Come-back du mercenaire Erik Prince, ancienne «gloire» de Blackwater
Fini la traversée du désert pour le sulfureux Erik Prince, le fondateur et ancien patron de la société de mercenaires la plus connue au monde Blackwater. Suite à des exactions commises en Irak, il avait démissionné et vendu sa société. Il avait déclaré à l’époque : «Je me suis mis, moi et mon entreprise, à la disposition de la CIA pour des missions très risquées. Mais lorsqu’il est devenu politiquement opportun de le faire, quelqu’un m’a jeté sous le bus». Aujourd’hui Prince se refait une virginité avec sa nouvelle société Victus Global profitant de son appartenance au Parti républicain et de sa proximité avec les milieux trumpistes notamment le secrétaire d’État à la Défense Pete Hegseth.
Imed Bahri
Selon le Wall Street Journal, Erik Prince opère actuellement avec une nouvelle entreprise dans plusieurs pays d’Amérique latine et d’Afrique.
Dans une enquête menée par Benoit Faucon et Vera Bergengruen, le journal américain explique que les services du mercenaire controversé sont désormais convoités après avoir rétabli l’ordre public dans les montagnes de la région de Puno, riche en or au Pérou.
Edwin Ajawana, propriétaire d’une mine d’or dans les Andes, a parcouru 23 heures de route pour rencontrer Erik Prince, espérant protéger ses employés et ses biens. Se joignant à d’autres entrepreneurs, il a déclaré à Prince: «Des morts continuent de joncher les routes, les décharges et les poubelles. Pour nous, l’État est quasiment inexistant. Nous avons été abandonnés».
Prince, qui a vendu Blackwater en 2010, a lancé sa nouvelle société, Victus Global, en tant que marque mondiale pour un réseau de sociétés qu’il a fondées pour mener des opérations de sécurité en Équateur, en République démocratique du Congo et en Haïti, et est désormais à l’avant-garde d’une industrie émergente bénéficiant des réductions de l’aide étrangère de Trump.
Le journal a indiqué que l’ancien des forces spéciales des Marines était prêt à offrir ses services, exhibant des images de drones montrant ses mercenaires en Haïti aidant à traquer et à éliminer des membres présumés de gangs dans le cadre d’un contrat gouvernemental signé en mars. Ce contrat, d’un minimum de 10 millions de dollars par an, payé par le gouvernement ou une coalition d’intérêts privés, était disponible.
Combler le vide dans les emplois de sécurité
Prince estime que ses mercenaires peuvent combler le vide dans les emplois de sécurité internationale que l’administration Trump préfère ne pas financer. Il affirme vouloir réaliser des profits dans les pays qui ont désespérément besoin de l’aide américaine.
L’ancien candidat à la présidentielle Hernando de Soto, qui a reçu Prince, a déclaré à Lima que le fondateur de Blackwater «est dans l’œil de Trump», offrant au Pérou la meilleure chance d’être dans le radar de la Maison Blanche pour une assistance en matière de sécurité et d’attirer l’attention des investisseurs américains préoccupés par les problèmes de sécurité à l’étranger.
Pour a part, Prince a déclaré : «Je ne suis pas proche de Trump mais je suis proche de son équipe». Il l’est notamment du secrétaire à la Défense Pete Hegseth, avec qui il a nagé dans l’Hudson et qui avait déjà sollicité la clémence pour quatre sous-traitants de Blackwater condamnés pour le meurtre de 14 civils en Irak.
Le journal a rapporté que Blackwater, autrefois la plus grande force mercenaire des États-Unis, avait perdu sa réputation aux États-Unis après les révélations de violences commises pendant la guerre contre le terrorisme de l’ancien président George W. Bush. Cependant, Prince, 56 ans, a amassé une fortune en fournissant une assistance en matière de sécurité dans le monde entier, parfois en marge la loi, a précisé le WSJ.
Bien que la Maison Blanche ait refusé de commenter les liens de Prince avec l’administration, l’homme d’affaires tente de combler le vide laissé par la politique sélective «America First» de Trump en Amérique latine et en Afrique. La nouvelle entreprise de Prince emploie des dizaines de personnes mais ses ambitions sont grandes et la devise de Victus Global est : «Nous ne nous contentons pas de conseiller, nous agissons».
Accompagner les entreprises américaines à l’étranger
Interrogé sur l’identité de l’homologue américain des mercenaires russes du groupe Wagner, Prince a répondu que ce serait lui et son entreprise. Il a ajouté : «Alors que les entreprises américaines commencent à se tourner vers l’étranger pour des projets dans les domaines de l’énergie, des mines et des infrastructures, je serai là avec elles».
Sous pression, Victus a initialement concentré son marketing sur l’Amérique latine, reflétant la position intransigeante de l’administration Trump sur la sécurité des frontières, les gangs et le trafic de drogue. Prince a en effet renforcé ses liens avec le président salvadorien Nayib Bukele ainsi qu’avec le président équatorien Daniel Noboa avec qui il a un contrat.
Le Département d’État américain a déclaré : «Nous comprenons que Prince se soit rendu en Équateur à titre privé. Le gouvernement des États-Unis n’est pas impliqué dans les opérations de lutte contre le trafic de stupéfiants menées par des sociétés de sécurité privées dans le pays».
Parmi les initiatives les plus récentes de Prince, le contrat de sécurité d’un an en Haïti où les gangs sèment la terreur. Selon le WSJ, Prince a engagé des mercenaires salvadoriens pour aider la police locale à cibler les gangs avec des drones standard chargés d’explosifs, en utilisant des techniques développées pendant la guerre en Ukraine.
Le WSJ cite les Nations Unies qui ont déclaré ce mois-ci que des drones avaient tué au moins 233 membres de gangs et trois civils. Il ajoute qu’une femme avait été tuée lorsque deux membres de gangs se sont réfugiés chez elle et qu’un drone qui les poursuivait a explosé.
«Les drones ont stoppé l’hémorragie», a déclaré pour sa part le Premier ministre haïtien Alix Didier Fils-Aimé ajoutant que les chefs de gangs se vantaient auparavant de leurs crimes sur les réseaux sociaux mais qu’ils se cachent désormais. Il a expliqué que le montant qu’Haïti versera à Prince dans le cadre du contrat équivaut à environ 1% du milliard de dollars que les Nations Unies et les gouvernements précédents ont consacré à la sécurité ces dernières années. Autrement dit, c’est moins cher et plus efficace.
Cependant, Dan Foote, diplomate américain ayant été envoyé spécial en Haïti en 2021, a déclaré que l’approche de Prince risquait d’exacerber l’instabilité. Il a ajouté que l’intervention de la sécurité privée en Haïti échouerait si elle était menée par des étrangers qui ne sont pas responsables devant les lois et le peuple haïtiens.
Le gouvernement canadien a exprimé son inquiétude face aux «rapports d’exécutions extrajudiciaires» en Haïti et un groupe de sénateurs démocrates a demandé aux départements d’État et de la Sécurité intérieure des précisions sur les opérations de Prince.
Des mercenaires salvadoriens à Kinshasa
Selon le journal, le président congolais Félix Tshisekedi a choisi Prince en décembre pour protéger les collecteurs d’impôts responsables de près de 40 mines, dont des minerais essentiels aux industries automobile et électronique américaines, comme le cobalt.
Le contrat de Prince comprend une deuxième mission visant à mettre fin à la contrebande de minerais et à aider les autorités à sécuriser les frontières de la RDC. Des rumeurs circulent également concernant des discussions avec Prince concernant l’envoi de mercenaires salvadoriens pour sécuriser le palais présidentiel à Kinshasa, la capitale.
Pour maintenir les bonnes relations de Victus avec l’administration Trump, Prince entretient des relations étroites avec les alliés du président, au sein et en dehors de l’administration. Depuis l’élection de Trump, il a visité la résidence de Mar-a-Lago appartenant au président et a déclaré qu’il tenait les membres des équipes de sécurité nationale et diplomatique de Trump informés de ses projets en Afrique et en Amérique latine.
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