Par Néjib Gaça

La carthagologie. Plus qu’un champ académique, il s’agit d’un courant qui se veut une révolution épistémologique, une entreprise de réhabilitation historique et un appel à une refondation identitaire des peuples d’Afrique du Nord. De la théorie du « Grand retrait carthaginois » à une relecture radicale des origines de la démocratie, Karim Mokhtar, père fondateur de la carthagologie et visionnaire d’une renaissance carthaginoise méditerranéenne, revient sur son parcours et son œuvre fondatrice. Il propose une vision audacieuse : celle d’une Carthage toujours vivante, occultée mais jamais détruite. Entretien.
Vous êtes le père fondateur de la carthagologie. Pouvez-vous nous parler de votre parcours personnel dans la fondation de ce mouvement intellectuel révolutionnaire ?
J’ai commencé ce travail en 2012, dans un climat académique où la moindre tentative de réhabiliter Carthage était soit ignorée, soit activement combattue. A l’époque, personne ne parlait sérieusement d’une renaissance carthaginoise ou d’une lecture postcoloniale et indépendante de notre histoire. J’ai donc dû construire cette discipline pierre par pierre, dans un isolement initial, mais avec une conviction inébranlable.
Aujourd’hui, la carthagologie est bien plus qu’un projet personnel, c’est un mouvement intellectuel qui a influencé des chercheurs à Oxford, ainsi que dans plusieurs universités américaines, en Espagne, en Angleterre, au Maroc, en Algérie et en Tunisie. Des professeurs, historiens, linguistes et anthropologues y trouvent un nouveau cadre de lecture pour comprendre non seulement Carthage, mais aussi l’identité nord-africaine et méditerranéenne dans son ensemble. C’est une revanche épistémologique contre deux millénaires de narrations biaisées !
M. Mokhtar, commençons par la question fondamentale : qu’est-ce que la carthagologie, et pourquoi avez-vous ressenti le besoin de créer ce domaine d’étude entièrement nouveau ?
La carthagologie est le réveil méthodique de Carthage à partir des ruines laissées par une historiographie gréco-romaine biaisée.
C’est un mouvement et un cadre méthodologique visant à reconstruire l’histoire, la philosophie, la science et la société carthaginoises depuis une perspective proprement carthaginoise, non altérée par la propagande impériale.
J’ai fondé la carthagologie parce que les études classiques, en particulier dans le monde académique traditionnel, ont perpétué des mythes, que Carthage n’était qu’une extension phénicienne, que son peuple était barbare, qu’elle manquait d’âme culturelle.
Mais lorsque l’on examine les couches archéologiques, linguistiques et culturelles sans les filtres romains, on découvre quelque chose d’extraordinaire, Carthage comme première république multiculturelle, comme inventrice de l’écriture phonétique et comme phare philosophique.
La carthagologie rend la parole à Carthage. Ce n’est pas du révisionnisme, c’est une justice historique.
Quelles sont, selon vous, les idées ou découvertes les plus révolutionnaires que vous avez introduites à travers la carthagologie ?
Certaines idées bouleversent non seulement notre vision de Carthage, mais aussi des fondations même de la civilisation occidentale. Une des idées les plus révolutionnaires que j’ai proposées est la théorie du Grand retrait carthaginois, selon laquelle Carthage n’a pas été totalement détruite en 146 av. J.-C., mais a orchestré un retrait stratégique et planifié. Des preuves archéologiques et démographiques suggèrent que de nombreuses familles carthaginoises se sont déplacées vers l’Atlantique, certaines peut-être jusqu’aux Amériques, bien avant Christophe Colomb.
Une autre révélation clé est que les Romains, et puis même les Americains, ont repris et adapté la Constitution carthaginoise, un système politique sophistiqué combinant aristocratie, méritocratie et démocratie pragmatique.
Enfin, je soutiens que l’alphabet phonétique que l’Europe utilise aujourd’hui est en fait une innovation cananéenne-carthaginoise, diffusée par nos ancêtres bien avant l’hégémonie grecque.
Qu’est-ce qui, selon vous, rend l’histoire de Carthage si méconnue ou mal comprise aujourd’hui, même parmi les historiens professionnels ?
La principale raison, c’est que notre accès à l’histoire de Carthage est filtré par les écrits de ses anciens ennemis. Imaginez si l’unique récit que nous avions de la Révolution française venait de l’aristocratie monarchiste ! Eh bien, c’est exactement ce qui s’est passé avec Carthage. L’essentiel des sources que nous possédons provient d’auteurs romains ou grecs, comme Polybe ou Tite-Live, qui avaient tout intérêt à diaboliser une civilisation qu’ils venaient de raser.
En outre, l’archéologie carthaginoise a longtemps été négligée ou interprétée selon les biais orientalistes et coloniaux. La carthagologie cherche à renverser cette logique d’héritage idéologique, en croisant les données matérielles, linguistiques, sociopolitiques et en redonnant la parole aux Carthaginois eux-mêmes, à travers ce qu’ils ont laissé et ce que l’on a longtemps refusé de lire.
Vous parlez souvent d’un « retour de Carthage » ou d’un « réveil carthaginois ». Est-ce seulement symbolique, ou envisagez-vous un véritable projet politique et culturel ?
C’est bien plus qu’un symbole. Le retour de Carthage que je défends est à la fois intellectuel, culturel et politique. Sur le plan symbolique, il s’agit de restaurer une mémoire mutilée, de rendre aux peuples nord-africains la conscience de leur propre modernité ancienne, souvent niée ou effacée. Mais c’est aussi un projet concret, que je développe à travers le mouvement de la République de Carthage.
Nous proposons, par exemple, de renommer la Tunisie en « République de Carthage », non pas pour effacer quoi que ce soit, mais pour réancrer le pays dans sa véritable histoire méditerranéenne.
Ce projet vise aussi à encourager un modèle démocratique avancé inspiré de la Constitution carthaginoise, à valoriser le pluralisme ethnique, et à faire de Carthage un nouveau modèle de renaissance civilisationnelle pour toute l’Afrique du Nord et au-delà.
La Constitution de Carthage est souvent mentionnée dans vos travaux comme un modèle avancé. En quoi différait-elle des systèmes politiques grecs ou romains ?
La Constitution de Carthage n’était pas seulement avancée… c’était la première véritable Constitution de l’histoire et la première république sur Terre. Elle précédait de loin les modèles romains, et même athéniens. Aristote lui-même, bien que profondément hellénocentré, la considérait comme plus stable et plus efficace que celles d’Athènes ou de Sparte. Ce système reposait sur une démocratie méritocratique intelligente, où les dirigeants, les suffètes étaient élus pour leurs compétences, sans être issus d’une aristocratie héréditaire. Il s’agissait d’un équilibre entre démocratie, aristocratie et technocratie, avec une rotation du pouvoir, des mécanismes de contrôle et une absence de culte guerrier.
Mais ce qui est encore plus révolutionnaire, c’est ma théorie récente selon laquelle c’est Carthage qui aurait influencé Athènes à adopter le principe démocratique. Il est très possible que même le mot “démocratie” ne soit pas d’origine grecque. Selon mes recherches linguistiques, il proviendrait d’un composé carthagino-cananéen : dem (sang) + qart (la cité, l’État), ce qui signifierait le sang de la cité, une définition bien plus cohérente dans un contexte méditerranéen ancien, où l’appartenance et le devoir civique étaient liés au sang versé pour la communauté. Cette lecture redonne à Carthage son rôle central non seulement dans l’histoire politique, mais aussi dans l’étymologie même de la gouvernance populaire.
Vous évoquez souvent la dimension multiethnique de Carthage. Est-ce une exagération moderne ou une réalité historique étayée ?
C’est une réalité historique incontestable, bien qu’elle ait été systématiquement minimisée ou effacée par les récits gréco-romains. Carthage était une république profondément cosmopolite, une cité-Empire bâtie sur le commerce, les alliances et l’inclusion plutôt que sur la conquête brutale. Elle réunissait des Nord-Africains autochtones, des Levantins, des Ibères, des Sardes, des Siciliens, et même des Grecs et des Étrusques, tous intégrés à des degrés divers dans la vie économique, militaire et parfois même politique. Contrairement à l’idéal grec fondé sur la citoyenneté exclusive, Carthage offrait un modèle d’intégration pragmatique, qui rappelait davantage les grandes villes modernes que les cités antiques.
Et c’est là une des raisons de la haine profonde que Rome vouait à Carthage, elle représentait un monde ouvert, libre, intelligent et pluraliste, aux antipodes de l’impérialisme romain qui reposait sur l’homogénéisation et la domination. Cette pluralité ethnique, culturelle et linguistique est au cœur de l’identité carthaginoise, et c’est elle que la carthagologie s’emploie à réhabiliter.
Dans vos travaux, vous affirmez que Carthage a été fondée dès le XIIIe siècle avant notre ère, et non au IXe siècle comme le soutient la version gréco-romaine. Pouvez-vous nous expliquer ce décalage chronologique et ce qu’il révèle ?
Absolument. L’idée que Carthage aurait été fondée seulement au IXe siècle avant notre ère est une construction idéologique tardive, promue par les Grecs, puis amplifiée par les Romains. Elle visait à minimiser l’ancienneté et la profondeur historique de Carthage, en la présentant comme une création récente de prétendus “Phéniciens” venus de l’Est. Ce récit avait une double utilité stratégique : d’une part, il permettait aux Romains de prétendre que Carthage n’était ni autochtone ni ancienne, mais une intruse étrangère. D’autre part, cela justifiait la négation de toute influence carthaginoise sur Rome, Athènes ou d’autres civilisations méditerranéennes.
Or, les fouilles archéologiques, les stratigraphies urbaines et les échanges commerciaux démontrent clairement que Carthage, ou Qart Hadasht, existait déjà comme un centre civilisationnel actif au XIIIe siècle avant notre ère.
Elle n’était pas un simple « Comptoir phénicien », elle était un pôle majeur, une ville-Etat complexe bien avant la fondation légendaire de Rome. De plus, le terme « phénicien » lui-même est une invention grecque péjorative, réduisant toute une civilisation à la fabrication de la teinture pourpre (le fameux « purple dye »), d’où le mot phoinix en grec. C’est une stratégie classique de réduction identitaire. En refusant d’appeler ces peuples « carthaginois », les Grecs et les Romains leur ont nié leur souveraineté historique. C’est cette falsification que la carthagologie déconstruit, preuves à l’appui.
Parlons de l’influence intellectuelle de Carthage. Vous avez avancé l’idée que des penseurs carthaginois ont influencé la philosophie grecque, notamment Socrate.
Pouvez-vous développer ?
En effet, c’est l’un des aspects les plus fascinants de mes recherches.
Dans mon hypothèse du « Socrate carthaginois », je propose que Socrate, ou du moins l’origine de sa pensée, pourrait être liée à un héritage carthaginois. Plusieurs éléments convergent vers cette idée. D’abord, aucune œuvre écrite directement par Socrate ne nous est parvenue, ce qui laisse penser qu’il exprimait peut-être ses idées dans une langue autre que le grec, potentiellement le cananéen carthaginois. Ensuite, son apparence physique décrite comme « non grecque » par ses contemporains, ainsi que ses critiques radicales des dieux grecs pourraient signaler des racines étrangères.
Ajoutons à cela des parallèles troublants entre certaines doctrines attribuées à Socrate et des concepts religieux et éthiques carthaginois, notamment sur la justice, l’honneur et le dialogue intérieur. Si l’on replace Athènes dans le contexte des échanges méditerranéens de l’époque, il devient tout à fait plausible que des philosophes ou mystiques carthaginois aient transmis leur savoir à travers les routes commerciales, les écoles, voire l’esclavage. Ce n’est pas une revendication gratuite, mais une hypothèse étayée par des indices linguistiques, culturels et philosophiques. Là encore, la carthagologie ouvre des portes que l’historiographie gréco-romaine a toujours refusé d’envisager.
Un exemple frappant qui illustre cette dynamique d’effacement est celui du philosophe carthaginois Clitomaque, né sous le nom de Hasdrubal. Ce penseur majeur du IIIe siècle av. J.-C., formé à Carthage avant de devenir chef de l’Académie platonicienne à Athènes, a vu son nom originel effacé au profit d’un pseudonyme hellénique, probablement pour rendre ses idées plus acceptables dans les cercles intellectuels gréco-romains.
Ce changement n’est pas anodin : il révèle un processus systématique de désidentification des figures carthaginoises dans les sources classiques. Si cela a été fait pour un penseur aussi éminent, il est fort probable que des milliers d’autres Carthaginois, penseurs, inventeurs, chefs militaires, scientifiques, aient subi le même sort, leur héritage dilué ou réattribué à des figures « grecques » ou « romaines ». La carthagologie s’attache justement à traquer ces effacements et à restituer les identités authentiques derrière les masques imposés par l’Histoire impériale.
Vous avez également proposé une théorie radicale sur la disparition de Carthage : « Le Grand retrait carthaginois ». Pouvez-vous nous expliquer cette hypothèse ?
Oui, c’est l’une de mes hypothèses les plus ambitieuses. Contrairement au récit traditionnel qui affirme que Carthage a été complètement détruite en 146 av. J.-C. par Rome, je soutiens que cette idée est une illusion propagandiste, façonnée pour faire croire à une victoire totale. Ma théorie du Grand retrait carthaginois propose que les élites carthaginoises, conscientes depuis des décennies de la montée de Rome, ont planifié un retrait stratégique bien avant la chute officielle. Ce n’était pas une extinction, mais une dispersion organisée.
Des preuves archéologiques, numismatiques, linguistiques et même génétiques pointent vers une migration massive vers l’Ouest, possiblement jusqu’aux îles Canaries, les Amériques ou d’autres régions atlantiques, où des éléments de culture carthaginoise persistent de manière étrange et inexpliquée. Carthage n’a pas été réduite en cendres, elle s’est éparpillée, se transformant en silence stratégique pour survivre dans l’ombre de l’Histoire.
Cette hypothèse remet radicalement en question la notion même de « chute » civilisationnelle. Elle nous oblige à envisager Carthage non pas comme une cité morte, mais comme une civilisation fluide, résiliente, transocéanique.
Un autre point marquant est votre insistance sur l’identité nord-africaine et méditerranéenne de Carthage. Pourquoi est-ce si important aujourd’hui ?
C’est fondamental, car l’identité de Carthage a été systématiquement arabisée ou orientalisée dans les narratifs modernes, notamment en Tunisie. Ce glissement n’est pas innocent. Il fait partie d’un processus de colonialisme identitaire, où l’on nie aux peuples nord-africains leur propre antiquité pour les réduire à une « extension » de l’Orient. Or, Carthage était profondément nord-africaine, enracinée dans les terres de l’actuelle Tunisie, et en symbiose avec les peuples amazighs, les Berbères, les Numides et même les tribus sahariennes.
Redonner à Carthage son ancrage afro-méditerranéen, c’est rétablir une continuité historique qui a été rompue. C’est aussi réhabiliter une fierté civilisationnelle locale, indépendante des récits coloniaux, impériaux ou religieux importés. Et cela a des implications contemporaines : la jeunesse tunisienne, algérienne ou marocaine a besoin de repères historiques qui leur appartiennent, pas de mythes venus d’ailleurs.
Carthage n’était ni un satellite de Tyr, ni une annexe de l’Orient, c’était une puissance locale, ancrée, innovante et souveraine. La carthagologie, en révélant cela, est aussi une invitation à reconstruire l’identité collective sur des bases historiques réelles, et non sur des fictions imposées.
Selon vous, pourquoi la Tunisie moderne, berceau de Carthage, a-t-elle si peu investi dans la mémoire carthaginoise ?
Parce que depuis l’indépendance, la Tunisie a été enfermée dans un récit national fabriqué à des fins idéologiques, fondé sur le panarabisme et une identité orientale imposée. Ce récit a été institutionnalisé dans les écoles, les médias et même dans la Constitution et c’est un drame, car cela prive les Tunisiens de leur vraie richesse identitaire.
La République de Carthage que je défends est donc aussi un projet de libération historique. Elle propose de sortir de cette cage idéologique pour renouer avec ce que nous sommes réellement : un peuple méditerranéen, ouvert, inventif, ancien et pluriel.
Vous abordez aussi la question de l’art et de la culture carthaginois. Que savons-nous réellement de la créativité artistique de Carthage ?
Contrairement à l’idée reçue d’une Carthage austère ou purement commerciale, la cité était un véritable centre de création artistique et symbolique, rivalisant avec Athènes ou Alexandrie. Mais cet aspect a été volontairement occulté ou sous-estimé. Pourtant, on retrouve des traces d’un art carthaginois raffiné et codifié, que ce soit dans la sculpture, la céramique, la joaillerie, l’architecture ou les textiles. Les motifs carthaginois reflètent un mélange sophistiqué d’influences africaines, levantines et méditerranéennes, mais avec une grammaire esthétique propre.
Par exemple, le symbolisme de Tanit, déesse protectrice de la cité, révèle un langage visuel codé qu’on retrouve sur les stèles, les amulettes, et même les objets du quotidien. Il y avait aussi une musique carthaginoise, des danses rituelles, une architecture urbaine pensée selon des principes de fluidité sociale et d’organisation civique. Carthage n’a pas seulement produit des marchandises, elle a produit du sens, des formes, du sacré, de la beauté. Réhabiliter cette dimension artistique, c’est redonner à Carthage sa pleine humanité, au-delà des clichés militaires ou économiques.
Vous avez parlé de Carthage comme la « première république de l’histoire ». Pourquoi est-ce si important de le rappeler aujourd’hui, à l’ère des démocraties modernes ?
Parce que cela bouleverse notre chronologie politique. On enseigne encore que la démocratie est née à Athènes et que la République est une invention romaine. Mais Carthage, bien avant Rome et Athènes, avait déjà institué un système politique stable, sophistiqué, équilibré, où les dirigeants étaient élus, les pouvoirs séparés et la richesse n’assurait pas l’accès automatique au pouvoir.
Ce modèle préfigurait des idées qui, aujourd’hui encore, nous semblent modernes : rotation des charges, contrôle citoyen, délégation méritocratique, poids des assemblées, etc. Et cela dans un esprit d’inclusion ethnique, pas d’exclusion. Carthage prouve que l’idée républicaine ne vient pas uniquement d’Europe, mais aussi d’Afrique du Nord, d’un monde afro-méditerranéen brillant, lucide et structuré. Rappeler que Carthage fut la première république du monde, c’est rendre justice à cette civilisation injustement reléguée, et c’est aussi offrir aux peuples du Sud une généalogie politique noble, effacée par des siècles de domination intellectuelle. La République moderne a une dette envers Carthage. Il est temps de le reconnaître.
Quel rôle la diaspora nord-africaine peut-elle jouer dans ce réveil carthaginois que vous appelez de vos vœux ?
Un rôle essentiel. La diaspora, c’est la mémoire en mouvement. Ce sont des millions de femmes et d’hommes dispersés à travers le monde, souvent coupés de leurs racines véritables, mais en quête d’un sens profond à leur identité. En reconnectant cette diaspora avec la mémoire carthaginoise, on ne lui offre pas seulement une histoire glorieuse, on lui offre une matrice de souveraineté intérieure et collective.
La carthagologie est aussi un outil d’émancipation contemporaine, un levier pour revaloriser l’héritage des diasporas en France, aux États-Unis, au Canada, en Allemagne, etc. Ces jeunes générations peuvent devenir les ambassadeurs d’une nouvelle lecture du passé, des passeurs de savoirs, de culture, d’entrepreneuriat, enracinés dans un modèle historique qui leur appartient.
Imaginez une jeunesse qui ne se dit plus “issue de l’émigration”, mais descendante directe de la première république de l’histoire. Le potentiel de transformation est immense. Carthage peut renaître dans chaque conscience éclairée, et la diaspora est le terrain idéal pour cette renaissance.
En une phrase, quel est votre rêve ultime pour Carthage ?
Mon rêve, c’est de voir Carthage renaître non comme un souvenir, mais comme une force vivante, une république culturelle, intellectuelle et spirituelle, debout, enracinée en Afrique du Nord, rayonnant sur le monde, inspirant les peuples à se libérer des récits imposés pour redevenir auteurs de leur propre histoire.
N.G.