyais que lui. J’ai eu une attaque de panique, je suis rentré et j’ai pleuré. » Ce soir-là, Mohammad Bakri s’assoit sur son lit et lui dit simplement : « Si tu veux vraiment jouer, tu montes demain sur scène. Sinon, tu rentres en Palestine. » Une phrase sèche mais fondatrice, qui a défini la rigueur qu’il s’imposera pour la suite.

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Adam Bakri
CIFF 2025 – Adam Bakri et son prix d’honneur

Le choc et la lumière d’Omar

Son premier rôle au cinéma, Omar (2013), réalisé par Hany Abu-Assad, le révèle au monde. Présenté au Festival de Cannes, le film remporte le Prix du Jury dans la section Un Certain Regard avant d’être distingué aux Journées Cinématographiques de Carthage en 2014 (Tanit d’or), et de faire le tour des grands festivals, avant d’être nommé aux Oscars. « J’étais jeune et un peu perdu, raconte-t-il. Ce film m’a beaucoup fatigué, et je ne sais pas encore pourquoi. Mon rêve s’est réalisé trop vite, alors que je n’étais pas prêt. Après Omar, j’ai traversé une période de dépression ; il m’a fallu du temps pour retrouver la lumière. » Certaines scènes, dit-il, « incarnaient la souffrance de mon peuple » et ont transformé sa manière de jouer.

Refuser la suprématie du blanc

Après ce succès, il signe avec une agente hollywoodienne réputée, mais leurs visions divergent. « Elle considérait les projets arabes comme sans importance et voulait que je travaille uniquement sur des productions occidentales, jusqu’à vouloir me rendre moins arabe, y compris physiquement. C’était une forme de suprématie du blanc. » Cette collaboration l’éloigne un temps du monde arabe, jusqu’à ce qu’il retrouve, grâce à son père, un rôle dans un projet régional. « C’est à ce moment-là que j’ai rompu avec cette agente. »

Un retour au monde arabe

Avec la série La Porte de l’Enfer (Bab Al-Jaheem, 2021), tournée au Liban, Adam Bakri renoue pleinement avec le monde arabe. « C’était un projet difficile, avec beaucoup d’action et de drame. » Sur ce tournage, il rencontre l’actrice libanaise Cynthia Samuel, qu’il épousera. Depuis, il partage sa vie entre New York et Dubaï. « Ces deux dernières années, j’ai rencontré beaucoup de gens intéressants et j’ai renoué avec le monde arabe que j’avais quitté. » Ce lien retrouvé l’a conduit à rejoindre un feuilleton égyptien à venir, diffusé pendant le Ramadan prochain : « Je ne peux pas en dire plus, mais c’est un projet important pour moi. »

Le cinéma égyptien comme matrice

Interrogé sur le cinéma égyptien, il s’anime : « J’ai grandi en regardant les films de l’âge d’or, surtout en noir et blanc. À un moment, je ne voyais que du cinéma égyptien, avant tous les autres. » Il cite Ciel d’enfer (Seraa’ Fel Wadi, 1954) de Youssef Chahine et Un homme dans notre maison (Fi Baytena Ragol, 1961) de Henry Barakat, et évoque avec émotion Omar Sharif : « Il a apporté au cinéma égyptien une manière nouvelle de jouer. J’ai grandi en rêvant d’être comme lui, et je suis certain qu’il a joué un rôle dans mon choix de devenir acteur. »

Affirmer son intégrité d’acteur

Parmi ses expériences internationales, il évoque Official Secrets (2019), aux côtés de Keira Knightley. Ce rôle lui vaut une nomination au Women Film Critics Circle Awards dans la catégorie « Best Screen Couple ». « Keira est une grande star, dit-il. Elle faisait partie de mes rêves de jeunesse. Travailler avec une artiste de ce niveau te rend meilleur. » Il confie que cette expérience lui a appris « des leçons précieuses sur le professionnalisme » et l’a aidé à mieux définir les rôles qu’il souhaite incarner.

Interrogé sur la manière d’éviter les stéréotypes imposés aux acteurs arabes, il répond : « Il suffit de refuser les rôles de terroristes. J’en ai refusé beaucoup, et ils ont fini par ne plus m’en proposer. Pour eux, l’Arabe est soit terroriste, soit victime. Mais on ne peut pas bien jouer un rôle qu’on n’aime pas, et je ne veux pas contribuer à donner une mauvaise image des Arabes. » Il ajoute : « Je suis privilégié, je pouvais refuser. Je n’avais pas de contraintes financières. Et le rôle d’Omar m’imposait une responsabilité : je ne pouvais pas devenir terroriste après avoir été militant. »

CIFF 2025
Adam Bakri
CIFF 2025 – Adam Bakri et Sherif Nour Eldin

Le cinéma palestinien face aux obstacles

En 2024, il tourne If You See Something, un film qu’il juge essentiel : « C’est l’histoire d’un Irakien qui essaie de vivre normalement aux États-Unis, d’aimer une femme, mais le système ne le lui permet pas, parce qu’il n’est pas blanc. »

Avec All That’s Left of You (2025), réalisé par Cherien Dabis, il signe l’un de ses projets les plus personnels. Le film, choisi pour représenter la Jordanie aux Oscars 2026, raconte l’histoire d’une famille palestinienne sur trois générations, de 1948 à nos jours. « Pour la première fois, je tourne avec mon père et mon frère », dit-il. Adam est également coproducteur du film. « C’est un jalon personnel et artistique. » Le tournage devait se dérouler en Palestine, mais le 7 octobre 2023 bouleverse tout : « J’étais arrivé le 6 pour tourner à Haïfa. Le lendemain, tout a changé. L’équipe étrangère a pris peur et est partie. Nous avons fini le tournage à Chypre et en Grèce. »

Adam Bakri reconnaît que tourner en Palestine devient de plus en plus complexe. « C’est très difficile, pas seulement pour des raisons de sécurité, mais aussi à cause des autorisations. Certains lieux sont inaccessibles, certains visas impossibles à obtenir. Malgré tout, je pense qu’il faut continuer à filmer là-bas. » Pour lui, le cinéma palestinien doit rester un témoignage : « Un bon film, c’est un film réaliste. Certains réalisateurs enjolivent la réalité, d’autres non. Moi, j’admire ceux qui restent fidèles à ce qu’ils voient, comme Michel Khalifeh. »

Le 7 octobre et la conscience du monde

Pour Adam Bakri, cet instant a marqué un tournant. « Le 7 octobre a mis la cause palestinienne sur le plan international. Je descendais dans le métro à New York et je voyais de jeunes Américains blancs porter le keffieh et lire des livres sur la Palestine. Je pense qu’il n’y aura plus de retour en arrière. » Il ajoute : « Il faut que nous puissions nous libérer de la colonisation qu’ils ont construite en nous pendant de longues années. »

Un artiste multiple

Son engagement se traduit aussi par la continuité de son œuvre. Omar sera prochainement projeté à New York lors d’un événement pour Gaza. « Le monde est aujourd’hui prêt à nous écouter. Les gens verront ce film sous un angle différent. »

Au-delà du cinéma, Adam Bakri cultive d’autres formes d’expression. « J’espère pouvoir un jour faire une exposition, j’adore peindre », confie-t-il. Il publie ses œuvres sur un compte intitulé Hay, du nom d’un personnage apparu dans un rêve. « Cinq ans plus tard, alors que je traversais une période difficile, je me suis souvenu de lui. Hay est devenu une figure que je continue de développer. »

Il écrit, lit beaucoup, y compris de la poésie, et accorde une grande importance à la culture : « Une personne doit lire. Si tu ne lis pas, tu meurs. Il faut connaître les expériences des autres, cela t’enrichit. » Longtemps passionné par les essais, il s’est tourné vers le roman après avoir découvert l’écrivain Maruani : « Il m’a ouvert à l’importance du monde intérieur et de l’imagination. Cela m’aide énormément comme artiste. »

Même les échecs, qu’il pratique en amateur, participent à cette quête intérieure : « Mon père et mes frères sont très bons, moi je débute. Mais ce jeu apprend la patience et une autre façon de penser. »

Quand Sherif Nour Eldin lui demande ce que signifie pour lui la notion de “chez soi”, il répond sans hésiter : « Mon chez-moi, ce sont des personnes, pas un lieu. C’est là où sont mes proches, mes amis, les gens que j’aime. »

Rêver, encore

Poète autant qu’acteur, Adam Bakri revendique sa part de rêveur. « Aujourd’hui, mes rêves sont plus clairs. Chaque décision que je prends, je la pèse davantage. » Sur ses aspirations : « Elles sont nombreuses. Sur le plan général, je souhaite que Gaza se relève, que les Arabes aillent mieux. Sur le plan personnel, j’aimerais continuer à accomplir des choses qui comptent. »

Il conclut avec sérénité : « La vie sans rêve est plus difficile. Avoir des objectifs clairs permet de faire des choix conscients. »

En écoutant Adam Bakri, on comprend que le cinéma n’est pas seulement un art, mais une forme de résistance tranquille, un langage pour exister autrement. Derrière chaque rôle, il cherche moins à représenter un peuple qu’à redonner un visage à l’humain. Et peut-être est-ce là la véritable puissance du cinéma arabe aujourd’hui : celle d’inviter le monde à regarder, enfin, sans détour.

Neïla Driss

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Golden Globes 2026 – Sarah Jessica Parker recevra le Carol Burnett Award

24. November 2025 um 10:25

L’actrice américaine Sarah Jessica Parker sera honorée du Carol Burnett Award (Prix Carol Burnett) lors de la cérémonie des Golden Globes 2026, qui sera diffusée sur la chaîne CBS le 8 janvier, quelques jours avant la 83ᵉ édition officielle des prix, prévue le 11 janvier. Cette distinction prestigieuse vient saluer l’ensemble de sa carrière et son apport majeur à la télévision, aussi bien devant que derrière la caméra.

Connue dans le monde entier pour son rôle emblématique de Carrie Bradshaw dans la série Sex and the City (1998-2004), Sarah Jessica Parker devient ainsi la sixième personnalité à recevoir ce prix créé en 2019 en hommage à la légendaire comédienne Carol Burnett. Elle rejoint un cercle restreint d’artistes d’exception tels que Carol Burnett elle-même, Ellen DeGeneres, Norman Lear, Ryan Murphy et Ted Danson, distingués pour leur contribution remarquable à l’histoire du petit écran.

Golden Globes 2026
Sarah Jessica Parker
Sarah Jessica Parker et son Golden Globes de Meilleure actrice en 2001

Une actrice emblématique d’une génération

Lauréate de quatre Golden Globes pour son interprétation dans Sex and the City – série également récompensée trois années consécutives dans la catégorie Meilleure comédie – Sarah Jessica Parker a durablement marqué la culture télévisuelle. Le personnage de Carrie Bradshaw, chroniqueuse new-yorkaise libre et introspective, a incarné à la fin des années 1990 une nouvelle forme de féminité à l’écran, entre indépendance, vulnérabilité et humour.

L’actrice a poursuivi cette aventure avec And Just Like That (2021-2025), la suite produite par HBO dont la troisième saison vient de s’achever, reprenant avec finesse les thèmes du vieillissement, de l’amitié et des mutations sociales contemporaines. Sarah Jessica Parker n’y est plus seulement actrice : elle y exerce également un rôle de productrice, confirmant sa place au sein de l’industrie télévisuelle américaine comme figure de création à part entière.

Golden Globes 2026
Sarah Jessica Parker
Sarah Jessica Parker à la première de « And Just like that »

Une carrière entre télévision, cinéma et théâtre

Si la télévision l’a consacrée, Sarah Jessica Parker a aussi brillé au cinéma, de Hocus Pocus et Hocus Pocus 2 à The Family Stone, Failure to Launch, The First Wives Club, Ed Wood ou Mars Attacks!. Artiste aux multiples facettes, elle a su conjuguer popularité et exigence, mêlant comédie, émotion et engagement. Elle a également reçu un Emmy Award et un Screen Actors Guild Award, confirmant la reconnaissance unanime de ses pairs.

Helen Hoehne, présidente des Golden Globes, a salué « une carrière qui incarne pleinement l’esprit du Carol Burnett Award », ajoutant : « Son impact pionnier sur la télévision et son dévouement à l’art du récit ont laissé une empreinte indélébile sur la culture populaire. »

Un hommage partagé avec Helen Mirren

Lors de cette même soirée baptisée Golden Eve, l’actrice britannique Helen Mirren se verra remettre le Cecil B. DeMille Award, récompensant une carrière exceptionnelle dans le cinéma. Cette émission spéciale, diffusée le 8 janvier à 20h sur CBS et en streaming sur Paramount+, proposera des rétrospectives, témoignages et moments marquants, retraçant le parcours des deux lauréates.

L’événement s’inscrit dans la nouvelle initiative Golden Week, une semaine entièrement dédiée aux Golden Globes à travers les plateformes du groupe Paramount, avant la grande cérémonie du 11 janvier animée par la comédienne Nikki Glaser, déjà nommée aux Golden Globes, aux Grammy Awards et aux Emmy Awards.

Une tradition d’excellence et de mémoire

Depuis sa création en 1944, les Golden Globes se sont imposés comme la grande fête du cinéma et de la télévision mondiale, attirant chaque année des millions de spectateurs dans plus de 185 pays. Le Carol Burnett Award, instauré en 2019, vise à célébrer les artistes qui, à travers leur œuvre, ont transformé la télévision et inspiré durablement le public.

De leur côté, les Cecil B. DeMille Awards, créés en 1952, ont honoré les plus grands noms de l’histoire du cinéma : Walt Disney, Audrey Hepburn, Sidney Poitier, Elizabeth Taylor, Robert Redford, Barbra Streisand, Meryl Streep, Tom Hanks ou encore Oprah Winfrey.

Avec Sarah Jessica Parker et Helen Mirren, l’édition 2026 des Golden Globes promet une double célébration de l’excellence et de la longévité, à travers deux figures féminines dont les parcours, bien que différents, incarnent chacune à leur manière la puissance et la diversité du storytelling audiovisuel.

L’héritage des Golden Globes

Au-delà du glamour, les Golden Globes demeurent un acteur majeur du soutien à la création : au fil des trois dernières décennies, plus de 55 millions de dollars ont été reversés à des programmes de bourses, de restauration de films et d’initiatives humanitaires. En s’associant à des organisations œuvrant pour une meilleure représentation et un accès élargi à l’industrie du divertissement, la cérémonie continue de jouer un rôle social et culturel essentiel.

Produit par Dick Clark Productions, le gala reste « Hollywood’s Party of the Year® », un moment où se croisent mémoire et modernité, tradition et renouveau. En distinguant Sarah Jessica Parker, les Golden Globes célèbrent non seulement une actrice, mais aussi une époque : celle où la télévision s’est imposée comme l’un des plus puissants miroirs de notre société.

Neïla Driss

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CIFF 2025 – Réflexions cinématographiques : un voyage dans les mondes de Nuri Bilge Ceylan

18. November 2025 um 21:31

Dans le cadre de la 46ᵉ édition du Festival international du film du Caire (CIFF), qui s’est déroulée du 12 au 21 novembre 2025, une rencontre exceptionnelle a réuni le cinéaste turc Nuri Bilge Ceylan, président du jury de la compétition internationale, autour d’un panel intitulé « Réflexions cinématographiques : un voyage dans les mondes de Nuri Bilge Ceylan ».

Modérée par le critique Ahmed Shawky, président de la Fédération internationale de la presse cinématographique (FIPRESCI), la rencontre a déroulé lentement le fil d’un parcours singulier, où photographie, littérature, philosophie et expérience intime de la vie se mêlaient pour façonner une œuvre parmi les plus marquantes du cinéma contemporain.

Les membres du jury étaient présents, comme pour rappeler que cette conversation n’était pas seulement un moment de prestige, mais un véritable partage de regard, au cœur même du festival.

Un parcours hors du commun

Né à Istanbul en 1959, Nuri Bilge Ceylan s’est d’abord consacré à la photographie avant de devenir cinéaste. Il a étudié l’ingénierie électrique à l’université du Bosphore, puis le cinéma à l’université Mimar Sinan, à Istanbul. Son premier court métrage, Koza (1995), sélectionné à Cannes, a inauguré une longue relation avec ce festival. Cet événement marquait le début d’une filmographie singulière où la nature, le silence et la contemplation occupent une place centrale.

Avec La Petite Ville (Kasaba, 1997), Nuages de mai (Mayıs Sıkıntısı, 1999), Uzak (2002, Grand Prix du Jury et Prix d’interprétation masculine à Cannes), Les Climats (İklimler, 2006), Les Trois Singes (Üç Maymun, 2008, Prix de la mise en scène à Cannes), Il était une fois en Anatolie (Bir Zamanlar Anadolu’da, 2011, Grand Prix à Cannes), Winter Sleep (Kış Uykusu, Palme d’or 2014), Le Poirier sauvage (Ahlat Ağacı, 2018) et Les Herbes sèches (Kuru Otlar Üstüne, 2023, Prix d’interprétation féminine), Ceylan a bâti une œuvre profondément marquée par une quête existentielle, un sens aigu du cadre et une attention extrême aux paysages humains et naturels.

Photographie et philosophie d’un regard

Son cinéma se distingue par la lenteur maîtrisée de son rythme, l’économie de la parole, l’importance des visages et du silence, et un lien constant avec la littérature. Deux éléments, d’ailleurs, reviennent avec insistance dans sa filmographie : la photographie et la littérature, que le cinéaste aborde comme deux versants d’une même quête du sens.

Nuri Bilge Ceylan revient d’abord sur ses origines d’artiste, en faisant remonter son rapport aux images à l’adolescence. À quinze ans, dit-il, il était « très introverti et solitaire », et la photographie était alors, pour lui, « une passion pour les solitaires ». Cette pratique, loin d’être un simple hobby, devient un refuge et un mode d’observation du monde. Plus tard, vers vingt-cinq ans, il commence à fréquenter assidûment les salles de cinéma et comprend qu’il pourrait, lui aussi, faire du cinéma. Il achète une caméra, tourne seul, monte seul, filme la campagne où il vit, la nature, les visages qui l’entourent. Peu à peu, il s’entoure de quelques collaborateurs, puis d’une petite équipe de tournage, sans jamais renoncer à cette proximité très physique avec l’image. Même aujourd’hui, rappelle-t-il, ses plateaux restent réduits : six ou sept personnes, pas davantage.

Sa réflexion, telle qu’il la formule au Caire, rejoint ce qu’il affirme par ailleurs : tout ce qu’il fait en photographie ou en cinéma procède d’« une seule et même vision philosophique ». Il précise que chaque image qu’il capture porte, pour lui, « le même noyau » que celles de ses films. L’art, dit-il, « ne se divise pas » : il est prolongement spirituel et intellectuel d’une même quête, une « recherche permanente de sens ». Ses séries de photographies, exposées dans des musées ou galeries, partagent avec son cinéma un même souffle contemplatif, un soin extrême apporté à la composition, une langue visuelle calme et retenue qui s’attache aux détails minuscules, à ces fragments de réalité qui finissent par constituer le cœur de son expérience artistique.

Le cinéma comme exploration de l’âme

Ceylan refuse de considérer le cinéma comme de simples « images en mouvement ». Il y voit une occasion de consigner les instants les plus précis de l’existence, de braquer la lumière sur l’expérience humaine avec une profondeur philosophique et une sensibilité aiguë. Son style réaliste, patient, et ses images empreintes de poésie visuelle sont autant de moyens d’explorer l’âme humaine et sa relation au monde. Ce qui frappe, dans ses propos, c’est cette manière de revenir constamment à l’humain, jamais à la démonstration : il ne revendique ni une théorie, ni une école, mais un regard, nourri par la solitude, la lecture, la photographie et l’observation.

Les débuts : filmer l’intime pour atteindre l’universel

Au fil de la rencontre, Nuri Bilge Ceylan esquisse deux grandes phases de son œuvre. Il se souvient de ses débuts, films très intimes tournés avec sa famille, des proches, des acteurs non professionnels, dans des environnements qui lui sont familiers. Il estime que cette étape est presque incontournable : il fallait d’abord se confronter à soi-même, apprendre à se connaître, avant de pouvoir aborder des récits plus complexes. Les films suivants s’ouvrent à d’autres horizons, les récits s’étoffent, se densifient, gagnent en complexité philosophique. Pourtant, insiste-t-il, il ne s’intéresse pas aux histoires en tant que telles : « Les histoires ne m’intéressent pas, je préfère les questions. » Ses films sont moins des récits que des terrains de recherche, des lieux où l’on fait l’épreuve du doute, où l’on confronte des personnages à des interrogations auxquelles lui-même ne sait pas toujours répondre.

Créer dans le doute et la lenteur

Son rapport au temps de la création est à l’avenant. Une fois un film terminé, il lui faut souvent une année pour s’en remettre, et il ne pense pas immédiatement au suivant. Aucun « tiroir » rempli de projets en attente : quand un film se termine, le suivant n’existe pas encore. Puis, un jour, l’élan revient, sans qu’il puisse dire pourquoi ni comment, et il se remet à écrire. Il l’avoue, non sans ironie : il n’est pas naturellement très motivé, il se « pousse » lui-même à faire un nouveau film. Tous les jours, dit-il encore, l’idée d’arrêter le traverse ; mais il ne voit pas ce qu’il ferait d’autre de sa vie. Ce mouvement de va-et-vient entre lassitude, doute et nécessité d’avancer irrigue l’ensemble de son discours.

Cette dynamique se double d’un travail d’écriture à deux voix, notamment avec son épouse, qui participe au scénario. Les idées circulent, les discussions s’enchaînent, et les désaccords sont fréquents, en particulier autour des dialogues. Il ne s’en plaint pas : ces disputes, au contraire, font avancer le film. L’écriture, pour lui, n’est pas un geste solitaire figé mais une confrontation, une mise à l’épreuve.

Il explique aussi qu’il aime écrire des histoires à première vue simples, qui lui permettent de pousser dans le détail les questions qu’il se pose lui-même lorsqu’il est seul. Ces questionnements, confie-t-il, ressemblent parfois à une forme de thérapie : il interroge, cherche des réponses, plonge si profondément dans certaines réflexions qu’il se retrouve parfois incapable de les exprimer entièrement.

L’acteur, partenaire du doute

Le cinéaste raconte également le chemin qu’il a parcouru avec les acteurs. Il dit avoir un rapport très particulier au casting : aucun préjugé au départ, seulement une idée du personnage. Il filme différents acteurs, professionnels ou pas, monte les images, observe la chimie qui se crée entre eux, recompose les groupes pour voir ce qui fonctionne le mieux. Le doute ne le quitte pas : au début d’un tournage, il a toujours peur de ne pas avoir choisi les bons interprètes. Il tient à ne pas surcharger ses comédiens de répétitions : une seule lecture du scénario lui suffit, il ne souhaite pas multiplier les essais, de peur de finir par détester son propre film. Ce qu’il demande, en revanche, est très clair : une mémorisation rigoureuse des dialogues, car sa confiance dans les acteurs repose sur cette précision. Toutefois, au fil des années, ses dialogues se sont affinés, densifiés, ce qui rend plus difficile le recours à des non-professionnels ; d’où, de plus en plus souvent, le choix de comédiens expérimentés.

Il évoque aussi cette expérience singulière où il a lui-même joué dans l’un de ses films. Il le dit sans détour : il a détesté être acteur. Sa timidité en faisait une épreuve. Mais cette tentative lui a permis de mieux comprendre ce que ressent un interprète devant la caméra, et donc de mieux les diriger par la suite. Là encore, l’expérience personnelle se transforme en outil de mise en scène, en savoir pratique.

Le climat, la nature et le silence

L’un des axes majeurs de son travail tient à sa relation au climat, aux saisons, à la nature. La météo, pour lui, n’est pas une donnée secondaire : elle influence sa manière de filmer, et il la considère comme un élément dramatique à part entière. Le choix d’un hiver neigeux, d’un été écrasant, d’un automne pluvieux n’est pas décoratif : il reflète la réalité, les conditions concrètes de la vie, et devient un élément puissant de la narration. Ce rapport au climat traverse toute sa filmographie, jusqu’à donner son titre à l’un de ses films les plus emblématiques. Les paysages d’Anatolie, les routes désertes, les villages isolés deviennent ainsi des personnages silencieux, mais omniprésents.

L’humiliation, une blessure intime et universelle

Un autre motif traverse ses films avec insistance : l’humiliation. Nuri Bilge Ceylan ne cherche pas à en faire mystère. Il explique qu’il déteste être humilié, qu’il en a peur, que cela touche probablement à une blessure intime. Lorsqu’un personnage est humilié, dit-il, il révèle des aspects cachés de lui-même, il réagit, se transforme ; l’humiliation devient une épreuve qui permet de le cerner mieux. Il cite Dostoïevski, qui a lui aussi beaucoup travaillé ce thème. Et il établit un lien entre cette obsession et le monde contemporain : aujourd’hui, l’humiliation passe aussi par les réseaux sociaux, elle peut prendre mille formes, s’étaler en public, changer la trajectoire d’une vie. Enfant, il a grandi dans une toute petite ville, sans accès à ce qui se passait ailleurs. Le monde était réduit à cet espace. L’ère numérique a tout bouleversé. Le monde, désormais, ressemble à un « petit village » où chacun observe, commente et juge l’autre. Ses films, en mettant en scène ces humiliations visibles ou souterraines, prolongent cette réflexion.

Littérature et transmission

La littérature occupe une place centrale dans cet univers. Ceylan évoque avec reconnaissance l’empreinte de Tchekhov, dont des détails parsèment, selon lui, tous ses films. Il lui arrive de le citer explicitement, tout comme Dostoïevski, dont Crime et châtiment, lu à dix-neuf ans, l’a profondément marqué. En le relisant plus tard, il a eu le sentiment qu’on ne changeait pas tant que cela avec l’âge : certaines questions, certains chocs restent intacts. Il raconte aussi la découverte récente de l’écrivain égyptien Tawfiq El-Hakim, et notamment de Journal d’un substitut de campagne, qu’il a aimé au point de vouloir l’adapter au cinéma. Il a découvert ensuite que le texte avait déjà fait l’objet d’un film en Égypte, et se dit aujourd’hui curieux de voir cette adaptation. Ce détour par la littérature arabe témoigne de sa disponibilité à d’autres imaginaires et d’un dialogue constant entre cultures.

Une philosophie de vie et de création

La conversation glisse également vers une dimension plus intime et philosophique. Nuri Bilge Ceylan confie qu’au fil du temps, il a appris une chose : il ne se considère pas lui-même comme une personne importante, il ne se donne pas de valeur particulière. Ce qui l’importe, c’est l’humanité dans son ensemble, même s’il avoue ne pas savoir précisément ce que cela signifie. Il parle d’un instinct de protection que nous posséderions tous, et avec lequel il aime jouer : le casser, mettre à l’épreuve la fierté de ses personnages, les forcer à voir là où ils se croyaient solides. Pour cela, paradoxalement, il lui faut lui-même une certaine fierté, ne serait-ce que pour la confronter. Il dit voir la vie d’une manière légèrement décalée : même dans des situations difficiles, il lui arrive de se surprendre à sourire ou à accepter ce qui survient. Il insiste : il a sa propre sensibilité, mais il ne se sent pas toujours comme « les autres ». De manière générale, il perçoit la vie comme dépourvue de grand sens, et cette vision l’amène à ne pas prendre les choses trop au sérieux. Cela ne fait pas de lui un homme léger, dit-il ; simplement quelqu’un qui observe autrement les détails de la vie, qui parfois est totalement lui-même, parfois non.

La durée, le montage et la liberté du travail

Sur la durée de ses films, il fait preuve d’un mélange de lucidité et d’humour. Nuri Bilge Ceylan a reconnu ne pas savoir pourquoi ils deviennent de plus en plus longs. Il a dit en souriant qu’il savait que cela dérangeait tout le monde – les distributeurs, les producteurs, les festivals, le public – mais qu’il n’y pouvait rien. Il a ajouté que la psychologie humaine était trop complexe pour être résumée, et que, lorsqu’il écrit, il ne pense pas à la longueur et ne cherche jamais à faire long. Il a même proposé à son producteur français, a-t-il raconté, de le payer moins si le prochain film dépassait encore la durée prévue, afin d’être tranquille et de pouvoir travailler librement.

Par ailleurs, lors du montage, il s’aperçoit parfois qu’une scène n’est pas bonne et préfère alors en tourner d’autres pour pouvoir choisir ensuite. Il aime disposer de plusieurs alternatives et multiplier les options. Grâce au numérique, il filme beaucoup, parfois jusqu’à deux cents heures. Ses budgets sont donc importants, non pas parce qu’il engage des acteurs coûteux, mais parce qu’il tourne énormément, multiplie les angles, explore différentes émotions et prend le temps nécessaire pour trouver ce qu’il cherche.

La musique, le comique et l’universalité

Son rapport à la musique témoigne de la même logique. Il ne choisit jamais la musique avant la fin du montage. Ce n’est qu’une fois les images assemblées, une fois les silences et les respirations trouvés, qu’il décide de ce qui doit venir s’y ajouter, ou non. La musique n’est pas là pour dicter l’émotion, mais pour épouser un mouvement déjà présent dans l’image. De la même façon, il tient à introduire une part de comique dans ses films, bien qu’ils ne soient jamais des comédies. « La vie est amusante », affirme-t-il. Il dit n’avoir aucun goût pour la sentimentalité ; il cherche au contraire un réalisme qui, parfois, fait rire le public là où lui ne cherchait qu’à être exact.

Enfin, il insiste sur le fait que ses films ne sont pas « turcs » au sens étroit. Il dit parler de l’humain, pas du Turc, convaincu que les gens sont les mêmes partout. Cette universalité, il ne la revendique pas comme une ambition abstraite, mais comme une conséquence logique de sa démarche : filmer les sentiments, les failles, les contradictions qui dépassent les frontières, sans se soucier de les habiller d’une identité nationale.

CIFF 2025 
Réflexions cinématographiques : un voyage dans les mondes de Nuri Bilge Ceylan
CIFF 2025 – Nuri Bilge Ceylan et es membres du jury, venus l’écouter.

Un regard lent sur un monde pressé

Cette rencontre, organisée dans le cadre des journées de l’industrie du festival, s’inscrit dans la volonté du Festival international du film du Caire de nourrir un dialogue culturel et artistique entre les créateurs et le public, et de mettre en lumière des figures qui ont contribué à renouveler le langage de l’image et à élargir les horizons du récit visuel. La salle était pleine, les regards accrochés aux mots de Ceylan. Il est toutefois regrettable que les interventions du modérateur aient parfois pris un tour excessivement technique, laissant peu de place aux anecdotes, aux souvenirs, à ces petites histoires qui, racontées par un cinéaste de cette trempe, auraient rendu la rencontre plus chaleureuse encore, plus incarnée.

Reste une impression forte : celle d’un artiste qui ne sépare jamais la pensée de la forme, ni la vie de l’art, et qui poursuit, film après film, une même question, inlassable. Alors qu’il présidait le jury de la compétition internationale, on ne peut s’empêcher de se demander comment ce regard, forgé dans la lenteur, la nuance et le doute, influe sur les films qu’il juge et sur ceux qu’il fera demain. Dans un paysage où tout semble aller toujours plus vite, la présence de Nuri Bilge Ceylan au Caire rappelle qu’il existe encore un cinéma qui prend le temps de regarder, d’écouter et de penser.

Neïla Driss

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CIFF 2025 – Afef Ben Mahmoud à l’honneur dans le palmarès complet du Festival du Caire

22. November 2025 um 12:00

La 46ᵉ édition du Festival international du film du Caire s’est achevée au théâtre de l’Opéra du Caire par une cérémonie de clôture placée sous le signe de la mémoire et de la responsabilité du cinéma. La soirée s’est ouverte sur l’image de la petite Hind Rajab, accompagnée de l’enregistrement de sa voix. Ce sont ces appels que le monde entier a entendus : la voix d’une enfant palestinienne de Gaza, qui a appelé à l’aide pendant trois heures après avoir vu les membres de sa famille tués sous ses yeux par l’armée israélienne, avant d’être elle-même tuée. Elle n’avait que six ans.

Vidéo ici (cliquer sur le lien pour la voir): https://www.facebook.com/massir.destiniii/videos/1867752923948243

Le président du festival, Hussein Fahmy, est alors monté sur scène pour rappeler que ce que le public venait d’entendre pourrait, à première écoute, ressembler à une scène de cinéma, mais qu’il s’agissait d’une réalité tragique. Il a insisté sur le fait que la force du cinéma réside dans sa capacité à documenter, à préserver les histoires vraies et à empêcher qu’elles ne soient effacées, quels que soient les efforts pour les ignorer. Il a souligné que Hind, son histoire et sa voix resteraient présentes, et que les enfants qui lui ressemblent ne sont pas des chiffres, mais des êtres humains de chair et de sang.

Hussein Fahmy a ensuite indiqué qu’il se réjouissait que le film de clôture de cette 46ᵉ édition soit La Voix de Hind Rajab, de Kaouther Ben Hania, un film qui revient précisément sur cet appel, sur les circonstances de la mort de l’enfant et sur la manière dont ce moment a été enregistré puis diffusé. Ce choix de clôture affirme la volonté du festival de placer au centre la question de la mémoire et du témoignage.

Dans la suite de son discours, il est revenu sur les différents volets de cette édition : les films en compétition, les films restaurés qui attirent toujours un public nombreux, les ateliers, les masterclasses, ainsi que le Marché du film qui a rassemblé de nombreux professionnels. Il a remercié les institutions égyptiennes qui ont soutenu cette édition, en particulier le ministère de la Culture dirigé par le Dr Ahmed Fouad Henawy, ainsi que les autres ministères concernés, l’Autorité égyptienne du tourisme, le gouvernorat du Caire et l’Opéra égyptienne. Il a enfin félicité le peuple qatari pour le lancement du festival de Doha et annoncé la signature d’un accord de coopération entre le Festival du Caire et la Qatar Media City Film Commission, destiné à développer une collaboration stratégique autour de la production et de la circulation des films arabes.

Avant la divulgation du palmarès et la remise des prix, plusieurs hommages ont été rendus à des figures marquantes du cinéma international et égyptien. Le réalisateur chinois Guan Hu a été honoré pour l’ensemble de sa carrière et pour sa contribution au rayonnement du cinéma asiatique contemporain. La cinéaste hongroise Ildikó Enyedi, qui avait animé une masterclasse remarquée au cours de cette édition, a également reçu un hommage spécial, saluant une œuvre singulière et profondément ancrée dans la réflexion sur l’identité et le regard. Le directeur de la photographie égyptien Mahmoud Abdel Samie a lui aussi été honoré pour l’ensemble de sa carrière. Dans le discours qu’il a prononcé à cette occasion, il est revenu sur son engagement pour la préservation du patrimoine cinématographique égyptien et a annoncé que des discussions sont en cours pour l’ouverture, dans les prochaines années, d’un Musée du Cinéma en Égypte — un projet qu’il suit de près.

CIFF 2025 Clôture Ildikó Enyedi
CIFF 2025 – La réalisatrice hongroise Ildikó Enyedi et son trophée

Une fois ce cadre posé, la cérémonie a enchaîné avec l’annonce du palmarès.

Dans la compétition internationale, présidée par Nuri Bilge Ceylan, avec Basma, Bogdan Mureșanu, Joan Hu, Nadine Khan, Simona Paggi et Leyla Bouzid, la Pyramide d’or du meilleur film a été attribuée à Dragonfly de Paul Andrew Williams. Le prix de la meilleure interprétation féminine a été décerné ex aequo aux deux actrices principales de ce film, Andrea Riseborough et Brenda Andrew Williams. La Pyramide d’argent du meilleur réalisateur est revenue aux frères Tarzan et Arab Nasser pour Once Upon a Time in Gaza, tandis que le prix du meilleur acteur a récompensé Majd Eid pour le même film. Once Upon a Time in Gaza a également reçu le prix du meilleur long métrage arabe, ce qui porte à trois le nombre de prix obtenus par ce titre au Caire.

Once Upon a Time in Gaza, coproduction entre la France, la Palestine, l’Allemagne, le Portugal, le Qatar et la Jordanie, se déroule à Gaza en 2007. Le film suit Yahiya, un étudiant, et Osama, un trafiquant de drogue au bon cœur, qui se retrouvent associés et vendent de la drogue depuis un restaurant de falafels. Leur activité les met en présence d’un policier corrompu et arrogant, et les pressions s’accumulent progressivement, jusqu’à faire apparaître la fragilité des liens, la violence des rapports de pouvoir et la dureté des conditions de vie dans une société en crise. Le film avait fait sa première à Cannes, où il avait déjà obtenu un prix de mise en scène, avant d’arriver au Caire avec ce parcours déjà bien entamé.

CIFF 2025 Clôture
Once Upon a time in Gaza
CIFF 2025 – Le film « Once upon a time in Gaza » remporte trois prix

La Pyramide de bronze, prix spécial du jury, a distingué As We Breathe du réalisateur Seamus Alton.

Le prix Naguib Mahfouz du meilleur scénario a été attribué à The Things You Kill d’Alireza Khatami. Ce film (Turquie, Canada, France, Pologne, 2025, 113 minutes), sélectionné en compétition internationale et présenté par le Canada pour l’Oscar du meilleur film international, suit Ali, professeur de littérature installé en Turquie après des années passées aux États-Unis. La mort de sa mère l’oblige à revenir dans la maison familiale et fait remonter à la surface une enfance marquée par un père autoritaire et une mère silencieuse. L’arrivée de Reza, un jardinier qu’Ali engage, introduit un trouble supplémentaire : cet homme devient peu à peu le révélateur des zones obscures de son histoire. Le film avance par réminiscences, objets, gestes et non-dits, pour interroger la filiation, la culpabilité, la transmission de la violence et la peur de la reproduire au moment où Ali tente de devenir père à son tour. En plus du prix du scénario, The Things You Kill a également reçu le prix FIPRESCI de la critique internationale, ce qui en fait l’un des films les plus distingués de cette édition.

Le prix Henri Barakat de la meilleure contribution artistique a récompensé la photographie de Sand City, signée Matthew Gio Mbini.

Dans la section Horizons du cinéma arabe, le jury composé d’Abdel Salam Moussa, Nadia Dristi et Karim Aïtouna a remis le prix du meilleur scénario au très beau Complaint No. 713317 de Yasser Shafiei, dont c’est le premier long métrage. Le prix Salah Abou Seif, prix spécial du jury, est allé à Anti-Cinema du réalisateur Ali Saïd. Le grand prix Saad Eddine Wahba du meilleur film arabe a distingué Dead Dog (Kalb Saken) de la cinéaste libanaise Sarah Francis.

Le prix de la meilleure interprétation féminine dans cette section a été attribué à Afef Ben Mahmoud pour son rôle dans Round 13 de Mohamed Ali Nahdi. Le film arrive au Caire directement après sa participation au festival de Tallinn. Il suit une famille tunisienne confrontée à la maladie d’un enfant et explore, à travers ce noyau familial, la douleur, la dignité et le poids des difficultés sociales qui s’ajoutent à l’épreuve intime. C’est dans ce cadre qu’Afef Ben Mahmoud incarne une mère aux prises avec une situation qui dépasse ses forces, entre inquiétude, responsabilité et épuisement. Le film s’attache aux gestes du quotidien, aux regards, à la tension qui s’installe au sein de la famille, et c’est à partir de là que se construit le rôle qui lui a valu ce prix.

Vidéo ici (cliquer sur le lien pour la voir): https://www.facebook.com/massir.destiniii/videos/2004242306786914

Du côté des documentaires, le Festival du Caire a annoncé la victoire de Souraya mon amour de Nicolas Khoury. Ce film libano-qatari, en arabe, d’une durée de 81 minutes, plonge dans l’univers de l’artiste Souraya Baghdadi et revient sur la relation qui l’unissait à son mari, le réalisateur Maroun Bagdadi, plus de trente ans après sa mort. Le documentaire se construit à partir d’extraits de Petites guerres (1982), où Maroun Bagdadi avait filmé leur première rencontre, ainsi que d’archives personnelles et d’entretiens. Il s’intéresse notamment au rapport de Souraya à son corps après des années de danse et de méditation, et interroge la manière dont le deuil et la mémoire se tissent dans le temps.

Le prix du public Youssef Sherif Rizkallah, doté de 15 000 dollars, a été remis à One More Show (Dayel ‘Anna ‘Ard) de Mai Saad et Ahmed al-Danf. Le film se déroule au cœur de la destruction à Gaza et suit la troupe du Free Gaza Circus – Youssef, Batout, Ismail, Mohamed et Just – contrainte au déplacement du nord de Gaza vers le sud. Malgré les ruines, ces artistes de cirque continuent à se produire pour les enfants dans les abris et dans les rues, transformant leurs numéros en acte de résistance et en geste de consolation.

Le prix NETPAC du meilleur film asiatique a été attribué à The Botanist de Jing Yi, dans le cadre de l’engagement du festival en faveur de la visibilité des cinémas asiatiques.

La compétition des courts métrages, présidée par la réalisatrice thaïlandaise Boom Boonsermvicha, avec l’actrice égyptienne Tara Emad et le cinéaste suisse Anas Sarin, a vu le prix Youssef Chahine du meilleur film court attribué à Cairo Streets (Shawarei al-Qahira) du réalisateur Abdallah al-Tayea. Le prix du meilleur film arabe court est revenu à Teta w Teta (Two Tetas) de Lynn al-Safah, et le prix spécial du jury a récompensé A Very Straight Neck de Niu Sora.

Au milieu d’un palmarès dense et riche, un manque reste toutefois visible : le film Calle Málaga de Maryam Touzani repart sans aucun prix. Depuis sa projection, critiques et spectateurs n’avaient cessé d’en parler en termes élogieux, le décrivant comme un très beau film, une véritable ode à la vie et un condensé d’émotions. Son absence du palmarès a suscité de nombreux commentaires à la sortie de la cérémonie et sur les réseaux sociaux, chacun essayant de comprendre et d’expliquer cette absence, le film répondant à tous les critères pour remporter tous ces prix : un très beau scenario, une belle mise en scène et une interprétation remarquable de la part de son actrice principale Carmen Maura, sans oublier les couleurs, la chaleur du film, les belles photographies…

La soirée s’est achevée avec la projection de La Voix de Hind Rajab, confirmant le fil conducteur de cette clôture : un festival qui, au-delà des récompenses, interroge la manière dont le cinéma garde trace des voix, des visages et des histoires que l’on aurait trop facilement tendance à laisser disparaître.

Neïla Driss

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