La famille tunisienne dépense mensuellement entre 130 et 140 dinars pour l’achat d’eau minérale
Le coût de la consommation d’eau en bouteille pour une famille tunisienne de cinq personnes a augmenté depuis 2022, atteignant entre 130 et 140 dinars par mois, selon les révélations de Hussein Rahili, expert en gestion des ressources hydriques, lors d’une interview avec l’agence TAP.
Rahili attribue cette augmentation aux changements climatiques et à la hausse des températures, qui ont poussé les familles tunisiennes à consommer en moyenne six bouteilles d’eau par jour, surtout pendant l’été.
L’expert souligne que l’adoption de l’eau en bouteille par les citoyens a connu une augmentation significative au cours de la dernière décennie, faisant de la Tunisie le quatrième pays consommateur d’eau en bouteille au niveau mondial par rapport à sa population.
En 2024, la consommation annuelle moyenne d’eau en bouteille par individu en Tunisie a atteint environ 241 litres, contre 225 litres en 2020, selon les dernières statistiques de l’Office National des Eaux Minérales et de l’Hydrothérapie.
Rahili explique que l’utilisation excessive de l’eau en bouteille comme alternative à l’eau du robinet est due à la détérioration de la qualité de l’eau distribuée par le réseau de la SONEDE (Société Nationale d’Exploitation et de Distribution des Eaux) et aux coupures fréquentes dans certaines régions. Les classes moyennes et pauvres sont les plus touchées, contraintes de se tourner vers des sources d’eau inconnues, ce qui pose un problème majeur en raison de ses graves répercussions sur la santé.
À cet égard, l’expert met en garde contre la prolifération des vendeurs ambulants d’eau potable d’origine inconnue, particulièrement présents dans les quartiers populaires. Cette eau provient souvent de sources naturelles et a une faible teneur en sels, ce qui peut entraîner des maladies hépatiques en cas de consommation excessive, soulevant ainsi une question de sécurité sanitaire que les autorités responsables doivent prendre en considération.
L’expert affirme que trois millions de citoyens tunisiens sont affectés par l’eau potable, en raison de la forte salinité et des concentrations élevées de certains carbonates, en plus du risque de pollution des ressources hydriques dû à l’absence de réseaux d’assainissement.
Dans ce contexte, il insiste sur la nécessité d’améliorer la qualité de l’eau dans toutes les régions confrontées à ce problème, notamment dans le bassin minier où le taux de fluor est élevé. Il recommande l’élaboration d’un programme intégré à cette fin pour garantir une eau de bonne qualité et en quantités durables.
Rahili souligne que l’État doit assumer sa responsabilité de fournir de l’eau potable et de veiller à la santé des citoyens, d’autant plus qu’environ 4 000 enfants meurent chaque jour dans le monde des suites de la diarrhée.
L’expert conseille d’investir dans l’amélioration de la qualité de l’eau distribuée par la SONEDE et de rénover les conduites de transport d’eau depuis les barrages, dont la durée d’exploitation a dépassé 15 ans, d’autant plus que 70% de la pollution provient de ces conduites.
Concernant le gaspillage de l’eau, Rahili révèle que le taux de gaspillage dans les zones irriguées atteint 40%, soit près de 750 millions de mètres cubes, ce qui est supérieur aux quantités d’eau consommées annuellement par les citoyens.
Dans ce cadre, il met en garde contre le danger de la détérioration continue des ressources hydriques depuis 1995 et l’absence de politiques d’adaptation et d’orientation, notamment vers des solutions de fortune et plus coûteuses pour le citoyen, telles que les coupures d’eau et le dessalement de l’eau de mer. Ce, malgré un coût des stations de dessalement cinq fois supérieur à leur coût réel, au lieu d’investir ces fonds dans d’autres projets.
L’intervenant conclut : « Si l’État avait pris en compte la question du gaspillage de l’eau depuis 1995 jusqu’à aujourd’hui, environ 70% du gaspillage aurait été évité (un quart de l’eau est gaspillé au niveau des réseaux de raccordement), des quantités importantes d’eau auraient été préservées, et l’investissement dans une grande partie du renouvellement des conduites de transport d’eau aurait été évité, réduisant ainsi les coupures répétées et consacrant les efforts à l’amélioration de la qualité de l’eau. »