Nouvelle parution : « Quand la diplomatie façonne la ville » : L’architecture comme clé de lecture historique
Si les bâtiments racontent une histoire d’architecture, ils révèlent surtout une lutte d’influence feutrée, où chaque choix d’implantation, chaque construction ou rituel diplomatique traduit une volonté de dominer l’espace, de représenter une puissance et d’inscrire sa marque dans la ville.
La Presse — Avec « Quand la diplomatie fait la ville. Le quartier consulaire du Tunis ottoman (XVIIe – XIXe siècles) », Adnen El Ghali propose bien plus qu’un ouvrage d’histoire : il offre une relecture profonde de l’espace urbain tunisien à la mesure des dynamiques diplomatiques, sociales et culturelles qui ont marqué la régence ottomane entre 1660 et 1881. Ce livre rigoureux, à la croisée des disciplines, interroge la ville comme théâtre de représentation politique et de conquête symbolique.
Architecte, urbaniste et historien, Adnen El Ghali met à profit son regard transversal pour explorer un pan méconnu de l’histoire urbaine de Tunis : l’implantation des consulats européens au cœur de la médina et de ses environs. Entre 1660, date de l’édification du premier fondouk, et l’instauration du protectorat français en 1881, les missions consulaires deviennent de véritables agents de transformation du tissu urbain. Mais au-delà des pierres, ce sont les enjeux de pouvoir, de prestige et d’influence qui façonnent ces lieux.
L’ouvrage retrace l’évolution de la triade consulaire : les consuls, les maisons consulaires et leurs territoires d’inscription à travers des espaces physiques et symboliques. Si les bâtiments racontent une histoire d’architecture, ils révèlent surtout une lutte d’influence feutrée, où chaque choix d’implantation, chaque construction ou rituel diplomatique traduit une volonté de dominer l’espace, de représenter une puissance et d’inscrire sa marque dans la ville. Le consulat devient alors une scène politique à part entière, où se jouent des rapports de force entre États, mais aussi entre cultures.
La structure de l’ouvrage, organisée en trois chapitres, permet de cerner les différentes strates de cette diplomatie bâtisseuse : des débuts de l’installation consulaire à la consolidation d’un réseau urbain complexe, en passant par la conquête des privilèges et la mise en scène du pouvoir à travers des architectures spécifiques. El Ghali accorde une attention particulière aux interactions sociales, aux transferts culturels et aux phénomènes d’hybridation, qu’il décrypte avec précision.
Ce livre s’inscrit dans une démarche de valorisation du patrimoine matériel et immatériel de la capitale tunisienne. En faisant dialoguer urbanisme, architecture et histoire politique, Adnen El Ghali redonne toute leur dimension aux maisons consulaires, souvent réduites à des vestiges oubliés. Il révèle comment ces édifices ont participé à dessiner la ville, non seulement dans ses formes mais aussi dans ses usages et ses représentations.
« Quand la diplomatie fait la ville » est une œuvre précieuse pour qui s’intéresse à l’histoire urbaine, à la diplomatie, ou à la manière dont l’espace peut devenir un outil politique. C’est aussi un hommage à Tunis, ville carrefour, façonnée par les regards, les ambitions et les négociations qui ont traversé son histoire.
« Quand la diplomatie fait la ville – Le quartier consulaire du Tunis ottoman (XVIIe – XIXe siècles) » de Adnen El Ghali, paru en mars dernier et disponible en librairie. Un ouvrage soutenu par l’Association de sauvegarde de la médina de Tunis (ASM)