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DOSSIER SPECIAL (II) – Trump et le Maghreb : entre défis et opportunités dans un monde reconfiguré

12. November 2024 um 06:35

La présidence de Donald Trump, sera marquée par son style de gouvernance non conventionnel et son approche centrée sur les intérêts américains, aurait des répercussions significatives sur les relations internationales et sur les pays du Maghreb, dont la Tunisie.

Dans un contexte global marqué par les rivalités géopolitiques, les tensions commerciales et une polarisation accrue, les choix de politique étrangère de Trump pourraient introduire des incertitudes, tout en offrant des opportunités de repositionnement stratégique pour les pays maghrébins.

 

ZOOM 2 – Deuxième incertitude : un rapprochement avec les régimes stricts et la stabilisation des alliances en Afrique du Nord

Sous l’administration Trump, l’approche pragmatique et souvent transactionnelle envers les régimes stricts a mis en avant la stabilité et les intérêts économiques comme priorités stratégiques, souvent au détriment des droits de l’Homme.

Cette vision pourrait renforcer les alliances des États-Unis avec certains gouvernements d’Afrique du Nord, assurant une stabilité politique immédiate, mais suscitant des préoccupations quant à l’avenir des réformes démocratiques dans la région.

 

  • Effets de l’approche pragmatique et du soutien aux régimes stricts en Afrique du Nord

Trump a adopté une approche plus tolérante vis-à-vis des régimes stricts, considérant la stabilité politique comme un levier pour sécuriser les intérêts économiques et stratégiques américains dans des zones géopolitiquement sensibles.

En Afrique du Nord, où plusieurs pays connaissent des tensions sociales et politiques, cette politique pourrait se traduire par un soutien accru à des gouvernements qui maintiennent un pouvoir strict pour éviter l’instabilité.

Des pays comme l’Égypte et la Libye, confrontés à des défis sécuritaires, pourraient bénéficier de ce pragmatisme dans la mesure où les États-Unis privilégieraient la lutte contre le terrorisme et le contrôle des flux migratoires; même si cela implique un renforcement de mesures répressives locales.

Une telle dynamique pourrait permettre aux gouvernements autoritaires en Afrique du Nord d’obtenir un soutien diplomatique et financier des États-Unis sans être soumis à des pressions pour adopter des réformes démocratiques.

La Tunisie, en tant que seul pays ayant véritablement réussi une transition démocratique après les révolutions de 2011, pourrait quant à elle se retrouver isolée. Car son modèle de gouvernance axé sur la participation démocratique et les droits de l’Homme ne s’inscrirait pas forcément dans les priorités de cette vision pragmatique.

 

  • Effets de l’impact sur les aspirations démocratiques et les droits de l’Homme

Bien que cette approche puisse assurer une certaine stabilité à court terme, elle risque d’étouffer les aspirations démocratiques de la société civile dans les pays du Maghreb. En l’absence de soutien extérieur pour promouvoir les réformes institutionnelles, les mouvements « pro-démocratie » pourraient se retrouver affaiblis. Et les dirigeants pourraient renforcer leur pouvoir en adoptant des mesures de contrôle social et politique plus strictes.

La jeunesse et les groupes civils, qui ont été les moteurs des demandes de changement et d’ouverture politique dans les pays du Maghreb, pourraient ressentir une frustration croissante. Ce blocage des aspirations pourrait également engendrer de nouvelles tensions sociales et politiques à moyen terme, les citoyens percevant cette alliance stratégique comme un abandon des valeurs démocratiques au profit de simples intérêts économiques et sécuritaires.

 

  • Effets sur le repositionnement géopolitique et le renforcement des alliances alternatives

La réévaluation des relations de Trump avec les alliés traditionnels des États-Unis, notamment les pays européens, crée une opportunité pour les États nord-africains de renforcer leurs relations avec des puissances émergentes telles que la Chine et la Russie.

Ces puissances alternatives, qui adoptent également une approche pragmatique et moins regardante sur les pratiques strictes, pourraient offrir un soutien économique et technologique substantiel aux pays du Maghreb en échange d’un alignement stratégique.

Le Maroc, par exemple, pourrait poursuivre ses collaborations avec la Chine dans le cadre de l’initiative de la « Nouvelle Route de la Soie » avec des investissements dans les infrastructures et les zones industrielles.

De son côté, l’Algérie, riche en ressources énergétiques, pourrait intensifier sa coopération militaire avec la Russie pour diversifier ses partenariats de défense.

 

  • Effets sur les risques d’une dépendance stratégique

Toutefois, un repositionnement vers des alliances avec la Chine et la Russie n’est pas sans risques. Les pays du Maghreb pourraient devenir stratégiquement dépendants de ces puissances. Se retrouvant parfois contraints d’adopter des orientations politiques et économiques alignées sur les intérêts de Pékin et/ou de Moscou.

Cette dépendance pourrait également limiter leur autonomie décisionnelle dans des domaines critiques comme la politique énergétique, la gestion des infrastructures et la technologie.

La Chine, par exemple, pourrait profiter de son influence pour imposer des conditions économiques favorables à ses propres entreprises, limitant le développement d’une industrie locale.

De plus, une dépendance accrue vis-à-vis de ces partenaires pourrait engendrer des tensions avec les partenaires occidentaux. Et particulièrement avec l’Union européenne, principale partenaire commerciale du Maghreb. Ce qui rendrait la position diplomatique des pays nord-africains plus délicate et polarisée.

 

En définitive, le pragmatisme de l’administration Trump pourrait renforcer le soutien à des régimes stricts en Afrique du Nord, en échange de garanties de stabilité et de coopération dans les domaines économiques et sécuritaires.

Cette approche pourrait offrir une stabilité immédiate mais compromettrait les réformes démocratiques à moyen terme.

Dans le même temps, les pays du Maghreb pourraient chercher à élargir leurs alliances en se rapprochant de la Chine et de la Russie, diversifiant ainsi leurs partenariats économiques et militaires.

Néanmoins, cette stratégie comporte des risques de dépendance et de tensions avec les partenaires occidentaux, rendant le positionnement géopolitique de la région plus complexe et potentiellement instable.

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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DOSSIER SPECIAL (I) – Trump et le Maghreb : Entre défis et opportunités dans un monde reconfiguré

11. November 2024 um 06:30

La présidence de Donald Trump, qui sera marquée par son style de gouvernance non conventionnel et son approche centrée sur les intérêts américains, aurait des répercussions significatives sur les relations internationales et sur les pays du Maghreb, dont la Tunisie.

Dans un contexte global marqué par les rivalités géopolitiques, les tensions commerciales, et une polarisation accrue, les choix de politique étrangère de Trump pourraient introduire des incertitudes, tout en offrant des opportunités de repositionnement stratégique pour les pays maghrébins.

 

ZOOM 1  – Première incertitude : Le retour du nationalisme économique

Le retour du nationalisme économique, incarné par la doctrine « America First » de Donald Trump, marque une rupture significative dans les échanges commerciaux et les flux d’investissements internationaux.

Cette doctrine de protectionnisme assumé, qui cherche à favoriser l’économie américaine en limitant sa dépendance aux importations et en réévaluant les accords commerciaux, risque d’avoir des répercussions directes pour les pays du Maghreb.

Ce retour aux politiques protectionnistes pourrait affecter non seulement le commerce entre les États-Unis et les pays maghrébins, mais également les investissements dans des secteurs stratégiques.

 

  • Effets sur le commerce maghrébin

Les relations commerciales entre les États-Unis et certains pays du Maghreb, notamment le Maroc et la Tunisie, bénéficient d’accords qui facilitent l’accès aux marchés américains.

Par exemple, le Maroc a signé en 2006 un accord de libre-échange avec les États-Unis, favorisant les exportations marocaines vers le marché américain, en particulier dans les secteurs textile et agricole.

En Tunisie, le régime du Système généralisé de préférences (SGP) permet également au marché américain un accès privilégié pour certaines catégories de produits.

Toutefois, une réévaluation de ces accords, conformément à une politique protectionniste, pourrait altérer ces relations commerciales. Le Maroc et la Tunisie verraient leurs marges commerciales se réduire si les États-Unis imposaient de nouvelles barrières tarifaires ou non-tarifaires pour protéger leur propre industrie. En cas de durcissement des conditions d’accès, les exportations de textile, de produits agricoles, et d’autres biens manufacturés du Maghreb vers les États-Unis pourraient en pâtir.

Cela pourrait également freiner la croissance de certaines industries tournées vers l’exportation, augmentant ainsi la pression économique locale.

 

  • Effets sur la réduction potentielle des investissements américains au Maghreb

Le programme économique de Trump cherche à encourager les entreprises américaines à rapatrier leur production, voire leurs capitaux investis à l’étranger.

Si les entreprises américaines réduisaient leurs investissements directs au Maghreb, les effets pourraient être significatifs, car les États-Unis jouent un rôle important dans les IDE au Maroc, en Tunisie et en Algérie.

Les investissements dans les secteurs de l’industrie manufacturière, de l’agroalimentaire et des services risqueraient d’être freinés, limitant l’accès aux technologies et aux compétences américaines.

La réduction des IDE américains pourrait aggraver le manque de financement dans certains secteurs clés de l’économie maghrébine et affaiblir le potentiel de croissance dans des secteurs stratégiques comme les infrastructures, les services financiers et les nouvelles technologies.

La dépendance des économies maghrébines aux flux de capitaux étrangers, surtout pour le financement de projets d’infrastructure et de développement économique, rend ces pays vulnérables face aux changements de priorités économiques des partenaires étrangers.

 

  • Effets sur la transition énergétique au Maghreb

Un autre point crucial est l’impact sur la transition énergétique. L’administration Trump, ayant soutenu les industries fossiles aux dépens des énergies renouvelables, pourrait ralentir les projets de partenariats dans le domaine des énergies propres avec les pays maghrébins. Or, le Maghreb, en raison de ses ressources naturelles abondantes en soleil et en vent, a récemment manifesté un intérêt croissant pour les énergies renouvelables.

Les pays comme le Maroc, très avancé dans sa transition énergétique, comptent sur les partenariats internationaux pour atteindre leurs objectifs. La réduction des soutiens et des partenariats dans les énergies renouvelables pourrait limiter l’accès aux technologies, aux financements et aux savoir-faire américains, ralentissant ainsi l’expansion de ce secteur clé pour le développement durable et l’indépendance énergétique.

 

  • Effets sur la stratégie économique du Maghreb

Face à ce retour du nationalisme économique, les pays maghrébins pourraient être contraints de revoir leur stratégie de diversification économique.

Le Maghreb pourrait chercher à renforcer ses relations commerciales avec d’autres blocs économiques comme l’Union européenne, la Chine ou encore les pays du Golfe. L’approfondissement de partenariats au sein de la région africaine, à travers des initiatives comme la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA), pourrait également représenter une alternative pour compenser les effets d’un retrait américain.

Cette dynamique pourrait également pousser les économies maghrébines à investir davantage dans leur marché intérieur, à encourager la production locale et à réduire leur dépendance vis-à-vis des marchés extérieurs, s’inscrivant ainsi dans une logique de résilience économique face aux changements géopolitiques mondiaux.

 

En définitive, le retour du nationalisme économique incarné par la politique de « America First » pourrait engendrer des perturbations majeures dans les relations commerciales et les investissements des pays du Maghreb avec les États-Unis.

La remise en question des accords commerciaux, la réduction potentielle des investissements américains, et le frein mis aux partenariats dans les énergies renouvelables pourraient ralentir le développement économique de la région.

Pour y faire face, le Maghreb devra intensifier ses partenariats avec d’autres régions, diversifier ses sources d’investissement et renforcer son marché intérieur pour limiter sa vulnérabilité face à l’incertitude des politiques protectionnistes internationales.

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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Vers une refondation de l’économie tunisienne

10. November 2024 um 11:13

Au début de ce second quinquennat, l’économie tunisienne se trouve confrontée à plusieurs défis majeurs qui menacent sa stabilité et son développement à court et moyen termes. 

Ces défis touchent à la fois des aspects structurels, macroéconomiques et sociaux, créant un contexte difficile pour la croissance économique et la cohésion sociale.

Cette analyse vise à examiner ces enjeux de manière approfondie et à esquisser les perspectives envisageables pour les mois et les années à venir.

 

Les cinq défis abordés – l’endettement public et les déséquilibres budgétaires, l’inflation persistante et la baisse du pouvoir d’achat, la faible attractivité des investissements étrangers, le taux de chômage élevé et la migration des talents, ainsi que l’instabilité politique et sociale – forment un ensemble complexe de problèmes interdépendants qui plongent la Tunisie dans une situation économique et sociale critique.

  • Interdépendance aggravante des défis :

Chaque défi a des répercussions profondes sur les autres. L’endettement public chronique limite la capacité de l’État à intervenir efficacement pour soutenir la croissance ou lutter contre les inégalités sociales, tandis que l’inflation persistante érode le pouvoir d’achat des ménages, alimentant un mécontentement social de plus en plus palpable. Parallèlement, la fuite des cerveaux et la faible attractivité des investissements étrangers privent l’économie de deux leviers essentiels pour relancer la croissance et améliorer la compétitivité. Ces difficultés, amplifiées par une instabilité politique permanente, ont pour effet de maintenir la Tunisie dans un cercle vicieux de stagnation, où les mesures correctives sont limitées par les pressions sociales et financières.

  • Spectre d’une aggravation des crises, à court terme :

À court terme, les perspectives économiques et sociales restent préoccupantes. La Tunisie fait face à une croissance molle, une détérioration continue des conditions de vie et des réformes bloquées par un climat politique polarisé. L’endettement élevé et les déficits budgétaires récurrents limitent la marge de manœuvre du gouvernement, tandis que la fuite des talents et la faiblesse des investissements étrangers freinent la création d’emplois. De plus, l’inflation persistante, combinée à des politiques monétaires restrictives, aggrave le ralentissement économique et limite les perspectives d’amélioration à court terme.

Dans ce contexte, la Tunisie pourrait connaître de nouvelles tensions sociales, attisées par une frustration croissante face à l’inaction politique et l’aggravation des conditions de vie. Le mécontentement populaire risque d’intensifier l’instabilité, mettant en péril la cohésion nationale et freinant encore davantage les efforts de redressement économique.

  • Impératif de réformes structurelles, à moyen terme :

Cependant, à moyen terme, il est possible d’inverser cette trajectoire si des réformes structurelles profondes et cohérentes sont mises en œuvre. Le pays doit impérativement réformer son cadre macroéconomique en s’attaquant aux déséquilibres budgétaires, en renforçant l’efficacité fiscale et en maîtrisant ses dépenses publiques. De même, l’amélioration du climat des affaires, avec une lutte renforcée contre la corruption et une simplification des procédures bureaucratiques, est cruciale pour attirer les investissements étrangers et revitaliser les secteurs clés de l’économie.

L’investissement dans des secteurs porteurs tels que les énergies renouvelables et les technologies numériques est également essentiel pour diversifier l’économie et créer des opportunités d’emploi. Parallèlement, des politiques actives pour freiner la migration des talents et promouvoir l’innovation intérieure sont indispensables pour renforcer le potentiel de modernisation de l’économie.

  • Nécessité d’un consensus politique et social :

Une condition sine qua non de la réussite de ces réformes est un consensus politique et social fort. Le dialogue entre les différents acteurs – gouvernement, partis politiques, société civile, syndicats – doit être relancé pour parvenir à des compromis nécessaires. Ce consensus permettra de surmonter les résistances face aux réformes souvent perçues comme impopulaires, tout en garantissant une meilleure répartition des fruits de la croissance.

 

Un tournant décisif pour la Tunisie

La Tunisie se trouve à un tournant décisif de son histoire économique et politique. La combinaison de ces cinq défis montre l’ampleur des réformes à entreprendre pour restaurer la stabilité et relancer la croissance. Si les obstacles sont immenses, des opportunités existent, à condition de faire preuve de volonté politique et d’engagement collectif. Seule une approche globale tenant compte des enjeux économiques, sociaux et politiques permettra à la Tunisie de sortir de cette spirale et de retrouver une trajectoire de développement durable et inclusif.

 

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Le cinquième défi : Instabilité politique et sociale

Quatrième défi : Taux de chômage élevé et migration qualifiée

Troisième défi : la faible attractivité des investissements étrangers

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Une nouvelle lecture de la stagflation : enjeux critiques et perspectives  

 

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* Dr. Tahar EL Almi,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

L’article Vers une refondation de l’économie tunisienne est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

Le cinquième défi : Instabilité politique et sociale

09. November 2024 um 12:00

Au début de ce second quinquennat, l’économie tunisienne se trouve confrontée à plusieurs défis majeurs qui menacent sa stabilité et son développement à court et moyen termes. 

Ces défis touchent à la fois des aspects structurels, macroéconomiques et sociaux, créant un contexte difficile pour la croissance économique et la cohésion sociale.

Cette analyse vise à examiner ces enjeux de manière approfondie et à esquisser les perspectives envisageables pour les mois et les années à venir.

 

L’instabilité politique et sociale en Tunisie constitue l’un des plus grands obstacles à son développement économique et à sa cohésion sociale. Depuis le 14 janvier 2011, la Tunisie a traversé plusieurs phases de transition démocratique, mais sans parvenir à une stabilité politique durable. Ce climat d’incertitude a des répercussions directes sur les dynamiques économiques, affectant à la fois la confiance des investisseurs et la performance des institutions publiques.

  • Polarisation et absence de consensus : 

Le paysage politique tunisien reste marqué par une fragmentation des forces politiques et une polarisation croissante entre les partis et les acteurs sociaux. Cette absence de consensus complique la mise en œuvre de réformes économiques cruciales, car chaque tentative de réforme se heurte à des résistances politiques ou sociales. En 2024, l’opposition sur la nature et l’ampleur des réformes à adopter est perceptible, ce qui paralyse le processus de décision et conduit à des mesures temporaires plutôt qu’à des solutions structurelles durables.

La situation est également exacerbée par l’érosion de la confiance dans les institutions politiques. La perception d’une corruption endémique et d’une mauvaise gestion publique alimente un mécontentement social croissant. Cette instabilité complique la tâche des gouvernements successifs, qui peinent à instaurer des réformes face à une société civile de plus en plus mobilisée et critique.

  • Tensions sociales :

L’instabilité politique est intimement liée aux tensions sociales exacerbées par la hausse des prix et la détérioration des services publics. En raison de la stagnation économique, l’érosion du pouvoir d’achat, combinée à un chômage élevé, a provoqué un mécontentement social qui se traduit par des grèves, des manifestations et parfois des mouvements de protestation violents.

La gestion des subventions sur les produits de première nécessité, comme les carburants et les denrées alimentaires, demeure une question très sensible. Alors que le gouvernement est contraint de réduire ces subventions pour répondre aux conditions des bailleurs de fonds internationaux, ces mesures risquent de provoquer une escalade de la contestation sociale. Les coupes dans les subventions sont souvent perçues comme injustes par une population qui souffre déjà d’un niveau de vie en baisse. La détérioration des infrastructures de santé, d’éducation et de transport public alimente également le mécontentement, augmentant ainsi le risque de protestations massives.

  • Incertitude et paralysie économique, à court terme :

À court terme, cette instabilité politique et sociale crée un climat d’incertitude qui affecte profondément les acteurs économiques. Les investisseurs, qu’ils soient nationaux ou étrangers, hésitent à engager des capitaux dans un environnement où les perspectives de stabilité sont faibles et où les réformes économiques sont bloquées par des considérations politiques.

Cette paralysie a un impact direct sur la croissance économique. En l’absence de réformes économiques structurelles, la Tunisie peine à attirer de nouveaux investissements productifs, tandis que les entreprises locales sont réticentes à engager de nouveaux projets ou à embaucher dans un contexte d’incertitude croissante. Cela renforce le cercle vicieux de stagnation économique et de mécontentement social, créant un terrain fertile pour des crises sociales récurrentes.

  • Risques de fragmentation sociale et économique, à moyen terme :

Si la situation politique et sociale ne s’améliore pas, la Tunisie risque de connaître des vagues de protestations sociales de plus en plus intenses. À moyen terme, l’absence de réponse adéquate aux revendications sociales pourrait mener à une fragmentation encore plus marquée de la société tunisienne. Les tensions entre les régions côtières, mieux développées, et les régions intérieures, souvent négligées et plus pauvres, risquent de s’accentuer. Cette polarisation pourrait également affecter la cohésion nationale, avec des répercussions profondes sur la stabilité politique.

L’instabilité persistante affaiblirait encore davantage l’économie, en repoussant les réformes nécessaires pour redresser les finances publiques et améliorer la compétitivité du pays. Le faible taux de croissance prévu pour 2024, autour de 1%, reflète cette incapacité à sortir de la spirale de la stagnation, avec un marché du travail sous pression, des finances publiques en difficulté, et un secteur privé qui peine à se relancer.

  • Perspectives et voies de sortie :

Dans ce contexte de fragilité, les perspectives économiques de la Tunisie à court terme restent préoccupantes. La croissance économique devrait rester modeste, freinée par une demande intérieure en berne et des investissements limités. Cette croissance, de l’ordre de 1%, sera insuffisante pour compenser l’aggravation de la situation socio-économique et pour répondre aux attentes d’une population de plus en plus frustrée par l’absence de résultats concrets.

À moyen terme, la Tunisie devra impérativement adopter des réformes structurelles pour espérer relancer son économie et renforcer sa stabilité sociale. Parmi ces réformes, l’amélioration du climat des affaires est primordiale. Cela implique une simplification de la bureaucratie, une lutte effective contre la corruption, et la mise en place d’un cadre juridique plus transparent et prévisible pour les entreprises. Ces mesures sont indispensables pour restaurer la confiance des investisseurs et stimuler les flux d’investissements directs étrangers (IDE).

La modernisation du système fiscal est également cruciale. La Tunisie doit élargir sa base fiscale, lutter contre l’évasion fiscale et s’assurer que la fiscalité soit plus juste, afin de réduire les déséquilibres budgétaires sans recourir systématiquement à l’endettement extérieur.

Par ailleurs, le pays doit investir dans des secteurs porteurs comme les « énergies renouvelables » et les « technologies numériques », qui offrent de réelles opportunités de diversification économique. Ces secteurs peuvent générer des emplois, améliorer la productivité, et réduire sa dépendance vis-à-vis de secteurs vulnérables comme le tourisme et l’agriculture.

 

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* Dr. Tahar EL Almi,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

L’article Le cinquième défi : Instabilité politique et sociale est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

Quatrième défi : Taux de chômage élevé et migration qualifiée

08. November 2024 um 08:20

Au début de ce second quinquennat, l’économie tunisienne se trouve confrontée à plusieurs défis majeurs qui menacent sa stabilité et son développement à court et moyen termes. Ces défis touchent à la fois des aspects structurels, macroéconomiques et sociaux, créant un contexte difficile pour la croissance économique et la cohésion sociale. Cette analyse vise à examiner ces enjeux de manière approfondie et à esquisser les perspectives envisageables pour les mois et les années à venir.

Le chômage structurel en Tunisie, et en particulier chez les jeunes diplômés, constitue un problème économique et social majeur qui alimente une dynamique de migration qualifiée. Cette situation a des répercussions importantes à court et moyen termes, menaçant la compétitivité de l’économie et sapant les perspectives de développement durable du pays.

  • Chômage des jeunes et en particulier des diplômés, un problème chronique 

Le taux de chômage en Tunisie, qui avoisine 16 % en 2024, est l’un des indicateurs les plus alarmants de l’économie nationale. Toutefois, ce chiffre global masque une réalité encore plus inquiétante : le chômage des jeunes, en particulier des diplômés, atteint près de 30 %, reflétant une inadéquation profonde entre le marché du travail et le système éducatif. Les jeunes diplômés peinent à trouver un emploi dans un marché déjà saturé et caractérisé par un faible dynamisme du secteur privé, ainsi que par une faible capacité d’absorption des secteurs publics et parapublics, traditionnellement pourvoyeurs d’emplois.

La rigidité du marché du travail, associée à une offre limitée d’opportunités dans les secteurs porteurs d’innovation, exacerbe ce chômage des jeunes diplômés. La surqualification pour des postes disponibles pousse de nombreux jeunes à chercher des opportunités à l’étranger, dans un contexte où l’économie tunisienne peine à créer suffisamment d’emplois pour répondre à la demande croissante.

  • Fuite des cerveaux et ses conséquences 

Face à l’absence de perspectives locales, une part importante de la jeunesse tunisienne, en particulier les diplômés, choisit l’émigration, principalement vers l’Europe et les pays du Golfe. Cette fuite des cerveaux affecte particulièrement les secteurs à forte valeur ajoutée, telles que les technologies de l’information, les sciences, la médecine et l’ingénierie. Les professionnels formés localement, souvent aux frais de l’État, sont rapidement attirés par des offres d’emploi plus lucratives et des conditions de travail plus stables à l’étranger.

À court terme, cette émigration massive prive l’économie tunisienne de talents qualifiés indispensables pour soutenir les efforts de modernisation et d’innovation. La perte de compétences dans des secteurs clés compromet la compétitivité du pays dans les domaines technologiques et industriels et limite sa capacité à attirer des investissements étrangers, qui sont souvent liés à la disponibilité d’une main-d’œuvre qualifiée.

De plus, la migration qualifiée aggrave les pénuries dans certains secteurs critiques tels que la santé, où le départ des médecins et des infirmiers vers des marchés plus rémunérateurs exacerbe les défis déjà présents pour les systèmes de soins de santé tunisiens, notamment dans les zones rurales sous desservies.

  • Aggravation de la crise du marché du travail, à court terme 

À court terme, la combinaison d’un taux de chômage élevé et de migration des talents va intensifier la crise sur le marché du travail en Tunisie. Les secteurs à forte valeur ajoutée, qui dépendent d’une main-d’œuvre qualifiée, vont continuer à stagner, faute de personnel compétent pour répondre aux exigences de l’économie numérique et de l’industrie moderne.

Cela risque d’entraîner une augmentation de la précarité de l’emploi, en particulier pour les jeunes sans qualifications spécifiques, exacerbant les tensions sociales et les frustrations liées au manque d’opportunités économiques.

Parallèlement, les perspectives d’amélioration du marché du travail à court terme restent limitées, à moins de réformes significatives pour réorienter l’économie vers des secteurs plus productifs.

  • Frein à l’innovation et à la modernisation, à moyen terme 

À moyen terme, l’impact de la fuite des cerveaux va entraver gravement le potentiel d’innovation de la Tunisie. L’absence d’une main-d’œuvre qualifiée capable d’adopter et d’intégrer des technologies avancées dans les processus de production va limiter la compétitivité globale du pays. La Tunisie, qui aspire à devenir un acteur régional dans des secteurs tels que les technologies de l’information, les énergies renouvelables et l’industrie manufacturière, verra ses ambitions contrecarrées si elle ne peut pas retenir ses talents.

Cette situation pourrait aussi compromettre la transition numérique et la modernisation de l’économie tunisienne. Les entreprises, locales comme internationales, pourraient hésiter à investir dans un pays où la disponibilité de compétences techniques reste incertaine. Cela freinerait l’émergence de nouvelles industries capables de créer des emplois qualifiés et de stimuler la croissance à long terme.

  • Réformes du marché du travail et valorisation des talents, des solutions potentielles 

Pour faire face à cette crise, des réformes structurelles du marché du travail sont nécessaires. L’une des priorités devrait être de réduire l’écart entre les compétences des jeunes diplômés et les besoins des entreprises. Cela pourrait passer par une meilleure coordination entre les institutions d’enseignement supérieur et le secteur privé, en favorisant des programmes de formation en alternance ou en stage, qui permettent aux étudiants d’acquérir une expérience pratique.

Par ailleurs, il est essentiel de créer des incitations pour retenir les talents en Tunisie. Des politiques visant à soutenir l’entrepreneuriat et à encourager la création de start-up dans des secteurs à forte croissance pourraient aider à maintenir les jeunes diplômés dans le pays. Le développement d’écosystèmes d’innovation et l’amélioration de l’accès au financement pour les petites et moyennes entreprises (PME) peuvent également stimuler la création d’emplois qualifiés.

Enfin, la diaspora tunisienne peut être un atout si elle est bien mobilisée. Encourager les transferts de compétences et les collaborations entre les talents tunisiens à l’étranger et le tissu économique local pourrait atténuer les effets négatifs de la fuite des cerveaux. Des initiatives de retour temporaire ou de mentorat pourraient favoriser le partage des connaissances et contribuer à la modernisation des secteurs clés.

 

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* Dr. Tahar EL Almi,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

L’article Quatrième défi : Taux de chômage élevé et migration qualifiée est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

Troisième défi : la faible attractivité des investissements étrangers

07. November 2024 um 07:30

Au début de ce second quinquennat, l’économie tunisienne se trouve confrontée à plusieurs défis majeurs qui menacent sa stabilité et son développement à court et moyen termes. 

Ces défis touchent à la fois des aspects structurels, macroéconomiques et sociaux, créant un contexte difficile pour la croissance économique et la cohésion sociale.

Cette analyse vise à examiner ces enjeux de manière approfondie et à esquisser les perspectives envisageables pour les mois et les années à venir.

  • Bureaucratie excessive et cadre juridique contraignant :

Un des principaux obstacles à l’attractivité des IDE en Tunisie réside dans la lourdeur bureaucratique et les lenteurs administratives. Les investisseurs étrangers sont confrontés à une complexité excessive dans les procédures d’enregistrement des entreprises, l’obtention de permis, et la navigation dans un système administratif souvent peu transparent. Cette bureaucratie freine non seulement les nouvelles entrées sur le marché, mais également les expansions des entreprises déjà implantées.

Par ailleurs, le cadre juridique tunisien, bien qu’ayant connu des réformes depuis la révolution, reste marqué par des ambiguïtés, des incohérences et un manque de clarté dans la mise en œuvre des lois. Les investisseurs cherchent un environnement où les règles sont prévisibles et stables. Or, la Tunisie n’a pas encore réussi à offrir cette stabilité.Ce qui décourage les investisseurs de projets à long terme.

  • Corruption endémique et déficit de gouvernance :

La corruption est un problème persistant en Tunisie. Il constitue un frein majeur pour les investisseurs. Le pays se classe régulièrement mal dans les indices mondiaux de perception de la corruption. Ce qui impacte négativement la confiance des investisseurs étrangers. Les pratiques de corruption généralisée augmentent le coût des affaires et créent un environnement d’incertitude où les entreprises doivent naviguer à travers des obstacles illégitimes pour obtenir des services ou des autorisations.

Les déficits de gouvernance se manifestent également par une faible transparence dans les marchés publics, ainsi qu’une perception d’inefficacité dans la gestion des ressources de l’État. Le manque de réformes pour renforcer les institutions et la gouvernance réduit la compétitivité du pays, laissant les investisseurs se tourner vers d’autres marchés plus prévisibles et transparents.

  • Instabilité politique et perception de risque sécuritaire :

Depuis la révolution de 2011, la Tunisie traverse une phase d’instabilité politique chronique, avec des changements fréquents de gouvernements, des tensions sociales et des troubles politiques réguliers. Cette instabilité crée un climat d’incertitude qui dissuade les investisseurs étrangers de prendre des engagements financiers à long terme.

De plus, bien que la Tunisie ait réussi à maintenir un certain niveau de sécurité, la perception de risque sécuritaire demeure une barrière pour de nombreux investisseurs. Les attentats terroristes qui ont touché le secteur touristique en 2015, par exemple, ont eu un effet durable sur l’image du pays, notamment dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre comme le tourisme et l’hôtellerie. Le rétablissement de la confiance dans la sécurité nationale est un préalable essentiel pour attirer à nouveau des flux significatifs d’IDE.

  • Manque de réformes économiques structurelles :

L’absence de réformes économiques profondes empêche la Tunisie de devenir un marché attrayant pour les investisseurs internationaux. Des secteurs clés comme l’industrie et les technologies de l’information nécessitent des investissements massifs pour se moderniser et se conformer aux normes internationales. Toutefois, le manque de flexibilité sur le marché du travail, la faiblesse des infrastructures et des coûts de production relativement élevés, freinent la compétitivité du pays.

En parallèle, l’État tunisien a longtemps été perçu comme jouant un rôle trop dominant dans l’économie, au détriment de l’initiative privée. Cette centralisation économique a généré un environnement où la concurrence est limitée et où les innovations sont rares, réduisant ainsi l’attrait pour les entreprises qui cherchent des opportunités de croissance dynamique.

  • Difficultés à attirer des capitaux pour la relance, des conséquences à court terme :

À court terme, sans réformes structurelles destinées à améliorer le climat des affaires, la Tunisie continuera à attirer peu de capitaux étrangers, un facteur essentiel pour soutenir la reprise économique postpandémie. L’absence d’IDE compromet la capacité du pays à financer des projets d’infrastructures indispensables et à soutenir la création d’emplois dans les secteurs moteurs de l’économie. Cela affecte particulièrement des secteurs comme le tourisme, qui dépend fortement des investissements internationaux pour se remettre des chocs successifs liés à la pandémie et à l’instabilité politique.

Le manque de nouveaux capitaux limite également les opportunités d’innovation et de transfert de technologie, essentiels pour accroître la productivité et la compétitivité du tissu industriel tunisien. Les investisseurs préfèrent souvent des marchés où les perspectives de croissance sont meilleures et où le cadre réglementaire et fiscal est plus stable.

  • Retard dans la modernisation et la compétitivité globale, des conséquences à moyen terme :

À moyen terme, l’absence d’IDE risque de freiner la modernisation des secteurs stratégiques de l’économie tunisienne, tels que l’industrie, le tourisme, les technologies de l’information. Ces secteurs, essentiels à la création d’emplois et à la croissance inclusive, nécessitent des flux d’investissements pour se moderniser, adopter de nouvelles technologies et améliorer leurs capacités productives. Sans ces investissements, la Tunisie risque de rester en retard par rapport à ses concurrents régionaux et mondiaux, réduisant ainsi sa compétitivité à long terme.

De plus, la faiblesse des investissements dans les infrastructures, les transports et l’énergie, pourrait ralentir le développement économique du pays, limitant les perspectives de diversification économique et d’intégration dans les chaînes de valeur mondiales.

 

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* Dr. Tahar EL Almi,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

L’article Troisième défi : la faible attractivité des investissements étrangers est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

Deuxième défi : inflation persistante et pouvoir d’achat en baisse

06. November 2024 um 09:36

Au début de ce second quinquennat, l’économie tunisienne se trouve confrontée à plusieurs défis majeurs qui menacent sa stabilité et son développement à court et moyen termes. 

Ces défis touchent à la fois des aspects structurels, macroéconomiques et sociaux, créant un contexte difficile pour la croissance économique et la cohésion sociale.

Cette analyse vise à examiner ces enjeux de manière approfondie et à esquisser les perspectives envisageables pour les mois et les années à venir.

L’inflation, stabilisée autour de 6,7 %, reste un problème majeur pour l’économie tunisienne, avec des répercussions directes sur le pouvoir d’achat de la population. Cette inflation, combinée à des hausses continues des prix des produits de base tels que les carburants et les denrées alimentaires, contribue à une détérioration constante des conditions de vie, exacerbée par les fluctuations des prix internationaux et la dépréciation du dinar tunisien. Ce défi, à la fois économique et social, est au cœur des préoccupations nationales, tant sur le plan de la stabilité interne que sur celui de la gestion des inégalités croissantes.

  • Causes structurelles et conjoncturelles de l’inflation :

L’inflation en Tunisie est le résultat d’une combinaison de facteurs internes et externes. D’une part, l’inflation importée liée à la hausse des prix internationaux des matières premières et à la volatilité des marchés mondiaux exerce une pression croissante sur les prix locaux. Cette tendance a été aggravée par les répercussions de crises géopolitiques, comme le conflit en Ukraine, qui ont perturbé les chaînes d’approvisionnement globales et entraîné une flambée des prix des carburants et des denrées alimentaires.

D’autre part, la dépréciation continue du dinar rend les importations plus coûteuses, exacerbant ainsi l’inflation interne. L’affaiblissement de la monnaie nationale est en grande partie dû aux déficits commerciaux chroniques, à la faiblesse des réserves de change et à une compétitivité limitée sur les marchés internationaux. Cette combinaison alimente une inflation structurelle difficile à maîtriser sans une réforme en profondeur des équilibres macroéconomiques.

  • Erosion du pouvoir d’achat et conséquences sociales :

L’inflation persistante a un impact direct et dévastateur sur le pouvoir d’achat des ménages tunisiens. Avec une hausse des prix plus rapide que celle des salaires, les ménages à revenu moyen et faible voient leurs revenus réels diminuer. Ce qui affecte leur capacité à satisfaire leurs besoins essentiels. Les augmentations successives des prix des produits de base, en particulier des denrées alimentaires, ont un effet régressif, touchant de manière disproportionnée les ménages les plus vulnérables.

En effet, la hausse du prix des carburants, combinée à l’augmentation des coûts de transport, se répercute sur l’ensemble de l’économie, augmentant les coûts de production et de distribution. Cela se traduit par une inflation généralisée, qui affecte non seulement les biens de consommation, mais aussi les services, créant un cercle vicieux qui amplifie l’érosion du pouvoir d’achat.

  • Politique monétaire restrictive, le dilemme pour la Banque centrale :

Pour contrer l’inflation, la Banque centrale de Tunisie a adopté une politique monétaire restrictive, en augmentant ses taux directeurs pour limiter la création monétaire et freiner la demande. Bien que cette approche vise à contenir les pressions inflationnistes, elle présente également des effets secondaires négatifs. Un resserrement monétaire rend plus coûteux l’accès au crédit pour les entreprises et les ménages, freinant ainsi l’investissement privé et ralentissant la consommation intérieure, deux moteurs clés de la croissance économique.

Le secteur privé, déjà affaibli par une conjoncture défavorable, se retrouve confronté à des difficultés accrues pour financer ses activités.  Ce qui freine la création d’emplois et réduit les perspectives de croissance. Ce dilemme reflète une problématique classique : la lutte contre l’inflation par la restriction monétaire risque de compromettre l’investissement et l’activité économique à court terme, tout en exacerbant les tensions sociales liées à la baisse du pouvoir d’achat.

  • Conséquences sociales à court terme :

À court terme, la persistance de l’inflation continuera à éroder les revenus des ménages, alimentant un sentiment de mécontentement social qui pourrait s’aggraver. L’augmentation des coûts de la vie, combinée à un marché du travail morose et à un taux de chômage élevé, amplifie les frustrations. Ces tensions pourraient rapidement se traduire par des mouvements sociaux. Et ce, d’autant plus que les hausses de prix affectent des produits essentiels, comme les denrées alimentaires de base et les carburants, dont la population dépend quotidiennement.

Les récents ajustements des subventions, dans le cadre des réformes imposées par les bailleurs de fonds internationaux, ont accentué ce mécontentement. La perception que ces mesures pèsent de manière disproportionnée sur les classes les plus modestes, sans amélioration tangible des conditions de vie, risque de générer des revendications sociales plus marquées, mettant en péril la stabilité politique.

  • Risques à moyen terme :

Si l’inflation persistante n’est pas maîtrisée à moyen terme, la Tunisie pourrait être confrontée à une véritable crise sociale, avec des répercussions potentielles sur la stabilité politique. En l’absence d’une reprise économique solide ou de politiques redistributives efficaces, les inégalités sociales pourraient se creuser davantage, alimentant un sentiment d’injustice au sein de la population.

Les politiques monétaires restrictives, bien qu’efficaces pour contenir l’inflation à court terme, doivent être complétées par des réformes structurelles qui stimulent la production nationale, améliorent la compétitivité et renforcent la protection sociale. Sans cela, la pression sur le pouvoir d’achat continuera d’alimenter des frustrations sociales, créant un terreau propice à des mouvements de protestation, voire à une instabilité politique durable.

 

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* Dr. Tahar EL Almi,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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