Revue économique et financière hebdo au 07 novembre 2025 – La stabilité avant la tempête ?
Dans un environnement mondial toujours incertain, la Tunisie semble marquer une pause. Les indicateurs monétaires et financiers publiés au 7 novembre 2025 traduisent une stabilité apparente, soutenue par la détente des prix mondiaux et une accalmie monétaire interne. Mais derrière cette respiration, se dessine une fragilité persistante qui limite la portée de la reprise.
International : un monde en équilibre instable
À l’international, les marchés financiers évoluent dans une atmosphère d’attente. Aux États-Unis, la Réserve fédérale a suspendu ses hausses de taux, encouragée par une désinflation visible mais prudente. Les rendements obligataires à dix ans sont repassés sous 4,4 %, signalant une détente des anticipations d’inflation.
En Europe, la BCE reste sur la même ligne, confrontée à une croissance quasi nulle et à un ralentissement marqué de la consommation.
Sur le front géopolitique, les tensions persistantes au Moyen-Orient entretiennent la volatilité. Le baril de Brent oscille autour de 82 dollars, tiré par les restrictions de production de l’OPEP+ mais tempéré par une demande chinoise encore hésitante.
À Pékin, la relance budgétaire et immobilière peine à restaurer la confiance des ménages.
Résultat : un environnement international plus calme sur les prix des matières premières, mais où la croissance reste fragile — un contexte plutôt favorable aux pays importateurs comme la Tunisie.
Tunisie : une conjoncture tunisienne en respiration
Les données monétaires et financières de la Banque centrale de Tunisie, au 07 novembre 2025* confirment un certain répit. Le solde du compte courant du Trésor remonte à 749,8 millions de dinars, en hausse par rapport à la veille mais toujours inférieur à 2024. Côté bancaire, la liquidité s’améliore : le solde du compte courant des banques s’établit à 372,6 millions de dinars, soit une progression de 86 % sur un an.
La BCT maintient son taux directeur à 7,5 %, après une baisse de 50 points de base depuis 2024, dans une logique de soutien mesuré à l’activité. Le taux du marché monétaire reste stable à 7,49 %, tandis que le volume global du refinancement recule légèrement à 11,6 milliards de dinars. Ces niveaux traduisent un équilibre relatif, malgré une demande de liquidités toujours élevée.
Les avoirs en devises atteignent 24,7 milliards de dinars, équivalents à 107 jours d’importation, soutenus par deux piliers essentiels : les recettes touristiques cumulées, en hausse (sur un an) de 7,8 % sur un an, et les transferts des Tunisiens à l’étranger, en progression de 7,4 %. Ces flux extérieurs assurent une bouffée d’oxygène à la balance des paiements et contribuent à la stabilité du dinar, qui reste légèrement plus ferme face à l’euro mais plus faible face au dollar.
Une dette intérieure sous contrôle apparent
La gestion de la dette publique montre une recomposition intéressante. L’encours des Bons du Trésor à court terme chute à 3 milliards de dinars, contre plus de 9 milliards un an plus tôt, tandis que les Bons du Trésor assimilables à moyen et long terme grimpent à 28,7 milliards. L’État semble vouloir étaler ses échéances, réduisant le risque immédiat de refinancement.
Mais cette stratégie a un coût : les taux des BTA dépassent encore 8 %, maintenant une charge d’intérêt élevée pour le budget. Sur le marché boursier, la tendance reste neutre : la Tunisie financière attend la loi de finances 2026 pour calibrer ses anticipations. Les valeurs bancaires et d’assurance dominent les échanges, profitant d’un climat monétaire plus stable et d’un regain de confiance prudent.
Des équilibres fragiles à consolider
À court terme, la Tunisie bénéficie d’une phase de stabilité bienvenue. L’inflation ralentit, les réserves en devises se maintiennent, et la détente du taux directeur allège légèrement la contrainte sur le crédit. Cette respiration monétaire soutient la confiance, sans toutefois créer un élan de croissance.
À moyen terme, le pays devra concilier cette stabilité avec les exigences de la consolidation budgétaire. Les marges de manœuvre sont limitées : la masse salariale publique reste élevée, les besoins de financement du Trésor récurrents, et la croissance encore trop faible pour inverser la tendance.
La clé réside désormais dans la coordination entre politique monétaire et politique budgétaire. Une meilleure allocation des dépenses publiques, un soutien ciblé à l’investissement productif et une réforme fiscale équitable pourraient offrir à la Tunisie un levier durable pour transformer cette stabilité fragile en relance maîtrisée.
===============================
Références :
(1) Sources principales consultées pour le contexte international : World Bank MENAAP (07 nov. 2025), données prix Brent / marché pétrolier (07 nov. 2025), minutes Fed / prises de position récentes, analyses Reuters sur la réaction des marchés aux tensions régionales. (Banque Mondiale)
(2) (*) https://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/indicateurs.jsp
(**) https://www.ins.tn/
===============================
* Dr. Tahar EL ALMI,
Economiste-Economètre.
Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,
Psd-Fondateur de l’Institut Africain
D’Economie Financière (IAEF-ONG)
L’article Revue économique et financière hebdo au 07 novembre 2025 – La stabilité avant la tempête ? est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.