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ZOOM – Néoprotectionnisme – le miroir brisé de la mondialisation

08. August 2025 um 09:21

Le protectionnisme d’aujourd’hui ne se contente pas de fermer les frontières : il redessine la carte du pouvoir mondial. Le texte soumis à notre réflexion, « Néoprotectionnisme ou néomercantilisme : où en sommes-nous exactement ? » prétend trancher un débat d’école : vivons-nous un retour du néomercantilisme ou l’essor d’un néoprotectionnisme décomplexé ? L’auteur penche résolument pour la seconde hypothèse, insistant sur le caractère défensif, populiste et conjoncturel des politiques commerciales actuelles. Mais à force d’opposer deux concepts comme s’ils étaient mutuellement exclusifs, il escamote la réalité : dans l’économie mondiale d’aujourd’hui, le néoprotectionnisme est souvent le masque de manœuvres géoéconomiques qui, elles, relèvent bel et bien d’un néomercantilisme assumé.

 Un faux dilemme conceptuel

La distinction théorique avancée– un néomercantilisme structuré, stratégique, coordonné, face à un néoprotectionnisme désordonné et électoraliste- repose sur une séparation nette qui, sur le terrain, s’efface. Les grandes puissances n’agissent pas uniquement dans l’urgence. Même lorsque leurs décisions semblent improvisées, elles s’inscrivent souvent dans des trajectoires de puissance plus longues.

La guerre commerciale de Trump avec la Chine n’a certes pas réduit le déficit américain, mais elle a solidifié une tendance stratégique bipartisane : contenir la montée en puissance industrielle chinoise. Et cela, qu’on le veuille ou non, a toutes les caractéristiques d’un néomercantilisme revu à l’ère populiste.

 

La guerre commerciale de Trump avec la Chine n’a certes pas réduit le déficit américain, mais elle a solidifié une tendance stratégique bipartisane : contenir la montée en puissance industrielle chinoise.

 

La crise de la COVID-19 : prétexte ou révélateur ?

Le texte présente la pandémie comme un simple accélérateur de réflexes souverainistes, sans y voir un instrument de recomposition économique. Or, relocaliser les chaînes d’approvisionnement stratégiques dans les secteurs médicaux, technologiques ou énergétiques ne se réduit pas à un geste défensif. C’est aussi un investissement dans une autonomie productive qui, à terme, sert de levier d’influence commerciale et politique.

L’Europe, avec ses programmes de semi-conducteurs ou de batteries, ne fait pas que se protéger : elle se positionne pour peser demain sur les normes et les marchés mondiaux. C’est là que l’analyse de l’article s’avère courte : il sous-estime la dimension de planification stratégique derrière ces mesures.

 

Or, relocaliser les chaînes d’approvisionnement stratégiques dans les secteurs médicaux, technologiques ou énergétiques ne se réduit pas à un geste défensif. C’est aussi un investissement dans une autonomie productive qui, à terme, sert de levier d’influence commerciale et politique.

 

Populisme économique : l’arbre qui cache la forêt

L’auteur insiste sur le rôle du populisme comme moteur principal du néoprotectionnisme. Certes, les slogans comme America First ou Make in India sont calibrés pour flatter l’électorat. Mais derrière la rhétorique, les appareils d’État, les groupes industriels et les lobbies dessinent des architectures économiques qui dépassent le cycle électoral. La défense d’industries clés, même sous un vernis populiste, s’inscrit dans une logique de rapport de force durable. Qualifier cela uniquement de « réactif » revient à prendre au pied de la lettre un discours politique conçu justement pour dissimuler ses véritables objectifs.

 

Et la Tunisie dans tout ça ?

L’article effleure la question des pays vulnérables mais sans en mesurer l’ampleur stratégique. Pour la Tunisie, la distinction entre néoprotectionnisme et néomercantilisme n’est pas un débat académique : c’est un problème de survie économique. Quand la Chine verrouille ses circuits de production pour consolider son pouvoir d’exportation, c’est du néomercantilisme pur. Quand les États-Unis imposent des barrières imprévisibles sur l’acier, c’est du néoprotectionnisme, certes, mais aux effets tout aussi destructeurs. Dans les deux cas, Tunis se retrouve face à un monde où les règles changent au gré des rapports de force, sans filet de sécurité multilatéral. Cela impose une stratégie nationale qui ne soit pas seulement défensive mais proactive : diversification des partenaires, montée en gamme des exportations, intégration sélective dans les chaînes de valeur et surtout capacité à produire localement dans les secteurs critiques.

 

L’article effleure la question des pays vulnérables mais sans en mesurer l’ampleur stratégique. Pour la Tunisie, la distinction entre néoprotectionnisme et néomercantilisme n’est pas un débat académique : c’est un problème de survie économique. Quand la Chine verrouille ses circuits de production pour consolider son pouvoir d’exportation, c’est du néomercantilisme pur. Quand les États-Unis imposent des barrières imprévisibles sur l’acier, c’est du néoprotectionnisme, certes, mais aux effets tout aussi destructeurs.

 

In fine, entre idéologie et rapport de force

En voulant trop nettement séparer néoprotectionnisme et néomercantilisme, l’auteur oublie que dans la réalité, les puissances pratiquent un cocktail des deux. Le protectionnisme défensif est souvent la porte d’entrée d’un mercantilisme offensif. La mondialisation actuelle ne connaît plus les murs clairs et les frontières nettes : elle avance par zones grises, où les discours populistes servent à légitimer des stratégies de puissance.

Pour les économies fragiles, l’enjeu n’est pas de savoir si les grandes puissances sont « réactives » ou « stratégiques », mais de comprendre qu’elles sont toujours opportunistes. Et face à cela, continuer de penser que la Tunisie peut naviguer à vue relève moins de la naïveté… que de l’aveuglement.

 

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* Dr. Tahar EL ALMI,

Economiste-Economètre.

Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,

Psd-Fondateur de l’Institut Africain

D’Economie Financière (IAEF-ONG)

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Néoprotectionnisme ou néomercantilisme : où en sommes-nous exactement ?

07. August 2025 um 13:10

Alors que de nombreux analystes qualifient la période actuelle de retour du néomercantilisme, cet article défend la thèse selon laquelle l’économie mondiale contemporaine est plutôt marquée par un néoprotectionnisme à outrance. À travers l’exemple emblématique des politiques commerciales de l’administration Trump, mais aussi à la lumière de la crise de COVID-19 et de la montée du populisme économique, nous montrons que ces dynamiques relèvent davantage d’une logique défensive, populiste et conjoncturelle, que d’une stratégie économique étatisée à visée hégémonique.

Néoprotectionnisme versus néomercantilisme : clarifier les concepts

Le néomercantilisme désigne une stratégie étatique de long terme, visant à maximiser les excédents commerciaux, soutenir les champions nationaux, et renforcer la puissance géoéconomique. Il suppose une coordination entre politique industrielle, commerciale et monétaire, comme en témoigne le modèle chinois post-2000.

Le néoprotectionnisme, en revanche, est davantage réactif. Il traduit un repli défensif contre la mondialisation, via des barrières tarifaires, des restrictions à l’importation, ou des relocalisations, souvent motivées par des pressions politiques internes plutôt qu’une volonté de domination commerciale. Il est le reflet d’un populisme économique soucieux de protéger des secteurs ou des emplois jugés sacrifiés par le libre-échange.

 

Lire aussi : Néomercantilisme et géopolitique – Un retour stratégique ou un repli systémique ? (1/3)

 

Le cas Trump : un néoprotectionnisme populiste, non mercantiliste

L’élection de Donald Trump en 2016 symbolise un tournant majeur vers un néoprotectionnisme décomplexé. Sous la bannière « America First », l’administration Trump adopte des mesures tarifaires massives, souvent sans vision industrielle structurée.

Dès 2018, la guerre commerciale avec la Chine s’est traduite par des droits de douane exorbitants sans impact significatif sur le déficit commercial américain.

Par ailleurs, la taxation excessive de l’acier et de l’aluminium a touché même des alliés traditionnels comme le Canada ou l’Union européenne.

 

Ces politiques visaient avant tout à protéger certains électorats industriels, notamment dans la « Rust Belt », plutôt qu’à restructurer l’économie pour conquérir les marchés mondiaux. En cela, elles traduisent un protectionnisme défensif et électoraliste, bien éloigné d’un néomercantilisme étatique cohérent.

 

L’administration américaine a aussi remis en cause certains accords multilatéraux, tel que l’ALENA – remplacé par l’USMCA -, avec des clauses plus protectionnistes.

Ces politiques visaient avant tout à protéger certains électorats industriels, notamment dans la « Rust Belt », plutôt qu’à restructurer l’économie pour conquérir les marchés mondiaux. En cela, elles traduisent un protectionnisme défensif et électoraliste, bien éloigné d’un néomercantilisme étatique cohérent.

 

COVID-19 : accélérateur du repli économique

La pandémie de COVID-19 a révélé la vulnérabilité des chaînes de valeur mondialisées, provoquant un sursaut souverainiste. Les pénuries sanitaires, notamment de masques et de médicaments, ont incité à relocaliser les industries stratégiques.

De surcroît, des projets industriels régionaux, dans les batteries ou les semi-conducteurs, ont été lancés en Europe et en Asie, souvent motivés par la sécurité économique plus que par la compétitivité exportatrice.

Ces mesures, prises dans un contexte d’incertitude, relèvent d’un néoprotectionnisme « factuel » et « impulsionnel », détaché de tout socle doctrinal néomercantiliste.

 

Lire également :  Géopolitique – La Tunisie à l’épreuve du néomercantilisme mondial (2/3)

Populisme économique : logique politique avant stratégie commerciale

La montée du populisme économique dans les démocraties libérales favorise des politiques commerciales réactives et identitaires, fondées sur le rejet des élites mondialisées. Des initiatives comme « Make in India », les appels à la souveraineté économique en Europe, ou encore les politiques anti-importations en Amérique latine s’inscrivent dans cette logique.

Ces politiques visent à protéger les économies nationales à court terme, sans plan stratégique cohérent pour renforcer les capacités exportatrices ou la puissance économique globale. L’État devient arbitre, non stratège.

 

La montée du populisme économique dans les démocraties libérales favorise des politiques commerciales réactives et identitaires, fondées sur le rejet des élites mondialisées. Des initiatives comme « Make in India », les appels à la souveraineté économique en Europe, ou encore les politiques anti-importations en Amérique latine s’inscrivent dans cette logique.

 

L’Union européenne : un protectionnisme normatif ?

Face à la concurrence déloyale, notamment chinoise, l’Union européenne adopte elle aussi des instruments défensifs, entre autres :

* DMA (Digital Markets Act) : impose des règles aux “gatekeepers” pour limiter les abus de position dominante.

* DSA (Digital Services Act): responsabilise les plateformes sur les contenus diffusés.

* Promotion de solutions européennes (cloud souverain, moteurs de recherche alternatifs).

* Investissements dans les technologies stratégiques via des programmes européens (ex. : GAIA-X).

* Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières a été instauré.

* Le filtrage des investissements étrangers est renforcé.

* Des subventions industrielles ciblées sont accordées dans les technologies vertes.

Ces mesures s’inscrivent dans un cadre de rééquilibrage et de sécurisation technico-économique, là encore la logique reste réactive, pas néomercantiliste.

 

Impacts géopolitiques des distinctions entre néoprotectionnisme et néomercantilisme sur les pays vulnérables

La distinction entre néoprotectionnisme et néomercantilisme a des conséquences majeures sur la géopolitique mondiale, en particulier pour les pays vulnérables à ces tendances.

Les pays émergents et en développement, souvent dépendants des exportations et des investissements étrangers, se retrouvent pris entre des puissances, comme la Chine, qui cherchent à étendre leur influence par des stratégies économiques cohérentes, et des économies majeures adoptant un néoprotectionnisme défensif, marqué par l’instabilité et l’arbitraire.

Dans ce contexte, les États vulnérables subissent des pressions accrues : l’accès à certains marchés clés se réduit brutalement en raison des barrières tarifaires ou non tarifaires. Tandis que les flux d’investissements étrangers directs deviennent plus imprévisibles.

Ce phénomène complique la planification économique et accroît les risques d’instabilité politique. Ces pays doivent alors naviguer entre la nécessité d’intégration dans les chaînes de valeur mondiales et le besoin de renforcer leur autonomie stratégique, souvent sans disposer des moyens étatiques ou financiers nécessaires.

 

L’économie mondiale connaît un retour du protectionnisme, sous une forme nouvelle : populiste, défensive, fragmentée et souvent improvisée. Contrairement au néomercantilisme, stratégique et structuré, ce néoprotectionnisme reflète une désillusion face à la mondialisation, un rejet du multilatéralisme et un repli sur les intérêts nationaux immédiats.

 

Par ailleurs, l’instabilité générée par le néoprotectionnisme, caractérisé par des mesures ponctuelles, parfois contradictoires accroît les tensions géopolitiques, notamment dans les régions fragiles, où la compétition pour l’accès aux ressources et aux marchés se double d’enjeux sécuritaires.

Ainsi, la montée du néoprotectionnisme impose aux pays vulnérables un exercice d’équilibre délicat, entre adaptation aux nouvelles règles du jeu économique mondial et développement d’une stratégie propre, qui devra sans doute conjuguer souveraineté économique et intégration sélective.

In fine, l’économie mondiale connaît un retour du protectionnisme, sous une forme nouvelle : populiste, défensive, fragmentée et souvent improvisée. Contrairement au néomercantilisme, stratégique et structuré, ce néoprotectionnisme reflète une désillusion face à la mondialisation, un rejet du multilatéralisme et un repli sur les intérêts nationaux immédiats. La politique douanière de Trump illustre un protectionnisme de crise, motivé par la peur, l’idéologie et des enjeux politiques internes, avec des conséquences géopolitiques importantes, notamment pour les pays vulnérables dépendants du commerce international, confrontés à une économie mondiale plus instable et conflictuelle.

A bon entendeur !

 

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Mahjoub Lotfi Belhedi

Chercheur en réflexion stratégique optimisée IA // Data Scientist & Aiguilleur d’IA

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