NĂ©gociations avec lâIran, vĂ©ritable test pour Donald Trump !
Les nĂ©gociations indirectes entre les Ătats-Unis et la RĂ©publique islamique dâIran sâouvriront samedi 12 avril 2025 au Sultanat dâOman. Elles ne concernent pas uniquement le programme nuclĂ©aire comme lors des prĂ©cĂ©dentes Ă lâĂ©poque de lâadministration Obama. Elles engloberont Ă la fois la question nuclĂ©aire, lâarsenal de missiles balistiques iraniens et les groupes mandataires de la RĂ©publique islamique dans le Moyen-Orient.
Imed Bahri
Steve Witkoff, homme de confiance de Donald Trump et son partenaire de golf de longue date qui est son envoyĂ© spĂ©cial pour la rĂ©gion, reprĂ©sentera les Ătats-Unis et non le secrĂ©taire dâĂtat amĂ©ricain Marco Rubio. CĂŽte iranien, Abbas Araghchi, ministre des Affaires Ă©trangĂšres, reprĂ©sentera son pays.
Le prĂ©sident amĂ©ricain Donald Trump souhaite un accord nuclĂ©aire avec lâIran mais qui soit meilleur que celui signĂ© par lâadministration du prĂ©sident dĂ©mocrate Barack Obama en 2015, ont affirmĂ© Luke Broadwater et David E. Sanger dans une enquĂȘte publiĂ©e par le New York Times.
Lorsque Trump a lancĂ© sa premiĂšre campagne prĂ©sidentielle en 2016, on lui a demandĂ© comment il aborderait le problĂšme de sĂ©curitĂ© nationale le plus complexe au monde. Le candidat Trump avait une formule simple pour rĂ©duire le programme nuclĂ©aire iranien: «LâĂ©quipe de nĂ©gociation de Barack Obama devrait quitter la table des nĂ©gociations et partir. Alors les Iraniens viendront mendier».
LâĂ©cart entre les deux camps est Ă©norme
Aujourdâhui, les Iraniens sont bien plus proches de possĂ©der la capacitĂ© de produire une arme nuclĂ©aire quâils ne lâĂ©taient lors de la nĂ©gociation de lâaccord de 2015. Cela est dĂ» Ă la dĂ©cision de Trump de se retirer de lâaccord nuclĂ©aire en 2018. Le prĂ©sident a dĂ©sormais lâoccasion de dĂ©montrer ce quâObama et son Ă©quipe auraient dĂ» faire.
JusquâĂ prĂ©sent, lâĂ©cart entre les deux camps semble Ă©norme. Les Iraniens semblent vouloir une version actualisĂ©e de lâaccord de lâĂšre Obama qui limitait les stocks de matiĂšres nuclĂ©aires de lâIran.
Les AmĂ©ricains, quant Ă eux, veulent dĂ©manteler lâimmense infrastructure dâenrichissement du combustible nuclĂ©aire iranien, son programme de missiles et mettre fin au soutien de longue date de TĂ©hĂ©ran au Hamas, au Hezbollah et Ă ses autres forces mandataires en Irak et au YĂ©men.
Le NYT indique que le temps presse et peut jouer en défaveur des ambitions de Trump.
Le journal cite Jeanne Shaheen, sĂ©natrice du New Hampshire et cheffe de file dĂ©mocrate au sein de la commission des relations Ă©trangĂšres du SĂ©nat, qui a qualifiĂ© la dĂ©cision de M. Trump de se retirer de lâaccord sur le nuclĂ©aire iranien de grave erreur. Elle a dĂ©clarĂ©: «Il est impĂ©ratif que nous parvenions rapidement Ă un accord. Le programme nuclĂ©aire iranien progresse de jour en jour et avec lâexpiration imminente des sanctions, nous risquons de perdre lâun de nos plus importants leviers». Cette expiration des sanctions est prĂ©vue pour le 18 octobre.
Trump est dĂ©sormais sous pression pour parvenir Ă un accord plus strict concernant lâIran que celui conclu sous lâadministration Obama. Ce sera un vrai test pour le prĂ©sident qui joue les durs avec les Iraniens pour voir sâil parvient Ă atteindre ses objectifs.
Pour faire pression, son administration menace dĂ©jĂ la RĂ©publique islamique de frappes militaires si les nĂ©gociations ne se dĂ©roulent pas bien, sans toutefois prĂ©ciser si les Ătats-Unis, IsraĂ«l ou une force conjointe mĂšnerait ces frappes. La porte-parole de la Maison Blanche, Caroline Leavitt, a promis mardi que les Iraniens paieraient un lourd tribut sâils ne nĂ©gociaient pas avec M. Trump.
«Les Iraniens seront surpris de dĂ©couvrir quâils nâont pas affaire Ă Barack Obama ou Ă John Kerry. Câest un tout autre jeu», a dĂ©clarĂ© Jim Risch, sĂ©nateur rĂ©publicain de lâIdaho et prĂ©sident de la commission des relations Ă©trangĂšres.
Les nĂ©gociations dĂ©buteront samedi, avec Steve Witkoff, ami et partenaire de golf de Trump, qui dirigerait lâĂ©quipe amĂ©ricaine. Witkoff gĂšre Ă©galement les nĂ©gociations sur Gaza et lâUkraine et nâa aucune expĂ©rience de la technologie complexe de lâenrichissement des combustibles nuclĂ©aires ou des nombreuses Ă©tapes impliquĂ©es dans la fabrication dâune bombe nuclĂ©aire.
LâIran se laisserait-il dĂ©sarmer totalement ?
La premiĂšre question Ă laquelle il sera confrontĂ© concerne la portĂ©e des nĂ©gociations, lâaccord de lâĂšre Obama ne portant que sur le programme nuclĂ©aire. Il nâa pas abordĂ© le programme de missiles de lâIran qui Ă©tait soumis Ă des restrictions distinctes de la part lâOnu que TĂ©hĂ©ran a ignorĂ©es. Lâaccord de 2015 nâa pas Ă©galement concernĂ© ce que les AmĂ©ricains appellent le soutien au terrorisme Ă savoir les groupes mandataires financĂ©s et armĂ©s par la RĂ©publique islamique dans le Moyen-Orient.
Le conseiller Ă la sĂ©curitĂ© nationale Michael Waltz a dĂ©clarĂ© quâun nouvel accord avec lâadministration Trump doit aborder tous ces aspects et doit dĂ©manteler complĂštement lâinfrastructure du programme nuclĂ©aire iranien et non le laisser fonctionner au ralenti comme cela sâest produit en 2015. Dans une interview accordĂ©e à «Face the Nation» sur CBS en mars, il a expliquĂ©: «LâIran doit abandonner son programme nuclĂ©aire dâune maniĂšre que le monde entier puisse voir. Un dĂ©mantĂšlement complet».
Cependant un tel accord ressemblerait bien plus Ă une capitulation. Il laisserait lâIran en grande partie sans dĂ©fense: pas de missiles, pas de forces mandataires et aucune voie vers une bombe nuclĂ©aire.
Bien que Trump ait dĂ©clarĂ© lundi que les pourparlers seraient directs, le ministre iranien des Affaires Ă©trangĂšres Abbas Araghchi a dĂ©menti cette affirmation confirmant quâils seraient indirects et se tiendraient dans le Sultanat dâOman. Dans un article publiĂ© dans le Washington Post, il a confirmĂ© que son pays Ă©tait prĂȘt Ă des discussions indirectes avec les Ătats-Unis. Le ministre iranien a appelĂ© Washington Ă retirer la menace militaire contre lâIran de la table des nĂ©gociations.
Le NYT a notĂ© que lâenvironnement de nĂ©gociation est plus risquĂ© quâil ne lâĂ©tait sous lâadministration Obama. Le programme nuclĂ©aire iranien a progressĂ© depuis que Trump sâest retirĂ© de lâaccord prĂ©cĂ©dent et aujourdâhui lâIran produit de lâuranium enrichi Ă 60% de puretĂ© juste en dessous du seuil nĂ©cessaire pour avoir la bombe.
Les agences de renseignement amĂ©ricaines ont conclu que lâIran explore une approche plus rapide bien que plus primitive pour dĂ©velopper une arme nuclĂ©aire qui prendrait des mois plutĂŽt quâun an ou deux si ses dirigeants dĂ©cidaient de se lancer dans une course Ă la construction dâune bombe.
Toutefois, la position de nĂ©gociation de lâIran semble plus faible Ă plusieurs Ă©gards. IsraĂ«l a dĂ©truit en octobre ses dĂ©fenses aĂ©riennes qui protĂ©geaient ses installations nuclĂ©aires et ses groupes mandataires dans la rĂ©gion ont Ă©galement Ă©tĂ© la cible de frappes, notamment le Hezbollah au Liban et le Hamas Ă Gaza.
Il y a cependant des facteurs importants dans lâĂ©quation. LâIran pourrait bĂ©nĂ©ficier de ses relations avec la Russie Ă un moment oĂč les Ătats-Unis tentent de nĂ©gocier avec celle-ci pour mettre fin Ă la guerre en Ukraine. Le ministĂšre amĂ©ricain de la Justice a Ă©galement accusĂ© les Gardiens de la rĂ©volution dâavoir tentĂ© dâassassiner Trump lâannĂ©e derniĂšre, une Ă©volution qui jettera une ombre sur les nĂ©gociations. Il y a aussi la question de savoir si les RĂ©publicains et IsraĂ«l accepteront un Ă©ventuel accord conclu entre les deux partis.
Un accord aprÚs 45 ans de désaccord
Dennis Gate, professeur de relations internationales Ă lâUniversitĂ© dâĂtat de Pennsylvanie et auteur dâun livre sur lâaccord nuclĂ©aire iranien, estime que Trump nâabandonnera probablement pas lâoption des frappes militaires ce qui rend les nĂ©gociations peu susceptibles de rĂ©ussir.
Pour sa part, Karim Sadjadpour du Carnegie Endowment for International Peace a averti que lâĂ©quipe Trump agirait en dehors de ses objectifs dĂ©clarĂ©s. Il a dĂ©clarĂ©: «Vous ne nĂ©gociez pas un prix final ou un grand accord mais plutĂŽt des questions techniques cruciales telles que les niveaux dâenrichissement de lâuranium, les spĂ©cifications des centrifugeuses et les systĂšmes dâinspection. Il y a une grande diffĂ©rence entre affirmer que lâIran ne peut pas possĂ©der lâarme nuclĂ©aire et que son programme nuclĂ©aire doit ĂȘtre dĂ©mantelĂ© comme cela sâest produit en Libye. Il existe un risque que la partie amĂ©ricaine qui manque actuellement dâexpĂ©rience claire et dâobjectif prĂ©cis soit dĂ©passĂ©e dans les nĂ©gociations par la partie iranienne qui possĂšde les deux».
Sayed Hossein Mousavian, expert en sĂ©curitĂ© et en politique nuclĂ©aire au Moyen-Orient Ă lâUniversitĂ© de Princeton, estime que les chances de succĂšs des nĂ©gociations rĂ©sident dans un rĂ©sultat que chaque partie vendrait Ă son propre public et que TĂ©hĂ©ran accepte des inspections pĂ©riodiques.
Mousavian conclut avec luciditĂ©: «Je comprends que Steve Witkoff souhaite un accord et non la guerre. Il partage lâĂ©tat dâesprit de Trump. Je vois donc une opportunitĂ© mais la rĂ©alitĂ© est que lâIran et les Ătats-Unis sont en dĂ©saccord depuis 45 ans et parvenir Ă un accord sur quoi que ce soit sera compliqué».
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