Lutte contre la cyberviolence à l’égard des femmes: un enjeu majeur à l’ère numérique
Au fil des années, les actes de violence fondés sur le genre auxquels sont confrontées les femmes et les filles ont pris une nouvelle dimension avec l’essor constant des technologies numériques. Bien que les technologies de l’information et de la communication (TIC) offrent des avantages considérables en matière de communication et de diffusion des connaissances, elles sont aussi devenues un terrain propice à l’émergence de nouvelles formes de violences, souvent invisibles mais tout aussi dévastatrices. La cyberviolence à l’égard des femmes, au-delà d’être une atteinte grave aux droits humains, représente aujourd’hui un véritable défi social et sanitaire.
Les conséquences pour les victimes sont nombreuses : peur pour leur sécurité physique; atteinte à leur estime de soi; perte de confiance; et souffrance psychologique. Face à cette réalité, des instruments internationaux existent pour protéger les femmes et lutter contre ces violences. Le Conseil de l’Europe, notamment, a développé des cadres juridiques essentiels.
La Convention d’Istanbul, adoptée par le Conseil de l’Europe, est le principal traité international consacré à la prévention et à la lutte contre la violence à l’égard des femmes, y compris la violence domestique. Ce texte impose aux États parties des mesures fortes de prévention, de protection des victimes et de poursuite des auteurs. Reconnaissant que la violence en ligne s’inscrit comme une extension des formes traditionnelles de violences basées sur le genre. En 2021, le Groupe d’experts sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes (GREVIO), en charge du contrôle de la mise en œuvre de cette convention, a publié une recommandation spécifique sur la dimension numérique de la violence à l’égard des femmes. Et ce, en soulignant la nécessité d’adapter les réponses juridiques et sociales face à ces nouveaux défis.
Parallèlement, la Convention de Budapest sur la cybercriminalité, autre traité international du Conseil de l’Europe, vise à renforcer la lutte contre les infractions commises en ligne en criminalisant les actes malveillants et en facilitant la coopération judiciaire et la collecte de preuves électroniques. Son Protocole additionnel améliore la collaboration internationale, un aspect fondamental lorsque la cybercriminalité transcende les frontières.
Dans ce contexte, la Tunisie a récemment franchi une étape importante. En effet, en 2024, elle a officiellement adhéré à la Convention de Budapest et est candidate à la Convention d’Istanbul depuis 2020, avec une invitation à rejoindre ce traité prolongée jusqu’en avril 2027. Ces adhésions marquent la volonté du pays d’intensifier sa lutte contre la cyberviolence et d’améliorer la protection des femmes.
Sur le plan national, le combat contre la violence à l’égard des femmes, y compris la cyberviolence, s’inscrit au cœur des priorités du Ministère de la Famille, de la Femme, de l’Enfance et des Seniors (MFFES). Le ministère promeut une démarche orientée vers la prévention, par le biais d’initiatives qui valorisent la cohésion familiale, le respect mutuel et le dialogue. Sous la devise « prévention pour la protection », la campagne nationale contre la violence à l’égard des femmes lancée en 2024 illustre cet engagement.
Dans ce cadre, une initiative multisectorielle rassemble plusieurs acteurs pour prévenir les comportements à risques et les phénomènes sociaux liés à la violence. L’éducation aux médias joue un rôle central en sensibilisant les jeunes aux dangers du numérique afin qu’ils deviennent acteurs de la prévention.
À l’occasion de la Journée mondiale de la femme, célébrée chaque 8 mars, a été lancé un concours Cette compétition invite les participants âgés de 18 à 30 ans à user de leur créativité pour dénoncer les formes multiples de cyberviolence à l’égard des femmes et proposer des solutions concrètes pour y faire face.
Les résultats du concours national de vidéos à destination des jeunes, organisé par le Conseil de l’Europe en partenariat avec le ministère sont très prometteurs. Ils montrent que les jeunes sont de plus en plus conscients des enjeux liés à la cyberviolence et qu’ils participent activement à sensibiliser leur entourage. Les vidéos primées sont désormais utilisées dans les campagnes de sensibilisation nationales, renforçant ainsi l’impact des messages portés. En outre, les lauréats bénéficient d’une formation en production audiovisuelle. Ce qui valorise leurs compétences et les encourage à poursuivre leur engagement.
La cérémonie de clôture du concours a eu lieu 7 août 2025 à Tunis, en présence des finalistes, des membres du jury, des représentants du ministère, du Conseil de l’Europe, des partenaires internationaux et d’acteurs clés de la société civile et des médias. Cet événement s’inscrit également dans le cadre des célébrations de la Journée nationale de la femme en Tunisie, le 13 août, symbolisant le renforcement de l’engagement du pays en faveur des droits des femmes.
Malgré ces avancées, de nombreux défis restent à relever pour assurer un environnement numérique sûr pour les femmes. La mobilisation collective, l’amélioration des législations, l’éducation permanente et la coopération internationale sont essentielles pour éradiquer la cyberviolence et garantir le respect des droits fondamentaux dans l’espace numérique.
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