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ECLAIRAGE – Tunisie, août 2025 :- pilotage monétaire serré

01. September 2025 um 14:30

L’économie tunisienne bénéficie encore d’amortisseurs solides dans une conjoncture internationale éclectique…

Sur les marchés mondiaux, la semaine a été marquée par une légère détente des taux longs américains après les annonces de la FED sur le maintien du rythme de resserrement. Tandis que la BCE a confirmé sa prudence face à l’inflation européenne encore supérieure à 3 %.

De son côté, le pétrole évolue autour de 85 USD le baril, légèrement en recul après des tensions géopolitiques atténuées au Moyen-Orient, et les prix des matières premières agricoles restent volatils, sous l’effet des sécheresses en Amérique du Sud et des répercussions climatiques sur les récoltes. Ces dynamiques influencent directement la facture énergétique et alimentaire de la Tunisie, et par extension le déficit courant et l’inflation importée.

En Tunisie, pilotage serré

La Tunisie se trouve à un moment charnière : les indicateurs monétaires et financiers au 29 août 2025 de la BCT révèlent une économie qui avance sur une ligne de crête, entre maîtrise prudente de la liquidité, allongement de la dette publique et appui des flux extérieurs.

Le pays bénéficie encore d’amortisseurs solides, mais la trajectoire dépendra de la capacité à préserver les réserves, contenir la fuite vers le cash et gérer le coût de la dette dans un environnement incertain.

Liquidité sous tension

Par ailleurs, le système bancaire reste marqué par une tension de liquidité que la Banque centrale gère au jour le jour. Le compte courant du Trésor s’est contracté, tandis que celui des banques est tombé à des niveaux bas.

En parallèle, la masse de billets et monnaies en circulation a atteint un record, dépassant les 26 milliards de dinars. Ce qui traduit une désintermédiation persistante et une préférence pour le cash. Pour maintenir l’équilibre, la BCT recourt de plus en plus aux opérations de refinancement à plus long terme, réduisant son exposition aux open markets. Le taux directeur, abaissé à 7,5 %, est transmis directement au marché monétaire, stabilisant le TMM à ce même niveau.

Le signal est clair : la politique monétaire veut asseoir la désinflation, sans offrir pour autant un assouplissement massif.

Le Trésor allonge sa dette

Le profil de la dette intérieure connaît une transformation profonde. L’encours des bons du Trésor à court terme a été réduit de façon spectaculaire, tandis que celui des bons assimilables a progressé de plus de 11 milliards de dinars en un an.

Le Trésor opte pour l’allongement de la maturité, une stratégie qui réduit le risque de refinancement immédiat mais qui engage l’État sur des charges d’intérêt plus lourdes à moyen terme. Le choix vise la stabilité, mais il suppose une gestion fine du calendrier d’émissions et une maîtrise du coût de financement.

Des amortisseurs extérieurs encore solides

Les flux externes constituent la principale soupape de sécurité. Les recettes touristiques cumulées dépassent les 5 milliards de dinars, en hausse de plus de 400 millions sur un an, et les transferts des Tunisiens à l’étranger avoisinent le même niveau, en progression comparable. Ces deux leviers amortissent les tensions de la balance courante et compensent partiellement le poids du service de la dette extérieure, légèrement allégé par rapport à 2024.

Les avoirs en devises de la Banque centrale s’élèvent à près de 25 milliards de dinars, couvrant 108 jours d’importation. Ce niveau reste confortable, mais inférieur aux 116 jours enregistrés l’an dernier, ce qui traduit une érosion à surveiller avec attention, notamment à l’approche de l’hiver où la facture énergétique pourrait grimper.

Le dinar comme allié anti-inflation

Sur le marché des changes, le dinar a regagné du terrain face au dollar et au yen, ce qui atténue la facture des importations en énergie et en matières premières. Face à l’euro, la stabilité domine.

Cette appréciation relative constitue un appui précieux dans la lutte contre l’inflation importée. Mais elle reste dépendante de la solidité des flux touristiques et des transferts, ainsi que de l’absence de choc externe majeur.

Perspectives à court terme

Les prochaines semaines seront marquées par la normalisation de la liquidité après la haute saison, avec un reflux attendu du cash vers le système bancaire. Le dinar devrait rester stable contre l’euro et ferme face au dollar, tant que les entrées de devises résistent. La Banque centrale devrait conserver un biais prudent, maintenant le TMM proche de 7,5 %, et le Trésor poursuivra sa stratégie d’allongement de la dette.

Enjeux de moyen terme

D’ici le premier semestre 2026, l’enjeu central sera de préserver le coussin de devises tout en consolidant la désinflation. Le maintien des flux touristiques et des transferts sera décisif pour éviter une érosion trop rapide des réserves. La dette intérieure, désormais plus longue, devra être gérée avec discipline afin de contenir le coût moyen. Si l’inflation poursuit sa décrue et que le dinar conserve sa stabilité, la BCT pourrait envisager de nouveaux assouplissements graduels. Mais le moindre choc externe — énergétique, alimentaire ou géopolitique — risquerait de fragiliser ce fragile équilibre.

Verdict

La Tunisie avance dans une zone de stabilité relative, obtenue grâce à un pilotage serré de la liquidité, un allongement de la dette publique et la vigueur des flux extérieurs.

À court terme, le cap semble maîtrisé. Mais à moyen terme, la réussite dépendra d’un triptyque essentiel : préserver les réserves, maintenir la confiance monétaire et gérer activement le coût de la dette. C’est à cette condition que le pays pourra transformer une stabilité fragile en véritable relance.

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

L’article ECLAIRAGE – Tunisie, août 2025 :- pilotage monétaire serré est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

ECLAIRAGE – L’ombre longue de l’inflation passée – Sortir de l’ombre inflationniste ou l’entretenir ? (3/3)

29. August 2025 um 06:00

L’inflation n’est pas qu’un prix qui grimpe(*), c’est une mémoire qui s’accroche(**), D’ici 2030, puis 2035, la Tunisie jouera l’essentiel de sa crédibilité monétaire. Selon que le pays attaque ses fragilités réelles ou s’en accommode (***), deux futurs radicalement différents se dessinent, avec un troisième chemin, médian, où l’on évite le pire sans jamais décrocher le meilleur.

 

Simulation 1 — 2030, la décrue maîtrisée ; 2035, la crédibilité ancrée

Entre 2025 et 2027, un compromis national stabilise les fondamentaux : ciblage budgétaire crédible, rationalisation progressive des subventions, ciblage social mieux outillé numériquement, ouverture de secteurs exportateurs à plus de concurrence, et assainissement des circuits de distribution qui brisent la rente. La Banque centrale garde une politique ferme mais prévisible, avec une règle de réaction explicite reliant le taux directeur, l’écart d’inflation et l’écart de production.

À partir de 2028, l’inflation recule de façon durable vers 4 %, puis converge vers 3 % à l’horizon 2032–2035. Le dinar cesse de glisser structurellement et la volatilité du change se réduit, signe d’anticipations plus ancrées.

En 2035, la Tunisie peut soutenir une croissance de 4–5 % avec une inflation de 3 % sans casser la demande, parce que les anticipations sont enfin alignées sur l’objectif.

 

La croissance s’épaissit par l’investissement privé et l’export : le taux d’investissement repart vers 22–24 % du PIB, la productivité retrouve un sentier modérément ascendant, les IDE se concentrent dans les chaînons industriels et services à plus forte valeur ajoutée. Le déficit courant passe sous 4 % du PIB d’ici 2030, la prime de risque souveraine se compresse, la pente de la courbe des taux se normalise. Surtout, la politique monétaire devient moins coûteuse : chaque point d’inflation supplémentaire appelle une réponse de moindre amplitude qu’aujourd’hui, preuve que la mémoire inflationniste se dissipe.

En 2035, la Tunisie peut soutenir une croissance de 4–5 % avec une inflation de 3 % sans casser la demande, parce que les anticipations sont enfin alignées sur l’objectif.

Simulation  2 — 2030, la stagflation installée ; 2035, l’usure du dinar.

La trajectoire inverse s’enclenche si les réformes structurelles déraillent, si les déséquilibres externes persistent et si le financement budgétaire reste incertain. Les anticipations restent désancrées, la spéculation sur les biens subventionnés perdure, et le « pass-through » du change vers les prix demeure élevé. La Banque centrale est contrainte d’alterner durcissements tardifs et pauses forcées, avec un coût de l’argent durablement élevé pour un effet limité sur l’inflation.

En 2030, l’inflation oscille encore entre 7 et 9 %, la croissance plafonne autour de 1,5–2 %, le chômage reste élevé, l’investissement productif recule en part du PIB et le marché parallèle accentue la dollarisation de fait via une fuite des capitaux. Le dinar continue de perdre graduellement, la dette publique se renchérit, la prime de risque souveraine ne décroche pas. En 2035, la politique monétaire est prisonnière de la mémoire collective : pour un même écart d’inflation, la réaction doit être plus forte qu’aujourd’hui pour obtenir moins de résultats, signe d’une crédibilité empêchée. On ne parle plus de stabilisation, mais d’endiguement permanent.

 

En 2035, la politique monétaire est prisonnière de la mémoire collective : pour un même écart d’inflation, la réaction doit être plus forte qu’aujourd’hui pour obtenir moins de résultats, signe d’une crédibilité empêchée. On ne parle plus de stabilisation, mais d’endiguement permanent.

Simulation 3 — 2030, l’entre-deux ; 2035, l’économie sous plafond

Le sentier médian mêle quelques succès visibles et des angles morts persistants. Certaines réformes avancent, d’autres s’enlisent, la communication de politique économique progresse mais demeure intermittente. L’inflation recule sans s’arrimer : 5–6 % en 2030, puis 4–5 % en 2035, avec des à-coups au gré des chocs d’offre et du change.

La croissance tient entre 2,5 et 3,5 %, portée par des niches exportatrices et des services modernisés, mais bridée par l’investissement public contraint et une concurrence imparfaite dans la distribution. La Banque centrale conserve une réaction ferme ; elle peut modérer l’amplitude des hausses de taux mais ne peut pas s’installer durablement dans une posture accommodante, faute d’anticipations pleinement ancrées.

 

La Banque centrale conserve une réaction ferme ; elle peut modérer l’amplitude des hausses de taux mais ne peut pas s’installer durablement dans une posture accommodante, faute d’anticipations pleinement ancrées.

 

Ce qui fera la différence entre 2025 et 2030

Trois leviers conditionnent l’issue.

Le premier est l’assainissement ordonné des finances publiques, non pas pour “faire plaisir aux chiffres”, mais pour rendre lisible la trajectoire de la demande publique et réduire l’incertitude qui nourrit les primes de risque.

Le second est la reconfiguration des circuits d’importation et de distribution, là où se niche une grande part de l’inflation importée et de la rente interne ; la concurrence et la traçabilité logistique y valent autant que les taux.

Le troisième est l’ancrage des anticipations par la cohérence intertemporelle : une règle de réaction monétaire explicite, des objectifs d’inflation communiqués, des accords salariaux pluriannuels encadrant l’indexation, et une stratégie de change comprise du marché.

Quand ces éléments se répondent, la mémoire inflationniste s’estompe ; quand ils se contredisent, elle s’épaissit.

2035 en point de mire : coût social aujourd’hui, dividendes demain

Dans le scénario vertueux, le coût initial est réel : crédits plus sélectifs, subventions mieux ciblées, réallocations budgétaires, négociations salariales exigeantes. Mais à l’horizon 2035, les dividendes deviennent tangibles : pouvoir d’achat stabilisé par une inflation basse et prévisible, prime de risque réduite qui allège la dette et libère des marges sociales, investissement productif relancé par une visibilité de prix et de change, montée en gamme des exportations qui atténue la vulnérabilité externe.

La politique monétaire cesse d’être l’outil unique de stabilisation pour redevenir ce qu’elle doit être : un pilier, pas un substitut aux réformes.

 

La Tunisie ne choisit pas seulement un taux d’inflation, elle choisit une mémoire collective. En 2030, puis en 2035, soit le pays aura transformé son passé inflationniste en leçon de crédibilité, soit il en restera l’otage. L’économie tunisienne a déjà prouvé qu’elle pouvait encaisser les chocs ; il lui reste à prouver qu’elle peut les anticiper.

Verdict

La Tunisie ne choisit pas seulement un taux d’inflation, elle choisit une mémoire collective. En 2030, puis en 2035, soit le pays aura transformé son passé inflationniste en leçon de crédibilité, soit il en restera l’otage. L’économie tunisienne a déjà prouvé qu’elle pouvait encaisser les chocs ; il lui reste à prouver qu’elle peut les anticiper.

C’est la différence, décisive, entre une monnaie qui subit et une monnaie qui compte.

 

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Articles en relation:

ECLAIRAGE – L’ombre longue de l’inflation passée – Pourquoi la Tunisie reste prisonnière de son passé … (2/3)

ECLAIRAGE – L’ombre longue de l’inflation passée – La Tunisie face à son dilemme monétaire (1/3)

 

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REFERENCES :

 

(*) The Legacy of High Inflation on Monetary Policy Rules :NBER- w34107 l’héritage d’une inflation élevée: par :  Luis I. Jacome H. Georgetown University, Nicolás E. Magud,  Monetary Fund (IMF), Samuel Pienknagura, International Monetary Fund (IMF) et Martín Uribe, Columbia University – Graduate School of Arts and Sciences – Department of Economics; National Bureau of Economic Research (NBER), Date Written: August 2025

https://www.nber.org/search?page=1&perPage=50&q=w34107

 

 

(**)  FEST- ÉTUDE DE L’ÉVOLUTION DES SALAIRES RÉELS EN TUNISIE : Dr Tahar El Almi et Phd Ezzedine Larbi, ( RIP )

https://library.fes.de/pdf-files/bueros/tunesien/14391.pdf

 

(***) Travaux récents, sous presse, nous y reviendrons.

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* Dr. Tahar EL ALM

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

L’article ECLAIRAGE – L’ombre longue de l’inflation passée – Sortir de l’ombre inflationniste ou l’entretenir ? (3/3) est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

ECLAIRAGE – L’ombre longue de l’inflation passée – Pourquoi la Tunisie reste prisonnière de son passé … (2/3)

27. August 2025 um 05:20

On croit souvent que l’inflation est une affaire de chiffres, de pourcentages et de courbes. En réalité, elle est d’abord une affaire de mémoire(*). Un pays qui a vécu une inflation persistante en garde les stigmates pendant des décennies : les ménages perdent confiance, les entreprises deviennent méfiantes et la banque centrale se voit condamnée à réagir de manière plus dure que de raison. La Tunisie, à l’instar de nombreuses économies émergentes, illustre tragiquement cette loi économique non écrite : l’histoire pèse plus lourd que la conjoncture (**).

Dans toute économie, l’expérience passée structure la manière dont les citoyens projettent l’avenir. L’Amérique latine en est l’exemple le plus frappant. L’Argentine, marquée par une hyperinflation chronique, vit encore aujourd’hui sous le joug d’anticipations inflationnistes incontrôlables : chaque promesse de stabilité est accueillie avec scepticisme, forçant la banque centrale à des politiques monétaires draconiennes qui finissent par asphyxier l’économie réelle.

 

À l’inverse, l’Europe de l’Est a démontré que la rupture radicale est possible. La Pologne, après une inflation à trois chiffres au début des années 1990, a bâti une crédibilité monétaire solide grâce à une politique budgétaire disciplinée, une ouverture maîtrisée et une communication claire de sa banque centrale. Résultat : la mémoire de l’hyperinflation s’est estompée, les anticipations se sont stabilisées, et le pays a pu attirer massivement les investissements.

 

À l’inverse, l’Europe de l’Est a démontré que la rupture radicale est possible. La Pologne, après une inflation à trois chiffres au début des années 1990, a bâti une crédibilité monétaire solide grâce à une politique budgétaire disciplinée, une ouverture maîtrisée et une communication claire de sa banque centrale.

 

La Tunisie, quant à elle, se situe entre ces deux trajectoires. Elle n’a pas connu l’hyperinflation, mais une inflation structurelle persistante, suffisamment forte pour miner la confiance dans le dinar et créer une habitude inflationniste difficile à déloger.

 

Une Banque centrale sous contrainte

La Banque centrale de Tunisie est consciente de ce dilemme. Elle sait que chaque dérapage des prix alimente une spirale psychologique : les ménages ajustent leurs dépenses par peur de nouvelles hausses, les entreprises répercutent immédiatement les anticipations inflationnistes dans leurs prix, et les syndicats réclament des revalorisations salariales qui entretiennent la boucle prix-salaires. Pour casser cette dynamique, la BCT n’a qu’une arme : le taux directeur. Mais chaque hausse se traduit par une contraction du crédit, un frein à l’investissement et un ralentissement de l’activité, aggravant les tensions sociales déjà explosives.

 

Le paradoxe de la crédibilité

Ce cercle vicieux n’est pas propre à la Tunisie. La Turquie en offre un exemple saisissant. Malgré une longue histoire d’inflation, la banque centrale turque avait réussi à gagner en crédibilité dans les années 2000. Mais cette crédibilité n’a pas suffi à ancrer durablement les anticipations. Chaque fois que l’inflation repart à la hausse, les marchés exigent des réponses brutales, et la moindre hésitation est interprétée comme une faiblesse. La crédibilité, paradoxalement, n’allège pas la charge de la politique monétaire : elle oblige au contraire à des réactions systématiquement vigoureuses, car le poids du passé reste présent.

 

En Tunisie, le même paradoxe est à l’œuvre. Même si la BCT affiche son indépendance et communique plus clairement qu’avant, les anticipations inflationnistes des agents économiques restent largement « désancrées ». Les promesses de stabilité sont accueillies avec circonspection, et la Banque centrale se retrouve contrainte de frapper fort à chaque dérapage, quitte à sacrifier la croissance.

 

En Tunisie, le même paradoxe est à l’œuvre. Même si la BCT affiche son indépendance et communique plus clairement qu’avant, les anticipations inflationnistes des agents économiques restent largement « désancrées ». Les promesses de stabilité sont accueillies avec circonspection, et la Banque centrale se retrouve contrainte de frapper fort à chaque dérapage, quitte à sacrifier la croissance.

 

L’équation tunisienne : entre histoire et réformes

Ce constat soulève une vérité fondamentale : en Tunisie, comme ailleurs, la lutte contre l’inflation ne peut être laissée à la seule banque centrale. Les déséquilibres qui alimentent la hausse des prix sont structurels : déficit commercial chronique, dépendance aux importations, poids des subventions, dérives budgétaires et spéculations organisées dans les circuits de distribution. Tant que ces sources ne seront pas taries, aucune politique monétaire, aussi agressive soit-elle, ne pourra restaurer durablement la confiance.
L’expérience internationale prouve que l’on peut échapper à l’ombre du passé, mais à condition de coupler discipline monétaire et réformes structurelles. C’est ce qu’ont réussi certains pays d’Europe de l’Est, là où d’autres, comme l’Argentine, ont échoué en se limitant à une réponse monétaire.

In fine, briser l’héritage pour libérer l’avenir

La Tunisie n’est pas condamnée à subir éternellement le poids de son passé inflationniste. Mais pour briser ce cercle vicieux, il faut accepter que la crédibilité ne se décrète pas. Elle se construit dans le temps, par des politiques cohérentes, une gouvernance transparente et un partage équitable de l’effort économique.

 

La Tunisie n’est pas condamnée à subir éternellement le poids de son passé inflationniste. Mais pour briser ce cercle vicieux, il faut accepter que la crédibilité ne se décrète pas. Elle se construit dans le temps, par des politiques cohérentes, une gouvernance transparente et un partage équitable de l’effort économique.

 

Tant que les déséquilibres persistants nourriront la défiance, la Banque centrale restera enfermée dans un rôle de pompier, condamné à des interventions coûteuses et socialement douloureuses. Le véritable enjeu n’est donc pas seulement de stabiliser l’inflation aujourd’hui, mais de reconstruire la confiance de demain. Car une monnaie forte ne repose pas uniquement sur un taux directeur, mais sur la capacité d’un pays à tourner la page de son histoire inflationniste.

 

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Article en relation: ECLAIRAGE – L’ombre longue de l’inflation passée – La Tunisie face à son dilemme monétaire (1/3)

 

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REFERENCES :

 

(*) The Legacy of High Inflation on Monetary Policy Rules :NBER- w34107 l’héritage d’une inflation élevée: par :  Luis I. Jacome H.Georgetown University, Nicolás E. Magud,  Monetary Fund (IMF), Samuel Pienknagura, International Monetary Fund (IMF) et Martín Uribe, Columbia University – Graduate School of Arts and Sciences – Department of Economics; National Bureau of Economic Research (NBER), Date Written: August 2025

https://www.nber.org/search?page=1&perPage=50&q=w34107

 

 (**)  FEST- ÉTUDE DE L’ÉVOLUTION DES SALAIRES RÉELS EN TUNISIE : Dr Tahar El Almi et Phd Ezzedine Larbi, ( RIP )

https://library.fes.de/pdf-files/bueros/tunesien/14391.pdf

L’article ECLAIRAGE – L’ombre longue de l’inflation passée – Pourquoi la Tunisie reste prisonnière de son passé … (2/3) est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

ECLAIRAGE – L’ombre longue de l’inflation passée – La Tunisie face à son dilemme monétaire (1/3)

25. August 2025 um 05:45

La Tunisie vit toujours sous le poids d’un héritage inflationniste. Plus qu’un simple phénomène économique, l’inflation passée façonne les comportements, influence les anticipations et enferme la Banque centrale dans une posture défensive. Ce fardeau historique explique la vigueur des réponses monétaires, mais aussi leurs limites dans une économie fragilisée.

Mémoire collective et réflexes monétaires

Les travaux récents(*), montrent que lorsqu’un pays a traversé des épisodes d’inflation élevés et répétés, sa banque centrale adopte une attitude plus agressive face aux chocs inflationnistes. La Tunisie n’échappe pas à cette règle.

Depuis les flambées de prix des années 2010(**) et plus récemment le pic de 2023-2024, la Banque centrale de Tunisie (BCT) réagit avec une intensité qui reflète moins la réalité présente que la peur d’un retour au passé.

Les agents économiques, qu’ils soient ménages ou entreprises, restent hantés par le souvenir d’une monnaie affaiblie et d’un pouvoir d’achat érodé. Ces anticipations nourrissent une spirale où l’inflation est perçue comme inévitable, obligeant la BCT à redoubler de sévérité.

La mémoire inflationniste devient alors une contrainte invisible mais redoutable : elle prolonge la méfiance et alimente des politiques monétaires restrictives.

Un paradoxe de crédibilité en Tunisie

La Tunisie illustre également un paradoxe mis en évidence dans les travaux économiques récents : même lorsque la crédibilité d’une banque centrale progresse, la vigueur de sa réponse face à l’inflation ne diminue pas.

Depuis 2012, la BCT a renforcé son image de gardienne de la stabilité des prix à travers des hausses successives du taux directeur et un encadrement strict du crédit. Pourtant, cette crédibilité acquise ne s’est pas traduite par une politique plus équilibrée.

La BCT demeure prisonnière d’une posture défensive. L’obsession pour l’inflation persiste alors que la demande intérieure s’essouffle et que les indicateurs de croissance restent atones.

En d’autres termes, l’ombre du passé inflationniste continue de conditionner les choix présents, au risque de sacrifier le redressement économique.

Les coûts d’une stratégie trop restrictive

Une politique monétaire agressive se traduit par des coûts élevés pour l’économie réelle. En Tunisie, la hausse des taux a freiné l’accès au financement, comprimé l’investissement productif et fragilisé encore davantage les petites et moyennes entreprises.

À court terme, cette stratégie freine la demande et limite la flambée des prix. Mais à moyen terme, elle entretient la stagnation et accentue le chômage, créant un terrain fertile pour de nouvelles tensions sociales.

La rigidité monétaire n’a pas suffi à casser durablement les dynamiques inflationnistes, souvent liées à des facteurs structurels tels que la dépendance aux importations, les dysfonctionnements des circuits de distribution ou encore les chocs sur les prix mondiaux. Elle a cependant contribué à alourdir le coût social de la désinflation, accentuant le sentiment d’une politique punitive.

Sortir de l’ombre : une stratégie globale

L’expérience tunisienne montre qu’on ne peut pas lutter efficacement contre l’inflation par la seule arme monétaire. Rompre avec le cercle vicieux de la méfiance suppose une approche plus large, qui combine crédibilité monétaire et action publique cohérente.

Il s’agit d’abord de restaurer la confiance en renforçant la discipline budgétaire et en orientant les dépenses vers l’investissement productif plutôt que vers la consommation immédiate.

Il s’agit aussi de réformer en profondeur les circuits de distribution et les mécanismes de fixation des prix, afin de réduire la part de l’inflation importée et spéculative.

Enfin, il est urgent de rééquilibrer les missions de la BCT en intégrant l’objectif de croissance et d’emploi à côté de la stabilité des prix, afin de ne pas enfermer l’économie dans une logique purement restrictive.

In fine, une économie prisonnière de son passé

La Tunisie illustre parfaitement l’idée que l’inflation est une mémoire longue. Ce passé continue de conditionner les anticipations des agents, de rigidifier la politique monétaire et de freiner la reprise.

Tant que ce traumatisme collectif ne sera pas dépassé par des réformes structurelles et une gouvernance crédible, la Banque centrale restera enfermée dans un dilemme stérile : protéger la stabilité des prix au prix d’un affaiblissement durable de la croissance.

Pour briser cette inertie, la stratégie en la matière doit dépasser la logique de réaction défensive et bâtir une véritable stratégie de crédibilité économique, où la lutte contre l’inflation ne serait plus un frein, mais un levier de développement durable.

 

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REFERENCES :

 

(*) The Legacy of High Inflation on Monetary Policy Rules :NBER- w34107 l’héritage d’une inflation élevée: par :  Luis I. Jacome H. Georgetown University, Nicolás E. Magud,  Monetary Fund (IMF), Samuel Pienknagura, International Monetary Fund (IMF) et Martín Uribe, Columbia University – Graduate School of Arts and Sciences – Department of Economics; National Bureau of Economic Research (NBER), Date Written: August 2025

https://www.nber.org/search?page=1&perPage=50&q=w34107

 

 

(**)  FEST- ÉTUDE DE L’ÉVOLUTION DES SALAIRES RÉELS EN TUNISIE : Dr Tahar El Almi et Phd Ezzedine Larbi, ( RIP )

https://library.fes.de/pdf-files/bueros/tunesien/14391.pdf

 

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* Dr. Tahar EL ALM

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

L’article ECLAIRAGE – L’ombre longue de l’inflation passée – La Tunisie face à son dilemme monétaire (1/3) est apparu en premier sur Leconomiste Maghrebin.

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