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La Global Sumud Flottilla, une odyssée humanitaire pour Gaza

16. September 2025 um 12:34

Sous le ciel pâle et indécis de septembre, les ports de Bizerte et de Sidi Bou Saïd vibraient d’une ferveur inhabituelle. Une marée humaine, drapée de keffiehs et de drapeaux palestiniens, déployait ses couleurs rouge, verte, noire et blanche. L’air se chargeait de senteurs mêlées : le poisson grillé, le jasmin enivrant, le sel des embruns, portés par les accents rauques du mezoued et les chants de lutte venus de Palestine comme d’Afrique du Sud. C’était une kermesse révolutionnaire, un carnaval des consciences, où chaque visage reflétait la fierté d’une Palestine debout, dont la voix est portée par une Tunisie solidaire, accueillant les héros anonymes de la Global Sumud Flotilla.

Abdelhamid Largueche *

Jamais, depuis que les hommes naviguent, la mer n’avait vu pareille convergence de consciences. Plus de soixante-dix navires, venus des quatre horizons, s’étaient lancés d’un même mouvement, portés par une conviction commune : secourir un peuple assiégé. Leur destination : Gaza. Leur mission : briser un blocus maritime imposé par l’Etat génocidaire d’Israël et dénoncé par le droit international. Leur mot d’ordre : «Paix».

À bord, ni arme, ni soldat, ni calcul militaire, ni agenda politique. Seulement des vivres, des médicaments, des volontaires — et cette certitude têtue : la solidarité demeure un levier pour desserrer l’étau de la violence.

Des centaines de citoyens engagés

Cette mobilisation inédite, portée par la Freedom Flotilla Coalition, rassemblait d’autres initiatives : le Mouvement Global vers Gaza, la Flottille maghrébine — à laquelle s’était joint le Maroc — ou encore la Flottille Nusantara. Ensemble, elles ont donné naissance à ce projet humanitaire hors norme, avec l’appui de centaines de citoyens engagés.

Parmi eux, des figures émergent. Thiago Avila, militant brésilien au visage buriné par le soleil, rescapé du Madleen, le bateau intercepté en juin par les Israéliens près des côtes palestiniennes, dont le sourire fatigué apparaît comme une victoire sur l’adversité. Non loin, Wael Naouar, porte-parole du comité maghrébin, scrute les tracés rouges d’une carte à la lumière vacillante des radios. À ses côtés, Rima Hassan, député européen, une Franco-palestinienne au regard ardent, qui cisèle ses communiqués comme un orfèvre, tandis que Greta Thunberg, Suédoise aux tempes argentées icone de l’écologie, initie les volontaires aux gestes de la résistance non-violente. Et puis, figure imposante et sereine, Mandla Mandela, petit-fils de Madiba. Il serre les mains, embrasse les militants, sa voix grave portant l’héritage de tout un continent : «La solidarité n’est pas un mot, c’est un acte.» Il rappelle que la liberté de son grand-père demeure inachevée tant que celle des Palestiniens reste niée.

Pour desserrer l’implacable étau

Depuis 2007, en effet, Gaza vit sous blocus terrestre, maritime et aérien. Israël a imposé ce verrouillage après la victoire du Hamas aux élections législatives de 2006, pourtant jugées libres et régulières. Près de deux millions d’habitants survivent dans un isolement quasi total. L’accès à la nourriture, aux soins, à l’électricité et à l’eau y est restreint, conditionné. ONG et institutions décrivent Gaza comme une «prison à ciel ouvert».

Les offensives militaires ont régulièrement ravagé l’enclave depuis 2008, jusqu’au désastre apocalyptique d’octobre 2023 et qui se poursuit depuis, faisant plus de 65 000 morts, dont plus de la moitié sont des femmes et des enfants, et 160 000 blessés.

La mémoire garde encore le drame du bateau Mavi Marmara, en mai 2010 : neuf morts et une cinquantaine de blessés, victimes d’un assaut israélien en pleines eaux internationales. Depuis, chaque volontaire sait qu’il s’expose à la prison, parfois à la mort.

Appareillage dans l’indifférence complice

Le 15 septembre, les navires quittent les ports de Bizerte, Sidi Bou Saïd et Gammarth dans une indifférence glaçante des médias occidentaux, toujours soucieux de ménager l’agresseur israélien. Peu de caméras, peu de titres, peu d’attention, en dehors de celle assurée par quelques militants engagés, comme si la grandeur de ce geste pacifique et courageux ne trouvait pas place dans le récit dominant.

Alors que les moteurs vrombissent, un silence solennel s’abat sur le port. Francesca Albanese, rapporteuse spéciale de l’Onu pour la Palestine, apparaît sur le quai. Sa présence donne à l’instant une lumière officielle et grave. Elle serre les mains des équipages, étreint Wael et Thiago, s’incline devant Mandla. Ce geste, simple et fort, rappelle à la communauté internationale ses propres manquements.

Côte à côte, Wael, Rima, Greta, Thiago, Mandla et tant d’autres regardent les navires s’éloigner, silhouettes fragiles découpées dans l’immensité bleue. La fête s’achève. Commence le voyage : la mer immense et, au-delà, les hommes. Escortés par ceux qui refusent que la Méditerranée devienne prison, ils portent avec eux l’héritage de Mandela et la ténacité d’un peuple. Ils partent, incarnant le «Sumud», cette résistance persévérante et opiniâtre qui défie tous les blocus.

Rima Hassan et Greta Thunberg.

A l’avant-garde de l’humanité

Ces bateaux désarmés témoignent d’une force morale comparable aux grandes pages de courage de l’histoire moderne. Certains osent dire que leur audace évoque les débarquements de la Seconde Guerre mondiale : moins d’armes, mais davantage de cœur et d’humanité.

La question qu’ils posent, par leur seule navigation, transcende Gaza : «Que diront de nous nos enfants, et les enfants de nos enfants, face au génocide en cours ?»

Peut-être retiendront-ils que, malgré la guerre, l’indifférence et la complicité dans le génocide perpétré sous nos yeux, des centaines de femmes et d’hommes venus de quarante-quatre pays ont choisi de naviguer pour la dignité.

Ils diront que, dans la nuit de l’Histoire, ils ont refusé le confort de l’oubli. Qu’ils ont choisi la mer comme chemin d’espérance. Et qu’ils ont écrit, avec leurs voiles fragiles et leurs coques modestes, une page de résistance pacifique défiant le temps.

Ces femmes et ces hommes sont l’avant-garde de l’humanité.

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