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Algérie l Le cri exilé de Kamel Daoud à ceux qui volent son deuil

12. Juli 2025 um 08:21

«Il y a des jours qu’on n’oublie pas. Aujourd’hui, ma mère est morte.» Ainsi commence le texte bref mais saisissant publié par l’écrivain franco-algérien Kamel Daoud , Prix Goncourt 2024, dans le quotidien français Le Figaro.

En quelques lignes, l’auteur de ‘‘Meursault, contre-enquête’’ donne à lire ce que l’exil politique, l’interdiction de territoire, l’autoritarisme peuvent produire de plus inhumain : l’impossibilité de faire son deuil.

Dans ce texte adressé nommément à Abdelmadjid Tebboune, président de la République algérienne, à Kamel Sidi Saïd et à Belkaïm (probablement des figures du pouvoir ou de l’appareil sécuritaire), Daoud ne cherche ni la métaphore ni l’indulgence. Il nomme, il accuse, il témoigne.

La violence du bannissement

L’écrivain, qui vit en France mais reste viscéralement lié à son pays natal, dénonce la violence d’un bannissement qui l’empêche de revenir pour enterrer sa propre mère.

Le texte frappe par sa sobriété. Aucune envolée, aucun effet. Juste la nudité d’une douleur privée rendue publique parce qu’elle devient politique. Il ne dit pas «Ils m’ont interdit de parler», il dit : «Je ne peux pas la voir».

Ce déplacement du langage – du politique au charnel – confère à son propos une puissance rare. Ce n’est plus l’État qui opprime, c’est l’État qui vole l’intime, qui détruit le lien sacré entre une mère et son fils.

«Vous m’avez confisqué le deuil.» Cette phrase résume tout. Elle dit le crime moral que constitue la privation de ce moment ultime. Elle dit aussi une forme d’impardonnable. On peut survivre à l’exil, au silence, à l’injustice. Mais survivre à l’impossibilité de dire adieu à sa mère ? C’est une autre peine. Plus durable. Plus enracinée.

À travers ce cri, Daoud rappelle à chacun de nous ce que peut le pouvoir algérien : non seulement punir ceux qui dérangent, mais les expulser jusqu’au dernier geste d’amour.

Le texte devient tombeau

Ce texte est aussi une mise en garde : il montre que la violence du bannissement ne s’arrête pas à la frontière, elle pénètre jusqu’aux liens les plus fondamentaux. Elle s’immisce dans la mort, dans le chagrin, dans la famille.

Il y a enfin, dans ce message, un geste d’écrivain. Daoud ne se contente pas de crier, il fixe les mots sur le papier comme on grave une stèle. Ce qu’on lui interdit par le corps – être présent au chevet de sa mère – il le fait par le verbe. Le texte devient tombeau. Et mémoire. Il fait adieu en écrivant.

À lire, à partager, à méditer : ce texte de Kamel Daoud est plus qu’un témoignage. Il est un acte. Un cri retenu, une blessure nue, une protestation silencieuse qui parle pour tous ceux, exilés, empêchés, bannis, à qui l’Algérie refuse jusqu’à la douleur.

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