Netanyahu dans le pétrin et le Hamas au pied du mur
Le dernier point de la première phase de l’accord entre Israël et le Hamas est l’entrée de 60 000 caravanes et de plusieurs bulldozers. Un point vital quand on sait le nombre de Gazaouis qui continuent de dormir à la belle étoile et les millions de tonnes de débris qui se dressent comme des obstacles au mouvements et aux activités dans l’enclave.
Après avoir tenu son Conseil de ministres dimanche 16 février, Netanyahu annonça froidement qu’il ne permettrait l’entrée à Gaza ni des caravanes, ni des bulldozers. Il a ajouté qu’il exige la libération de tous les otages morts et vivants en même temps; sinon « les portes de l’enfer s’ouvriront de nouveau ». Reprenant mot à mot la même menace proférée par Donald Trump quelques jours plus tôt.
Le revirement du Premier ministre israélien était prévisible. Le doute concernant l’accomplissement de la première phase de l’accord et l’engagement dans les négociations relatives à la deuxième phase était largement partagé dans les milieux médiatiques et politiques du monde arabe et d’ailleurs.
Trois raisons au moins expliquent le revirement de Netanyahu :
- La continuation de la guerre garantit son maintien au pouvoir. Tandis que la paix signifie sa fin politique et son jugement pour une multitude d’affaires de corruption;
- Les pressions que ne cessent d’exercer les partis extrémistes de Ben Gvir et Smotrich et les menaces de retrait de la coalition au cas où la guerre ne reprendrait pas;
- Le soutien de la nouvelle administration américaine de Trump qui s’avère plus intense encore que celui offert pendant plus d’un an par l’ancienne administration de Biden. Celui-ci ne ratait pas une occasion de rappeler au monde qu’il était « sioniste »; et celui-là vient de rappeler encore une fois qu’il est « le plus grand ami d’Israël que l’Amérique ait jamais produit »…
Dans le point de presse au cours duquel il a annoncé son revirement, Netanyahu a affirmé qu’il est en train de discuter avec Trump de « la date de réouverture des portes de l’enfer ». Démontrant, si besoin est, l’entière identité de vues des deux hommes sur le sort qu’ils comptent réserver à l’enclave palestinienne.
Face à la levée de boucliers dans le monde entier contre l’expulsion de deux millions de Gazaouis de leurs terres, Trump et Netanyahu se sont-ils mis d’accord pour concrétiser leur projet par la reprise de la guerre; malgré le refus universel du crime de nettoyage ethnique?
Une chose est certaine : si Netanyahu reprend la guerre, il se libèrera des pressions des extrémistes de son gouvernement; mais il se trouvera confronté à la rue israélienne qui se mobilise avec les parents des otages. La question pour lui est de savoir laquelle des deux pressions est la plus supportable et la moins dangereuse pour son maintien au pouvoir.
En cas de reprise de la guerre, la situation serait plus inextricable encore pour le Hamas. Affaiblie, ayant perdu beaucoup de ses dirigeants de premier rang et incapable d’être du moindre secours pour les survivants, l’organisation islamiste est au pied du mur.
Si Netanyahu décide de partir de nouveau en guerre, le Hamas se trouvera face à une alternative dont les deux termes sont aussi douloureux l’un que l’autre. Ou il continue à résister avec le peu de moyens qui lui reste à une machine de guerre israélienne soutenue par la plus grande puissance du monde. Ou il déclare solennellement mettre un terme à ses ambitions de continuer à gouverner Gaza en cédant la place à l’Autorité palestinienne par exemple.
Ainsi, le Hamas doit se rendre à l’évidence que son retrait du pouvoir n’est pas exigé seulement par Israël. Sans parler des pays occidentaux, la plupart des pays arabes, dont l’Egypte et l’Arabie saoudite, désirent le voir quitter la scène palestinienne.
Jusqu’ici, on ne sait pas si Netanyahu va reprendre la guerre ou s’engager, comme prévu initialement, dans le second round des négociations. Au cas où il choisit de reprendre la guerre, la seule solution pour éviter la destruction de ce qui reste à Gaza et d’épargner aux survivants de nouveaux massacres passe par l’annonce du Hamas de son retrait. Cela renforcera sans doute la position du monde arabe, qui n’a jamais été aussi uni, dans son opposition au sinistre projet que Trump et Netanyahu tentent d’imposer.
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