❌

Normale Ansicht

Es gibt neue verfĂŒgbare Artikel. Klicken Sie, um die Seite zu aktualisieren.
Ältere BeitrĂ€geHaupt-Feeds

Eclairage – Allemagne-Russie, la fin d’une illusion stratĂ©gique

20. Juni 2025 um 06:01

En dĂ©nonçant un accord de coopĂ©ration militaro-technique vieux de deux dĂ©cennies avec l’Allemagne, Moscou acte la fin d’un dialogue stratĂ©gique post-Guerre froide. Un tournant symbolique fort qui entĂ©rine l’échec du modĂšle europĂ©en d’intĂ©gration pacifique de la Russie et consacre la montĂ©e des logiques de confrontation sur le continent.

 

Une rupture aux accents de guerre froide

La Russie a officiellement rompu l’accord de coopĂ©ration militaro-technique signĂ© avec l’Allemagne au dĂ©but des annĂ©es 2000. Ce texte, devenu obsolĂšte depuis l’invasion de l’Ukraine, permettait des Ă©changes technologiques et la maintenance de matĂ©riel hĂ©ritĂ© de l’ex-RDA. Si ses effets pratiques Ă©taient dĂ©jĂ  inexistants depuis 2022, son abandon prend une forte charge politique.

Moscou envoie un message clair : Berlin n’est plus un partenaire, mais un adversaire stratĂ©gique. Ce geste traduit un changement de perception radical, qui scelle la fin d’un espoir : celui d’une Russie intĂ©grĂ©e Ă  l’ordre europĂ©en.

Berlin renonce au dialogue et choisit l’atlantisme

Du cĂŽtĂ© allemand, cette rupture formelle n’est que le point d’orgue d’une transformation stratĂ©gique entamĂ©e dĂšs le dĂ©but de la guerre en Ukraine. Le gouvernement Scholz avait opĂ©rĂ© un revirement sans prĂ©cĂ©dent : rĂ©armement accĂ©lĂ©rĂ©, soutien militaire massif Ă  Kiev, et abandon dĂ©finitif du projet Nord Stream 2.

L’Allemagne, longtemps perçue comme la voix modĂ©rĂ©e d’Europe face Ă  Moscou, s’aligne dĂ©sormais sans ambiguĂŻtĂ© sur la position amĂ©ricaine. Elle renonce ainsi Ă  son rĂŽle de mĂ©diateur, hĂ©ritier du Wandel durch AnnĂ€herung, cette doctrine de rapprochement par l’interdĂ©pendance Ă©conomique chĂšre Ă  Willy Brandt.

La Russie tourne la page de l’Europe

Pour Moscou, cette rupture s’inscrit dans une dynamique de dĂ©couplage stratĂ©gique plus vaste. PrivĂ©e d’accĂšs aux technologies occidentales, la Russie accĂ©lĂšre sa coopĂ©ration militaire avec la Chine, l’Iran ou encore la CorĂ©e du Nord. Elle ne cherche plus Ă  prĂ©server un lien avec l’Europe, mais Ă  affirmer une autonomie stratĂ©gique complĂšte.

La rupture avec Berlin confirme une tendance plus large : l’abandon de toute illusion de rapprochement avec l’Occident. Moscou assume une posture de confrontation, dans un monde qu’elle juge dĂ©sormais structurĂ© par la force, les blocs et la rivalitĂ© systĂ©mique.

L’effondrement d’un projet europĂ©en

Ce divorce russo-allemand incarne l’échec d’une architecture sĂ©curitaire europĂ©enne fondĂ©e sur trois piliers : la coopĂ©ration Ă©conomique, le dialogue stratĂ©gique, et l’espoir d’intĂ©grer la Russie dans un ordre continental pacifiĂ©. Ces fondements se sont effondrĂ©s les uns aprĂšs les autres.

La guerre en Ukraine n’a pas seulement figĂ© les positions militaires, elle a figĂ© les rĂŽles politiques : l’Allemagne devient un rempart, la Russie une menace, et l’Europe un théùtre de polarisation croissante.

In fine, le dialogue n’est plus une option

Au-delà de sa portée technique, la fin de cet accord militaire incarne une cassure idéologique et stratégique. Les passerelles construites laborieusement depuis les années 1990 sont désormais démantelées. Berlin et Moscou ne se parlent plus, ne coopÚrent plus, et surtout, ne se font plus confiance.

Dans cette nouvelle Ăšre de rivalitĂ©s assumĂ©es, la diplomatie du compromis cĂšde la place Ă  la logique de bloc. Le rĂ©alisme stratĂ©gique impose une vĂ©ritĂ© brute : on ne coopĂšre pas avec celui que l’on perçoit comme un ennemi. Une Ă©poque s’achĂšve. Une autre, plus instable, vient de commencer.

 

===============================

* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-EconomĂštre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financiùre (IAEF-ONG)

L’article Eclairage – Allemagne-Russie, la fin d’une illusion stratĂ©gique est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

ZOOM – Fin du rĂšgne du dollar : une brĂšche gĂ©opolitique Ă  saisir pour le Maghreb

18. Juni 2025 um 10:20

Alors que le monde assiste Ă  une reconfiguration silencieuse mais profonde des rapports monĂ©taires, le dollar perd de son emprise face Ă  l’essor des monnaies locales pilotĂ© par les BRICS. Ce bouleversement, loin d’ĂȘtre marginal, redessine les Ă©quilibres gĂ©opolitiques et offre au Maghreb une opportunitĂ© historique de redĂ©finir sa place dans le jeu mondial. Encore faut-il savoir l’anticiper.

L’hĂ©gĂ©monie du dollar, colonne vertĂ©brale du systĂšme financier international depuis 1945, semble entrer dans une phase de reflux. Loin des annonces fracassantes, un basculement profond est en cours, portĂ© par plus de 90 pays qui, dans le sillage des BRICS, redĂ©finissent leur rapport au billet vert. Ce mouvement mondial de dĂ©dollarisation ne relĂšve plus du simple dĂ©bat idĂ©ologique. Il s’inscrit dans une dynamique gĂ©opolitique affirmĂ©e et portĂ©e par des outils concrets, des alliances nouvelles, et une volontĂ© partagĂ©e de souverainetĂ© monĂ©taire.

Ce rĂ©alignement monĂ©taire, amorcĂ© au Sud et Ă  l’Est du globe, remet en cause l’ordre financier Ă©tabli aprĂšs la Seconde Guerre mondiale, dans lequel le dollar est Ă  la fois monnaie d’échange, d’endettement, de rĂ©serve, et d’influence politique. À mesure que des puissances Ă©mergentes s’organisent autour d’alternatives monĂ©taires, une nouvelle architecture mondiale se dessine. Et le Maghreb, longtemps pĂ©riphĂ©rique dans les Ă©quilibres globaux, pourrait bien y trouver une marge d’action stratĂ©gique inĂ©dite.

L’offensive monĂ©taire des BRICS

Depuis le dĂ©but de 2025, les membres des BRICS ont considĂ©rablement intensifiĂ© leurs efforts pour substituer le dollar par leurs monnaies nationales dans les Ă©changes commerciaux. L’Iran et la Russie commercent dĂ©sormais exclusivement en rouble et en rial. L’Inde a doublĂ© ses Ă©changes avec la Russie, grĂące Ă  des rĂšglements en roupie. Le BrĂ©sil et la Chine ont Ă©tabli un canal direct en real et yuan, adossĂ© Ă  l’intĂ©gration du systĂšme de paiement chinois dans les banques brĂ©siliennes.

Au-delà des accords bilatéraux, les BRICS construisent des infrastructures financiÚres capables de concurrencer les systÚmes occidentaux : le BRICS Pay, plateforme de paiements transfrontaliers en monnaies locales; la New Development Bank (NDB), qui finance des projets dans des devises non-dollar; ou encore des chambres de compensation régionales qui évitent les circuits traditionnels dominés par SWIFT.

Ces dynamiques, loin de rester cantonnĂ©es Ă  ce cercle initial, s’étendent dĂ©sormais Ă  l’Afrique, Ă  l’Asie du Sud-Est, Ă  la CommunautĂ© des États IndĂ©pendants (CEI) et Ă  l’AmĂ©rique latine. La dĂ©dollarisation devient une matrice gĂ©oĂ©conomique partagĂ©e par un nombre croissant d’États, souvent motivĂ©s par la volontĂ© de se prĂ©munir contre l’extraterritorialitĂ© du droit amĂ©ricain et les sanctions politiques.

Le secteur énergétique, catalyseur de la mutation

Le secteur de l’énergie, longtemps verrouillĂ© par le pĂ©trodollar, est aujourd’hui l’un des plus concernĂ©s par cette transformation. L’Arabie saoudite, pivot de l’OPEP, a commencĂ© Ă  accepter le yuan pour certaines de ses ventes de pĂ©trole. L’Inde rĂšgle ses importations russes en roupie. Le Ghana achĂšte dĂ©sormais du pĂ©trole contre de l’or. Autant de signaux qui indiquent que les principaux marchĂ©s mondiaux d’hydrocarbures sont en train de rompre avec l’uniformitĂ© dollar.

Ce changement est largement perçu comme une rĂ©ponse Ă  l’usage gĂ©opolitique du dollar par les États-Unis, notamment Ă  travers les sanctions extraterritoriales. En rĂ©ponse, des pays cherchent Ă  reprendre le contrĂŽle de leurs flux Ă©conomiques en se dĂ©tachant d’une monnaie qui n’est plus perçue comme neutre.

Un multilatéralisme de rupture

Face Ă  cette vague de repositionnement monĂ©taire, les rĂ©actions amĂ©ricaines se durcissent. Donald Trump, menace (encore ?) d’imposer des droits de douane de 100 % aux pays s’engageant dans des alternatives au dollar. Cette approche unilatĂ©rale renforce la polarisation du systĂšme international et pousse de nombreux pays Ă  accĂ©lĂ©rer leur autonomie monĂ©taire.

Pour autant, au sein mĂȘme des BRICS, des divergences apparaissent. Le prĂ©sident brĂ©silien Lula a ainsi retirĂ© de l’agenda la question d’une monnaie unique des BRICS, appelant toutefois Ă  une approche multilatĂ©rale Ă©quilibrĂ©e. Cela reflĂšte une tension entre le besoin d’unitĂ© politique et les rĂ©alitĂ©s hĂ©tĂ©rogĂšnes des Ă©conomies membres.

Le Maghreb face Ă  une recomposition mondiale

Dans ce contexte de fragmentation monétaire, les pays du Maghreb peuvent transformer leur position périphérique en atout stratégique. La réorganisation des flux commerciaux et financiers ouvre un espace inédit pour rééquilibrer leurs dépendances et diversifier leurs partenariats.

Sur le plan Ă©conomique, la possibilitĂ© de nouer des accords bilatĂ©raux en monnaies locales avec des partenaires asiatiques ou africains permettrait de rĂ©duire l’exposition au dollar et Ă  l’euro, tout en sĂ©curisant des approvisionnements vitaux. Le Maghreb peut Ă©galement s’insĂ©rer dans les circuits de financement de la NDB ou de la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures, qui offrent des alternatives aux prĂȘts conditionnĂ©s des institutions de Bretton Woods.

 

Sur le plan Ă©conomique, la possibilitĂ© de nouer des accords bilatĂ©raux en monnaies locales avec des partenaires asiatiques ou africains permettrait de rĂ©duire l’exposition au dollar et Ă  l’euro, tout en sĂ©curisant des approvisionnements vitaux.

 

Sur le plan logistique et Ă©nergĂ©tique, l’AlgĂ©rie dispose d’une carte maĂźtresse en tant que fournisseur de gaz naturel. Elle peut renforcer ses alliances vers l’Est en intĂ©grant des accords en monnaies alternatives avec la Chine ou la Turquie. Le Maroc, plateforme de transit entre l’Afrique et l’Europe, a les atouts pour devenir un hub de paiements rĂ©gionaux. La Tunisie, quant Ă  elle, peut tirer parti de sa proximitĂ© gĂ©ographique avec les deux blocs pour jouer un rĂŽle de pont monĂ©taire, Ă  condition de renforcer sa diplomatie Ă©conomique.

Une posture de non-alignement actif

Dans un monde de plus en plus polarisĂ©, la prudence stratĂ©gique impose aux pays du Maghreb d’adopter une posture de non-alignement actif. Cela suppose de maintenir des relations Ă©quilibrĂ©es avec l’Occident tout en s’ouvrant aux instruments monĂ©taires et financiers issus des BRICS et de leurs partenaires.

Sur quoi pourrait reposer une stratĂ©gie maghrĂ©bine efficace dans ce nouveau contexte monĂ©taire ? Faut-il renforcer la souverainetĂ© financiĂšre en diversifiant les rĂ©serves de change, en adhĂ©rant partiellement Ă  des plateformes de paiement alternatives, en concluant des accords de swap bilatĂ©raux et en s’intĂ©grant progressivement aux flux commerciaux libellĂ©s en monnaies non-dollar ?

Un tournant Ă  ne pas manquer

La dĂ©dollarisation mondiale, encore impensable il y a une dĂ©cennie, est aujourd’hui une rĂ©alitĂ© en construction. Elle traduit un nouvel Ă©quilibre de puissances, une revendication de souverainetĂ© Ă©conomique et un rejet croissant de la centralitĂ© politique du dollar. Dans ce processus, les pays du Maghreb ne doivent pas rester spectateurs.

Ils disposent des leviers nĂ©cessaires pour capter les opportunitĂ©s de cette transition monĂ©taire, Ă  condition d’adopter une vision stratĂ©gique cohĂ©rente, d’investir dans les outils de nĂ©gociation monĂ©taire et d’affirmer une diplomatie Ă©conomique fondĂ©e sur la diversification et l’anticipation.

Le basculement est en cours : le Maghreb saura-t-il en faire un levier d’indĂ©pendance et de projection, ou en subira-t-il une fois de plus les consĂ©quences en simple suiveur ?

 

===============================

* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-EconomĂštre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financiùre (IAEF-ONG)

L’article ZOOM – Fin du rĂšgne du dollar : une brĂšche gĂ©opolitique Ă  saisir pour le Maghreb est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

❌
❌