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Le poème du dimanche | ‘‘Sostenuto’’ de Monchoachi

07. Dezember 2025 um 07:35

Né en 1946 à Saint Esprit, en Martinique, Monchoachi est poète et essayiste. Il publie des ouvrages de poésie, en français et en créole, ainsi que des essais.

Monchoachi a entrepris depuis quelques temps une longue investigation poétique visant à mettre en évidence le projet dévastateur de l’Occident au regard des autres cultures : Lémistè 1-Liber America, consacré aux Amériques; Lémistè 2-Partition noire et bleue sur l’Afrique et l’Océanie; Lémistè 3 – Fugue vs Fug consacré à l’Europe, Lémistè 4 Streitti : la séparation dans le rapport au monde qui induit le  monothéisme, ici le judaïsme; Lemistè 5 La Grande Mesure, sur la Chine et l’Asie, non encore publié. Tous aux Editions Obsidiane. Le texte publié ici est inédit.

Tahar Bekri

Le Temps détraqué

Donc, avons dérivé jusqu’au fond des âges

                           Nuit puis jour,

                                  et jour encor

Remué ferments, démêlé tissures

Marché sur les pistes divines

D’un bord du ciel à l’autre flairé l’infime trace

             les senteurs dissipées,

Pieds poudrés aux carrefours avons dérapé

Monter-descendre dessus les dunes prendre pèse la terre

       dans le gypse, dans le sable sec

Et dans zentrailles fourmilières roulée en ses spires

L’éternité au Milieu balbutiée

             plein fentes, plein béances

             où affluent grande bondance

       gemmes et couleurs géminées

       parures dorées à lacer

              respir et resplendir

                    rires et bredouillis

       figures mêlées murmures qui ruent

             tambours, et sans répit, frappés-des-pieds :

       répétée, la fleur qui s’épanouit, immortelle

Transmue la nuit en chien qui mendie à la lune

Divin miroir de la danse sacrée dont la magique

       méduse, enserre,

                    puis tantôt détraqué

             raille la demeure des humains,

       offense et disjoint le Temps

             l’arène d’où le feu saillit,

       le séjour qui accueille et lie,

 l’arbre aux branches ombrageuses qui recueille le chant puissant,

       offense et démêle l’outre de la source force de vie

              en deux rives rases

             l’une pour l’autre perdue, l’une comme l’autre

             vouée à forligner :

       passé dépassé   présent déserté,

                           crotté d’actuels

       et, sous la main qui tâtonne, aucune destinée n’affleure,

       pièce voix basse ne branle à l’oreille longée.

Un voile glacé ce monde que l’Occident

             depuis mille ans arrache

                            puis assèche

Vieille peau battant ténèbes

déchet, chèvre noire du sacrifice.

Visions errantes dans ces décombres vont et viennent

les créatures s’effacent sans un regard

Immobiles beuglent les âmes encagées.

       Réveiller l’attente, déchirer la natte du Couchant.

II

             «…notre châtiment l’histoire» (1)

Pure l’attente qui rend l’homme au Temps, le dieu au visage

tatoué qui s’est jeté au feu et n’aspire qu’à restorer ses enfants,

ceux-là même couverts des raies blanches du sacrifice

depuis que la Roue s’est figée et refuse de tourner. Au sommet

du ciel, la vie lui a bâti sa demeure de nacre rouge, d’où Il porte

ciel et terre, fait marcher les neuf ciels et tourner l’univers.

A ses côtés la lune monte à travers le firmament revêtue de haillons

et couverte de cendres bleues quand tombe

la nuit.

Et l’attente, main ouverte, lèvres entr’ouvertes,

ajourée comme une forêt souriante,  attend. fait exister l’Instant,     

milieu vertical-lhorizontal,

blanc carrefour tournant,

oiseau aux ailes brillantes

immobile

engrangeant Silence.

En l’attente habitante le corps dépouillé, jarre vide,

sans ombre  se fait miraculeux soleil.

Et l’attente ainsi, rétablit le Temps pour l’heure

enrégimenté, elle lui restitue ses corde musicales légères sur

lesquelles le corps peut désormais nu, sur l’une,

                                            sur l’autre

tel l’oiseau, telle goutte de rosée

sauter

et le bruit des pas ici et là

   le bruit des pas

   ici-là

   sentir beauté passer entre les lèvres,

 le pays natal brasser le corps

et la bouche, une aube sortie de l’ombre

grimper danser faire avec toute la gourmandise

                       et l’étreinte de la langue,

avec des notes et une voix claire

   à nouveau faire avec grâce, avec joie

tourner la Roue.

Lémistè 6

(Inédit, remerciements à l’auteur).

1- Octavio Paz, Pasado en claro.

Note de la rédaction:

– Sostenu ; soutenu;

– Lemisté ; les mystères.


     

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