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Tunisie | BMI prévoit une aggravation des pénuries en 2025

17. März 2025 um 07:52

Dans son bulletin de veille économique d’avril 2025, BMI, filiale de Fitch Solutions Company, prévoit pour la Tunisie une aggravation des pénuries de biens de première nécessité risquant d’intensifier le mécontentement populaire.

La société de recherche multinationale britannique qui fournit des analyses macroéconomiques, industrielles et financières couvrant 22 secteurs et 200 marchés mondiaux estime que «les difficultés des autorités à résoudre les problèmes économiques structurels rendront le marché vulnérable aux chocs externes, ce qui pourrait aggraver les pénuries de biens de première nécessité».

«La récente crise du gaz exacerbera le mécontentement social existant en raison de la détérioration des conditions socio-économiques, ce qui maintiendra le risque de manifestations de grande ampleur élevé en 2025», ajoute l’agence, qui estime que «le risque élevé de futures pénuries d’eau mettront à l’épreuve les relations entre la Tunisie et l’Algérie, même si la convergence d’intérêts des deux présidents maintiendra la coopération bilatérale solide.»

Nous reproduisons ci-dessous la traduction de l’analyse de BMI concernant la Tunisie avec les réserves d’usage. Car il s’agit de simples prévisions et qui nous semblent excessivement alarmistes, étant donné que, jusque-là, et au cœur d’une crise qui perdure depuis 2011, la Tunisie a souvent trouvé des ressources pour détromper les plus sombres présages.

Ce sont là, également, des conjectures d’experts qui valent pour les avertissements qu’elles lancent aux responsables afin qu’ils prennent les mesures nécessaires susceptibles de nous éviter le pire.

I. B.

* * *

Nous pensons que la récente pénurie de gaz domestique va alimenter la frustration de la population face à la détérioration socio-économique en Tunisie. Depuis début 2025, les ménages et les entreprises tunisiens sont confrontés à des pénuries de gaz pour le chauffage et la cuisson, en particulier dans les zones rurales touchées par un froid intense. Cela a entraîné de longues files d’attente devant les centres de distribution de gaz et une montée des tensions entre citoyens, qui se sont disputés des bouteilles de gaz, ce qui a entraîné l’intervention de la police.

Ces pénuries ont également perturbé le fonctionnement de nombreuses entreprises, pesant sur leurs sources de revenus.

Les citoyens ont exprimé leur frustration face à l’incapacité du gouvernement à répondre à la demande croissante de gaz pendant l’hiver, aggravant ainsi le mécontentement déjà élevé causé par les pénuries d’autres biens de première nécessité qui durent depuis plus de deux ans.

Le gouvernement continue de faire face à de fortes pressions budgétaires et externes, qui limitent sa capacité à financer l’importation de biens, notamment ceux subventionnés, ce qui est à l’origine de ces pénuries.

Cette crise renforce notre conviction que les problèmes socio-économiques constitueront un défi majeur pour le président Kais Saïed durant son second mandat. Dans notre analyse précédente, nous avions avancé que le rejet persistant par Saïed des réformes structurelles recommandées par le FMI, son recours accru aux banques nationales et les hausses d’impôts pour financer les déficits budgétaires et extérieurs aggraveraient les difficultés socio-économiques, car ils entraîneraient probablement un ralentissement de la croissance économique et une hausse du chômage.

Nous avions également souligné que l’absence de résolution des problèmes économiques structurels rendrait l’économie extrêmement vulnérable aux chocs, tels que les intempéries.

La Tunisie a été confrontée à une grave sécheresse au cours des cinq dernières années, qui a provoqué une forte contraction du secteur agricole ainsi que de graves pénuries d’eau. Cette situation a non seulement eu un impact sur les moyens de subsistance de nombreux Tunisiens travaillant dans le secteur agricole (environ 15% de la population active), mais a également contraint le gouvernement à augmenter le prix de l’eau potable de 16% en 2024.

Par conséquent, l’aggravation continue des pénuries de biens maintiendra les pressions inflationnistes à un niveau élevé, compensant largement les nouvelles mesures gouvernementales visant à renforcer le pouvoir d’achat des ménages à faibles revenus et vulnérables.

Ces facteurs, conjugués au renforcement des restrictions imposées à l’opposition et aux militants, maintiendront le risque de manifestations de grande ampleur à un niveau élevé au cours des 12 prochains mois.

Le score de la Tunisie sur la composante «Risque sociétal» de notre indice de risque politique continue d’être supérieur à ses niveaux d’avant la Covid-19.

Dans ce contexte, nous pensons que les questions environnementales, telles que la sécurité hydrique, mettront à rude épreuve les relations entre la Tunisie et l’Algérie, mais que leurs intérêts respectifs aideront les deux pays à gérer leurs divergences.

En janvier 2025, le ministre tunisien des Affaires étrangères, Mohamed Ali Nafti, s’est rendu en Algérie pour discuter de questions de sécurité hydrique, telles que l’exploitation par l’Algérie des eaux souterraines communes et la construction de barrages sur la rivière Medjerda, commune avec la Tunisie, qui a affecté le débit du fleuve alors que la Tunisie est confrontée à une grave sécheresse. Cette visite faisait suite à l’accord tripartite de gestion de l’eau conclu entre la Tunisie, l’Algérie et la Libye, visant à prévenir les tensions liées à l’eau entre les trois pays et à promouvoir des projets hydrauliques conjoints.

Les trois pays partagent les eaux souterraines du système aquifère du Sahara septentrional, l’un des plus grands aquifères du monde avec plus d’un million de km². Notre équipe ESG Pays estime que si cet accord rassure les investisseurs sur le fait que les pénuries ne sont pas susceptibles de provoquer des tensions politiques entre ces pays, il ne suffira pas à résoudre les pénuries d’eau à court terme, en raison des investissements limités dans les projets d’infrastructures hydrauliques. Cependant, les pénuries d’eau ayant déjà déclenché des manifestations en Tunisie, nous pensons que la multiplication des problèmes d’eau alimentera la colère de l’opinion publique envers le gouvernement et Saïed. Cela pourrait contraindre ce dernier à adopter une approche plus affirmée dans les négociations avec l’Algérie sur la sécurité hydrique, voire à menacer de se retirer de l’accord.

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