Analyse de l’IACE | Et si le protectionnisme était la solution pour une relance durable ?
L’Institut arabe des chefs d’entreprise (IACE), think tank basé à Tunis, a publié dans son blog une analyse économique sous le titre «Quand le protectionnisme paye». Dans le contexte des hausses tarifaires imposées par les Etats-Unis à la majorité de ses partenaires, dont la Tunisie (25%), l’analyse explore une politique industrielle sélective et adaptée au contexte de notre pays.
Cette politique s’articulerait autour de trois pistes concrètes : la substitution aux importations dans les secteurs accessibles ; le retour de la politique de compensation commerciale et des mesures ciblées respectant les engagements internationaux.
Se basant sur les dernières statistiques publiées par le Département du Commerce américain, les auteurs de l’article constatent que le protectionnisme américain a commencé à porter ses fruits : une croissance du PIB au 2ᵉ trimestre de 3,8 % contre 3,3 % estimés initialement (taux annualisé); un rebond des achats locaux de biens d’équipement, ainsi qu’une baisse des demandes d’allocations de chômage et un raffermissement du taux de change du dollar, qui s’est apprécié de 0,66 % par rapport à un panier de grandes monnaies, malgré la baisse récente du taux d’intérêt de base et les incertitudes sur l’économie américaine, notamment à court terme (inflation).
Constatant également que «l’objectif des mesures protectionnistes introduites par le Président Trump était d’accroître la production des entreprises américaines et les bénéfices des hommes d’affaires, même si la production locale est plus coûteuse que les importations», ils se demandent si la Tunisie pourrait s’inspirer de ce nouveau modèle, plus favorable aux entreprises qu’au consommateurs mais d’une façon sélective et ciblée. Et ce par :
«1- l’adoption d’une politique de substitution aux importations dans certains secteurs industriels dont l’accès est aisé, soit parce qu’il avait été déjà réalisé dans le passé (industries mécaniques et électriques, industries de matériaux de construction), soit parce qu’il est devenu technologiquement faisable de nos jours. Cela exige une politique industrielle de l’État, qui doit encadrer, supporter et subventionner certaines activités industrielles, comme cela a été fait en Tunisie dans le programme de mise à niveau du siècle dernier et aux USA cette décennie. Les circonstances internationales sont favorables à cette orientation. De plus, des mesures douanières peuvent être adoptées, si cela est possible compte tenu des accords bilatéraux et multilatéraux existants;
2. la réinstauration de la politique de compensation commerciale vécue dans les années 90 qui exigeait des fournisseurs de voitures automobiles d’acheter des pièces de rechange et autres produits locaux à raison d’une proportion de leurs ventes en Tunisie. Les circonstances internationales sont favorables à ces mesures de compensation, qui obligent les importateurs de certains produits, où la concurrence internationale est vive, à exiger de leurs fournisseurs de faire des achats locaux, augmentant ainsi les exportations du pays.
3- Cette politique protectionniste peut poser des problèmes pour un petit pays comme la Tunisie, avait suivi longtemps une politique d’ouverture commerciale extérieure. Des réactions de la part des pays partenaires sont attendues, notamment de ceux avec qui la Tunisie est liée par des accords de coopération (UE en particulier). Pour cela, les mesures protectionnistes doivent être sélectives (par branches d’activité voire même par produits) et non générales, en donnant la préférence aux mesures qualitatives (conformité aux normes, formes de financement) sur les mesures quantitatives (taxe), et doivent être appliquées d’une manière progressive. Cela permettrait d’éviter des mesures contradictoires avec les clauses de l’accord d’association pour les produits actuellement importés par la Tunisie de l’UE, et de se concentrer sur les produits importés d’Asie (Chine, Turquie, transit de Dubaï).»
Dans le nouveau monde qui se dessine avec des orientations et des méthodes de fonctionnement tournant le dos au libéralisme économique et renouant avec les politiques publiques de type keynésienne pour relancer la croissance de la production et de l’emploi, le défi aujourd’hui est d’assurer un développement durable et inclusif.
«Pour accomplir ce triple rôle (croissance, durabilité et équité), les politiques publiques doivent donner la priorité aux politiques industrielles sectorielles et aux mesures méso- et microéconomiques, dans un cadre global de stabilité macroéconomique assurée par des politiques fiscales et monétaires qui respectent les grands équilibres ou pseudo-équilibres financiers intérieurs et extérieurs», préconisent les auteurs.
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