Dans un monde tripolaire, quelle place pour l’Europe?
Dans le monde tripolaire qui est en train d’émerger, il n’y a pas de place pour les faibles. Désormais, trois puissances dominent le monde : les Etats-Unis, la Russie et la Chine. Quant à l’Union européenne, elle est en voie de désintégration, tant il est vrai qu’elle est la plus grande perdante de la guerre entre la Russie et l’Ukraine où elle s’était engagée sans filet.
Habib Glenza

Henry John Temple, ancien homme d’État britannique du 19e siècle, disait : «Nous n’avons ni d’alliés perpétuels ni d’ennemis éternels. Seuls nos intérêts sont perpétuels et éternels». Les relations entre les Etats-Unis et le reste du monde se fondent sur ce principe substantiel: ils n’ont que des intérêts. S’inspirant de la philosophie de Henry John Temple, cette politique reste la même, peu importe l’alternance qui caractérise le régime démocratique américain. Certes il peut y avoir une certaine nuance dans les approche, selon que l’administration soit démocrate ou républicaine, mais tous n’ont qu’un seul objectif: travailler à promouvoir et à défendre l’intérêt des Etats-Unis, même s’il est en nette contradiction avec les valeurs de la République et les principes moraux dont elle se réclame.
En poussant les Européens et les Ukrainiens à faire la guerre à la Russie, les Américains pensaient faire plier l’économie russe dans un très court délai, mais les choses ne se sont pas déroulées comme prévu. Certes, l’économie russe a subi en 2022, de sérieuses difficultés après l’imposition, par l’Occident, de plus de 17 000 sanctions mais dès le début de l’année 2023, l’économie russe a repris sa courbe ascendante, grâce aux efforts diplomatiques de l’équipe de Vladimir Poutine.
Des guerres insensées et perdues d’avance
En dépit de l’aide occidentale, notamment américaine, à l’Ukraine, la Russie est sortie de ce conflit haut la mainavec comme bonusl’annexion du Donbass, territoire peuplé en majorité russophones et de russophiles, et qui représente 20% de la superficie de l’Ukraine, en plus de la Crimée annexée en 2014.
En arrivant au pouvoir, le 20 janvier 2025, Donald Trump, en bon businessman, a jugé que l’Occident et l’Ukraine ne peuvent gagner cette guerre et qu’il est inutile de la continuer à dépenser, inutilement, des dizaines de milliards de dollars.
Encore faut-il rappeler que, lors de sa campagne électorale, Trump a promis aux Américains de stopper voire de réduire la méga-dette américaine qui se chiffre à environ 26 trillions de dollars! Il vient même de signer un décret réduisant de 30% le budget du Pentagone, ce qui signifie en clair qu’il ne veut plus dépenser l’argent des Américains dans des guerres insensées comme celles du Vietnam, d’Irak, de Libye, d’Afghanistan ou de l’Ukraine, toutes du reste perdues.
Pourquoi le président Trump a-t-il décidé de mettre fin au conflit russo-ukrainien et de se ranger du côté de Poutine?
Trump lorgne les réserves mondiales de minéraux rares
A la suite du différend qui a opposé Huawei et le gouvernement américain en 2019, la Chine, premier producteur de minéraux rares traités, a brandi la menace de réduire ses exportations de terres rares vers les Etats-Unis. Des métaux indispensables au fonctionnement des téléphones portables et de nombreux objets technologiques, produits à 90% par les Chinois.
L’Ukraine concentre à elle seule 5% des ressources minières mondiales en minerais précieux (graphite, uranium, lithium, niobium, cobalt, etc.). Malheureusement, ces terres rares ukrainiennes se trouvent entre les mains de Poutine au Donbass, à l’est de l’Ukraine! D’où la nécessité pour le président Trump de se rapprocher de l’autocrate russe, quitte à tourner le dos à l’Union européenne, depuis longtemps vassalisée, militairement faible et qui ne possède pas les richesses naturelles recherchées.
Par ailleurs, le président Trump vise à saper les excellentes relations entre la Russie et la Chine qui ont contribué à l’essor de l’économie chinoise en passe dernièrement de surclasser l’économie américaine en raison du fait que les Etats-Unis ont dépensé une fortune dans des guerres qu’ils n’ont pas gagné.
La Chine est en tête de liste pour la production minière et les réserves de terres rares, avec 44 millions de tonnes de réserves et 140 000 tonnes de production minière annuelle. Alors que le Vietnam et le Brésil possèdent les deuxième et troisième plus grandes réserves de métaux de terres rares avec respectivement 22 et 21 millions de tonnes de réserves et 1 000 tonnes de production par an chacun.
Europe et Ukraine, grands perdants du conflit avec la Russie
Poussés par les Américains, Européens et Ukrainiens se sont lancés dans un conflit insensé, dans l’intérêt des Etats-Unis, une guerre dévastatrice en vie humaines et financièrement très coûteuse. Après trois années d’hostilités, la Russie n’a pas capitulé, au contraire, elle a gardé la Crimée annexée en 2014 et le Donbass qui représente environ 20% de la superficie de l’Ukraine.
En s’engageant fortement aux côtés de Volodymyr Zelenski, un ancien amuseur public converti en chef de guerre, en infligeant à la Russie de lourdes sanctions économiques, et en boycottant l’importation des produits bon marché russes (gaz, pétrole, charbon, céréales et autres), l’UE est finalement le plus grand perdant de ce conflit. Car la Russie a riposté en interdisant l’importation de produits en provenance de l’UE, notamment les voitures et en particulier les voitures Volkswagen. Le résultat fut catastrophique pour l’économie européenne. Pour la première fois de son histoire cette société, qui a plus de 90 ans d’existence, a dû fermer 3 de ses filiales en Allemagne en raison de l’achat du gaz de schiste (polluant) américain quatre fois plus cher que le gaz russe!
Une conclusion s’impose : dans le monde tripolaire qui est en train d’émerger, il n’y a pas de place pour les faibles. Désormais, trois puissances dominent le monde : les Etats-Unis, la Russie et la Chine. Quant à l’UE, elle est en voie de désintégration, tant il est vrai qu’elle est traversée par de fortes contradictions internes que la montrée de l’extrême-droite, très perméable à la propagande poutino-trumpienne, risque d’exacerber.
L’article Dans un monde tripolaire, quelle place pour l’Europe? est apparu en premier sur Kapitalis.