Tunisie | Reprise du procès de «complot» sous haute surveillance
La troisième audience du procès dit de «complot contre la sûreté de l’État» s’est ouverte, ce vendredi 18 avril 2025, au tribunal de première instance de Tunis, en l’absence de la majorité des accusés. ٍVidéo.
Peu avant l’ouverture de l’audience, des familles de détenus, soutenues par des militants politiques, ont organisé un sit-in pour réclamer des procès en présence des accusés et demander leur libération.
Les proches des accusés ont scandé des slogans appelant à une «justice équitable et indépendante».
L’audience s’est déroulée sous haute surveillance. L’accès à la salle a été interdit aux journalistes, militants politiques et membres de la société civile. Seuls les avocats et un membre de chaque famille d’accusé ont été autorisés à y accéder.
Les journalistes ont protesté contre cette décision en organisant un rassemblement devant le tribunal, appelant à leur permettre de couvrir le procès et d’informer l’opinion publique sur ses différentes étapes et détails.
Le tribunal avait décidé la tenue des audiences à distance pour les accusés jusqu’à l’émission d’une décision finale sur l’ensemble du dossier. Une décision contestée par la défense, qui a insisté lors des deux précédentes audiences sur la présence physique des accusés en salle pour pouvoir se défendre dans un procès digne de ce nom.
Les avocats ont déclaré dans leurs plaidoiries que les accusés attendent, depuis l’ouverture de l’affaire il y a deux ans, de pouvoir comparaître devant la justice et être entendus directement. Pour eux, un procès à distance ne garantit pas les conditions d’un procès équitable.
Dans une correspondance adressée à l’Ordre des avocats, la présidence du tribunal a justifié sa décision par «l’existence d’un danger réel», décision qui s’applique également aux affaires pénales prévues devant le Pôle judiciaire antiterroriste durant le mois de mars 2025.
La juridiction a fondé sa décision sur l’article 73 de la loi relative à la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent, ainsi que sur l’article 141 bis du Code de procédure pénale relatif à la possibilité d’un procès à distance.
L’affaire remonte à février 2023, date à laquelle des hommes politiques, responsables, anciens ministres, avocats et hommes d’affaires ont été arrêtés pour des accusations liées notamment à la «formation d’une entente pour comploter contre la sûreté intérieure et extérieure de l’État».
Selon le dossier de l’accusation, on reproche aux prévenus ou à certains d’entre eux d’avoir eu des rencontres avec des diplomates étrangers accrédités en Tunisie, or, aucun de ces diplomates, qui auraient comploté contre la Tunisie, n’est poursuivi par la justice. Pour les avocats, cet élément prouve, à lui seul, que les accusations ne reposent pas sur aucun fait matériel tangible.
Cette affaire implique 40 accusés, dont 9 sont actuellement en détention. Parmi eux, figurent des hommes politiques, d’anciens responsables, des avocats et des hommes d’affaires, notamment Ridha Belhadj, ancien directeur de cabinet de l’ancien président Beji Caïd Essebsi, Ghazi Chaouachi, ancien secrétaire général du parti Attayar et ancien ministre, Issam Chebbi, secrétaire général du Parti républicain, Abdelhamid Jelassi, ancien dirigeant (démissionnaire) du mouvement Ennahdha, Sayed Ferjani, dirigeant du même parti, Jawher Ben Mbarek, professeur universitaire et activiste politique, les hommes d’affaires et activistes politiques Kamel Eltaief, Khayam Turki et Ridha Charfeddine. Tous ces prévenus sont en détention. D’autres sont en liberté, notamment l’ancienne députée Bochra Belhaj Hmida, l’activiste Chayma Issa et le philosophe français Bernard-Henri Lévy, lui aussi cité dans le dossier.
I. B. (avec Tap).
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