Le Pentagone abandonne son ambition de contenir la Chine
La politique de Trump serait un déni agressif des règles existantes sur tous les fronts ou peut-être d’un « grand repli » dissimulé, avec un ajustement des engagements politico-militaires des États-Unis au déclin de leur poids dans l’économie mondiale ? Probablement la deuxième hypothèse. Etant donné que les stratèges du Pentagone commencent à l’admettre.
Selon un rapport de Politico, publié lundi 8 septembre, qui cite trois sources ayant connaissance du texte, le projet de la dernière version de la Stratégie de défense nationale, qui est généralement révisée au début de chaque mandat gouvernemental et a déjà été transmis au bureau du secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, il y a quelques jours, donne la priorité à la sauvegarde de la sécurité intérieure et régionale (c’est-à-dire l’hégémonie sur l’hémisphère occidental) comme une priorité plus importante que la confrontation avec des adversaires internationaux, tels que Pékin et Moscou.
Si cela était officialisé, cela constituerait un changement majeur par rapport aux politiques des récents gouvernements américains, qu’ils soient démocrates ou républicains, y compris celles des quatre premières années de Trump.
Il suffit de rappeler que la Stratégie de sécurité nationale de 2018 place la maîtrise de la Chine au premier rang des défis auxquels Washington est confronté.
La rhétorique de Trump à l’égard des puissances eurasiennes reste acerbe. Comme le prouvent du reste ses récents propos (mi-blagueur, mi-sérieux ?) concernant le sommet de Tianjin et la manière dont la Russie, la Chine et la Corée du Nord « conspirent » pour « saper » les États-Unis.
Mais au fond, un nouveau « réalisme » semble gagner du terrain. Et si le projet de stratégie de sécurité nationale 2025 est susceptible d’être modifié par Hegseth, les actions de l’administration Trump sont aussi éloquentes que les textes.
Le déploiement de forces fédérales pour maintenir l’ordre dans la capitale, Washington (avec la perspective d’étendre le modèle de militarisation du maintien de l’ordre à d’autres villes), ainsi que le déploiement de forces navales dans les Caraïbes, invoquant la nécessité de lutter contre le trafic de drogue en provenance du Venezuela, semblent déjà figurer dans les pages du projet. Il en va de même pour la réduction de l’aide militaire américaine, de plusieurs centaines de millions de dollars, accordée aux pays d’Europe de l’Est dans le cadre de l’Initiative de sécurité balte.
Le « Département de la Guerre » lui-même, comme Trump, enclin à la lionisation, veut le renommer, donne donc le signal de limiter son rayon d’action.
Le « cerveau » de ce changement est largement considéré comme le sous-secrétaire à la Défense chargé de la politique, Elbridge Colby, un « faucon » de longue date sur les questions chinoises et l’un des pionniers de la rédaction de la doctrine de 2018. Paradoxalement, il semble désormais aligné sur le vice-président JD. Vance dans la volonté de libérer les États-Unis de fardeaux extérieurs inutiles.
L’équipe de Colby devrait également publier prochainement deux autres documents importants, qui concernent le déploiement des troupes dans le monde (Global Posture Review), dont les 80 000 soldats américains stationnés en Europe, ainsi que l’armement.
Toutefois, le fait que les États-Unis, sous la direction de Trump, cherchent désormais à transférer davantage de fardeaux à leurs alliés ne signifie pas nécessairement un renversement de l’ambition générale d’affaiblir la Chine et la Russie. L’accent mis sur la « doctrine Monroe » n’annonce pas non plus des temps plus paisibles– du moins en ce qui concerne l’Amérique latine, comme le Venezuela le sait déjà. Mais le renversement auquel Colby travaillerait suggère que les personnes bien informées ont déjà fait leurs calculs, concluant que la fenêtre de temps pour l’« endiguement » est close et qu’un équilibre instable se dessine entre des puissances presque égales, chacune disposant de sa propre sphère d’influence.
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