UE – Sanctions contre Israël : quand l’apathie s’ajoute au déshonneur
Un rapport de la Commission européenne, présenté fin juin aux ministres européens des AE, estime qu’Israël a violé l’article 2 de l’accord d’association qui l’unit à l’UE, en matière de respect des droits de l’homme. Pourtant, les vingt-sept réunis mardi 15 juillet à Bruxelles, ont décide « pour l’instant » de ne pas sanctionner l’Etat hébreu.
Choisir la procrastination comme mode d’action? En décidant, faute d’unanimité, de ne rien décider, en refusant de trancher dans le vif dans une affaire aussi grave, les ministres européens des Affaires étrangères réunis mardi 15 juillet à Bruxelles avant la pause estivale, ont estimé « préférable pour l’instant », de ne pas sanctionner Israël. Refusant ainsi de statuer sur l’accord d’association entre Israël et l’UE, manifestement bafoué. Alors que les massacres de civils se poursuivent à Gaza de manière quasi ininterrompue.
L’Europe déchirée
En d’autres termes, Bruxelles a reconnu que l’Etat hébreu a enfreint l’article 2 de son accord d’association avec l’UE, portant sur le respect des droits humains. Mais, faute de consensus sur des mesures de rétorsion- il fallait l’unanimité pour le suspendre et une majorité qualifiée pour adopter des sanctions- les Vingt-Sept se contentent d’un engagement d’Israël à ré-autoriser les livraisons d’aide humanitaire. Maigre consolation pour leur conscience, apparemment torturée par tant de barbarie!
Pourtant, la Commission européenne a présenté fin juin dernier aux Vingt-Sept les conclusions d’un audit confirmant qu’Israël viole bien l’article 2 de l’accord signé en 1995. Ce point prévoit que « les relations entre les parties, ainsi que toutes les dispositions du présent accord, sont fondées sur le respect des droits de l’homme et des principes démocratiques, qui guident leur politique intérieure et internationale et constituent un élément essentiel du présent accord ».
Gaza : « un mouroir, pour ne pas dire un cimetière »
Faut-il rappeler que ce sont les Pays-Bas qui ont lancé l’idée d’un réexamen de l’accord au vu de la situation dramatique à Gaza, en ralliant 16 autres Etats à leur cause dont la France. Laquelle, par la voix de son ministre des AE, Jean-Noël Barrot, a appelé le 20 mai dernier à « réexaminer l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël ». Alors que Gaza est devenu « un mouroir, pour ne pas dire un cimetière ».
De même, Kaja Kallas, la cheffe de la diplomatie de l’UE, a présenté à ses collègues les mesures graduées en cas de violation du fameux article 2.
Néanmoins, les Etats de l’UE ont refusé, pour l’instant, d’endosser une ou plusieurs des 10 mesures de rétorsion passant de la dénonciation et suspension pure et simple de l’accord, à des sanctions comme l’interdiction d’importer des produits en provenance des territoires palestiniens occupés, un embargo total sur les ventes d’armes ou une révision de la politique en matière de visas.
En effet, la question se posait avec insistance depuis plusieurs mois, en raison de l’intensification des offensives de l’armée israélienne dans la bande de Gaza et du maintien d’un blocus interdisant toute aide humanitaire à la population. Sachant que l’Union européenne avait soutenu au début le droit de l’Etat hébreu de se défendre après les attaques du 7 octobre 2023, qui ont fait près de 1 200 morts et 252 otages israéliens. Mais ce soutien s’est lézardé en raison de la situation humanitaire catastrophique à Gaza et la multiplication d’offensives militaires de Tsahal marquées par de nombreuses violations du droit humanitaire.
Frustration
Mais devant les tergiversions des chefs de la diplomatie européenne, certains ministres ont exprimé leur frustration face à l’absence d’action concrète contre Israël. La ministre slovène des Affaires étrangères Tanja Fajon a écrit sur X qu’elle regrettait qu’il n’y ait pas eu de « consensus » lors de la réunion pour suivre la révision de l’accord d’association UE-Israël. Tout en ajoutant qu’un accord de principe sur l’amélioration de l’aide humanitaire « ne peut servir d’excuse à l’inaction ».
Pour sa part, le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, a déclaré que, conformément aux normes européennes et internationales, son pays demanderait la suspension de l’accord d’association UE-Israël, un embargo sur les armes à destination d’Israël et l’interdiction des produits provenant des colonies juives. « Cette guerre doit prendre fin et l’armée israélienne doit se retirer », s’est-il écrié.
Idem pour son homologue français, Jean-Noël Barrot qui a également déclaré que la France serait prête à prendre des sanctions à l’encontre des « individus et entités responsables de la colonisation extrémiste et violente » en Cisjordanie occupée et « cesser tout soutien financier direct et indirect à la colonisation ».
Le ministre français a également « exigé » qu’Israël lève son « blocus financier » et paie les deux milliards d’euros qu’il doit verser à l’Autorité palestinienne. Le gouvernement israélien doit mettre « fin à la colonisation de la Cisjordanie et en particulier au projet funeste dit projet E1 qui, avec 3 400 logements, menace de couper en deux la Cisjordanie et de porter un coup fatal à la solution à deux États », a-t-il affirmé.
A noter qu’une proposition de sanctions à l’encontre des colons extrémistes, coupables de violences contre les Palestiniens de Cisjordanie, est sur la table des Vingt-Sept depuis des mois. Une très large majorité d’États membres y est favorable, mais l’adoption de ces sanctions, qui requiert l’unanimité, se heurte jusqu’à présent au veto de la Hongrie.
Toutefois, les divergences persistantes entre les pays d’Europe de l’Ouest, plus critiques envers Israël, et ceux d’Europe centrale et orientale, plus favorables, ont empêché tout consensus. Si l’Espagne, l’Irlande ou encore la Belgique avaient appelé à durcir le ton contre l’Etat hébreu, par contre l’Allemagne, la République tchèque, la Hongrie ont fait barrage à toute résolution contraignante, soulignant sans rougir, leur « proximité » douteuse et intéressée avec Tel-Aviv!
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