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Heute — 15. Dezember 2025Haupt-Feeds

Virage monétaire mondial et recomposition financière

15. Dezember 2025 um 05:45

La conjoncture internationale de fin 2025 demeure marquée par un tournant monétaire progressif. Après deux années de resserrement brutal, les grandes banques centrales, au premier rang desquelles la Réserve fédérale américaine, ont engagé une phase de normalisation prudente. La baisse graduelle des taux directeurs a entraîné un reflux du dollar, une détente des conditions financières mondiales et un rééquilibrage partiel des flux de capitaux vers les économies émergentes.

Cette inflexion monétaire mondiale constitue un facteur exogène favorable pour les pays importateurs nets d’énergie et fortement dépendants des financements extérieurs, comme la Tunisie. Toutefois, ses effets positifs restent conditionnés à la solidité des fondamentaux internes et à la crédibilité de la politique économique domestique.

En Tunisie : liquidité bancaire, une tension persistante mais maîtrisée

Sur le plan interne, les indicateurs monétaires du 12 décembre confirment la persistance d’une tension structurelle sur la liquidité bancaire, malgré un encadrement étroit par la Banque centrale de Tunisie (BCT).

Le volume global du refinancement atteint 11,8 milliards de dinars, en hausse par rapport à la veille mais en retrait par rapport à fin 2024. Cette évolution traduit une dépendance toujours élevée du système bancaire aux ressources de la BCT, même si l’intensité de cette dépendance tend à se stabiliser.

La structure du refinancement révèle une préférence marquée pour les opérations à moyen terme, notamment les refinancements à six mois (ORPLT); tandis que les interventions d’open market continuent de se contracter. Cette recomposition suggère une volonté de sécuriser la visibilité de la liquidité bancaire dans un environnement encore incertain.

Le volume global du refinancement atteint 11,8 milliards de dinars, en hausse par rapport à la veille mais en retrait par rapport à fin 2024. Cette évolution traduit une dépendance toujours élevée du système bancaire aux ressources de la BCT, même si l’intensité de cette dépendance tend à se stabiliser.

Par ailleurs, la montée des facilités permanentes de prêt à 24 heures confirme des tensions ponctuelles sur la trésorerie de certaines banques. Alors que le recours à la facilité de dépôt demeure négatif, signe d’un excès de liquidité très limité.

Politique monétaire : une détente confirmée, mais sous surveillance

La stabilité du taux directeur à 7,50 %, conjuguée à l’alignement du taux du marché monétaire (TM) sur ce niveau, confirme l’entrée de la politique monétaire tunisienne dans une phase de détente graduelle. La baisse de 50 points de base par rapport à 2024 reflète une amélioration relative du risque inflationniste, sans pour autant signaler un basculement vers une politique franchement accommodante.

La BCT reste manifestement engagée dans une stratégie d’équilibre délicat : soutenir l’activité économique et la capacité de financement de l’État; tout en évitant toute résurgence inflationniste ou pression excessive sur les réserves en devises.

Finances publiques : un Trésor sous contrainte permanente

Le solde du compte courant du Trésor, à 2,2 milliards de dinars, recule légèrement par rapport à la veille mais reste nettement supérieur à son niveau de 2024. Cette situation illustre une gestion de trésorerie sous tension, fortement dépendante du recours au marché domestique.

La structure de la dette publique confirme cette dépendance : l’encours des Bons du Trésor Assimilables progresse fortement sur un an; tandis que les bons à court terme se contractent. Ce basculement vers le moyen et long terme permet de lisser le profil d’amortissement de la dette. Mais, il accroît le stock global et renforce l’effet d’éviction sur le crédit à l’économie.

La structure de la dette publique confirme cette dépendance : l’encours des Bons du Trésor Assimilables progresse fortement sur un an; tandis que les bons à court terme se contractent.

Réserves en devises : une érosion lente mais préoccupante

Les avoirs nets en devises de la BCT s’établissent à 24,8 milliards de dinars, correspondant à 105 jours d’importation. Bien que ce niveau reste au-dessus du seuil critique; la tendance demeure baissière par rapport à 2024.

Cette érosion s’explique par un service de la dette extérieure toujours élevé, malgré une amélioration des recettes courantes. Elle rappelle la fragilité de l’équilibre externe tunisien et la nécessité de maintenir un flux régulier de devises, qu’il s’agisse d’exportations, de tourisme, de transferts ou de financements extérieurs concessionnels.

Secteurs générateurs de devises : des signaux encourageants

Les indicateurs réels offrent néanmoins des motifs d’optimisme prudent. Les recettes touristiques cumulées atteignent 7,5 milliards de dinars à fin novembre, en nette progression annuelle. De même, les revenus du travail des Tunisiens à l’étranger poursuivent leur hausse, dépassant 7,9 milliards de dinars.

Ces deux postes jouent un rôle d’amortisseur macroéconomique essentiel, contribuant à contenir le déficit courant et à soutenir les réserves de change, dans un contexte de financement extérieur contraint.

Taux de change : un dinar plus résilient face au dollar

L’évolution des cours interbancaires du dinar confirme une appréciation sensible face au dollar américain, dans le sillage du repli du billet vert sur les marchés internationaux. Cette dynamique contribue à modérer l’inflation importée, notamment sur les matières premières énergétiques et alimentaires.

En revanche, le dinar s’inscrit dans une légère dépréciation face à l’euro, reflet des relations commerciales asymétriques avec la zone euro et de la structure des échanges extérieurs tunisiens. Cette évolution demeure toutefois maîtrisée et cohérente avec les fondamentaux actuels.

Perspectives à court et moyen terme : stabilité fragile et arbitrages délicats

À court terme, la trajectoire macroéconomique tunisienne devrait rester marquée par une stabilité fragile, soutenue par la détente monétaire, la résilience des recettes en devises et une gestion active de la liquidité par la BCT.

À moyen terme, les marges de manœuvre demeurent étroites. La soutenabilité des finances publiques, la consolidation des réserves en devises et la relance de l’investissement productif constituent des priorités absolues. Sans accélération des réformes structurelles et sans clarification du cadre de financement externe, les ajustements monétaires resteront insuffisants pour enclencher une dynamique de croissance durable.

Dans ce contexte, la politique économique tunisienne continue d’évoluer sur une ligne de crête, où chaque décision monétaire ou budgétaire doit arbitrer entre stabilité immédiate et viabilité à long terme.

 

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Références :

(1) Sources principales consultées pour le contexte international : World Bank MENAAP (12 déc. 2025), données prix Brent / marché pétrolier (12 déc. 2025), minutes Fed / prises de position récentes, analyses Reuters sur la réaction des marchés aux tensions régionales. (Banque Mondiale)

(2) (*) https://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/indicateurs.jsp

(**) https://www.ins.tn/

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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ECLAIRAGE – L’euro reprend l’initiative face au dollar — Quels impacts pour la Tunisie à l’aube de 2026 ?

10. Dezember 2025 um 12:03

L’euro avance prudemment mais sûrement face au dollar, dans un moment charnière où les banques centrales des deux côtés de l’Atlantique s’apprêtent à façonner le paysage monétaire des prochains trimestres.

À l’approche de la réunion de la Réserve fédérale américaine (Fed), les marchés accordent désormais une probabilité écrasante à une baisse imminente des taux directeurs. Tandis que la Banque centrale européenne (BCE) semble déterminée à maintenir sa position de pause monétaire. Cette divergence subtile mais déterminante nourrit actuellement le redressement de l’euro, qui évolue autour de 1,1645 dollar dans la séance asiatique de lundi.

Ce mouvement technique, qui pourrait paraître modeste, porte en réalité des implications majeures pour les économies périphériques, dont la Tunisie, fortement exposée aux turbulences du marché des changes.

La dynamique (1) qui s’installe repose largement sur l’affaiblissement progressif du dollar. Les investisseurs anticipent presque unanimement une réduction de 25 points de base du taux des fonds fédéraux, ramenant la fourchette entre 3,50 % et 3,75 %.

Cette vision d’un cycle d’assouplissement désormais engagé suffit à peser sur le billet vert. Mais les opérateurs demeurent attentifs au ton qu’adoptera la Fed (2). En effet, une baisse de taux assortie d’un discours ferme – le fameux « hawkishcut » – pourrait facilement inverser la tendance et offrir un répit au dollar en fin d’année. Tout se jouera dans l’orientation du message, plus encore que dans l’ajustement lui-même.

En zone euro, le tableau évolue dans un sens presque opposé. Les dernières données d’inflation ont légèrement dépassé les attentes en novembre. Une surprise qui allège paradoxalement la pression immédiate sur la BCE.

L’institution de Francfort devrait maintenir le statu quo lors de la réunion du 18 décembre, considérant que la normalisation monétaire opérée depuis deux ans doit encore déployer ses effets. Ce contraste entre un dollar pénalisé par l’anticipation d’une détente et un euro stabilisé par l’attentisme de la BCE confère aujourd’hui un avantage tactique à la devise européenne.

Les divergences d’analyse au sein des grandes banques (3) illustrent toutefois l’incertitude de moyen terme. Goldman Sachs privilégie un horizon prolongé de stabilité, avec un taux de dépôt maintenu à 2 % jusqu’en 2026. Deutsche Bank, plus prudente, estime qu’une hausse marginale reste possible si les pressions inflationnistes persistent.

 

La BCE devrait maintenir le statu quo lors de la réunion du 18 décembre, considérant que la normalisation monétaire opérée depuis deux ans doit encore déployer ses effets. Ce contraste entre un dollar pénalisé par l’anticipation d’une détente et un euro stabilisé par l’attentisme de la BCE confère aujourd’hui un avantage tactique à la devise européenne.

 

Aux États-Unis, les débats s’annoncent tout aussi serrés : plusieurs stratégistes anticipent des fractures internes au comité FOMC, nourries autant par les partisans de l’orthodoxie monétaire que par ceux plaidant pour une action plus souple. Dans un tel contexte, la volatilité sur l’EUR/USD devrait rester élevée durant tout le premier semestre 2026.

Les prochains indicateurs conjoncturels européens — notamment l’indice Sentix de confiance des investisseurs et la production industrielle allemande (4) — pourraient également influencer l’orientation des anticipations. Un rebond industriel, même timide, viendrait renforcer la thèse d’une zone euro résistante, offrant un nouvel appui à l’euro. À l’inverse, un repli marqué raviverait la pression sur la BCE et ouvrirait la voie à un rééquilibrage monétaire.

Implications pour la Tunisie : un moment charnière pour le dinar

L’évolution actuelle du marché des changes ne constitue pas seulement un mouvement technique entre deux devises majeures : elle façonne directement l’environnement macro financier dans lequel évolue la Tunisie.

Le pays, dont les importations sont majoritairement libellées en euro mais dont une part significative de la dette et des paiements extérieurs demeure en dollar, se trouve au cœur d’un arbitrage délicat.

Un euro qui se renforce et un dollar qui se replie constituent, à court terme, une configuration globalement favorable pour la Tunisie.

Ainsi, la baisse relative du dollar permettrait d’alléger temporairement la facture énergétique et celle des matières premières, généralement indexées sur la devise américaine. Cela pourrait contribuer à réduire les pressions sur la balance commerciale en fin d’année, dans un contexte où les déficits structurels restent importants.

 

La Tunisie, dont les importations sont majoritairement libellées en euro mais dont une part significative de la dette et des paiements extérieurs demeure en dollar, se trouve au cœur d’un arbitrage délicat.

 

Simultanément, un euro plus robuste soutient indirectement le dinar, compte tenu du panier de référence où la monnaie unique occupe une part dominante. Historiquement, les épisodes de raffermissement de l’EUR/USD se traduisent par une stabilisation du dinar face à l’euro et par une modération des tensions vis-à-vis du dollar. Si la tendance actuelle se confirme, le dinar pourrait évoluer dans une zone plus confortable au tournant de 2026, ce qui réduirait marginalement les pressions sur les réserves en devises.

Toutefois, ce répit n’efface pas les vulnérabilités. Une communication agressive de la Fed, renforçant temporairement le dollar, pourrait rapidement inverser les gains. De même, si la BCE venait à adopter un ton plus prudent début 2026, l’euro pourrait perdre une partie de son avantage. Pour la Tunisie, cela signifierait un risque renouvelé de glissement du dinar, surtout dans un contexte où la croissance demeure modérée, les besoins de financement importants et les marges de manœuvre monétaires limitées.

À moyen terme, le pays devra également composer avec une réalité incontournable : les conditions financières internationales vont rester volatiles en 2026. La divergence des politiques monétaires, les hésitations conjoncturelles européennes, les tensions géopolitiques et la fragmentation commerciale peuvent rapidement amplifier les mouvements de change. Pour la BCT, l’enjeu sera de maintenir une trajectoire de stabilisation progressive du dinar tout en évitant un resserrement trop prononcé qui pourrait pénaliser davantage les liquidités bancaires et l’activité réelle.

Perspectives 2026 : une fenêtre d’opportunité à saisir

Si l’euro poursuit sa trajectoire ascendante, la Tunisie pourrait bénéficier d’une fenêtre d’amélioration relative de ses conditions extérieures au premier semestre 2026. Un dollar plus faible allégerait certaines charges externes et pourrait contribuer à modérer l’inflation importée, élément crucial dans la gestion du pouvoir d’achat et de la stabilité sociale. Un euro stable ou légèrement renforcé offrirait par ailleurs un appui au dinar, favorisant une meilleure visibilité pour les opérateurs économiques et les investisseurs.

 

À l’orée de 2026, le mouvement de l’euro face au dollar esquisse donc un scénario de stabilisation favorable, mais non garanti. Pour la Tunisie, la priorité consiste désormais à transformer cette accalmie relative des marchés en marge de manœuvre durable, tant pour l’économie réelle que pour la trajectoire du dinar.

 

Mais cette fenêtre reste fragile. Elle dépendra largement de la capacité de l’Europe à éviter une récession, de la posture réelle de la Fed après décembre et de la stabilité géopolitique régionale. Dans un environnement incertain, la Tunisie devra accélérer ses ajustements internes, renforcer sa discipline budgétaire, améliorer la transparence de ses circuits de distribution et optimiser son plan de financement extérieur pour tirer pleinement parti d’un cycle monétaire mondial en transition.

À l’orée de 2026, le mouvement de l’euro face au dollar esquisse donc un scénario de stabilisation favorable, mais non garanti. Pour la Tunisie, la priorité consiste désormais à transformer cette accalmie relative des marchés en marge de manœuvre durable, tant pour l’économie réelle que pour la trajectoire du dinar.

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Références :

(1) Salle des marchés-IAEF(ONG)-09/12/2025 16:54.

(2)communiqués :

(3) communiqués :  FED, Goldman Sachs, Deutsche Bank…

(4)communiqué Sentix

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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L’hebdo du vendredi 7 décembre 2025 – Le dinar tunisien dans la tourmente internationale

08. Dezember 2025 um 12:53

L’économie mondiale aborde la fin de 2025 avec une tonalité incertaine. La détente récente autour du dollar, affaibli par les anticipations d’un assouplissement monétaire américain en 2026, offre un répit momentané aux devises émergentes, dont le dinar.

Parallèlement, l’euro profite d’indicateurs européens mieux orientés et d’un discours plus rassurant de la BCE, retrouvant une dynamique haussière. Cette amélioration internationale demeure pourtant fragile, prise en étau entre les tensions géopolitiques persistantes au Moyen-Orient, un ralentissement chinois qui pèse sur les matières premières et une volatilité continue sur les marchés obligataires. Dans cet environnement, les économies ouvertes et structurellement dépendantes de financements extérieurs, comme la Tunisie, restent particulièrement exposées.

Tunisie — Une liquidité sous pression : la BCT arbitre entre stabilité et vulnérabilités internes

Les indicateurs monétaires du 5 décembre 2025 confirment un contexte bancaire toujours tendu. Le solde du compte courant ordinaire des banques reste faible, bien en-deçà des niveaux de 2024. Ce qui traduit la persistance d’une liquidité structurellement déficitaire. Le volume global de refinancement, légèrement supérieur à 11 milliards de dinars, montre combien le secteur bancaire dépend encore des interventions quotidiennes de la Banque centrale.

Le taux du marché monétaire demeure solidement arrimé à 7,5 %, en ligne avec un taux directeur maintenu sans changement. Ce choix reflète l’équilibre délicat recherché par la BCT : éviter d’alimenter les tensions inflationnistes; tout en préservant la fluidité minimale du crédit. Mais les signaux envoyés par l’économie réelle invitent à la prudence. La demande de cash continue de s’amplifier et les billets en circulation dépassent désormais 26 milliards de dinars, un record. Cette explosion de la circulation fiduciaire révèle une défiance persistante vis-à-vis du système bancaire; mais aussi l’emprise croissante de l’économie parallèle, difficile à contenir sans réformes structurelles audacieuses.

Des réserves de change sous tension : un coussin qui s’érode malgré la résilience des flux extérieurs

Les avoirs nets en devises reculent à 24,6 milliards de dinars, équivalents à 104 jours d’importation, contre 112 jours un an auparavant. L’érosion est notable et s’explique en grande partie par un service de la dette extérieure particulièrement lourd en 2025. Les paiements cumulés atteignent en effet près de 11,5 milliards de dinars à fin novembre.

Malgré cette pression, les recettes en devises montrent une résilience appréciable. Le tourisme progresse et dépasse 7,5 milliards de dinars, bénéficiant d’une fréquentation européenne soutenue. Les revenus des Tunisiens à l’étranger suivent la même trajectoire ascendante et apportent près de 8 milliards de dinars à fin novembre. Ces flux constituent aujourd’hui la première ligne de défense du dinar. Mais ils ne suffisent pas à eux seuls à compenser le poids du service de la dette et les besoins croissants en importations essentielles.

Un dinar en équilibre instable : respiration face au dollar, glissement contrôlé face à l’euro

Sur le marché des changes, le dinar évolue dans un mouvement à double vitesse. Le recul mondial du dollar permet au dinar de reprendre de la vigueur, avec un taux passant de 3,16 à 2,93. Cette amélioration allège temporairement la facture des importations libellées en dollars, notamment pour l’énergie et certaines matières premières stratégiques.

Face à l’euro, la situation est plus nuancée. Le dinar glisse légèrement, passant de 3,32 à 3,42. Cette dépréciation modérée, mais persistante, traduit une tendance structurelle liée aux déséquilibres externes, à la dépendance des entreprises tunisiennes aux intrants importés et à un différentiel d’inflation qui continue d’éroder la compétitivité interne. La Banque centrale (BCT) semble maintenir une stratégie de flottement géré, évitant tout mouvement brusque, mais acceptant une correction graduelle du taux de change.

Un horizon proche sous surveillance : une stabilisation relative mais conditionnelle

À court terme, le dinar devrait bénéficier de conditions relativement favorables. Le repli du dollar, la stabilité du taux directeur, la hausse saisonnière des transferts des résidents à l’étranger et la bonne tenue du tourisme européen devraient contribuer à contenir les pressions immédiates. Mais cette stabilisation reste précaire. Les réserves en devises demeurent sous tension et le moindre choc externe pourrait modifier le paysage en quelques jours, surtout dans un environnement global volatil.

Une équation plus complexe en 2026 : dette, croissance et inflation comme lignes de fracture

À moyen terme, la situation s’annonce plus exigeante. Les obligations extérieures de 2026 imposeront des sorties de devises importantes, au moment même où la croissance intérieure peine à générer des excédents exportables. L’inflation sous-jacente, installée à 5 % fin novembre, réduit les marges de manœuvre monétaires et renchérit les importations. La progression constante de l’économie informelle absorbe une part croissante de la liquidité bancaire, accentuant les tensions sur le marché monétaire.

La capacité du gouvernement à sécuriser de nouveaux financements extérieurs, qu’ils soient bilatéraux ou multilatéraux, jouera un rôle décisif dans la stabilité du dinar. Faute de ces apports, la dépréciation graduelle resterait le scénario le plus probable.

In fine : une stabilité apparente qui ne masque pas les vulnérabilités profondes

La Tunisie termine 2025 dans une posture délicate. Les signaux positifs existent, notamment dans les revenus extérieurs et la relative stabilité du dinar face au dollar. Mais les vulnérabilités structurelles persistent : liquidité bancaire fragile, dette extérieure lourde, érosion des réserves, montée du cash et dépendance aux chocs exogènes.

Le dinar bénéficie aujourd’hui d’une accalmie conjoncturelle. Mais cette stabilité demeure conditionnelle et pourrait être rapidement remise en question. L’année 2026 s’ouvrira sous le signe d’un équilibre fragile, où la moindre secousse internationale pourrait suffire à rebattre les cartes du marché tunisien.

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain D’Economie Financière (IAEF-ONG)

L’article L’hebdo du vendredi 7 décembre 2025 – Le dinar tunisien dans la tourmente internationale est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

Euro en reprise, dollar affaibli : quelles implications pour le dinar tunisien ?

06. Dezember 2025 um 18:24

La scène monétaire internationale connaît un nouvel épisode de réajustement qui pourrait, à moyen terme, peser sur les équilibres externes des économies émergentes, dont la Tunisie. La paire EUR/USD poursuit une dynamique de reprise soutenue, portée à la fois par la faiblesse persistante du dollar américain et par une amélioration progressive des indicateurs européens. Ce mouvement, qui repositionne l’euro vers la zone des 1,17, se déploie dans un contexte géopolitique et macroéconomique plus serein qu’au cours des derniers mois.

L’euro bénéficie d’abord de signaux macroéconomiques plus robustes. Les derniers PMI des services en zone euro sont légèrement revus à la hausse, tandis que l’inflation — bien que remontant marginalement à 2,2 % — reste suffisamment contenue pour dissuader la BCE d’accélérer toute normalisation restrictive. Signe de détente financière : l’écart de rendement entre les obligations allemandes et italiennes est revenu à 70 points de base, un plus bas depuis quinze ans, renforçant la perception d’un risque souverain mieux maîtrisé en Europe.

De l’autre côté de l’Atlantique, les États-Unis montrent des signes d’essoufflement. L’indice ISM manufacturier peine à se redresser et les marchés restent convaincus que la Fed ira vers des baisses de taux dès décembre ou au tout début de 2026. Le calendrier statistique américain, particulièrement pauvre avant la réunion de la Fed, limite toute possibilité de renverser cette anticipation. Le dollar conserve certes des phases de rebond technique liées à des mouvements de refuge, mais celles-ci demeurent éphémères.

 

L’indice ISM manufacturier peine à se redresser et les marchés restent convaincus que la Fed ira vers des baisses de taux dès décembre ou au tout début de 2026.

 

Dans ce climat où l’euro gagne du terrain et où le billet vert s’affaiblit, la paire EUR/USD a franchi des niveaux techniques décisifs : 1,1600 puis 1,1650. Une cassure nette au-dessus de 1,1700 ouvrirait la voie vers 1,1728, voire 1,18, renforçant l’idée d’un retournement plus durable de tendance.

Cette recomposition monétaire internationale n’est pas sans conséquences pour les économies importatrices nettes comme la Tunisie, dont la devise reste fortement exposée aux mouvements du dollar et de l’euro.

Pour le dinar tunisien, l’appréciation de l’euro constitue un facteur ambivalent.
D’un côté, elle améliore mécaniquement la valeur des recettes en euros des secteurs exportateurs dominants — textile, mécanique-électrique, agroalimentaire, tourisme — offrant un répit relatif aux entreprises opérant avec l’Europe, principal partenaire commercial du pays. Elle contribue aussi à réduire les pressions de change lorsque la Banque centrale doit sécuriser les paiements extérieurs libellés en euros.

De l’autre, la Tunisie reste structurellement importatrice d’énergie, de matières premières et de biens intermédiaires dont une part importante est libellée en dollars. La faiblesse actuelle du billet vert constitue donc, à court terme, un soulagement appréciable : elle allège la facture énergétique, limite les tensions sur les réserves de change et tempère la dynamique inflationniste importée.

 

De l’autre, la Tunisie reste structurellement importatrice d’énergie, de matières premières et de biens intermédiaires dont une part importante est libellée en dollars. La faiblesse actuelle du billet vert constitue donc, à court terme, un soulagement appréciable…

Le scénario actuel — euro plus fort, dollar plus faible — constitue ainsi une configuration relativement favorable pour le dinar, réduisant son exposition au choc dollar et améliorant les termes de l’échange avec la zone euro. Toutefois, cette fenêtre demeure fragile. Une nouvelle volatilité géopolitique, un durcissement inattendu de la Fed ou au contraire un ralentissement brutal en Europe pourraient inverser rapidement les tendances, exposant de nouveau la Tunisie à des pressions de change plus fortes.

À ce stade, la reprise de l’euro au-delà de 1,16 ouvre une parenthèse de stabilité monétaire dont la Tunisie pourrait tirer avantage si elle est accompagnée d’une gestion prudente du marché des changes et d’une politique monétaire cohérente avec la maîtrise de l’inflation. Mais comme souvent, la respiration offerte par les marchés internationaux n’est qu’un répit : elle doit être mise à profit pour renforcer les fondamentaux internes, faute de quoi tout retournement du dollar pourrait relancer les tensions sur le dinar.

In fine, l’équilibre du moment — euro résilient, dollar vacillant — constitue une opportunité pour le dinar tunisien, mais une opportunité transitoire, dépendante d’un environnement mondial où les certitudes demeurent rares et où les cycles de volatilité se sont accélérés.

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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