Au-delà du cessez-le-feu à Gaza : le bilan accablant du projet sioniste
Après plus de quinze mois d’une agression sioniste barbare empreinte de l’intention avérée de commettre un génocide et une résistance palestinienne dont l’héroïsme sera inscrit en lettre d’or dans les livres d’histoire et enseigné dans les académies militaires, si toutefois on y enseigne encore l’honneur, un cessez-le-feu a été finalement décrété à Gaza. Mais si l’euphorie de la victoire est légitime, il ne faut cependant pas perdre de vue l’obligation d’analyser exhaustivement ce cessez-le-feu âprement négocié pour essayer de bien comprendre sa signification en rapport avec le projet sioniste au Moyen-Orient.
Prof. Mohamed-Dahmani Fathallah *
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Il est évident que même si ce cessez-le-feu a été réclamé par toute la communauté internationale y compris la société civile en Israël, il ne sous-entend en rien un changement de direction du projet sioniste mondial au Moyen-Orient. Le conflit entre les Palestiniens et l’entité israélienne n’est que la tête de pont de ce projet à l’idéologie démoniaque. Il convient donc de rappeler les contextes de cette énième péripétie.
D’abord le contexte géographique qui dépasse la terre de Palestine et cible tout le Moyen-Orient, lequel couvre un territoire allant par extension de l’actuel Maroc à l’ouest jusqu’au Pakistan/Afghanistan à l’est et dont la Palestine, terre des prophètes, est l’épicentre, avec le contrôle de la ville sainte de Jérusalem/Al-Qods comme le symbole ultime de la mainmise sur ce grand territoire.
Aujourd’hui Jérusalem est la capitale (officielle mais non reconnue internationalement) de l’entité sioniste colonialiste. Alors que le contexte géographique est bien défini, même si le projet sioniste est de nature globale, le contexte historique est trompeur, puisque le sionisme a pu l’accommoder selon ses desideratas grâce à une ingénierie perfide reposant en premier lieu sur une définition farfelue du sémitisme et la légende du peuple élu.
Le statut de victime historique unique
Cette légende qui sert leurs desseins, les sionistes l’ont inculquée à travers un contrôle exclusif des médias de masse aux peuplades juives d’abord puis au reste du monde.
Le projet sioniste a aussi capitalisé sur la création du statut de victime historique unique en amplifiant les exactions dont les Juifs ont pu subir à travers l’histoire.
Enfin, et depuis la création par la force et la fourberie des Anglais et des Européens de l’entité israélienne en Palestine, les sionistes, fort de leur succès dans la manipulation de l’histoire et de leur pouvoir d’imposition au public occidental des légendes servant leur projet, ont en plus créé la légende du seul pays théocratique démocratique et de l’armée la plus éthique malgré des pratiques largement documentées contraires aux conventions internationales et surtout aux croyances judaïques originelles prônées par de grands rabbins juifs depuis des millénaires.
Les sionistes avaient compris que depuis Alexandre le Grand, le contrôle du monde passait par le contrôle du Moyen-Orient. Ils ont donc bien assimilé la nature particulière de cette région et ils ont adapté la stratégie de leur projet d’hégémonie à ce contexte géographique et ont savamment altéré le contexte historique.
En fait la situation au Moyen-Orient a toujours été complexe et ses racines profondes remontent loin dans l’histoire de l’humanité. Elle fut séquentiellement marquée par la succession et les conflits des empires antiques des Accadiens (Iraq actuel), des Achéménides (Iran actuel), de l’Egypte impériale et des Babyloniens.
Puis l’histoire du Moyen-Orient fut liée de façon intriquée à l’éclosion des religions abrahamiques monothéistes que sont le judaïsme, le christianisme et l’islam. La région a été depuis le théâtre de conflits incessants. Même si ces conflits ont toujours été très marqués par l’aspect religieux et culturel, ils ont en fait été surtout influencés par des intérêts géopolitiques, des luttes pour le pouvoir et des enjeux territoriaux pour s’accaparer les richesses. Les croisades en sont la meilleure illustration. Les guerres modernes, où les Etats jouent un rôle central, obéissent toujours à ce schéma millénaire immuable.
En ce qui concerne le conflit israélo-palestinien qui représente le fond-de-commerce du projet sioniste, les Sionistes ont profité des évènements du 11 septembre 2001 pour fait évoluer ce schéma en y intégrant la notion de lutte contre le terrorisme et le principe d’autodéfense après avoir bien pris soin d’introduire une confusion ente le statut de combattant pour la liberté et celui de terroriste.
Fort de cette énième manipulation des conventions, les Sionistes ont poussé l’ignominie jusqu’à ajouter la déshumanisation au schéma des conflits armés pour faire passer auprès de l’opinion publique le génocide qu’ils ont commis à Gaza.
Les conflits entre Israël et les Palestiniens ont toujours été marqués par des cycles de violence, des négociations de paix infructueuses et des tensions politiques permanentes. Mais depuis que le mouvement Hamas a pris sur lui la lutte armée pour la libération de la Palestine et des Palestiniens du joug sioniste, le conflit s’est durci et a formé une vraie entrave au projet sioniste dans la région surtout que les Sionistes étaient en train de réussir à neutraliser les pays limitrophes par des accords de coopération floues garantissant à l’entité sioniste la reconnaissance d’un Etat souverain et d’une paix durable.
Le dernier conflit en date a cependant constitué un point de rupture avec les précédents. Ainsi, en prenant le devant, le Hamas a transformé une guérilla de résistance à un occupant barbare en une bataille pour l’indépendance qui a dévoilé au monde la vraie nature du projet sioniste dans la région. Les Sionistes ont voulu que ce dernier conflit soit à l’occasion une des étapes finales de leur projet au Moyen-Orient. Mais une première évaluation à la lumière du cessez-le-feu en cours nous fait penser que la notion de «victoire» dans ce conflit peut être interprétée de différentes manières selon le point de vue adopté.
Cependant la bonne évaluation de la victoire ou de la défaite se conçoit au-delà du cessez-le-feu par l’établissement d’un bilan des faits relatifs au projet sioniste.
Des agressions meurtrières récurrentes
Sur le plan militaire, si l’on considère la grande capacité de la machine de guerre du camp sioniste avec sa garde avancée en Israël et ses bases en Europe et aux Etats-Unis, on ne peut plus parler de guerre mais d’agressions meurtrières brutales et récurrentes.
Le génocide perpétré à Gaza s’ajoute aux millions de morts que le projet sioniste a causé rien que ces trois dernières décennies en Iraq, Syrie, Libye, et Afghanistan avec la destruction massive et systématique des infrastructures, des habitations et des ressources naturelles.
Toutefois, si on considère que le Hamas a réussi à résister militairement pendant plus d’une année à l’armada sioniste et à lui infliger des pertes significatives, on peut parler de victoire tactique. D’autant plus que la sacro-sainte sécurité d’Israël au détriment de celle des Palestiniens a été désacralisée à l’occasion et que beaucoup de colons ont été déplacés des terres qu’ils avaient spoliées.
Mieux encore, le monde a réalisé l’ampleur des crimes de l’armada militaire israélienne qui est au service d’une poignée d’exaltés dirigeant le projet sioniste mondial.
Aujourd’hui, après avoir défait le Hezbollah au Liban, Israël a consolidé sa mainmise sur le plateau du Golan. Elle occupe même un nouveau territoire en Syrie où elle a installé dans un chaos méticuleusement orchestré un régime qui lui est favorable.
Sur le plan politique, le projet sioniste prévoit de redessiner la carte géopolitique du Moyen-Orient. Et à ce jour, les Sionistes ont réussi à détruire de grands pays comme l’Iraq et la Syrie ainsi que la Libye en y introduisant sous couvert de démocratisation un chaos indescriptible. Ils ont aussi réussi à vassaliser d’autres comme les pays du Golfe, le Maroc, l’Egypte et la Jordanie. Ils n’ont pas pour autant réussi à remodeler les frontières ni à faire plier les peuples et aucune reconnaissance d’un Etat israélite sioniste n’a pu être obtenue qu’à travers des accords de paix imposés aux pays vassalisés.
Les entraves au projet sioniste global
A l’opposé, le Hamas est perçu comme ayant gagné. En effet, en plus des lourdes pertes infligées à l’armée israélienne, le Hamas a remis la cause palestinienne à l’ordre du jour alors que la communauté internationale commençait à l’oublier. Mieux encore, le bloc occidental a commencé à se fissurer politiquement après la reconnaissance depuis le dernier génocide à Gaza de l’Etat Palestinien par des pays courageux et justes comme l’Irlande, l’Espagne, la Norvège en plus du Mexique, de la Barbade, de la Jamaïque, de Trinité-et-Tobago, des Bahamas, de l’Arménie et de la Slovénie. Ceci porte le nombre de pays ayant reconnu l’Etat Palestinien à 154 sur les 193 que compte l’organisation des Nations unis.
Ailleurs dans le monde, les conflits armés fomentés par les Sionistes et leurs agents se sont multipliés. En Ukraine, la Russie s’est embourbée dans une guerre d’usure que les atlantisto-sionistes s’ingénient à prolonger pour l’affaiblir après avoir réussi à l’isoler de l’Europe qu’ils ont totalement vassalisée. La puissance militaire et la volonté politique de la Russie d’être le chef de file d’un bloc politico-économique qui rivaliserait avec le bloc occidental représentent avec le conflit en Palestine les plus grandes entraves au projet sioniste global.
En Afrique, le projet sioniste s’est révélé à travers la forte offensive diplomatique menée par Israël et qui a réussi à menacer l’unité et l’intégrité du continent. En effet en 2021, Israël s’est vu accorder le statut d’observateur au sein de l’organisation de l’Union africaine (UA) et ce grâce à une surprenante décision unilatérale du président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat. Ce dernier a fait fi des valeurs inscrites dans l’acte fondateur de l’UA qui condamnent fortement l’apartheid et le colonialisme. Cette décision a été néanmoins annulée à la suite d’une forte pression exercée par les Etats membres que sont l’Afrique du Sud, le Nigeria, l’Algérie, la Namibie, le Botswana et la Tunisie.
Cependant, cette affaire a créé une polémique au sein de l’UA qui a scindé l’organisation en deux camps. Le bilan de cette affaire est à mettre au crédit du projet des sionistes qui ont semé les germes de la désunion chez les africains.
Sur le plan humanitaire, à travers tous les pays du Moyen-Orient, exception faite des pays du Golfe, le projet sioniste a occasionné des souffrances humaines considérables aux populations particulièrement aux Palestiniens. En Palestine, les conditions de vie déjà précaires sont en effet devenues insupportables. Les pertes humaines et les infrastructures détruites donnent un goût amer à la «victoire» proclamée, car elles exacerbent la souffrance des populations civiles, qui ont culminé avec le génocide perpétré à Gaza. Un génocide que les gouvernants du monde pseudo-civilisé ont activement soutenu alors que beaucoup d’autres ont observé une indifférence choquante malgré les appels pressants et les initiatives de quelques pays et d’un bon nombre d’organisation non gouvernementale auprès de la Cour pénale internationale. Mais cette organisation a fini malgré toutes les pressions par inculper Benjamin Netanyahu, le chef file public du sionisme, et son ministre de la guerre, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité et émettre des mandats d’arrêts internationaux contre eux.
Le projet sioniste se nourrit du chaos
Paradoxalement ces accusations et ces mandats d’arrêt ont aussi été portés contre Mohamed Deif, l’un des chefs de la résistance palestinienne, même si cela n’a pas été suivi de conséquence exécutive à ce jour. Ces faits donnent à réfléchir sur la signification du droit international et surtout sur les conditions de son application. Les revers que connaît l’organisation des Nations-Unies se multiplient comme en témoignent les vetos consécutifs du bloc sioniste aux appels au cessez-le-feu. Le dernier revers en date est venu sous la forme de l’expulsion de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) de Jérusalem-Est. Cet ordre d’expulsion interdit les activités de l’UNRWA en Israël, à Jérusalem-Est, et dans tous les territoires occupés depuis 1967.
Tous ces bilans sont à l’évidence temporaires tant la situation engendrée par le projet sioniste est aussi troublante que complexe. Cette complexité est devenue d’autant plus grande après l’élection de Donald Trump à la tête de l’exécutif américain. Bien que ce personnage ait déjà occupé ce poste auparavant, ces nouvelles décisions et déclarations irresponsables sont en train créer un chaos global et sans précèdent dans les dynamiques et les équilibres des pouvoirs, des religions et des cultures. Ceci ressemble beaucoup à la marque de fabrique du projet sioniste qui se nourrit essentiellement de chaos pour exister et qui a choisi Donald Trump pour ses dons innés de perturbateur et l’a mis totalement à son service.
La recherche d’une solution globale juste, pacifique et durable, qui demeure essentielle pour éviter davantage de souffrances et de pertes humaines, ne semble plus à l’ordre du jour. L’avenir du monde, qui était déjà un sujet complexe, est en train de devenir plus incertain que jamais. Dans cet indescriptible chaos, les facteurs politiques, sociaux et économiques sont de plus en plus imprédictibles. Les perspectives varient considérablement et plusieurs scénarios peuvent être envisagés selon les bilans du projet sioniste.
* Millenium 3 Advisory.
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