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Edito : Recensement de la population … Entre message et alerte

12. Oktober 2025 um 04:23

Sans surprise ! Le dernier recensement de la population et de l’habitat réalisé par l’INS confirme ce que l’on pressentait depuis un certain temps quant à l’architecture et à l’évolution de la population. Celle-ci plafonne à 11.972.169, accusant sans doute l’un des plus faibles taux de croissance d’Afrique. A peine 0.87%. Ce qui rend problématique son renouvellement face à la démographie galopante du continent africain. La relative stagnation de la population tunisienne fait même craindre un mouvement de recul si rien ne vient relancer la natalité.

La Tunisie serait-elle sous-peuplée au regard de son potentiel de développement, même si les pauvres et les sans-emplois sont légion ? Avons-nous perdu la maîtrise de la transition démographique devenue, du coup, contre-productive ? La question mérite d’être posée.

Le constat est alarmant. En clair, cela signifie que le pourcentage des personnes âgées augmente quand celui de la population active diminue, pour ne représenter que 64% du total. A l’autre bout de la chaîne, la situation n’est guère meilleure. On y apprend que 3,5% des enfants de 6 à 16 ans sont déscolarisés, sans que le pays ait à subir la moindre pression démographique. Autant dire qu’il y aura fort à faire en matière d’inclusion scolaire. Par ailleurs, la population employée s’élève à 3,68 millions d’individus, dont 67,4% de sexe masculin et 32,6% de femmes, alors que celles-ci représentent plus de la moitié de la population : 50,7%.

A l’évidence, le tableau inquiète plus qu’il ne rassure. A ce rythme, la population tunisienne vieillit, avant même qu’elle ne s’élève dans l’échelle des revenus. Elle est marquée, de surcroît, au fer blanc par un décrochage scolaire insoutenable. Pas moins de 80 000 enfants en sont annuellement victimes. Ils quittent l’école ou en sont éjectés sans être totalement pris en charge en vue de leur réinsertion dans la vie active. L’école de la deuxième chance reste un vœu pieux.

Chapitre chômage, on y apprend peu de chose au-delà de ce que l’on savait déjà. Le curseur n’arrête pas de monter. Le taux de chômage s’élève à 17,2% pour les hommes et culmine à 24,6% pour les femmes. Plus précisément, 25% des femmes en âge de travailler ont un emploi contre 55% pour les hommes. Ce qui n’est pas sans tirer vers le bas la croissance potentielle.

Le nombre de jeunes de moins de trente ans diminue dans la pyramide des âges. A bien des égards, ce groupe est le nerf de la guerre économique. Sa propension à consommer, à créer et à inventer est la plus forte. On comprend que cela aura pour effet de limiter la demande de consommation et l’innovation à l’ère de l’IA. Et, par ricochet, d’impacter à moyen et long terme la dynamique de croissance.

 

Le coût de la vie, l’incertitude en tout genre, le manque de visibilité et l’absence de perspectives sont loin d’être un phénomène isolé. Ils s’accompagnent chez nous d’un exode rural ininterrompu, qui surcharge les grandes villes du littoral tout en dépeuplant les campagnes qu’on prive de forces de bras.

 

Il est établi depuis la nuit des temps qu’il y a une forte corrélation entre démographie et croissance. L’une et l’autre vont dans la même direction. Mais il y a plus grave : le non-dit a de quoi alarmer et inquiéter. Les signes d’essoufflement démographique – population en état stationnaire – ont de multiples raisons. Le coût de la vie, l’incertitude en tout genre, le manque de visibilité et l’absence de perspectives sont loin d’être un phénomène isolé. Ils s’accompagnent chez nous d’un exode rural ininterrompu, qui surcharge les grandes villes du littoral tout en dépeuplant les campagnes qu’on prive de forces de bras. Cette Cette migration intérieure à cause du chômage, de la pauvreté et des conditions de travail – si travail il y a – laisse derrière elle un vide sidéral qui ouvre la voie à toutes sortes de spéculations.

Ce sont les régions de l’intérieur, à la lisière des frontières algériennes et libyennes, qui sont les plus exposées. Elles n’arrêtent pas de porter les stigmates de cette hémorragie humaine dont on sait qu’elle est à la fois la cause et l’effet du déclin du monde rural traditionnel de ces régions, si éloignées du bon Dieu et si proches de la capitale. Elles peinent à exister, faute de soutien et d’appui financier public franc et massif. Cette situation n’est pas sans avoir de profondes répercussions sur l’intégrité du territoire et la sécurité nationale.

 

La nature a horreur du vide. Et au regard de ce qui se passe dans le monde, on n’est jamais à l’abri de certaines tournures, dont seule l’Histoire a le secret.

 

La nature a horreur du vide. Et au regard de ce qui se passe dans le monde, on n’est jamais à l’abri de certaines tournures, dont seule l’Histoire a le secret. Point besoin d’être grand clerc pour se convaincre que les régions frontalières sont pour nous d’essence stratégique. Elles sont à la sécurité du pays ce que le cœur est à l’organisme humain. Il faut y créer et maintenir des activités agricoles et industrielles, fussent-elles peu compétitives. On doit y développer et déployer des politiques publiques et sectorielles dans le cadre d’un plan d’aménagement du territoire qui nous fait tant défaut. L’enjeu est moins économique et financier que social et sécuritaire.

Ces régions, dont on parle si peu, constituent notre première ligne de défense. Le gouvernement serait bien inspiré d’y promouvoir des pôles scientifiques regroupant des centres de recherche, de formation et des universités spécifiques. Et surtout de subventionner et de soutenir financièrement – quoi qu’il en coûte – activités agricoles, petits métiers, PME/PMI et pourquoi pas startups et technologies émergentes. Pour éviter que les jeunes et moins jeunes désœuvrés ou en situation précaire ne prennent d’assaut les villes et les embarcations de la mort. Nous devons à tout prix protéger nos territoires de la convoitise des uns et de l’afflux migratoire désordonné d’individus venus d’ailleurs, fuyant les guerres, la misère, l’insécurité et le réchauffement climatique. La sécurité nationale et la cohésion sociale ont un prix que la collectivité doit assumer.

L’intégrité du pays, notre propre sécurité, le souci de bien-être de l’ensemble des Tunisiens et, en premier, de ceux qui assurent nos arrières, doivent l’emporter sur toute autre considération budgétaire ou financière. Faire que les habitants sans garantie d’avenir se réapproprient leur destin, leur propre région, jusque-là vouée au déclin, n’est pas une option ; cela relève d’une ardente obligation. Remodeler le paysage agricole et industriel du pays dans un souci d’équité, de justice, d’équilibre, d’efficacité et de sécurité est sans conteste la voie royale pour en finir avec la fracture régionale, qui coupe le pays en deux du nord au sud, alors qu’il est voué à l’unité de par l’étendue de son histoire.

 

L’essor de la Tunisie, son autonomie, dépendent de notre capacité d’actionner tous les leviers d’une croissance inclusive. Il y a besoin, il y a nécessité d’établir un maillage agro-industriel revisité par les nouvelles technologies, en faisant émerger dans ces régions en déshérence des villes au statut de métropole, avec en perspective un rayonnement transfrontalier.

 

Les statistiques révélées par l’INS à l’occasion du récent recensement de la population et de l’habitat sont porteuses de messages, d’alertes et d’une impérieuse nécessité. L’essor de la Tunisie, son autonomie, dépendent de notre capacité d’actionner tous les leviers d’une croissance inclusive. Il y a besoin, il y a nécessité d’établir un maillage agro-industriel revisité par les nouvelles technologies, en faisant émerger dans ces régions en déshérence des villes au statut de métropole, avec en perspective un rayonnement transfrontalier. Elles offriront des opportunités d’emploi, de création d’entreprise, de richesse et un cadre de vie décent tout à l’avantage de ces régions.

L’émergence, avec davantage de prétention et d’ambition, de villes-métropoles tout le long des frontières comme Tabarka, Jendouba, Le Kef, Kasserine, Gafsa, Médenine, irradiera l’ensemble des régions périphériques et les positionnera sur une trajectoire de développement durable. Elles ne pourront y parvenir d’elles-mêmes, étant déconnectées et dépourvues de moyens et d’attributs. Mais tout devient possible si elles sont promues en cohérence avec une politique d’aménagement du territoire digne de ce nom. C’est ainsi qu’on pourra rallumer la flamme de la démographie aujourd’hui en berne, protéger nos frontières, sécuriser le pays et créer les conditions d’un réarmement industriel et agricole. Le temps nous est compté. Nous n’avons d’autre choix que d’assurer la cohésion sociale en aménageant au plus vite les voies d’un développement durable. La sécurité nationale en dépend. Le reste n’est que littérature.

 

Cet édito est paru dans le dernier numéro de l’Economiste maghrébin numéro 929 du 8 octobre au 22 octobre 2025 sous le titre « Population ».

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