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Hommage | Hamed Karoui, l’un des bâtisseurs de la Tunisie moderne

26. März 2025 um 07:48

Nous fêterons demain, jeudi 27 mars 2025, le 5e anniversaire de la mort de l’ancien Premier ministre Hamed Karoui. L’auteur, qui l’avait connu de près, rend hommage ici à cette figure majeure de l’histoire tunisienne contemporaine, dont le parcours mérite d’être mieux connu et célébré. Car il reste une source d’inspiration pour tous les Tunisiens. *

Foued Mouakhar

Le 27 mars 2020, la Tunisie a perdu l’un de ses plus grands serviteurs : le Dr Hamed Karoui. Homme d’une intégrité légendaire, d’une modestie exemplaire et d’un dévouement sans faille. Il a consacré sa vie à son pays, tant dans la lutte pour l’indépendance que dans la construction de la Tunisie moderne. Ce témoignage vise à éclairer une jeunesse souvent peu informée des pages glorieuses de notre histoire, en retraçant le parcours exceptionnel de cet homme qui a marqué son époque par son engagement et son humilité.

Origines familiales

Hamed Karoui est né le 30 décembre 1927 dans une famille tunisienne respectée. Son père, Belhassen Karoui, appartenait à une lignée de magistrats, tandis que son oncle, feu Mohamed Karoui, est considéré comme l’un des pères fondateurs du Code du statut personnel, une pierre angulaire de la modernisation de la Tunisie. Sa mère, Lalla Aïchoucha Nour Eddine, était une femme de caractère, connue pour son authenticité, sa détermination et sa douceur.

Dès son enfance, Hamed Karoui est imprégné des valeurs de justice, de rigueur et de service public. Ces principes guideront toute sa vie, tant dans son engagement politique que dans sa carrière médicale.

A gauche de Taieb Mehiri.
Scout : debout, 2e à partir de la gauche.

Engagement précoce 

Dès son plus jeune âge, Hamed Karoui s’engage dans la lutte pour l’indépendance de la Tunisie. Il rejoint les Scouts Tunisiens, où il gravit les échelons pour devenir chef de la région du Sahel. Cette expérience forge en lui un esprit de leadership et de discipline, tout en renforçant son attachement à la cause nationale.

Dans les années 1940, alors qu’il est encore lycéen, il rejoint secrètement le Néo-Destour, le parti nationaliste dirigé par Habib Bourguiba. Malgré son jeune âge, il participe activement à des actions de sensibilisation, de collecte de fonds et de diffusion clandestine de la presse nationaliste, notamment le journal Al-Kifah (La Lutte). Ces activités, bien que risquées, témoignent de son engagement précoce et de sa détermination à libérer la Tunisie du joug colonial.

Militant du Néo-Destour à Paris.
Militant de l’Uget à Paris.

Combat pour l’indépendance

En 1946, Hamed Karoui obtient son baccalauréat et part étudier la médecine à Paris où il continue son combat pour l’indépendance, cette fois sur le sol français. Il devient président de la cellule destourienne de Paris. Une position stratégique qui lui permet de mobiliser les étudiants tunisiens et de sensibiliser l’opinion publique française à la cause tunisienne.

Avec ses camarades, il fonde l’Union générale des étudiants tunisiens (Uget). Une organisation qui joue un rôle crucial dans la lutte anticoloniale. Elle devient une plateforme pour internationaliser la cause tunisienne, en établissant des liens avec des étudiants maghrébins, arabes et africains. 

Président de l’Etoile du Sahel, avec Abdelmajid Chettali à sa droite.
A gauche de Habib Bourguiba, avec Bechir Ben Yahmed, Bibi Junior et Taieb Mehiri.

Karoui représente l’Uget lors de conférences internationales à Prague et Colombo, contribuant à faire entendre la voix de la Tunisie sur la scène mondiale.

En parallèle, Karoui et ses camarades utilisent les médias français pour dénoncer les exactions coloniales. Ils organisent des campagnes médiatiques autour d’événements comme les incidents de Sousse, Téboulba  et Tazerka… amplifiant ainsi la pression sur le gouvernement français. Leur stratégie de communication habile, inspirée de la méthode bourguibienne de «l’alliance du dialogue et de la pression», contribue à affaiblir le moral du colonisateur et à accélérer la marche vers l’indépendance.

Médecin et bâtisseur de la nation

Juste à l’aube de l’indépendance, Karoui obtient son doctorat en médecine et se spécialise en pneumologie. Animé par la volonté de contribuer à la reconstruction du pays, il rentre immédiatement en Tunisie et entame une carrière médicale.

Il lance une campagne nationale contre la tuberculose, une maladie alors endémique en Tunisie. Chaque vendredi, il ouvre les portes de son cabinet privé pour offrir des consultations gratuites aux patients démunis, venus de toutes les régions du Sahel. Il dirige également le service de pneumologie à l’hôpital Farhat Hached de Sousse, tout en maintenant un rythme de travail effréné.

Avec Saddam Hussein.
Avec Jacques Chirac.

Au service de Sousse et de la Tunisie

Parallèlement à sa carrière médicale, Karoui s’engage en politique. Il devient maire de Sousse, député, et vice-président du Parlement. Sous son mandat, Sousse se transforme en un pôle touristique, industriel et culturel majeur. Il contribue à la modernisation de la ville, tout en préservant son patrimoine historique.

Sur le plan national, Karoui occupe plusieurs postes ministériels, dont celui de Premier ministre sous le président Zine El Abidine Ben Ali de 1989 à 1999. Pendant cette période, il joue un rôle clé dans la stabilisation du pays et la mise en œuvre de réformes économiques et sociales. Malgré les défis, il reste fidèle à ses principes d’intégrité et de modestie, refusant tout privilège indu et vivant simplement.

Avec Yasser Arafat.
Avec Hafedh Assad. 

Un modèle de service désintéressé

Tout au long de sa carrière, Karoui est reconnu pour son intégrité et sa discrétion. Il refuse de se mettre en avant, affirmant souvent : «Je n’ai fait que mon devoir sacré envers mon pays.» Cette humilité, alliée à une rigueur et une ponctualité légendaires, en fait un modèle pour ses pairs et pour les générations futures.

Même après sa retraite, Karoui continue à servir son pays discrètement. En 2013, face à la dérive de la Tunisie, il lance le Mouvement Destourien pour redonner espoir aux Tunisiens et transmettre son héritage politique à la jeune génération. Il soutient des figures comme Abir Moussi, qu’il considère comme une digne héritière de l’esprit destourien.

Avec Abir Moussi.
Avec Nelson Mandela.

Héritage et postérité

Hamed Karoui restera dans les mémoires comme un patriote intègre et dévoué, dont la vie et les actions ont grandement contribué à l’indépendance et au développement de la Tunisie. Son engagement sans faille, sa modestie et son refus de toute forme de reconnaissance personnelle en font un modèle pour les générations futures.

En cette période de turbulences, son parcours nous rappelle l’importance de l’intégrité, du service désintéressé et de l’amour de la patrie. Puissent les jeunes Tunisiens s’inspirer de son exemple pour bâtir un avenir meilleur.

* Une version complète de cet article peut être consultée sur la page Facebook de l’auteur.

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Invasion, exode et crise en Tunisie | La prophétie d’une Nouvelle Ere 

17. März 2025 um 08:24

J’ai lu, presque distraitement, un article signalant une invasion de criquets dans le sud de la Tunisie. Un fait banal, en apparence. Mais un mot, un seul, a accroché mon regard : nuée. Et soudain, une image. Un souvenir ancien, hérité de récits qui traversent les âges. Une réminiscence biblique, celle des Dix Plaies d’Égypte. La huitième plaie : une armée d’insectes, sombre et vorace, qui recouvre le sol, dévore les cultures et ne laisse derrière elle qu’un désert. 

Manel Albouchi *

L’image s’est imposée à moi, avec cette impression étrange que certaines choses ne se répètent pas par hasard. 

Par curiosité, j’ai voulu comprendre. J’ai fouillé, cherché des précédents. Une date a surgi : 1987. Cette année-là, une invasion de sauterelles avait ravagé la Tunisie, coïncidant avec un autre événement majeur : le coup d’État de Ben Ali. 

Et si ce n’était pas une simple coïncidence? 

Si ces fléaux naturels étaient des signaux? Des symptômes visibles d’un désordre plus profond? 

Si, à certains moments de l’Histoire, la nature devenait le reflet de nos propres crises? 

J’ai poursuivi mon enquête. Et ce que j’ai découvert m’a troublée. 

Les sauterelles, messagères d’une transition  

Les invasions de sauterelles ne sont pas rares en Tunisie. Mais elles semblent surgir à des périodes où le pays vacille. Comme si elles reflétaient un malaise sous-jacent, un déséquilibre invisible mais bien réel. 

Dans certaines traditions, on dit que lorsque les hommes ne savent plus lire les signes, la nature prend le relais. 

Regardons de plus près : 

1955 : Une invasion massive frappe la Tunisie et l’Algérie. À ce moment-là, la Tunisie est en pleine lutte pour son indépendance. Quelques mois plus tard, les accords d’autonomie interne sont signés. Un cycle colonial s’achève. 

1958-1959 : Une nouvelle invasion survient alors que la jeune République tunisienne peine à se stabiliser. 

1977 : Les criquets reviennent, au moment même où les tensions sociales montent dangereusement. L’année suivante, la Tunisie connaît sa première grève générale et une répression sanglante. 

1987 : Nouvelle invasion, et cette fois, c’est un régime qui bascule. Bourguiba tombe, Ben Ali prend le pouvoir. 

2003 : En pleine période de crispation politique, un nouvel essaim ravage le pays. Une fissure dans un système qui se veut immuable. 

2011 : Alors que la Révolution du Jasmin bouleverse la Tunisie, les criquets reviennent. Encore une fois, ils précèdent une transition majeure. 

2020-2021 : En pleine pandémie, la Tunisie s’enfonce dans la crise, et les criquets refont surface. Quelques mois plus tard, le président Kaïs Saïed a renforcé ses pouvoirs. 

2025 : Nous y sommes. Une nouvelle invasion. Un pays exsangue. Un État en crise. Un peuple à bout de souffle. 

Est-ce un hasard ? 

Les fléaux ne sont pas des causes. Mais ils sont des révélateurs.

Un pays en train de se vider 

Les sauterelles sont une métaphore. Elles viennent dévorer ce qui reste, laissant derrière elles un sol stérile, une terre appauvrie. 

Et si cette invasion n’était que l’écho d’un autre phénomène, bien plus grave encore? 

La Tunisie se vide de ses ressources, de ses talents, de son avenir. 

L’eau se raréfie. Le stress hydrique atteint des niveaux critiques, les barrages sont à sec, et l’agriculture s’effondre. Comme si la terre elle-même nous signifiait son épuisement. 

Les compétences fuient. Médecins, ingénieurs, chercheurs, étudiants… Tous partent. Un exode massif, une saignée intellectuelle qui affaiblit un peu plus la nation. 

L’avidité règne. Une élite corrompue capte les richesses, détourne les fonds, exploite jusqu’au dernier filon. Comme ces criquets qui prennent tout, sans rien laisser derrière eux. 

L’État tergiverse. Institutions paralysées, services publics à l’agonie, inflation galopante. L’avenir devient un désert. 

La crise migratoire explose. 

Les criquets ne sont peut-être qu’un symptôme. 

Un dernier avertissement. 

Un pays devenu un carrefour du chaos 

En parallèle de l’exode de ses propres élites, la Tunisie devient un point de transit (et de rejet) pour des milliers de migrants subsahariens en quête d’un avenir en Europe. 

Le paradoxe est saisissant : les Tunisiens fuient leur pays, pendant que d’autres viennent y chercher refuge… pour se retrouver piégés dans une impasse. 

Les côtes de Sfax sont devenues des cimetières flottants. Des corps rejetés par la mer. Des vies broyées entre les violences policières, l’exploitation et le rejet. 

Les discours xénophobes montent. Les tensions explosent. 

Et pourtant, n’est-ce pas là une autre manifestation du même effondrement ? 

Un pays qui ne sait plus accueillir, qui rejette l’Autre, est un pays qui se rejette lui-même. 

Les sauterelles ne détruisent pas seulement les cultures. Elles révèlent les fractures invisibles. 

Un cycle qui se referme ?  

Dans L’Exode, après les plaies vient le départ. Un exode vers la liberté. Mais avant la Terre promise, il y a quarante ans d’errance dans le désert. 

La Tunisie est-elle prête à partir ? À briser le cycle ? 

Ou préfère-t-elle rester sous l’emprise de ses propres Pharaons, ces figures de pouvoir qui exploitent les vulnérabilités et maintiennent le pays dans une aliénation moderne ? 

Osera-t-elle traverser son désert ? Ce passage éprouvant mais nécessaire, où il faut renoncer aux illusions du passé pour bâtir autre chose. 

Le problème, c’est que la transition n’est jamais confortable. 

En psychologie, nous parlons de résistance au changement. Même lorsque tout s’effondre sous nos yeux, une partie de nous s’accroche encore. Par peur du vide. Par crainte de ce qui pourrait advenir. 

Mais il arrive un moment où ne pas choisir devient le pire des choix. 

Un test pour la conscience collective  

L’invasion des sauterelles n’est pas seulement un phénomène naturel. C’est un événement symbolique, un test. 

Si nous devions poser la question en termes psychanalytiques, nous dirions : qu’est-ce que cet événement met en lumière? 

Que reste-t-il à dévorer en Tunisie? 

Quelles structures doivent être abandonnées avant qu’elles ne nous entraînent dans leur chute? 

Sommes-nous prêts à revoir notre rapport au monde, à nos ressources, à nos valeurs? 

Les fléaux sont des manifestations du refoulé. Ils surgissent lorsque les mots ne suffisent plus. 

Tant que nous refusons de voir, ils se répètent. 

Oui, les sauterelles finiront par partir. 

Mais la vraie question est : aurons-nous compris la leçon, ou attendrons-nous la prochaine plaie

* Psychologue, psychanalyste.  

Podcast de l’auteure : FeMENA Network

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