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LA CONTROVERSE – La Science économique en état de mort cérébrale ? Une critique radicale à l’heure du capitalisme algorithmique

28. Juli 2025 um 05:45

La controverse suscitée par les prises de position de Mahjoub Lotfi Belhedi, notamment dans son dernier article intitulé « Brouillard : 404 – Science économique Not Found », dépasse la simple querelle académique. Elle vient poser avec une acuité rare une question qui dérange : la science économique, telle qu’elle est encore majoritairement enseignée et pratiquée, a-t-elle épuisé sa capacité à rendre compte du réel ? Ou pire encore : est-elle devenue un obstacle à la compréhension des transformations profondes du capitalisme contemporain ?

 

Une critique à contre-courant : quand la rupture remplace la réforme

Contrairement à la majorité des critiques adressées à l’économie dominante, Belhedi ne se situe pas dans une perspective réformiste. Il ne plaide ni pour une mise à jour des outils théoriques ni pour un élargissement des modèles d’analyse. Son propos est plus radical : il s’agit d’un diagnostic de décès disciplinaire. Selon lui, nous ne vivons pas une simple transition paradigmatique, mais bien un effondrement épistémologique, où les fondements mêmes de la pensée économique – la notion de travail, de valeur, de rareté ou de marché – ont perdu toute pertinence explicative.

L’enjeu n’est plus de corriger les angles morts d’une science en crise, mais de constater l’obsolescence de son architecture intellectuelle. Là où certains perçoivent des signes de résilience ou d’adaptation (économie comportementale, numérique, computationnelle), Belhedi voit des greffes sur un arbre déjà mort, des tentatives de sauvetage d’un langage devenu inaudible face à un monde reconfiguré par les algorithmes, les données et la logique des plateformes.

 

« Selon lui, nous ne vivons pas une simple transition paradigmatique, mais bien un effondrement épistémologique, où les fondements mêmes de la pensée économique – la notion de travail, de valeur, de rareté ou de marché – ont perdu toute pertinence explicative. »

 

La faillite de la valeur-travail : symptôme d’un basculement ontologique

Le point nodal de la critique réside dans la mise en faillite de la théorie de la valeur-travail. À l’heure du capitalisme algorithmique, la valeur n’est plus produite par le travail humain intentionnel, mais par la captation massive et automatique de comportements, d’affections et d’interactions, souvent inconscients. Les données générées par les utilisateurs d’un réseau social, les clics sur une plateforme, les modèles comportementaux prévus par une IA deviennent la nouvelle matière première du capital. Et ce capital, désormais auto-reproductif, se détache des catégories traditionnelles du travail, de la production et même du marché.

La controverseEn ce sens, l’auteur affirme que Marx n’a pas simplement été pris de court par TikTok ; il n’avait tout simplement pas eu à penser un modèle économique où le travail vivant est marginalisé au profit de la valeur dérivée de l’attention et de la modulation prédictive des comportements. La critique de Belhedi ne nie donc pas l’importance historique des grands penseurs économiques, mais elle déclare leur inapplicabilité actuelle.

 

« Le point nodal de la critique réside dans la mise en faillite de la théorie de la valeur-travail. À l’heure du capitalisme algorithmique, la valeur n’est plus produite par le travail humain intentionnel, mais par la captation massive et automatique de comportements, d’affections et d’interactions, souvent inconscients. »

 

Une économie qui refuse de mourir : résistance symbolique et conservatisme méthodologique

Face à cette situation, le réflexe dominant est, selon Belhedi, celui du sauvetage interne. Une partie de la communauté économique s’efforce de maintenir la légitimité de la discipline en multipliant les ajustements marginaux, les extensions de modèles classiques ou les hybridations superficielles avec d’autres sciences sociales. Mais cette stratégie, qui vise à préserver le monopole d’interprétation de la science économique, empêche l’émergence d’alternatives véritablement transformatrices.

Il faut, affirme-t-il, oser la rupture. Car tant que l’économie classique conservera son autorité symbolique – dans les institutions, les politiques publiques, les médias, les universités – elle empêchera l’avènement d’un nouveau langage pour penser le monde. Ce n’est donc pas un débat académique clos, mais une lutte de pouvoir intellectuelle, où se joue la possibilité d’une refondation.

 

« Il faut, affirme-t-il, oser la rupture. Car tant que l’économie classique conservera son autorité symbolique – dans les institutions, les politiques publiques, les médias, les universités – elle empêchera l’avènement d’un nouveau langage pour penser le monde. »

 

L’économie des métadonnées : vers une nouvelle épistémè transdisciplinaire

La proposition de Belhedi ne se limite pas à la destruction critique : elle contient aussi un embryon de projet fondateur. Celui d’une économie des métadonnées, à la fois transdisciplinaire et critique, capable de penser les nouvelles logiques de création de valeur et de domination. Cette science en gestation croiserait les outils des sciences computationnelles, de l’algorithmique, de la théorie critique, de la philosophie politique et de l’éthique des systèmes. Elle s’intéresserait non plus seulement aux flux monétaires ou à la production matérielle, mais aux architectures de données, aux infrastructures numériques, à la dynamique des plateformes, aux régimes d’attention.

Loin d’être une utopie technocratique, cette perspective s’ancre dans une réalité déjà en cours : celle où le capital n’a plus besoin de produire pour accumuler, mais se contente de calculer, modéliser, anticiper. L’enjeu est alors d’élaborer une science qui ne soit pas seulement réactive, mais capable d’anticiper les formes de domination à venir.

 

« Une économie des métadonnées qui s’intéresserait non plus seulement aux flux monétaires ou à la production matérielle, mais aux architectures de données, aux infrastructures numériques, à la dynamique des plateformes, aux régimes d’attention. »

Une critique qui bouscule, mais qui reste à construire

Il serait tentant de rejeter cette critique comme trop radicale, trop spéculative ou trop théorique. Pourtant, elle pose une question essentielle : que vaut une science qui n’est plus capable de penser son objet ? Et plus encore : à partir de quand une discipline doit-elle accepter sa fin pour laisser émerger autre chose ?

Il reste certes à Belhedi la tâche de rendre son programme opérationnel. Car si la dénonciation de l’obsolescence des anciens cadres est convaincante, l’alternative reste encore en chantier. La transdisciplinarité, aussi prometteuse soit-elle, devra faire ses preuves : en termes de méthodologie, de modélisation, mais aussi d’application concrète.

 

« L’image finale proposée par Belhedi est forte : « une science qui refuse de mourir empêche une autre de naître ». Ce jugement sans appel peut heurter. Mais il a le mérite de rappeler une vérité souvent refoulée : les sciences ne sont pas éternelles. Elles naissent, prospèrent, se réforment parfois… et meurent aussi.« 

 

In fine, penser contre la maison, pour reconstruire ailleurs

L’image finale proposée par Belhedi est forte : « une science qui refuse de mourir empêche une autre de naître ». Ce jugement sans appel peut heurter. Mais il a le mérite de rappeler une vérité souvent refoulée : les sciences ne sont pas éternelles. Elles naissent, prospèrent, se réforment parfois… et meurent aussi.

Face aux mutations profondes du capitalisme numérique, à l’irruption des plateformes, à l’automatisation de la cognition et à la financiarisation de l’attention, peut-être faut-il accepter que la maison économique actuelle est devenue inhabitable. Et qu’il est temps, non de la rénover, mais de bâtir ailleurs. Une nouvelle demeure théorique, à la hauteur de notre époque.

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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Brouillard : 404 – Science économique Not Found

23. Juli 2025 um 06:00

Je tiens d’abord à saluer la qualité de l’article-réplique publié sous le titre « Éclairage : Science économique et soupçon numérique », émanant d’un professeur éminent, à la plume rigoureuse et nuancée. Cette réplique, bien qu’opposée à ma thèse, a le grand mérite d’ouvrir un espace de débat contradictoire au sein des médias tunisiens, un espace libéré à la fois de la complaisance académique et des polémiques stériles.

Cette évolution est précieuse, car elle consacre le retour de la confrontation d’idées dans un champ où le consensus mou a souvent servi de refuge à l’inaction intellectuelle.

Cela dit, je persiste et signe. Si mon article « Autopsie de la fin tragique des sciences économiques » a pu heurter certaines sensibilités, c’est précisément parce qu’il pose une rupture que beaucoup s’efforcent de transformer en simple transition. La critique de mon texte cherche à atténuer cette rupture en la ramenant à une « inflexion », un « basculement »; voire une « refondation douce ». Or, ce que j’avance n’est pas une nuance épistémologique : c’est un constat palpable, et documenté, d’effondrement disciplinaire.

Un effondrement structurel, pas un basculement paradigmatique

Le cœur de la réponse tient dans cette phrase : « Ce que l’auteur identifie comme une fin tragique pourrait être interprété, plus justement, comme un moment de basculement paradigmatique ». Or, c’est là toute la confusion. Il ne s’agit pas d’un basculement, comme entre la mécanique classique et la relativité, où les anciens concepts restent valides à certaines échelles. Il s’agit d’un effondrement structurel, où les concepts fondateurs de la science économique (valeur, travail, production, rareté, marché) ne décrivent plus la réalité, même partiellement.

Prenons un exemple simple : la valeur-travail. La critique concède que le capitalisme algorithmique « interroge » cette théorie. Ce n’est pas une interrogation : c’est une mise en faillite. Quand des IA produisent de la valeur à partir de comportements humains non intentionnels (et parfois inconscients), le travail vivant sort de l’équation économique. Cela ne « questionne » pas Marx, cela l’invalide comme cadre opératoire.

L’illusion d’un aggiornamento interne

La critique m’oppose les efforts de renouvellement des sciences économiques : économie comportementale numérique, économie des plateformes, économie computationnelle. Très bien. Mais ces courants ne sont pas une refondation : ils sont des greffes sur un arbre mort. Ils continuent à penser en termes de marchés, d’incitations rationnelles, de productivité, quand ce qui est en jeu, c’est la capture algorithmique de l’attention, la colonisation des affects, et la modulation prédictive du comportement. Ce ne sont pas de simples variables exogènes. Ce sont les nouvelles structures productives.

Comparer l’évolution actuelle de l’économie à la physique, passant de Newton à Einstein, est tentant, mais faux. La physique a intégré la relativité sans abandonner ses fondements mathématiques. Ici, il ne s’agit pas d’ajouter une couche : il s’agit d’admettre que les équations d’origine sont devenues silencieuses.

Marx n’a pas ignoré TikTok : il n’a pas eu à l’imaginer

On me reproche, à mots couverts, d’anachronisme : balayer Marx, Keynes ou Friedman parce qu’ils « ignoraient TikTok ». Mais ce n’est pas leur ignorance que je pointe. C’est le déplacement historique de l’objet même de l’économie. Marx est utile pour penser l’exploitation industrielle. Friedman, pour analyser les équilibres monétaires d’un capitalisme productiviste. Mais dans un monde où le capital est auto-reproductif, autonome, non corrélé au travail, leurs outils ne sont pas seulement dépassés : ils nous aveuglent.

 

 

Le danger n’est pas dans la radicalité de la critique. Il est dans le réflexe de sauvegarde de la discipline. Comme si toute remise en cause devait forcément rester interne à la maison économique. Non : il faut sortir de la maison.

Une science qui refuse de mourir bloque la naissance d’une autre

Je n’ai jamais plaidé pour l’abandon de toute réflexion économique. J’ai plaidé pour sa refondation hors de son épistémè d’origine. C’est pourquoi je propose l’économie des métadonnées, une science transdisciplinaire où l’économie dialogue avec les sciences computationnelles, les théories critiques, les études algorithmiques et l’éthique des systèmes. Ce n’est pas une utopie. C’est une nécessité. Car tant que la vieille science se cramponne à son autorité symbolique, elle empêche la nouvelle d’émerger. A ce titre, mon prochain ouvrage, « Métadonnés : les rouages d’une nouvelle économie », à paraître au mois de septembre prochain, s’attachera à montrer que la transdisciplinarité n’est ni une utopie ni un slogan, mais une nécessité méthodologique pleinement fondée…

Pleinement disposé à débattre des contours de cette nouvelle science, en revanche, difficile de cautionner l’idée selon laquelle la science économique traditionnelle pourrait, avec de simples retouches, intégrer les bouleversements numériques.

La raison est simple : elle ne l’a pas vue venir. Elle ne peut pas la penser. Et elle doit donc être dépassée.

 

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Mahjoub Lotfi Belhedi

Chercheur en réflexion stratégique optimisée IA // Data scientist & Aiguilleur d’IA

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