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Ne nous réjouissons pas trop vite de la chute d’Al-Assad

09. Dezember 2024 um 10:07

Aujourd’hui, alors que des célébrations populaires accompagnent les bouleversements en Syrie, avec la fuite de Bachar Al-Assad et la prise de la capitale Damas par les rebelles armés de Haya’at Tahrir Al-Sham, il est impératif de nous interroger : à qui profitent ces révolutions et ces désordres?

Khémaïs Gharbi *

Depuis plus de deux décennies, le monde arabe est le théâtre de bouleversements majeurs qui ont souvent été célébrés avec enthousiasme par les puissances occidentales et forcément par les populations locales galvanisées par l’espoir de changements et de démocratie. 

La chute de Zine El-Abidine Ben Ali en Tunisie en 2011 a marqué le début d’une vague de révolutions, suivie par celle de Mouammar Kadhafi en Libye la même année, et de Hosni Moubarak en Égypte. Ces événements, bien que prometteurs pour certains, ont également ouvert la porte à des souffrances incommensurables et à une instabilité profonde.

À cela s’ajoute l’invasion de l’Irak menée par les États Unis d’Amérique et leurs alliés, la chute de Saddam Hussein en 2003, dont l’exécution, un jour de fête musulmane, a marqué un affront inoubliable pour l’histoire et la dignité de la région.

Aujourd’hui, alors que des célébrations similaires accompagnent les bouleversements en Syrie, avec la fuite de Bachar Al-Assad et la prise de la capitale Damas par les rebelles armés de Haya’at Tahrir Al-Sham, il est impératif de nous interroger : à qui profitent ces révolutions et ces désordres? Ces événements, souvent initiés ou encouragés depuis l’étranger avec l’appui de certaines oppositions locales, ont plongé des millions de personnes dans le chaos. Derrière ces apparentes victoires populaires se cache une réalité sombre : une vague de destructions et de souffrances qui ne sert que les intérêts d’acteurs géopolitiques étrangers.

Les commanditaires et les victimes

Il ne suffit pas de constater les ruines. Il faut identifier les bénéficiaires pour comprendre qui tire les ficelles de ces bouleversements. Ceux qui applaudissent la chute des régimes arabes ne le font pas pour servir les aspirations des peuples à la liberté ou à la justice. Ils agissent au nom de leurs propres agendas : redessiner des frontières, affaiblir des nations, et imposer de nouvelles formes de domination.

Les révolutions qui ont balayé le monde arabe, de la Tunisie à la Syrie, ont permis aux anciennes puissances coloniales de tenter de réaffirmer leur contrôle sur des régions qui avaient pourtant arraché leur indépendance après la Seconde Guerre mondiale, grâce au droit des peuples à l’autodétermination prôné par Woodrow Wilson puis par Franklin Roosevelt.

Aujourd’hui, cette dynamique semble inversée. Les puissances qui avaient perdu leur emprise sur les pays arabes au milieu du XXᵉ siècle tentent un retour en force, cette fois avec l’appui des États-Unis. Ce projet, que certains appellent un «nouveau Sykes-Picot», repose sur une recomposition des influences et des frontières au détriment des populations locales.

N’applaudissons pas nos malheurs !

Dans ce contexte, il est légitime de se demander pourquoi, nous, Arabes, nous nous retrouvons souvent dans le camp de ceux qui se réjouissent de la chute de nos propres dirigeants, même lorsqu’ils résistent à ces projets d’ingérence. Applaudir la chute de Bachar Al-Assad ou de n’importe quel autre dirigeant sous prétexte de changement ne fait que nous aligner sur les intérêts de nos ennemis communs. Il y a une profonde incohérence à partager les gradins avec des supporters qui œuvrent contre notre souveraineté.

Nous devons refuser de devenir les complices de notre propre affaiblissement. Il ne s’agit pas ici de défendre des régimes ou des individus, mais de défendre le principe fondamental de l’indépendance et la dignité nationales. Si nous continuons à applaudir les bouleversements orchestrés à notre encontre, nous ne ferons que prolonger notre propre souffrance.

Un appel à la conscience patriotique

L’heure est venue pour les vrais patriotes de prendre conscience de la gravité de la situation. Nous glissons sur un toboggan qui nous mène droit vers l’effondrement total. Il faut stopper cette hémorragie. Cela commence par cesser de nous diviser et de nous critiquer systématiquement les uns les autres, car cette fragmentation ne fait que servir ceux qui veulent nous ramener à l’âge de pierre, comme l’avait cyniquement prédit George W. Bush en 2001.

Il est temps de réfléchir à l’avenir et de résister à ces vagues de destruction qui se succèdent sous prétexte de «printemps» ou de «libération». Les véritables ennemis ne sont pas ceux que nous désignons à la hâte parmi nous, mais ceux qui manipulent les fils en coulisse pour servir leurs propres intérêts. Si nous ne changeons pas de cap, la roue continuera de tourner, et les prochaines victimes seront inévitablement parmi nous.

Ne soyons pas les artisans de notre propre perte

L’histoire récente nous a appris que les bouleversements ne sont jamais anodins. Il est temps de tirer les leçons de ces expériences pour éviter de tomber encore et encore dans le même piège.

Soyons lucides. Ne célébrons pas trop vite la chute d’un dirigeant sans comprendre les implications profondes de cet événement. Seules la vigilance et l’unité peuvent nous permettre de sortir de ce cycle destructeur et de construire un avenir qui serve réellement les intérêts de nos peuples.

* Ecrivain et traducteur.

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