Kamel Daoud dérape dangereusement…
Dans une récente émission, Christian Dechavanne dit à Kamel Daoud : «Vous êtes la séduction faite homme de tout point de vue», et l’écrivain algérien répond : «J’ai beaucoup travaillé pour arriver à ce jour», résumant ainsi la quête qui a marqué tout son parcours jusque-là. «Je n’aime pas la pauvreté, dit-il dans la même émission (…) Je suis venu ici pour gagner, pour être le premier, pour avoir des prix, pour être admiré». C’est déjà fait, et on peut dire que pour y arriver, il a trouvé le filon : stigmatiser les siens qu’il méprise et accable, en ne reculant devant aucun excès pour plaire à l’autre qu’il admire et auquel il cherche à ressembler. (Voir vidéo ci-dessous)
Helal Jelali *
Dire que l’on marie les Algériennes et qu’on les enferme à 18 ans, comme l’a fait Kamel Daoud, entre autres excès, est complètement faux. En 1988, dans les campus des universités, la moitié des étudiants étaient des Algériennes, des étudiantes… Visitez un hôpital algérien et comptez le nombre de femmes médecins. Visitez un tribunal et comptez le nombre des femmes juges ou avocates. Dans les services publics, le nombre des Algériennes est presque proche des pays européens. Dans les guichets des mairies, les Algériennes sont bien représentées.
Ah oui, j’ai oublié les Algériennes «enfermées» dans les cockpits des avions civils d’Air Algérie et des appareils militaires, et celle qu’on vient de nommer directrice du prestigieux Institut Pasteur de Paris, Yasmine Belkaid.
Je compte parmi les amis de nombreuses familles algériennes, parmi elle, une famille de l’oasis de Tolga (Biskra). De cette famille sont sorties 3 femmes médecins et une pharmacienne qui officie à Alger, au début des années 1980. Ces femmes médecins avaient fait leurs études à la faculté d’Alger.
Il faut dire que, sans le crier sur les toits comme Bourguiba et pour ne pas choquer les conservateurs, Boumediene avait beaucoup fait pour la scolarisation des filles. Peut-être sous l’influence de son épouse qui était avocate et très progressiste.
Enfin, je relève dans vos différentes interventions dans les médias des positions assez extrémistes. C’est regrettable qu’un climat «Zemmourisé» en vogue en France puisse vous éblouir… «La vertu est l’équilibre entre les deux extrêmes», disait Aristote. Relisez le discours d’Albert Camus à Stockholm pour mieux comprendre votre métier d’écrivain : «La vérité est mystérieuse, fuyante, toujours à conquérir. La liberté est dangereuse, dure à vivre autant qu’exaltante. Nous devons marcher vers ces deux buts, péniblement, mais résolument, certains d’avance de nos défaillances sur un si long chemin.»
C’est vrai que les discours sur le musulman, l’arabe et l’insécurité sont devenus une belle rente politique, médiatique, intellectuelle et aussi financière.
Presque la majorité de la droite, une partie de la gauche et une certaine partie de l’élite française a fait son «beurre» sur ce créneau. Les éléments de langage du parti de Marine Le Pen sont devenus banals, courants et ordinaires. On peut presque parler de fascination chez certains, y compris des Maghrébins comme Kamel Daoud, pour l’extrême-droite. C’est dans l’air du temps… Mais on peut comprendre que des Maghrébins, qui se sentent injustement stigmatisés, en soient profondément choqués. Et de l’écrire, comme moi ici.
* Ancien rédacteur en chef dans une radio internationale à Paris.
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