Réforme de l’article 96 du Code pénal : vers une réduction des peines et l’introduction de l’intention dans l’abus de fonction
La commission de législation générale de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a adopté une version consensuelle des deux propositions de loi amendantes l’article 96 du Code pénal, lors de sa réunion du lundi 30 juin. Ce texte prévoit notamment la réduction de la peine d’emprisonnement à six ans et l’introduction du critère intentionnel dans le délit d’abus de fonction.
Cette réforme, qui sera soumise au vote lors de la prochaine séance plénière, vise à corriger les lacunes de l’article en question, lequel sanctionne l’abus de fonction visant à procurer un avantage injustifié. L’amendement exige désormais la preuve d’une intention délibérée, transformant ainsi l’infraction d’un délit matériel en délit intentionnel.
L’article 96 du Code pénal, qui concerne les violations commises par les fonctionnaires publics, fait l’objet de critiques depuis 2011 pour son application excessive, ayant perturbé l’environnement administratif et découragé les investissements. Le texte actuel couvre six actes criminels liés à l’abus de fonction ou à la violation des règlements.
La version consensuelle, adoptée après consultation d’experts en droit pénal, prévoit la réduction de la peine maximale de dix à six ans de prison, avec possibilité de sursis ou d’amende, ainsi que l’introduction de la preuve de l’intention délibérée.
Les professeurs Mongi Lakhdhar, Hatem Bellahmar et Najet Brahmi, auditionnés par la commission, ont unanimement soutenu la réforme. Ils recommandent notamment l’abandon du délit de “nuire à l’administration”, jugé trop flou et relevant davantage du disciplinaire que du pénal. Ils ont également plaidé pour l’introduction d’une enquête préalable avant toute suspension d’un fonctionnaire accusé, afin d’éviter les plaintes abusives. Il est aussi question d’élargir la définition du fonctionnaire public pour couvrir davantage de cas.
Cette initiative législative s’inscrit dans une démarche de modernisation du droit pénal tunisien, visant à instaurer un climat de confiance entre citoyens et fonctionnaires, permettre aux agents publics d’exercer leur jugement sans crainte excessive, limiter les plaintes malveillantes, et se conformer aux standards internationaux en matière de restriction de la criminalisation. La réforme traduit la volonté du législateur de trouver un équilibre entre la protection des deniers publics et la préservation d’un environnement administratif fonctionnel.