Deux tragédies, un même constat : l’administration, paralysée par une bureaucratie lourde et un laxisme persistant, peine à répondre aux attentes des citoyens.
A deux reprises, et en l’espace de quelques jours, le déroulement du travail dans les services publics a été au centre des discussions entre le Président de la République et la Cheffe du gouvernement. C’est que la bureaucratie résiste encore à tout changement dans le pays, avec les graves incidences qui en découlent et qui freinent tout élan innovateur.
Au fil de ces dernières années, l’immobilisme de certains responsables a conduit à une paralysie totale de l’administration et, par conséquent, à la détérioration de ses services et au blocage d’initiatives de développement social et de certains projets inhérents aux travaux de réfection et de maintenance. La révolution de l’administration se fait toujours attendre. Et pour cause, certains responsables se distinguent par leur léthargie, leur inertie. En toute logique, c’est le drame au bout de l’attentisme et de l’inaction, endeuillant des familles entières.
Tout manquement devra être sanctionné
Aussi bien dans l’affaire de décès des nourrissons à l’hôpital de La Rabta à Tunis en mars 2019, que dans celle relative à l’effondrement du mur d’un établissement scolaire à Mezzouna (Sidi Bouzid) le 14 avril 2025, l’inaction de certains responsables a produit les mêmes effets dramatiques. Nonobstant les multiples recommandations présidentielles visant notamment à faire prendre conscience aux responsables de leurs devoirs et obligations, ces derniers, semblent englués dans les rouages d’une administration pesante.
Certes, il est question dans cette conjoncture pénible qui appelle au soutien des familles des victimes et à l’union, de bien tirer les leçons, et de ne pas se contenter de jeter l’anathème sur les responsables dudit lycée ou le staff de l’hôpital de la région, mais de prendre plutôt de réelles mesures susceptibles d’éviter de pareils drames dans les années à venir.
Lors de ses rencontres avec la Cheffe du gouvernement, Kaïs Saïed a bien souligné que « L’administration doit être au service du citoyen et tout manquement devra être sanctionné », ajoutant que « toute partie au sein de l’administration qui ne fournit pas les services attendus par les citoyens dans les meilleures conditions, et qui ne cherche pas à éliminer les obstacles qui se dressent devant eux, est soumise à des sanctions par la loi ».
Le responsable qui sert des intérêts autres que ceux du peuple tunisien devra faire l’objet de mesures disciplinaires et si les actes commis relèvent d’une infraction pénale, il sera poursuivi en justice. Les recommandations sont bien claires.
Inquiétante résistance au changement
On est en droit de se demander, aujourd’hui, pourquoi tant d’immobilisme et d’inaction de la part de nos responsables qui s’emmurent derrière diverses barrières et refusent de quitter leurs bureaux au lieu d’aller à la rencontre des citoyens. Cela est aussi vrai pour certains ministres qui manquent de visibilité et qui n’ont pas encore saisi le message du Chef de l’État, effectuant rarement des visites inopinées pour s’assurer du bon déroulement du travail au sein de leur département.
Aux dernières informations, certains responsables municipaux ont entamé à titre préventif, après le drame de l’établissement scolaire à Mezzouna, la démolition de clôtures vétustes. faut-il un autre drame pour que les autorités municipales prennent une décision aussi simple ?
En recevant la Cheffe du gouvernement, Sarra Zaafrani Zanzri, au palais de Carthage, en mars dernier, Kaïs Saïed a pourtant insisté sur les nouveautés introduites par la Constitution du 25 juillet 2022, affirmant à cet égard qu’elle rompt définitivement avec celle de 2014. Il a, par ailleurs, mis en avant « la nécessité pour les responsables de s’approprier ces nouvelles dispositions et de s’engager pleinement pour répondre aux attentes légitimes du peuple tunisien ».
Le Président a aussi souligné l’importance d’introduire des réformes concrètes plutôt que de rédiger de simples textes, appelant à une administration efficace, axée sur la justice sociale et a pointé la multiplication des structures administratives inutiles, à l’instar du bureau de la relation avec le citoyen.
Saïed a par la même occasion appelé à une restructuration de plusieurs organismes publics, suggérant la suppression de ceux considérés comme « obsolètes ou inefficaces ». Il a souligné l’importance de l’administration dans le bon fonctionnement du service public, tout en avertissant les responsables qui mettent leurs intérêts personnels avant leurs devoirs.