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Être ou ne pas être chef de gouvernement en Tunisie

24. März 2025 um 08:02

Le président Kais Saïed a nommé Sarra Zaafrani Zenzeri comme 4e chef de gouvernement, depuis 2021, et 11e depuis 2011, date de la Révolte du Jasmin en Tunisie. Une espérance de vie politique moyenne de seulement 15 mois pour chacun. Une rotation effrénée et qui ne rassure ni l’économie, ni la société. Est-ce un indicateur d’instabilité ? Est-ce un corrélât d’une inefficacité chronique au niveau gouvernemental?

Moktar Lamari *

Plusieurs questions se posent et plusieurs enjeux s’imposent dans le contexte d’une crise économique et monétaire sans précédent. Une crise économique qui secoue le sens du travail, qui vampirise l’investissement et qui enfonce le pays dans la dette et la stagflation.

Être chef de gouvernement est un métier qui ne s’improvise pas. C’est un métier politique que ceux et celles qui n’ont pas assumé une vie politique active et engagée ne peuvent pas exercer de façon efficace.

En Tunisie, on a tendance à négliger la complexité de la fonction et à sous-estimer les compétences liées.

Être ou ne pas être chef de gouvernement

Être chef de gouvernement, c’est un métier complexe et jonché de difficultés et d’imprévus. Il faut convaincre par un leadership assumé et efficace, pour pouvoir communiquer et mobiliser les parties prenantes (pouvoirs, ministères, régions, etc.). Et il faut comprendre les mécanismes de l’État, et les rouages macroéconomiques de l’économie nationale et de ses interdépendances avec les pays étrangers et les organismes internationaux.

On doit avoir une compréhension des concepts économiques clefs et de leur impact sur le niveau de vie des citoyens et sur les processus de la création de la richesse.

Multiplier les changements du chef de gouvernement a été un sport national pour l’ère post-2011. On préfère limoger le chef de gouvernement que de remettre en question les politiques publiques qui de facto n’ont pas fonctionné efficacement, parce qu’elles ont été mal conçues ou mal-implantées, ou les deux à la fois.

On enseigne à nos étudiants en sciences politiques et en sciences économiques qu’il faut détenir une expérience politique et une expertise technique pour pouvoir fixer de manière réaliste les bonnes priorités et pour faire tourner l’État, en créant la richesse et pas l’inverse.

Il faut au moins 9 mois pour maîtriser tous les mécanismes et les rouages de l’État, quand on occupe le poste de ministre, et un peu plus pour occuper efficacement celui de Premier ministre.

Durant l’ère de Ben Ali ou de Bourguiba (50 ans), les 8 premiers ministres duraient dans leur poste plusieurs années, peut-être un peu trop. Ils étaient tous des hommes et de la région de Monastir et environs.

Vision programme et agendas

Dans les régimes démocratiques, on ne change pas de chef de gouvernement sur un coup de tête, sans évaluation et sans consultation crédible (élections ou vote parlementaire). On ne prend pas le risque de brouiller en un rien de temps, les repères du fonctionnement économiques et les cibles visées par une équipe dirigée par un chef de gouvernement.

L’économie n’aime pas l’instabilité politique, hait les incertitudes et peut sanctionner toutes les mauvaises décisions, par des fuites de capitaux, atrophie des investissements, ou même contraction de l’emploi et de la croissance.

Dans les régimes démocratiques, on évalue les performances de chaque gouvernement, par des évaluations de politiques (domaine de recherche en sciences sociales); on mesure le niveau de confiance populaire à l’égard des gouvernements et des élites.

La confiance compte en politique publique et le citoyen a son mot à dire, durant ces moments clefs. Elle constitue le principal carburant de la vie politique, et le principal propulseur de l’économie.

Le changement de chef de gouvernement constitue un moment clef pour changer de vision, instaurer un nouveau momentum et dessiner un nouvel agenda.

La nomination de la nouvelle chef de gouvernement, à qui on souhaite tout le succès dans ses nouvelles fonctions, doit être assortie de transparence et de vision, quant aux priorités et à l’agenda gouvernemental dans le court terme.

L’économie tunisienne est à la peine, et les tensions sociopolitiques sont nombreuses et parfois explosives. Notre économie est handicapée par une productivité qui recule sans cesse et une politique monétaire qui vampirise l’investissement, la libre concurrence entre les opérateurs économiques.

Sans un vrai programme économique mobilisateur et sans une révision structurelle de la politique monétaire, on ne peut rien faire de différent et de concluant.

La marge de manœuvre gouvernementale est tributaire de la relance de la croissance, de la création d’emplois, du retour de l’investissement, et ultimement de la restauration de la confiance envers l’État dans son ensemble et ses institutions officielles ou informelles.

Les chiffres actuels indiquent que 2 à 3 citoyens sur 4 ne font pas du tout confiance aux principales institutions de l’État (administration, gouvernement, banque, parlement). Ces données viennent de la World Value Survey (2022).

La nouvelle cheffe de gouvernement doit restaurer la confiance du citoyen. Elle doit aussi nous afficher clairement sa vision, ses priorités et les changements à introduire pour faire autrement, et obtenir les résultats que ses prédécesseurs n’ont pas pu réaliser.

On n’obtient pas des résultats différents en faisant toujours les mêmes erreurs.

* Economiste universitaire.

Blog de l’auteur : Economics for Tunisia, E4T.

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